Vladimir et Vladimir
Quelle bonne prise cette fois avec Babelio qui fidèlement me demande souvent mon avis, des plus favorables aujourd'hui avec le très bon roman de Bernard Chambaz Vladimir Vladimirovitch, pas du tout une biographie du tsar avec cependant des éléments réels de la vie de ce fabuleux personnage de roman qu'est Poutine. En fait Poutine a un homonyme, au moins un, et ce Vladimir Vladimirovitch, qui est en plus né le même jour, a été frappé lors des J.O. de Sotchi par la tristesse dans le regard du président devant l'élimination de l'équipe russe de hockey."Une tristesse d'enfant, des yeux de phoque". Et l'on sait la détresse du phoque en Alaska ou plutôt en l'occurrence au Kamchatka.
Alors V.V.Poutine le cheminot continue d'écrire dans ses cahiers noir et rouge sur V.V.Poutine le président. Il le fait depuis l'accession au pouvoir de ce dernier, évènement qui a en quelque sorte fait basculer sa vie. Pourtant aucune haine du modeste pour le puissant, pas non plus une vraie fascination. Mais un sentiment ambigu et très romanesque que Vladimir le petit tente de mettre noir sur blanc en racontant à sa manière la vie de Vladimir le grand. Enfance, KGB, ascension, omniprésence et omnipotence, décrivant ainsi un Poutine le président comme un personnage certes peu sympathique mais tellement "bon client" pour une littérature de qualité. Et Vladimir le modeste continue sa vie, un peu aléatoire, maintenant retraité du tramway, lui qui fut jadis professeur d'université, patineur et peintre du dimanche à la vie privée moyenne depuis son amour perdu pour Tatiana et ses petits arrangements avec Galina.
Pourquoi sur ses calepins de moleskine s'obstine-t-il à ces quelques mots, et pourquoi tous ces articles de presse concernant Vladimir le puissant? "19 février, tristesse dans ses yeux, phoques, aquarium". Probablement une sorte d'osmose avec ce pays occupant un cinquième du monde et, dans les carnets de Vladimir toute l'histoire de la Russie brutale comme un ours, chafouine comme une zibeline, pays géant passionnant et démesuré, inégalitaire comme pas permis, tellement ailleurs et dont le roman de Bernard Chambaz a le charme un peu vénéneux, vodka qui nous chavire et bruits de bottes compris du côté de l'Ukraine, cette fois.
Mon été avec le grand Will/ Scène 5
Quand on bosse un peu sur Shakespeare au cinéma on peut être tenté par le sérieux, voire le verbiage. Alors on se replonge dans le cinoche et on se dit que le meilleur film d'après Will, bien qu'il ne figure pas au générique, pourrait être celui-ci. J'ai d'ailleurs l'intention de terminer mon séminaire à l'Institut Universitaire Tous Ages par quelques images sans commentaires, juste un claquement de doigts, de ce chef d'oeuvre absolu, non pas seulement de la comédie musicale mais du cinéma tout entier. Voir, écouter...ressentir. Volontairement je n'ai pas choisi l'un des extraits les plus connus. Le cinq majeur de cette dream team: Robbins, Wise, Lehman, Bernstein, Sondheim. On peut vivre sans avoir vu West Side Story. Mais moins bien.
Ce billet sera vraisemblablement le dernier du mois. Un petit voyage bientôt et Dame Lassitude au front un peu soucieux passent par là...
Géographie: Sarasota, Floride
Sarasota, le croiriez- vous, est une station balnéaire proche de St Petersburg. Mais on parle là de St.Petersburg, Floride. Plutôt huppée, la ville de Sarasota est relativement récente. La Floride n'est pas l'état le plus rock-folk qui soit, ni le plus chanté sur Tin Pan Alley. Mais The New Mendicants ont assez d'étoffe pour passer un agréable moment en ville. Genre "folkish".
Sarasota est extrait de l'album Into the lime sorti en 2014. Télérama en dit plutôt du bien et Les Inrocks du plutôt pas mal. On ne va pas, tout au moins pas cette fois, contredire les officiels.
Du passé faisons table rase
Il est un peu difficile parfois ce Passé imparfait de Julian Fellowes. Intéressant et très bien écrit sur un sujet qui me branche: ma génération. L'auteur a mon âge. Il revient sur ces drôles de gens qui avaient 20 ans en 70, encore plus curieux quand il s'agit d'aristocrates anglais. Tout part dans ce roman des célèbres et désuets maintenant bals des débutantes ou quelque chose dans ce genre-là. Manifestement Julian Fellowes parle de choses qu'il connait bien en ce curieux pays,le plus exotique qui soit pour un Français. Pourquoi ai-je écrit en incipit qu'il était un peu difficile ce roman? Parce qu'il n'est pas si aisé pour un lecteur continental de s'inviter à ces 600 pages so typically British même si ce British là démolit consciencieusement la perfide Albion. Ce n'est plus Rule Britannia mais F*** you Bloody Island. Fellowes est l'auteur de Gosford Park l'un des derniers films de Robert Altman. C'est plus clair maintenant?
Damian Baxter charge le narrateur de retrouver la mère de son enfant. Six candidates possibles mais on est en 2008 et toutes et tous ont la soixantaine imminente. Ce narrateur sans nom va scrupuleusement enquêter, faisant jaillir des vérités enfouies, pas des plus reluisantes. Je peux comprendre ça, je n'ai pas toujours relui. Des fantômes se réveillent, des liaisons cachées ressurgissent, des antagonismes ancestraux réapparaissent. Presque tout ce beau monde est resté dans le beau monde, monde comme les autres avec son lot de vanités et de lâchetés, pas pire qu'ailleurs. Rassurez-vous, pas mieux non plus. Si on comprend assez bien la "bascule" de la fin des sixties, car Passé imparfait est parfaitement clair et maîtrisé, on a le droit d'être un peu frustré car Julian Fellowes évoque peu le Swinging London et la révolution musicale si prégnante de Carnaby Street à Ibiza.
Un très bon roman, de classe aux deux sens du terme. Mais Julian Fellowes, peut-être Sir Julian Fellowes à cette heure, une question. Comment un tel livre peut-il ne pratiquement pas citer John, Paul, George and Ringo? Soyons justes. Il y a quand même en direct live (comme on ne disait pas) lors d'un bal le Spencer Davis Group. Ce qui n'est pas rien.