La Comtesse au théâtre
Il y a quelques années une rencontre avec une comédienne avait dans ma vie donné quelques étincelles.Le cinéphile que j'étais a eu l'idée d'écrire pour elle ce qui suit.Cette très courte pièce un instant envisagée lors d'une soirée n' a jamais vu le jour.Telle quelle je vous la présente,à titre amical.A propos les étincelles dont je parlais n'ont pas pétillé jusqu'à concrétisation de ce splendide morceau de théâtre.Le théâtre s'en est vite remis.L'actrice et l'auteur s'en sont remis aussi,peut-être un peu moins vite.(Pardon pourla pagination,pas terrible.Et pardon pour la pièce,pas terrible non plus)
Dialogue
Cinéma:lui l’écran(masculin)
Théâtre:elle la scène(féminin)
Le théâtre drapé ----dignité;elle est seule et se penche
sur l’humanité.La vie c’est elle.
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Elle,la Scène
Je vous connais bien tous,oui,tous là,grands et petits depuis si longtemps.J’ai vécu vos vies et plusieurs fois.Je ne meurs pas.Vous non plus vous ne mourrez pas.Mieux vous vivrez en moi.
Mon nom:protéiforme il est comme on veut,selon votrehumeur,selon vos amours,changeant comme le vent.Appelez moi la Scène,le Théâtre.Au fil des ans:c’est qu’ on me donne environ 2600 ans.Pas mal pour tant d’années,non?Tragédie,Comédie.
Des esthètes incertains m’ont parfois baptisée Tragi-comédie.Mais un peu plus loin dans le monde je suis Nô,je suis Kabuki,théâtre d’ombres,Pansori.Là bas vers l’Orient.J’ai été farce aussi.Et même rite.Plus tard on m’a appelée Pantomime,Boulevard,voir Grand guignol.J’arpentais le Boulevard du Crime,c’était le siècledernier,crinolines,hauts-de-forme.Je pourrais vous en raconter des anecdotes,j’ai tant aimé,j’ai tant vécu,mille vies peut-être.
Et les plus grands m’ont servie.Il me semble même que les historiens ne remontent pas assez loin.Dans le froid des cavernes,je suis sûre,on mimait la chasse à l’auroch,au félin géant. Au moins les costumes étaient d’époque.J’y étais déjà,vous-dis-je.
Et les enfants?Que dire desenfants qui jouent dans leurs récrés et jusqu’à leurs pleurs,leurs flatteries,leurspetitesvanités pour plaire à la maîtresse:la plus sage,la plus attentionnée pour ranger ou nourrir Jeannot Lapin.Des comédiennes;Tiens!On est plutôt femme déjà quand on parle de jouer.Le théâtre est femme,avec ses tours,ses perversités,ses...
Aparté:mais on arrive...
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Lui,l’Ecran
Je l’ai entendue.Une vieille querelle,une histoire quiremonte.Elle se prend pour l’Art,le seul,le vrai.Elle va vous faire,si ce n’est déjà fait le coup de l’Antique,des amphithéâtres sur la mer.Syracuse,Taormine et la Grèce.Ah la Grèce!Quelle prétentieuse que la scène.Et puis ce langage.Oui,même dans le langage,le vrai,celui des vraies gens,comme vous.Oh!Je ne voulais pas vous blesser.Non mais se faire une scène,une scène de ménage,la grande scène du III.Tout,vous-dis je,tout pour faire parler d’elle.Mademoiselle,faut-il les appeler,il paraît.
Et ces codes:la cour et le jardin,je ne sais trop quoi.Désuet comme leur jeu.Allez,moi,l’Ecran,le Grand Ecran,je le concède,elle a eu son heure de gloire,peut-être.Mais on a beau dire,le théâtre,c’est un peu l’école.Vous n’allez pas me contredire?On s’y ennuie ferme.Ca ne ressemble guère à la vie.Etpuis il faut aller avec son temps.On ne peut ignorer Méliès,ni lesfrères Lumière,1995,un fameux bail déjà.Moi aussi j’ai une histoire.Moi aussi!
Vaniteuse!J’en ai assez d’être l’idiot de la famille.
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Elle,la Scène
Vous êtes là,évidemment.J’aurais dû m’en douter.Dèsqu’il y a quelques curieux,vous êtes là.Vous donner en spectacle.J’aurais dû m’en douter.
Lui,l’Ecran
On ne se tutoie plus?L a mémoire vous ferait-elle défaut?Nous avons pourtant pas mal de souvenirs,ensemble,belle théâtreuse.Ne suis-je pas votre jeune frère en quelque sorte?Même si vous m’accusez d’avoir mal tourné(mal tourné,j’ai quand même un peu d’esprit,non?)Allez,ne soyez pas sévère,vous avez aimé,vous avez eu votre chance.La roue tourne.
Elle,la Scène
Je ne veux rien avoir à faire avec vousVous n’êtes
après tout qu’un homme d’affaires sans scrupules.Le Cinéma,
unfaiseur,un truqueur.Ah les beaux titres de gloire.Moi,je
suis là face à la mer,le centre du monde,en Sicile ou en Grèce.
C’est presque l’éveil de l’humanité,de la conscience.
Laissez moi vous situer l’ambiance.Brûle le soleil des
îles proches.L’amphithéâtre,cette oreille démesurée pour le
plus beau des spectacles.La mise en scène de l’homme par l’
homme et pour les hommes.Le vent se lève un peu,la mer est
ionienne.Ils sont tous là avec ces noms si prodigieux.Ecoutez
comme cela chante:les choreutes,le coryphée,les protagonistes
et par dessus tout:le Destin.Eschyle,Sophocle,Aristophane et les autres.
Sans eux,sans leur plume,vous,pauvres humains vous
ne respireriez pas,le coeur à sec.Les sentiments,la grandeur,le pouvoir,la guerre,tout y est.L’essence même,ce qui fait que l’
homme est grand,palpite derrière un rideau.Le moindre tréteau
et les poumons s’emplissent de liberté.Tempête,violence,c’est
mon lot et c’est le monde.Je vous l’offre.
Lui,l’Ecran
Tout doux ma belle,comme vous y allez.Eh,j’ai appris
à parler,il y soixante-dix ans,à causer,c’est mieux.Leur langue,
c’est moi qui la connais.C’est que je viens de la rue,de la fête
foraine.Quand ils prennent leur marmaille par la main,c’est chez
moi qu’ils déboulent et pas à la Colline ou au Théâtre d’Expression du Peuple,ou quelque chose dans ce genre.Brechtien,c’est
cela?Le message,pourquoi pas le sacerdoce?Non,vous ne les ai-
mez pas vraiment.D’abord est-ce qu’ils mangent du pop-corn
au théâtre?Ca me donne faim.Allez la Scène,sois bonne joueuse.
On est resté proche,non!
Elle,la Scène
Cessez là ce jeu de démagogie,ce n’est pas mon goût
et je cultive une autre idée de l’Art.J’ai vécu la ferveur des ca-
thédrales,la foi des porches d’églises.Les mystères se jouaient
devant nombre de gens,illettrés,manants ou traîne-ruisseau
mal vêtus.Pourtant leur regard,j’ai su l’illuminer à la Passion
du Christ ou à la vie des saints.Ou bien encore en présentant la
Guerre Sainte et le voyage au Sépulcre.Si vousaviez vu comme
la communion inondait les parvis,ici-même en Picardie.Les femmes
à genoux comme contemplant le Ciel,entourées d’enfants aux
yeux écarquillés par la lumière émanantde cette scène si
chrétienne.Et les hommes se prosternant,eux pourtant rudes
à la tâche et obscurs,pour une fois transfigurés par le
théâtre.Transfigurés au sens premier,la figure comme
béatifiée.Les mystères médiévaux:la beauté,la grâce,seul Claudel
des siècles après a su...
Lui,l’Ecran
De grâce,il suffit,assez de grâce.Tu as vu,je parle
comme toi,un peu précieux”il suffit”.Pardonne moi ces facéties
mais je n’ai pas,moi,d’ancêtres canonisés à la sacristie.Tout au
plus mes premiers souvenirs remontent au sous-sol d’un café,
du Grand Café tout de même...Chapeau-claque plus qu’auréole.
Désolé.
Elle,la Scène
Le Café,les boulevards?Il est bien question d’un café,
fut-il grand,alors que j’évoque des centainesd’amateurs dans la
même liturgie,des tailleurs,des peintres,des jongleurs,tous
fiévreux de toucher au sacré,au coeur des villes pour édifier la cité.
Quel film,quelle fiction peut-elle ainsi toucherau sublime?Bien
sûr il y a peu de tartes à la crème dans la Passion.Comment dites-
vous,à Hollywood,”slapstick”?
Lui,l’Ecran
J’ai,moi,une toute autre idée du sacré,un respect du
public.Celui que vous ignorez,celui qui n’a pas honte de s’esclaffer
quand un flic tombe dans le bassin poursuivi par un chien.Bur-
lesque,les zygomatiques...Vous ne faites guère rire,ma belle
amie.Je vous l’ai dit,je sors à peine de la baraque en toile mais j’ai
grandi quand même et mes premiers maîtres,!les Méliès et sa
fantaisie,ses voyages extraordinaires,les Keaton,les Chaplin.
Ah!Celui-là au moins vous ne pouvez le nier.C’est officiel.
Elle,la Scène
Parlons-en.Il vient de chez moi.Il arpentait à huit
ans les théâtres londoniens,et pas les plus prestigieux.Plus près
de Jack l’Eventreur que de la Royal Company.Moi aussi,la Scène,
j’ai su accueillir les petits,les sans-grade sans flagornerie,sans
démagogie,dans la dignité.Au théâtre le petit Charles était
mime,acrobate,chanteur,enfant perdu,petit voleur et vieillard
chenu.Sans compter montage et démontage ,voire les tournées.
Chaque jour il faut remettre sur le tas l’ouvrage,rien n’est ja-
mais gagné.Au cinéma,c’est en boîte et voilà,on est tranquille,
ça roule.
Le métier de jouer est là:de vieilles planches,unvague
rideau,quelques spectateurs et j’aurai du talent.Pas toujours
celui du grand Will ou de Goldoni,je le concède et le revendique.
D’ailleurs ce soir,par exemple,l’auteur,bof...Il a beau essayer de
voir les choses derrière les choses.Pas toujours du génie,d’accord
mais du coeur;
“To be or not to be,that is the question”
Lui,l’Ecran
On croit rêver.Voilà ce Danois dégénéré à nouveau.
Et dans son royaume pourri.Non mais on croit vraiment rêver.Et
c’est la plus belle réplique du répertoire.Ca vous donne une idée.
Même une série B,chez nous,même ce ringard d’Ed Wood avait
plus d’imagination.Peut-être même Bresson:un minimaliste
pourtant lui,il aurait dû faire du théâtre.
Elle,la Scène
Moquez,moquez.Vous n’oserez taire la grandeur du
Roi Lear,père bafoué.Ni la violence des Henry,Richard.”Voici
l’hiver de notre déplaisir” Il y a là à Stratford/upon/Avon à la
fois Vérone et Azincourt,la guerre et le pouvoir,le Maure de Ve-
nise et ce traître de Iago,la perfidie des femmes et la veulerie
des grands.La paillardise de Fastaff elle-même est grandiose.
Lui,l’Ecran
N’oubliez pas que j’ai fait plus pour Shakespeare que
tous les vôtres.Je dois dire que lui,William,est l’un de mes meil-
leurs scénaristes.Avec mon grand à moi,mon très grand,Orson
Welles,quel attelage,non mais quel attelage!Et les Japonais,
aussi,créateurs de leur propre Shakespeare:Kurosawa,le
Château de l’Araignée.N’ai-je pas un peu mes titres de noblesse?
Elle,la Scène
Oui,à propos ce Welles est bien le mégalomane de 25
ans,brisé par Hollywood,pour cause de génie trop précoce.Pas
mal,l’idée de son traîneau et la neige de “Rosebud”.Pas mal pour
un cinéaste.Ca ne lui a pas porté chance:le cinéma,cette indus-
trie.Allez je vous l’accorde,vous avez eu quelques éléments de
valeur mais même pour Welles je vous ai précédé:son Mercury
Theatre,c’était bien avant Citizen Kane?
Comme ce grand Nordique,introverti,je suis à la re-
cherche de son nom.Grand metteur en scène de théâtre!Du
souffle assurément,mais quand vous m’accusez d’austérité,
repassez ses films.
Lui,l’Ecran
Ingmar Bergman,l’ermite de Farö.Un sacré client,pas
facile.Un tyran,obsédé par le péché.L’austérité très belle dans
son dépouillement.Tourments,la Honte,Crise,Cris et chuchotements.
Des personnages magnifiques de la part d’un homme qui
aimait les femmes et qui les a comblées,en les bousculant un peu
certes.Normal.De toute façon il m’ a quitté pour la télé,alors...
Elle,la Scène
J’en ai un peu assez du Nord.J’ai bourlingué plus au
chaud,en Méditerranée.Et ces lurons vous les avez toujours
ignorés,à part les Enfants du paradis.Je parle de mes vieux amis,
de ces caractères installés derrière un masque Pierrot(Pedrolino)
Colombine la fringante,Scaramouche,Arlequin le coloré,Mata-
more.Tous aux pieds légers,la Commedia dell’Arte,la comédie du
métier.Ils dansent,ils zieutent,ils écoutent,ils se moquent.On
appelle certains les Zanni,les histrions.Sveltes,ingambes,de la
porcelaine.
Lui,l’Ecran
Mon vieil ami Federico n’en était pas si loin.Une complice
à moi a dû vous en parler ici-même.Il n’aimait rien tant
que les bouffons,les clowns,les danseurs de corde et ceux qui
s’attardaient le nez dans les nuages au coeur de Roma,de la
Cité des Femmes et du Cinéma.Marcello!La belle équipe,oh,la bella squadra et la musique de Nino.
A propos de sud,chère consoeur,rappelez-vous le Prince:”Nousétions les guépards,les lions:ceux qui nous succè-
deront seront les chacals,les hyènes.Et tous tant que nous sommes,guépards,chacals,brebis,nous continuerons à nous
prendre pour le sel de la terre”.
Elle,la Scène
Je reconnais bien là Visconti,cet autre prince.Lui aus-
si m’a aimé,lui aussi m’a célébrée.Décidément nous avons des amis
communs.Peut-être sommes nous vraiment plus proches que
nous ne voulons le laisser paraître.
Lui,l’Ecran
Parfois j’ai été un peu nerveux,à l’Ouest,avec les chevaux,par exemple.Ils m’ont toujours excité,les chevaux et j’en
ai fait un genre à part entière,le seul spécifiquement cinéma-
tographique.Mais je l’assume et s’il ne devait rester de moi qu’
une image pourquoi pas un cavalier dans la plaine,ou une corde
au soleil attendant un cou de bonne volonté afin de l’étreindre.
Le western,le cinéma par excellence.Ou mieux encore parité
oblige,le seul grand rôle de femme dans un western,Joan Crawford,au piano,de noir vêtue,dans Johnny Guitar.Vous le savez
la tragédie grecque,les Atrides,ça s’est passé aussi le long du
Rio Bravo.Les Horace et les Curiace en guerre pour un ranch.
Universelle,la lutte pour le pouvoir.
Elle,la Scène
Oui mais la passion,la bataille d’Hernani,le romantisme
n’a pas d’égal.Qui n’a pas vu les “Jeune France”,mon tendre ami
Nerval,et Gautier,et bien d’autres,forcer les portes de la cita-
delle des classiques?1830,Hernani.Mort aux emperruqués,aux
vieux birbes!Quel cénacle autour de Victor,et Vigny et Dumas!
“Elle me résistait,je l’ai assassinée”
Lui,l’Ecran
J’ai moi aussi eu mes révolutions:l’expressionnisme
de Berlin,Murnau,Lang:”Ich weiss nicht”.Cet assassin égaré qui
sifflait Peer Gynt.
Et Jean-Luc et Truffaut pendus au rideau du Festi-
val;La Croisette en 68,la Nouvelle Vague,les Angry Young Men,
le néo-réalisme...
Elle,la Scène
Hola,on avait dit “Pas de catalogue”.Et ce n’est pas
parce qu’un chômeur a volé une bicyclette en Italie après-guerre que vous devez vous sentir investi d’une mission sociale.
Lui,l’Ecran
“Ciel mon mari”
Elle,la Scène
Quoi,vous avez osé?Immonde...
Lui,l’Ecran
Mais je n’ai rien dit,enfin rien de plus que l’une de
vos phrases immortelles(Note:il pouffe de rire).Pardonnez moi.
Est-ce ma faute si le théâtre pour beaucoup se résume à un
placard?Pantalonnade!
Elle,la Scène
C’en est trop.J’en ai assez entendu.Vous ne changerez
donc jamais.Me réduire à ces pitreries.Est-ce vraiment votre
opinion?Adieu!
Lui,l’Ecran
Bon,ça va,reviens.Tu sais bien que je t’aime toujours
même si on est parfois concurrents.J’ai moi aussi,et tu le sais
bien,dans mon patrimoine,par exemple le Congrès des belles-
mères,d’Emile Couzinet.Invisible,perdu pour tout le monde et
c’est diablement heureux.Jamais rien fait d’aussi débile.
Elle,la Scène
Je te pardonne,espèce de grand escogriffe.Allez,pour
ta punition récite-moi quelque chose.Il y a,chez toi bien des
choses que j’aime,si tu veux bien t’en donner la peine.
Lui,l’Ecran
O.K.Princesse.Si tu me le demandes ainsi avec ton sourire,ton sourire d’une nuit d’été.
“Nous sommes dans l’Ouest ici.Quand la légende dépasse la réalité,on imprime la légende.”
Et François le fidèle:”Les jambes des femmes sont
comme les branches d’un compas qui arpentent la terre en tous
sens et lui donnent son équilibre et son harmonie”
Dis,sois ma partenaire,juste un peu.
Elle,la Scène(l’interrompant)
Allez,je t’aide,jepasse à l’ennemi.
“Qu’est-ce que j’peux faire,j’sais pas quoi faire”.Ou me veux-tu un peu flingueuse “J’ai déjà vu des cons,mais vous êtes
une synthèse” ou anarchiste “Salauds de pauvres,Jambier,Jambier,47 rue Poliveau”
“Tu me fends le coeur”,si tu me veux province,si tu meveux Provence.
Lui,l’Ecran
“Silence,j’écris”.Mais quel talent,la Scène,tu devraisvenir plus souvent.
“Vos gueules la-haut!On n’entend plus la pantomime”
Elle,la Scène
“Bon appétit,Messieurs,ô ministres intègres”
Mais ne préfères-tu pas “Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes?”
Lui,l’Ecran
“Madame,il est tard demeurez ici.On vous y logera le mieux qu’on pourra”
Elle,la Scène
“Non,Dom Juan,ne me retenez pas davantage”
Ainsi mon ami,sensible à ce bon vieux Poquelin.Tu sais
que ça fait plaisir.Don Juan te plaît hein?Je reconnais bien là
ton curieux pouvoir,cette séduction un peu facile mais...
Lui,L’Ecran
Troublante
Elle,la Scène
Oui,voilà,troublante.Tu es content,là?Tu ne change-
ras donc jamais.Sors un peu de ton emploi.Tu vaux mieux que ta
complaisance,tu me l’as prouvé déjà.Dis moi plus,dis moi mieux.
Parfois tu sais cerner la vérité des êtres.Quand tu sais t’affran-
chir des contraintes et te donner les moyens,quand tu sais être
libre.Respire,respire la poésie surréelle et les haines du confor-
misme.Il y a eu Don Luis Bunuel et ses yeux de glace.Cette carte
tu ne l’as pas jouée à fond.
Lui,l’Ecran
Cette carte n’est un atout que pour la littérature.Il
me faut m’en affranchir.Moi je crois n’être jamais aussi vif
que dans le cartoon.Et Tex Avery est un maître,et l’animation
quel mot vivant et original.Le parfait sésame pour l’invitation
au voyage.Ah,ce loup au regard exorbité,hurlanT à l’amour au
cabaret!Waouh!Et la lune rieuse de Méliès, son clin d’oeil,l’un
des plus beaux appels du Septième Art,de moi quoi!
Maisje neparle que de moi.Tu as des projets?Des nouveautés.”Qu’allait-il faire dans cette galère?” ou plutôt “Ca
vous chatouille ou ça vous gratouille?”A moins que ce ne soit
trois soeurs,avec leur oncle,devisant dans le verger.Attends:
c’est la cerisaie,oui,la cerisaie.Ca se passe en Russie,je connais.
Bonjour l’action.Il y a l’âme slave,tempête dans un samovar.
Elle,la Scène
fois encore
J’avais effectivement une idée,simple et modeste.Par une soirée presque d’été j’aurais aimé la paix,la paix partoutmais au moins
entre nous.La soirée aurait ressemblé à celle-ci et tes amis
auraient été les miens.On aurait bu un peu,peut-être dansé,
doucement.L’atmosphère...
Lui,l’Ecran
“Atmosphère,atmosphère”
Non,pardon,c’est un peu facile.Au diable tous ces mots
jetés à notre face.Retournons ensemble à la bibliothèque.Je suis
sûr qu’on y fera des découvertes.Le livre n’est-il pas lui aussi de
la famille?Allez,viens!Viens!
Souviens-toi:une bonne pièce a parfois donné un bon
film.Et il y a quelques exemples de bon livres bien adaptés qui
ont fait de très grands films.Si,si,je pourrais vous en citer.On
en parle après,ça m’intéresse.
Elle,la Scène
Par contre on n’a jamais vu ou presque de roman
transcrit pour la scène avec bonheur.Rarement.La preuve d’une
plus grande indépendance en ce qui me concerne.
Lui,l’Ecran
Le dernier mot.Sûr qu’elle aura ...le dernier mot