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12 avril 2016

Tourments, ou le deuil lui va si bien

Enon

                                L'équation du deuil est magistralement explorée par ce livre qui tient parfois du prodige intellectuel. L'Américain Paul Harding, Prix Pulitzer 2010 avec Les foudroyés, plonge avec Enon dans les affres vécues par le père de Kate, 13 ans, qui est morte accidentellement dès les premières pages. Le couple ne résiste pas plus de quelques jours et Susan quitte Charlie. Ce n'était de toute façon pas le couple du siècle. Et c'est la descente aux enfers pour cet homme, expression banale mais parfois le très banal convient bien, dans la très modeste bourgade d'Enon, Nouvelle-Angleterre. Seul, Charlie va très vite sombrer dans une grave dépression avec dépendance, addiction plutôt, aux médicaments et à l'alcool. Ces choses là arrivent. Mais Enon va beaucoup plus loin, enclenchant une fatale mécanique du désastre. C'est que Charlie n'est pas un intellectuel et qu'il n'est pas apte à affronter ses souvenirs et moins encore les fantômes qui l'assiègent. Ses facultés vacillent,il s'est explosé la main quasi volontairement, cesse de se raser, dort sur le canapé, mais surtout marche dans les bois et prend l'habitude de hanter le cimetière d'Enon où reposent sa fille mais aussi sa mère et ses grand-parents.

                                Ainsi vit, ou survit, Charlie Crosby, Charlie le désarmé, le timoré peut-être, le très fragile sûrement. Jeune il avait vite arrêté ses études pour gagner sa vie en repeignant des maisons, en tondant les pelouses et en déblayant les allées enneigées. Epousé Susan, enseignante, élevé Kate du mieux qu'il le pouvait, Kate maintenant couchée dans le cimetière paroissial où il passe des heures, prostré, en proie à des ombres, à des voix, à de vraies rencontres parfois. Charlie, plein de whisky, de cachets, de douleur(s), voit ses souvenirs le submerger. La prose de Paul Harding est capable de nous emporter dans le quotidien de cet homme à la dérive, de nous émouvoir, mieux de nous bouleverser. Dans Enon la discrète, des pages entières sur le froid, sur quelques arbres, sur un bien discret supermarché de bourgade et son patron, ou encore une magistrale évocation du grand-père de Charlie remontant les mécanismes horlogers des maison bourgeoises, sont autant de joailleries. 

                               Enon est donc à mon sens une grande réussite, un poème d'amour d'un père à sa fille, mais aussi à la vie, la vie qu'il est quoi qu'il en soit un privilège de vivre. Pas à fleur de peau, mais profondément incarnée au sens premier. Qui peut dire ce qui suit les ténèbres? Ce qui suit la lecture d'Enon, ça, je le sais, est une belle envie de lire Les foudroyés.

 

 

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Commentaires
N
Coucou Claude,<br /> <br /> J'ai exploré dernièrement un livre sur le deuil avec "Ceux qui restent" de Marie Laberge. Des romans essentiels...<br /> <br /> Elle a su parler du sujet avec magie.<br /> <br /> Bisous
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S
Suis aussi en train de lire un livre sur le deuil d'enfant côté père, un livre plutôt positif curieusement, qui manie l'humour avec justesse.
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A
Tu me tentes diablement ! Je ne connais pas du tout et même si le thème n'est pas gai, il me semble traité subtilement ! Bises et à ttds .
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A
J'ai beaucoup aimé "les foudroyés" ; j'ai lu plutôt de mauvaises critiques sur celui d'aujourd'hui, je ne l'avais pas retenu, tu me fais reconsidérer la question.
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D
jamais lu je crois alors pourquoi pas mais j'ai une telle pile devant moi que ce sera pour dans quelques temps
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L
Hasard! Je vais à l'enterrement d'une amie aujourd'hui.....
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