Le veuf d'Haïfa
Voici un livre que je considère comme essentiel,remarquable de sagacité dans Israël il y a vingt ans...C'est la première fois que j'aborde la littérature israélienne mais je sais qu'elle est très riche,et riche d'un vécu qu'on imagine porteur d'expérience en cette terre pas tout à fait comme les autres.Avraham B.Yehoshua, septuagénaire, m'a emballé avec L'année des cinq saisons,plus sobrement intitulé Molkho en hébreu(c'est le prénom du personnage). Quinquagénaire, fonctionnaire à l'Intérieur Molkho vient de perdre son épouse.C'est l'automne à Haïfa et sa vie va (peut-être) changer après des années de soins dévoués.Ce n'est pas qu'il tienne tant que cela à batifoler tout de suite,Molkho,mais tout de même il entrevoit une certaine liberté. Mais on ne se détache pas si facilement d'un passé aussi présent et il va faire l'expérience d'une difficile réinsertion à l'existence.Ses rapports ombrageux avec son fils cadet,la présence de sa belle-mère à la maison de retraite voisine,ses aventures féminines oscillant entre burlesque et infantilisme vont s'avérer bien décevants et l'englueront dans une sort de "ni bien ni mal,ni lié ni libre" qui prend une couleur particulière à l'aune de ce pays petit par la taille mais si prégnant.Il semble que l'on se connaisse tous entre Haïfa et Jérusalem,ce qui n'est pas sans compliquer les choses.
Sur un thème très sérieux A.B.Yehoshua trace avec humour et distance le portrait d'un homme ordinaire confronté à la solitude et aux méandres d'un retour dans le monde.Molkho nous touche à chaque instant,au coeur même de ses petites médiocrités,parfois mesquin,parfois rapace et surtout tellement humain.On s'identifie vite à cet homme,manifestement dominé sa vie durant par sa femme,et dont on pense qu'il n'a pas vraiment fini de lui rendre des comptes.A l'évidence cet auteur aura ma visite à nouveau très prochainement.