Les brutes avaient raison
Ils avaient raison et moins de meurtrissures
Dévoreraient mon âme et mon ventre
En serait moins aigu
Ils avaient raison,Savonarole et tous les autres
Les hommes noirs de Nüremberg
Comme les incendiaires de Fahrenheit
Et le monde aurait dû laisser brûler
Sa mémoire et ses racines.
Mais peut-être n’est-il pas trop tard?
Amis,là,dès ce soir,détruisons les livres
Tous, même les anodins
Tous ceux qui pensent et se livrent nus
Se vautrant dans l’écriture
Sont porteurs du malheur
Et dégénérescence
Il ne faut pas que ces guides nous emmènent
Il est des voyages sans retour
Si les mots nous piègent
Et referment sur nos mains
L’acier et le venin de poésie
Les brutes avaient raison...
La peste soit de ce chevalier à la triste figure
De son pleutre écuyer.
Et les amants de Verone
Ou bien ce bateau ivre
De sombres influences...
Pourtant peut-être,peut-être si j’osais
J’aimerais sauver,là,voyez-vous
Celui-là,très vieux et usé
De toute façon presque illisible
Et puis maintenant je me souviens
C’est un livre,un livre où
Il ne se passe rien
Un désert,vous dis-je,et quelques soldats
Sans ennemis,sans raison d’exister
Quoi de plus dérisoire qu’un petit lieutenant
Qui attend,qui attend
L’exemplaire est laid,l’oeuvre quelconque
Laissez le moi encore un peu
Le héros n’en est pas brillant
Mais c’est un peu mon frère
D’expectative
Et si l’ennemi était là,demain matin...
Mais j’y pense et vous
Lequel vous est attaché
Au point de l’épargner,de l’adopter?
Un livre,rien qu’un et c’est un peu quand même
Pour la barbarie le début de la fin.
Si c’est moi qui avais raison...
Ce poème n'aurait jamais vu le jour sans Ray Bradbury ni François Truffaut.Merci à eux.
Peut-être conviendrait-il aussi de citer Rimbaud,Cervantes,Shakespeare et Buzzati.