La poésie du jeudi, Robert Walser
C'est avec un immense plaisir que je fouine chaque quinzaine pour cette superbe idée d'Asphodèle. Cette fois c'est outre Rhin que j'ai voyagé. Je me suis souvenu de Robert Walser, que j'ai peu lu mais dont Vie de poète m'avait enthousiasmé Couleurs en marche.
Temps
Je suis couché, j’ai bien le temps,
je réfléchis, j’ai bien le temps.
Le jour est sombre, il a le temps,
plus de temps que voulu, du temps,
j’en ai à mesurer, du temps, du long temps.
La mesure croît avec temps.
Une seule chose dépasse le temps,
c’est le désir, car aucun temps
n’égale du désir le temps.
Robert Walser (1878-1956)
Robert Walser, Suisse de langue allemande (1878-1956) fut un promeneur fragile. Après quelques années de bohème à Berlin il mena en Suisse une vie d'errance et de solitude. Sa faiblesse mentale le conduira à un internement psychiatrique dès 1929. Il n'écrira plus. Admiré par les grands Germains, Hesse, Hoffmanstahl, Musil, il est considéré comme un maître du minimalisme. Cela apparaît bien dans ce court texte sur le temps. Pour Stefan Zweig Walser était "le miniaturiste par excellence". Grand marcheur, il mourut le jour de Noël 1956, tombé dans la neige de son pays qu'il avait tant arpenté.