Ce bouquin est lauréat du Pulitzer 2016. Une référence. Méritée. C'est un grand livre. Et les chroniques ont été la plupart du temps très élogieuses. Je maintiens, c'est un grand livre, très bien écrit, qui ne vous lâche guère. A une condition, il faut être soi-même surfeur, et même, à mon avis, surfeur globe-trotter pour l'apprécier à sa juste valeur. William Finnegan, grand reporter,quand il n'était pas sur les planches, a une plume magnifique pour épouser les rides, les droites et les gauches, décrire ses chevauchées sur les spots du monde entier. Mais vous n'arriverez pas à me faire croire que tant de lecteurs puissent sans s'estourbir le suivre dans ses encyclopédiques circonvolutions de short-board ou de pintail.
Nous sommes donc en présence, ça arrive de temps en temps, du chef d'oeuvre quasi illisible. Et pourtant je l'ai lu, j'en suis venu à bout, après force paquets de mer. Mais comme le temps m'a paru long à infiltrer des reefbreaks et à faire des duck-dives. J'en suis épuisé. Il m'a fallu un mois pour parcourir le monde entier en compagnie de Finnegan. J'en ai marre des outside de Madère, des lineup de Samoa, des cutback de Waïkiki. C'est le ton de Jours barbares et c'est peu dire qu'il reste assez peu de place, malgré 520 pages, pour la vie dans les îles du Pacifique Sud, voire les écoles d'Afrique du Sud ou William Finnegan a trouvé un peu de temps pour enseigner.
N'empêche, ce récit a du souffle, ce souffle vital aux surfeurs de Californie et du reste du monde. Ce monde qui semble tourner à 90% dans le but d'émouvoir les adeptes de ce sport, vaguement philosophie, plus sûrement addiction. On peut lire Jours barbares et le trouver assez fabuleux. C'est mon cas. On peut y avoir sué sang et eau salée. C'est aussi mon cas. On pourra aussi, syndrome d'Ulysse et Joyce, se montrer perplexe quant à ceux qui auraient pris leur pied (goofy foot ou regular foot) sans avoir parfois envie de sortir des rouleaux, un peu compresseurs.
M.Finnegan, vous êtes un grand auteur. Je sais que vous étiez aussi au Soudan ou dans les Balkans. On surfe peu à Sarajevo. Si vous m'en parliez je vous écouterais volontiers. Les rares paragraphes non surfés, par exemple quelques lignes sur les autochtones de Madère, formidables, en sont témoins. En attendant rendez-moi un le Surfin' U.S.A des Wilson Brothers. C'est un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup. "C'mon! Brian, Carl, Dennis,c'mon!"