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                Quand Claudialucia a lancé ce beau projet j'ai eu tout de suite envie d'en être.Je ne savais pas vraiment,et ne le sais toujours pas vraiment,par quel biais j'aborderais ce périple.Mais par contre ma première intervention est l'évidence même,sur le plan cinématographique.La quintessence du Romantisme éclate d'ailleurs déjà dans le titre,Marianne de ma jeunesse.Pour moi c'est plutôt Marianne de mon enfance car j'ai cinq ans quand sort le film.Ce n'est que quelques années plus tard qu'un MonFilm attire mon attention,ce sera,disons Marianne de mes dix ans.C'est maintenant Marianne de mes 60 ans,mais c'est toujours Marianne.

marianne_de_ma_jeunesse

         Je ne savais pas que,devenu lecteur et cinéphile,j'apprendrai que le beau roman d'initiation de Peter von Mendelssohn, Douloureuse Arcadie,a été adapté et mis en scène par le grand cinéaste ultra-pessimiste et tout de noirceur,Julien Duvivier,en 1954.

          Cette Arcadie idyllique chère à Nicolas Poussin s'épanouit dans un décor germanique,le Sturm und Drang frappe ce château, pensionnat de luxe pour nantis.Lacs et montagnes abritent un bestiaire splendide où ne manquent que les licornes. Les animaux de la forêt communiquent avec les habitants, ils veillent sur eux jusqu'à devenir eux-mêmes meurtriers.Les élèves conspirent un peu,rivalisant en des sociétés secrètes parfois cruelles en leurs rituels.Les Sages s'opposent ainsi aux Brigands dans le château d'Heiligenstadt.Et l'on sait que cet âge n'est pas si tendre.

  horst

                     Un jour paraît un jeune poète venant d'une si lointaine Argentine,qui exerce aussitôt sur ceux qui l'entourent une fascination presque magique.Il suffit ainsi de l'apparition d'un étranger pour troubler davantage le désordre ordonné de ce domaine déjà effervescent.La rencontre au manoir isolé de Vincent,cet ange envahisseur,avec l'évanescente Marianne mettra le feu aux poudres. Curieusement,car ça ne se faisait plus au cinéma depuis les années quarante,Julien Duvivier tourne deux versions de Marianne de ma jeunesse.L'une en français avec un jeune acteur blond comme c'est pas permis,Pierre Vaneck.L'autre en allemand avec Horst Bucholz,tout aussi jeune,très vite happé par Hollywood comme apprenti mercenaire.Il me semble que Pierre Vaneck épouse mieux les tourments de cet âge sans pitié et que sa candeur mêlée d'effroi est inoubliable.
    

     Marianne de ma jeunesse,peut-être sortilège,n'a guère servi la carrière d'Isabelle Pia ou celle de Marianne Hold,jeunes beautés douloureuses du film.Pierre Vaneck lui-même n'a jamais vraiment eu de rôle très marquant au cinéma.Bucholz ne rencontra guère que Wim Wenders et Roberto Benigni,mais il était alors sexagénaire.

    Si vous passez du côté de Marianne de ma jeunesse,libre à vous d'y voir une pâtisserie kitschissime,voire crypto-démago-pompière.Moi j'ai laissé dans les eaux du lac d'Heiligenstadt des émotions profondes,celles de mes dix ans,les seules qui comptent vraiment,pas encore gâtées.