pigeon                  

    De l'âge d'or de la Comédie italienne j'ai extrait aujourd'hui le célèbre Pigeon de Monicelli et le moins célèbre mais cocasse Veuf de Risi.Même millésime à peu près,1959.Le pigeon n'a rien perdu de ses ailes qui paillonnent toujours au firmamentdes comédies drôles (pas si fréquent),défintivement drôles.On connaît l'argument que l'on doit un peu à Jules Dassin et à son Rififi chez les hommes,célèbre récit d'un hold up que Monicelli souhaitait parodier.On parle aussi d'une vague nouvelle d'Italo Calvino mais je n'en ai guère trouvé trace.De toute façon Le pigeon devait très vite creuser son propre sillon er devenir lui-même film référence du casse manqué (à ce niveau de ratage c'est du grand art) et surtout du renouveau de la Comédie italienne qui,si elle existait avant Le pigeon,n'avait pas cette fougue ni cette ironie.Le film de Monicelli,au titre italien I soliti ignoti,Les inconnus habituels,autrement plus fort et dérisoire,marche en fait sur les brisées du Néoréalisme maintenant défunt puisque ses cinq maîtres ont tous suivi d'autres voies.Mais un néoréalisme version optimiste,ce qui n'est guère le cas du Voleur de bicyclette ou de Sciuscia.

    Sans refaire l'histoire du cinéma italien rappelons vite fait les origines multiples de la comédie italienne,le théâtre antique de Plaute,Goldoni,la farce napolitaine,les intermèdes comiques du cinéma muet,et une certaine littérature,par exemple Nouvelles romaines de Moravia .Beaucoup de choses passionnantes dans Le pigeon.Le parrainage du grand Toto qui en prof de casse joue presque son propre rôle de passeur de relais de la comédie à ces jeunes loups que sont Gassman et Mastroianni.Le melting pot à l'italienne qui inclut un Sicilien plus qu'ombrageux,un Nordiste(Gassman) hâbleur et un peu méprisant pour ceux du Sud,un orphelin romain qui cache pudiquement sa condition et ses trois "mamans" de l'institution.Le ratage permanent qui inonde le film dès les premières images de vol de voiture,l'humour désespéré,typiquement italien,italianissime dirai-je,de ces branquignols qui croient peut-être aux lendemains qui chantent(pas sûr).Toutes ces scènes  pour moi inoubliables,l'enterrementde Cosimo où ce grand flandrin de Gassman n'ose pas lui-même porter son bouquet,la visite de Mastroianni à sa femme en prison,scène ou Monicelli renverse habilement le cliché du mari incarcéré avec ce personnage féminin fort qui a fait bouillir la marmite devant l'infantilisme de son époux;ceci en trafiquant les cigarettes,l'ahurissant hold up,pas loin de vingt minutes avec le butin que l'on sait.

  Mais pour moi le plus beau du Pigeon c'est ce petit matin,nos héros attendant leur bus,pour une nouvelle journée qui,qui sait,sera peut-être moins galère.Je ne serai pas aussi affirmatif.Je le serai par contre sur la prodigieuse réussite de ce film et de son équipe car les scénaristes ont fait là un bien beau travail.Allez vous en étonner sachant qu'il s'agit d'Age-Scarpelli et de Suso Cecchi d'Amico.I soliti ignoti est aujourd'hui aussi drôle qu'à sa sortie.Comme Chaplin et comme,comme qui au fait?

  veuf

   Avec Le veuf de Dino Risi c'est toute la veulerie d'Alberto Sordi,prodigieux pleurnichard hypocrite de tant de comédies plutôt acerbes.Contrairement aux héros du Pigeon le personnage de Sordi,homme d'affaires milanais,mais surtout époux d'une dame fortunée,n'attire pas immédiatement notre sympathie.Mais comme souvent chez les "monstres" de Risi toute leur mauvaise foi,leur vénalité,leur misogynie,leur comédie face à la vie finissent par nous convaincre qu'avec tant de défauts un homme ne peut être complètement mauvais.Füt-il un Sordi assassin de sa femme ou qui tente de l'être.Pleutre et génial Sordi,moins exportable que Gassman ou Mastroianni,plus romain courtelino-combinard que vrai Matamore,apporte à la plupart de ses films ce délire à l'italienne,troppo troppo.