La nostalgie,cette assassine blessure
Tarkovski est un cinéaste que je découvre seulement maintenant.Après Andreï Roublev La passion selon Andreï et Andreï j'ai donc vu Nostalghia.On sait le cinéma de Tarkovski exigeant,parfois frôlant l'ascèse en sa beauté plastique unique.Il me semble assez difficile de parler de Nostalghia tant la hauteur de vue de Tarkovski n'est pas notre quotidien.Le voyage dans l'Italie du Nord du poète russe,sur les traces d'un musicien,russe lui aussi,deux siècles plus tôt,se passe dans une Toscane qui n'a pas la luminosité des Taviani.C'est que le cinéma des frères se veut ancré dans une réalité très italienne alors que la parabole de Tarkovski est davantage universelle dans son questionnement.Tonino Guerra,le grand scénariste de plusieurs films importants des Taviani,Rosi,etc.. est d'ailleurs aussi celui de Nostalghia.
Le poète et sa traductrice rencontrent non loin de la chapelle de Piero della Francesca Domenico,sorte d'ermite accompagné de son chien et qui tient d'étranges propos.Cherchant à lutter contre le matérialisme du monde il se confie à Gortchakov le poète...Les pistes abondent dans Nostalghia,peut-être fausses.Et qu'est-ce que cette nostalgie où le thème de l'intraduisible semble vouloir scléroser tout art?Et Domenico dans sa folie n'est-il qu'un dément ou l'ultime sage dans cette Italie devenu un théâtre de malédiction.Mais Nostalghia sera ce que vous en ferez tant ce film sidérant de baroque somptueux et d'obscurs exils refuse de vous prendre par la main.La presse a parlé à propos de Nostalghia de poème métaphysique aux images inoubliables.Je parlerai de tremblante alchimie entre l'âme russe comme transportée,déportée et mystique et la Toscane qui aurait comme avorté sa Renaissance pour n'en retenir que la lumière noire.La présence si sensible du grand comédien suédois Erland Josephson évoquera certainement pour plus d'un spectateur un autre grand homme du Nord,à l'austérité si douloureuse et que vous aurez reconnu.