30 mars 2011

Poésie meurtrière

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      Actuellement très nordique dans mes lectures mais bien loin de Wallander et de Millenium je découvre Jon Kalman Stefansson (pour les gars du Nord je me fais grâce des accents,seule liberté orthographique que je me permette).Plus fort pour moi que les deux auteurs précédents,suédois, cet Islandais né en 63 se voit pour la première fois traduit en français avec Entre ciel et terre,très forte histoire de fortune de mer et drame familial se déroulant dans l'hostilité d'une Islande où les dieux nordiques sont bien peu cléments.Les hommes ici sont pêcheurs,la bière y coule dans les rares estaminets où des femmes rudes et souvent solitaires dispensent une chaleur retenue.La poésie,Barour en est fou.C'est atypique mais pourquoi un âpre matelot d'Islande n'apprécierait-il pas le Paradis perdu de Milton,auteur anglais aveugle?Barour tout à sa lecture oublie sa vareuse en partant sur la barque morutière.Fatale distraction sous ces latitudes et le modeste esquif rentrera avec un cadavre gelé.Le gamin,c'est ainsi que Stefansson le nomme,en conçoit un chagrin monstrueux.Il était son ami et n'a pu le sauver.Alors le gamin ne voit plus de raison de vivre.Mais avant il entreprend un voyage dans l'île afin de rendre au vieux Capitaine Kolbeinn,aveugle lui aussi comme Milton,ce fameux livre,livre assassin en quelque sorte,le Paradis perdu.Si la première partie du livre nous cramponne à la coquille de noix en plein Atlantique en un style très riche où ciel, mer, vents et marins se combattent avec un souffle inouï,la deuxième accompagne le gamin dans son voyage-quête pour retrouver le propriétaire de ce livre magique mais désormais maudit.

   Cette intiation conduira le jeune homme à croiser d'autres personnages, épisodiques, et cela disperse un peu le propos.Et puis quelque chose de tout bête m'a un peu gêné:il est parfois difficile de s'y retrouver dans les prénoms islandais et de s'avoir si l'on parle d'un homme ou d'une femme. Inconvénient minime pour qui fait preuve d'un peu d'attention.Mais j'ai aimé me perdre dans ces ruelles d'obscurité et de neige en un univers romanesque fantômatique et  qui laisse la part belle à l'imaginaire et à la poésie.Et puis dans la quête,surtout quand elle se veut maritime mes vieux amis Melville et Stevenson errent à jamais au bastingage,en partance,fiévreux.Jon Kalman Stefansson a bien mérité d'eux,lui qui est presque l'homonyme du second.Cap au Nord.Et cap sur l'avis de Dominique,plus enthousiaste encore. http://asautsetagambades.hautetfort.com/archive/2010/02/19/entre-ciel-et-terre-jón-kalman-stefánsson.html

 

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26 mars 2011

Quelques heures dans la vie de Torsten Bergman

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           Couverture en allemand pour ce livre suédois de Lars Gustafsson car je n'ai pas trouvé de visuel français. Mais L'après-midi d'un carreleur  publié en France,Presses de la Renaissance en 1992,est un roman qui nous rappelle que le Nord n'est pas l'apanage des polars,un peu envahissant parfois.Dans cette courte histoire qui se déroule effectivement en un après-midi un ouvrier sexagénaire veuf et dépressif effectue un petit boulot,comme on dit,pour quelques heures et au noir,cela va sans dire.Se retrouvant dans une maison inhabitée ces quelques moments vont l'amener à rencontrer un ancien collègue tout aussi désargenté.Ces quelques moments,dérisoires dans une vie ratée,réveillent en Torsten les souvenirs en un bilan d'un pessimisme qui fait penser à un autre Bergman,cinéaste celui-là.

   Mais l'austérité de ce sujet,l'homme vieillissant et délabré dans un no man's house désespérant,se teint parfois de poésie quand le carreleur retrouve le goût d'un bel alignement dans une salle de bains.Ou quand quelques bribes du temps passé lui reviennent en mémoire,du temps du travail bien fait.Dans un pays comme à l'abandon un brin d'imagination,quelques fleurs du souvenir,le sourire d'un enfant peuvent suffire un court,un bien court instant à éclairer le visage de Torsten ou de son ami Stig.Après tout voilà quelques heures de passées.On a connu pire...

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23 mars 2011

Géographie: Birmingham, Alabama

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    Une pépite rock'n'roll fifties fera l'affaire pour notre escale à Birmingham, Alabama,à ne pas confondre avec Birmingham,Angleterre,bien que l'une tire son nom de l'autre.Little Richard,Penniman à l'état civil,quasi octogénaire aujourd'hui,fut l'un des très rares pionniers du rock'n'roll noirs.Aussi électrique que maquillé l'enfant de Macon,Georgie,devait graver en quelques mois les incunables Long tall Sally, Lucille, Tutti frutti ,Rip it up.Puis il se calma un peu,devint ministre de l'Eglise des Adventistes.Ensuite les gars de Liverpool et Londres le remirent en selle et nombre de retours ainsi que son image revendiquée de Queen of rock'n'roll et un peu de cinéma firent qu'on ne l'oublia pas tout à fait.Moins connu que les titre précédents je vous propose Hey hey goin' back to Birmingham.J'avoue préférer la version de Ten years after par exemple.Mais là nous sommes à l'aube du rock.

htt://www.youtube.com/watch?v=OiqppI9_jSA

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     Birmingham est la plus grande ville d'Alabama,245 000 habitants.Y naquirent la chanteuse country Emmylou Harris et le grand sprinter Carl Lewis.Mais bien sûr Birmingham restera dans l'Histoire comme l'une des bases de la longue lutte des noirs américains au début des années 60,quand un certain Martin Luther King emprisonné y rédigea A letter from Birmingham Jail.

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20 mars 2011

Faux départ,parcours moyen,fin un peu mieux

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          Qu'est-ce qui fait une déception de lecture?Par exemple le hasard à la Bibliothèque Municipale,un titre un peu énigmatique,un auteur anglais inconnu.Mais ça n'a pas fonctionné terrible cette fois.Je vous expédie ça vite fait,injuste probablement car la fin du livre m'a quand même intéressé.David Carter, la cinquantaine, est frustré par la vie. Sa femme Eleanor s'enfonce dans une déprime interminable. Son poste de conservateur de musée lui échappe.Sa fille Kate s'est éloignée. Mais surtout il a appris que toute son existence a été construite autour d'un mensonge : il est un enfant adopté.Alors David n'a de cesse de se mettre en quête de son passé, à travers vieilles photos, lettres et vestiges ténus. Nous replongeons ainsi dans le Londres du Blitz, la ville de Coventry d'après guerre, et la campagne irlandaise.Cela avait tout pour me passionner,l'histoire récente d'un pays qui m'a toujours passionné,les racines disjointes et l'interrogation de David Carter.

   Pourtant à peine trois semaines après l'avoir lu je ne me "rappelle" plus Il n'y a pas de faux départ de Jon McGregor.Je suis sûr que cela vous est déjà arrivé.Pourquoi en parler?Parce que j'ai envie de dire que la littérature parfois ne suffit pas,pas plus mauvaise qu'une autre d'ailleurs.Mais tout cela sauf l'extrême fin du livre m'a laissé de glace.Un peu d'amertume aussi,le temps nous étant compté et le nombre de livres d'une vie fatalement dérisoire. 

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17 mars 2011

La mort dans l'île

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     En 1930 le grand Friedrich Wilhelm Murnau ne sait pas,lorsqu'il tourne dans les mers du Sud,qu'il mourra sur une route de Californie quelques jours avant la sortie du film.Il vient de quitter Hollywood après avoir tourné entre autres le plus beau film de l'histoire du cinéma,L'aurore.Avec Robert Flaherty,grand documentariste de Nanouk et L'homme d'Aran,Murnau débarque dans le Pacifique où ses acteurs,tous des natifs,n'ont pour la plupart jamais vu de caméra.L'idée de Murnau est de retrouver nature et naturel au sein d'un lagon paradisiaque qui s'avérera d'une grande cruauté.On suit bien le paradoxe de ces sociétés primitives et,rousseauisme oblige,on rêve d'une histoire d'amour et de nacre.Mais la tradition veille,cette tradition qui,si elle vacille,ne rompt jamais,ni en Polynésie en 1930 ni ailleurs,ni plus tard,avec son visage odieux derrière le masque exotique et idyllique.La jeune fille est en fait promise à devenir une vestale,grand honneur chez le peuple océanien,mais drame shakespearien quand on aime un jeune pêcheur.

 

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       En fait il semble,mais les avis diffèrent,que Murnau et Flaherty ne s'entendent pas du tout et sur aucun point de vue.Il restera peu de choses de Flaherty dans Tabou dont le côté fictionnel est vraiment la touche Murnau.Selon certains historiens Flaherty disparaîtra carrément du générique.Il demeure que ce film rompt avec tous les films antérieurs de Murnau,allemands ou américains,et Tabou continuera de briller au firmament du cinéma comme une perle dans la limpidité océane.Personnellement Story of South Seas me touche bien que je ne puisse m'empêcher de lui trouver une naïveté roublarde et un côté Murnau en vacances de dandy sur son yacht.Mais cette pancarte Tabu dans les eaux de Bora-Bora est à mon sens l'une des plus belles images de la mer au cinéma.

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13 mars 2011

Géographie: Abilene,Texas

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http://www.deezer.com/listen-2525621 Way out in Abilene   Lightnin' Hopkins

    Pour notre voyage il y a toujours un bluesman pour nous filer un coup de main à continuer la dust road de la musique américaine.Back to Texas avec une ville bien connue car souvent présente dans les westerns.A condition qu'il reste des amateurs de westerns,ce qui est aussi fréquent qu'un saloon sans tricheur ou un James Stewart dun mauvais côté de la loi.Abilene,107 000habitants au plein coeur du Texas,a été célèbre pour ses rassemblements de bétail.Mais il y a d'autres Abilene au Kansas ou en Georgie.

fr202Le grand Sam Lightnin'Hopkins lui nous emmène bel et bien au Texas,natif de cet état en 1912 et mort à Houston en 1982,ville dont il avait connu la prison vers 1930 comme tout bluesman de bonne facture.Influencé à ses débuts par Blind Lemon Jefferson Lightnin' Hopkins fut très prolifique tant acoustique qu'électrique.Au début des seventies il fut redécouvert et fit la première partie des mythiques groupes de la Côte Ouest,Jefferson Airplane,Grateful Dead et 13th Floor Elevators.

11 mars 2011

Sinueux Suédois s'insinuant sensiblement

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     Ouvrage des années 80 devenu classique de la littérature nordique Le chemin du serpent de Torgny Lindgren,né en 1938,  est un ouvrage fort, rugueux, violent dans sa peinture d'une société scandinave du XIXème Siècle.Société paysanne,très petite paysanne d'ailleurs où le maître est en fait le créancier du village,qui de père en fils s'arroge tous les droits sur le maigre lopin comme sur femme ou fille du paysan.Ce livre court a surtout l'originalité d'être une longue supplique adressée à Dieu par un très modeste fils de la terre.On ne connaît pas la réponse de Dieu.Le ton général n'est cependant pas misérabiliste,plutôt terre à terre si j'ose dire avec quelques éclairs un peu plus lumineux,surtout ceux qui ont trait à la musique,violon et orgue dont jouent certains protagonistes.

   Le chemin du serpent n'est pas seulement l'incantation lancinante que l'on pourrait craindre.Il nous insinue énergiquement dans la vie de ce siècle encore bien obscur des confins du royaume du Nord.En un temps pas si éloigné où toute menue monnaie devait s'arracher au prix d'efforts physiques harassants ou d'humiliations devant les puissants.On sent au long des 138 pages du récit,toujours comme une confidence au Très-Haut décidément bien loin,tout le courage et l'obstination à vivre de Jani le jeune homme,au moins jusqu'à ce que,intervention divine?,même le sentier du serpent disparaisse dans un glissement de terrain,qui constitue d'ailleurs le prologue du livre.Ceci fait que l'on n'est même plus très sûr de ce passé somme toute récent.Et puis la condition de ces familles était si humble...

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07 mars 2011

Exquis canaux létaux

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          On dit souvent qu'il y a quelque chose de surréaliste au royaume de Belgique.Et ce n'est pas Bons baisers de Bruges,le curieux premier film de Martin McDonagh qui va contredire cet adage.Soit deux tueurs plutôt irlandais dans la superbe Venise du Nord,magnifique d'art flamand et de rues-musées.Mais Bruges,comme Florence,peut provoquer un peu d'étourdissement,une sorte d'ennui aussi.Oh,d'ennui très poli entres vieilles Anglaises et Japonais mitraillant,mais d'ennui tout de même.C'est le cas du plus jeune des tueurs car le plus âgé,lui,ne se déplaît pas et sympathise avec l'habitant.Colin Farrell et Brendan Gleeson sont parfaits,apportant l'un son côté nerveux et dépressif à se jeter dans le si beau canal,l'autre massif et placide comme un préretraité du meurtre rémunéré.Leurs pérégrinations leur font croiser entre autres une dealeuse de tendresse et autres substances,un nain cabotin,une logeuse qui ne s'en laisse pas compter.

    Mais voilà leur boss,le glacial Ralph Fiennes toujours impeccable,demande à l'un d'éliminer l'autre,avant de traverser lui-même la Mer du Nord comme un terrain vague comme disait quelqu'un qui a pas mal chanté Bruges et Gand et Bruxelles.S'ensuit une course poursuite où le taux de morbidité des personnages principaux sera très élevé sans que leur amitié ne soit vraiment mise en cause.Nous sommes là dans le "professionnel" sérieux et pourtant presque burlesque, nonsensique à l'anglaise parfois.J'oserai dire que In Bruges m'a parfois rappelé les meilleures comédies policières des mythiques studios Ealing.Sous les pavés... les gages (des tueurs).Soyez prudents cependant en montant au beffroi et ne fréquentez guère les nains parfois maléfiques.On le sait depuis Fritz Lang et Les Nibelungen.

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04 mars 2011

Géographie: Jacksonville, Floride

 

      Jacksonville au nord de la Floride a beaucoup grandi pour devenir la cité la plus peuplée de l'état.Presque à l'embouchure de la Saint Johns River,fleuve qui coule entièrement en Floride,la ville s'est d'abord appelée Cowford,le gué.Puis,la Floride ayant été rachetée à l'Espagne en 1821,elle devint Jacksonville en hommage à Andrew Jackson,gouverneur du territoire de Floride puis septième président des Etats-Unis.Comme souvent en Amérique,homonymie oblige,il existe au moins une douzaine d'autres Jacksonville dans le pays.Peut-être en visiterons-nous une autre prochainement.Pour le son c'est Lynyrd Skynyrd,insubmersible groupe sudiste qui s'y colle.Rough guys....

http://www.deezer.com/listen-893790 Jacksonville kid  Lynyrd Skynyrd

 

 

 

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01 mars 2011

Ma vie sans...When the ship comes in

   

           Voici encore un classique première période de Dylan par l'édenté Shane McGowan et ses Pogues qui cuvent sûrement quelque part depuis longtemps.When the ship comes in figurait sur l'album The times they are a changin'.La version des Pogues est plutôt style pub braillard mais ne me déplaît pas.Arlo Guthrie,les Hollies,Peter,Paul and Mary l'enregistrèrent également.Remplie de métaphores marines sur les jours meilleurs à venir cette chanson du Zim avec sa chute sur les armées de Pharaon noyées en Mer Rouge peut sembler un peu grandiloquente en 2011 mais elle a presque 50 ans.

http://www.youtube.com/watch?v=BXJlBGRLLWM When the ship comes in   The Pogues

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