La poésie du jeudi, Emile Nelligan
Me sentant l'âme allegretto
Et furetant pour vous séduire
Quatre cordes,un piquant tempo
Que j'offre à votre doux plaisir
C'est en ces termes que j'ai choisi le poète québecois Emile Nelligan, sorte d'archange fulgurant né la veille de Noël 1879, et qui fut interné à 20 ans pour le reste de ses jours. On pense évidemment à d'autre météores. Merci Asphodèle pour avoir réveillé l'amateur de poésie qui somnolait en moi.
Le violon brisé
Aux soupirs de l'archet béni,
Il s'est brisé, plein de tristesse,
Le soir que vous jouiez, comtesse,
Un thème de Paganini.
Comme tout choit avec prestesse !
J'avais un amour infini,
Ce soir que vous jouiez, comtesse,
Un thème de Paganini.
L'instrument dort sous l'étroitesse
De son étui de bois verni,
Depuis le soir où, blonde hôtesse,
Vous jouâtes Paganini.
Mon coeur repose avec tristesse
Au trou de notre amour fini.
Il s'est brisé le soir, comtesse,
Que vous jouiez Paganini.
Emile Nelligan (1879-1941)