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BLOGART(LA COMTESSE)
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28 juillet 2008

Curiosité et propagande

     Curiosité à suivre...On comprend bien qu'Edward Robinson,né à Bucarest,Paul Lukas,né à Budapest et Anatole Litvak,né à Kiev,tous trois émigrés juifs à Hollywood aient eu envie de faire un film de pure propagande, sans grande originalité,mais qui avait pour objectif de dénoncer les infiltrations nazies aux Etats-Unis. Terriblement manichéen voire insupportable à la fin par son simplisme outrancier Les aveux d'un espion nazi se regarde comme un témoignage de la Warner,avant même le début de la guerre puisque sorti en 39.On y rencontre le si british George Sanders en officier nazi pur jus.Tout ce petit monde s'exprime évidemment en anglais.Peu importe l'objectif n'était pas de faire mais de faire savoir...

       On découvre ainsi les meetings des sympathisants sous l'oeil d'Adolphe et les svastikas.Saviez-vous qu'un certain Walt Disney y participa?Et que Joseph Kennedy(le papa) aussi?C'était ma minute de délation.Plus sérieusement la démocratie vaincra bien sûr.D'ailleurs le film se clot par cette phrase délicieuse et peu ambigüe: "L'Amérique ne fait pas partie des dernières démocraties.Elle est la démocratie".Je vous avais prévenus,il y a les bons et les mauvais. Merci à Patrick Brion qui continue inlassablement son travail sur France 3.Il arrivera aussi qu'un film de propagande,oui,soit aussi une oeuvre magistrale.N'est-ce pas Patron(Bogart)?Je parle évidemment de Casablanca et Le port de l'angoisse.O.K. Patron!

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18 juillet 2008

Le cinéma du New Deal et de Roosevelt

    Le toujours excellent et discret Cinéma de minuit sur France 3 a l'idée très originale de nous présenter quelques films qu'il n'est pas exagéré de qualifier de propagande.Casablanca et Le port de l'angoisse figurent au programme.Mais aussi,plus rares,quelques films peu connus comme ce Wild boys of the road du grand William A.Wellman que l'on commence à redécouvrir.( voir L'attractif traquenard tracassant de Track of the cat - ).Datant de 1933,tourné sans aucun acteur connu, ce film très peu distribué en France à mon avis n'est pas le meilleur de Wellman mais se révèle fort intéressant historiquement.Replaçons nous dans le contexte de la crise des années trente en Amérique,si bien évoquée par Steinbeck, Algren, Edward Anderson,ceci pour la littérature. Au cinéma Frank Capra bien sûr l'évoqua à sa manière,parfois un peu angélique mais si émouvante.

    Ne durant que 75 minutes Wild boys of the road est la simple histoire de trois adolescents victimes de la conjoncture qui jeta sur les routes non seulement les oakies bien connus des Raisins de la colère mais aussi des milliers de braves gosses qui sillonnèrent le pays en quête d'emploi et de survie.Les passages les plus intéressants sont évidemment les aventures ferroviaires de ces clandestins,ceci traité comme un livre d'images assez sages et édifiant.J'ai parlé de propagande et c'est bien cela,presque un film officiel.Mais un film officiel sympa dans toute sa naïveté où l'on peut finalement faire confiance aux institutions et au happy end inévitable.A voir comme on feuillette un vieil illustré retrouvé dans un grenier qu'auraient lu mes grands-parents ou vos arrière-grands-parents.

11 juin 2008

Prague vue par Fritz Lang et Bertolt Brecht

   

            Prochainement l'un des meilleurs films américains de Fritz Lang ou quand même la propagande peut avoir du talent.1942:depuis quelques années Fritz Lang se consacre à la lutte antinazie depuis Hollywood. Ce tryptique comprend Chasse à l'homme,Les bourreaux meurent aussi et Espions sur la Tamise.Pour ce dernier film voir Les miettes du Ministère ou Londres,nid d'espions - BLOGART(LA ....Les éditions Carlotta proposent un très bon double DVD comprenant les deux versions de Hangmen also die.Bernard Eisenschitz, spécialiste du cinéma allemand nous donne quelques clés,essentiellement sur la collaboration entre les deux exilés,très différents,Lang et Brecht.C'est d'aileurs à peu près la seule intrusion directe du grand dramaturge allemand dans le cinéma..L'ami Oggy qui a déjà dégainé,n'aime pas le film et je le trouve bien sévère.

   Il est vrai que Lang a voulu en quelque sorte "polariser" le sujet(au sens film noir,pas au sens obsession) et je pense que cela peut effectivement choquer un peu.Il ne prétend pas faire oeuvre historique car Les bourreaux meurent aussi a été conçu dès le début comme un thriller,par Lang plus que par Brecht cela va de soi.D'une construction relativement éclatée avec plusieurs lignes directrices le film a décontenancé ses rares spectateurs à sa sortie aux Etas-Unis. Présenté en France en 47 avec nombre de films retardés il n'obtint guère plus de succès malgré un timing diminué de 25 minutes(reste encore 1h55).On connaît le sujet ,l'assassinat de Heydrich, "protecteur" de la Tchécoslovaquie. On ne voit pas l'évènement mais l'idée de Fritz Lang est bien ailleurs.Il a déclaré avoir voulu par le biais du canevas policier faire un film informatif sur l'idée même de résistance,méconnue forcément des Américains.Alors Oggy y a vu quelques grosses ficelles probablement et il n'a pas tort.Néanmoins je considère Hangmen... comme un film important,pas  si éloigné de Mabuse... et de M...,non seulement par la mise en scène qui retrouve quelques touches expressionnistes,ombre et lumière,menaces,scènes de rue et importance du "monumental" (façades, brasserie, immeuble), mais aussi par l'épineuse question des méthodes qui conduisent la Résistance et la Cause(bonne) à utiliser des moyens guère plus reluisants que ceux de l'oppresseur.Thème éminemment langien,voir les films précités mais aussi Fury,premier film américain,déjà chroniqué ici.

    La dispersion du film nuit certainement à la clarté,passant du rôle du collabo à la fuite du héros traqué et au sort des otages.Mais tout de même,quelques images frappantes demeurent,certaines ellipses foudroyantes, le chapeau de l'inspecteur gestapiste par exemple, roulant sur lui-même pendant que meurt le tortionnaire.Pour conclure je pense que ce film,peu diffusé je crois,est partie prenante de la cohérence langienne,dont je prétends à chaque article le concernant, qu'elle est totale depuis Les Araignées jusqu'au tout dernier,en 60,Le diabolique Dr.Mabuse.Enfin je ne peux que conseiller l'excellent film de Douglas Sirk Hitler's madman,de 1943,qui raconte la même histoire,plus centrée cependant sur l'évènement en soi, l'attentat contre Heydrich.Oggy s'il l'a vu,me donnera certainement son avis.

11 mai 2008

Nous avons vu un bon film ce soir

      Nous avons gagné ce soir(1949) est sans contestation le meilleur témoignage cinéma  sur le monde de la boxe.On en parle mais avant,ce petit rappel d'une note ancienne où j'en disais déjà beaucoup de bien.

Septième et Noble Art

  Le sport favori du cinéma est sans conteste la boxe. Très peu de films en effet ont pu utiliser le football,le cyclisme ou le tennis et en faire d'authentiques oeuvres fortes,émouvantes ou dérangeantes. La boxe par contre semble avoir été inventée pour le cinéma tant par sa chorégraphie très particulière que par son insertion dans le genre très codé du film noir et de l'affairisme. Sans prétendre à l'exhaustivité voici quelques impressions sur les riches heures de la boxe à l'écran, sans chronologie ni classement quelconque. Simplement des films qui font mouche,des directs au coeur. Le BagarreurLe Bagarreur (The streetfighter) de Walter Hill(75) est l'un des très rares bon films de Charles Bronson,excellent tableau d'une Amérique en crise où le combat de rue, orchestré, est l'une des voies de salut pour les chômeurs de l'époque.    

Nous avons gagné ce soir

Nous avons gagné ce soir(The set up)de Robert Wise (49)raconte le combat de trop d'un boxeur vieillissant quià la magouille privilégie l'honnêteté jusqu'à y laisser son gagne-pain.Ce film, modèle de concision, devrait inspirer bien des cinéastes modernes qui ne prennent jamais le temps de faire court. Robert Ryan,qui fut lui-même boxeur y est saisissant. Que j'aime ce cinéma de la sobriété!   

      

     Gentleman Jim(42) de Raoul Walsh avec Errol Flynn raconte l'irrésistible ascension de Jim Corbett, tout en truculence et avec le sourire.Une success story à l'américaine où Flynn,acteur physique plus fin qu'on ne le dit,s'en donne à coeur joie. Fat City Fat City(72) d'après Leonard Gardner,mis en scène par John Huston est une très belle histoire de rédemption d'un boxeur alcoolique(Stacy Keach) qui retrouve le goût de vivre en aidant un jeune champion(Jeff Bridges).Le thème de la passation des pouvoirs est récurrent dans nombre de films sur la boxe.

Citons encore pour le cinéma américain Plus dure sera la chute(The harder they fall) de Mark Robson(56) pour Bogart dans son dernier rôle avec là encore la rédemption d'un journaliste qui prend soin d'un boxeur analphabète. Et Sang et or(Body and soul) de Robert Rossen en 47 avec le génial John Garfield. En règle générale le cinéma américain a bien traité la boxe, mythe très Nouveau Monde s'accordant bien avec cet art somme toute récent qu'est le cinéma.

     On ne peut ignorer évidemment Raging Bull(1980),numéro de haut vol des sieurs Scorsese et De Niro qui  transpire son italo-américain par tous les pores et qui mérite un chapitre à lui seul.La saga de Rocky Balboa  vaut également un coup d'oeil au moins dans sa première mouture,élégante et naïve,honnête et démocrate.      

   Le tout dernier en date,Million dollar baby(2005) est l'un des meilleurs films de Clint Eastwood,d'après une nouvelle de F.X.Toole,extraite de La brûlure des cordes. Il brasse tous les thèmes chers à la boxe: ascension, abnégation,"paternité" du vieil entraîneur, chute et drame du combat qu'il ne faudrait pas livrer. Le fait qu'il s'agit d'une boxeuse n'en est qu'émotionnellement plus fort. Eastwood s'y connaît en fêlures assassines.

   Retour sur The set-up ou Nous avons gagné ce soir,ou pourquoi ce film est le plus passionnant parmi bien d'autres sur la boxe.Le film de Robert Wise est fascinant de maîtrise,précis comme un reportage sportif,mais ancré dans une réalité quotidienne bien loin du glamour des combats de haut niveau de Vegas ou du Madison Square Garden.The set-up se déroule pratiquement en temps réel,chose rarissime.Si bien des films ont eu pour cadre la boxe celui-ci est la boxe dans sa dureté et sa bassesse,avec ses courages,ses peurs et ses combines.Très peu alourdi par une intrigue parallèle,seule la femme de Stolker Thompson apparaissant, étrangère mais peu à peu dégoûtée par ce monde,le film va ses 80 minutes sans compromis, dans une petite ville américaine de 1949,un samedi soir ordinaire sur fond de jazz et de néons.C'est très beau,noir et profondément prolétaire,qualité qui exclut l'artifice.Un modèle.

   Robert Ryan,grand acteur buriné,est saississant de vérité,dans son honnêteté qui lui interdit la magouille.On est happé par l'ambiance du bien modeste vestiaire,sur la porte duquel les noms sont inscrits à la craie(on est loin des aristos ferrarisés du football).Voilà les boxeurs,Stolker,35 ans,fin de carrière très besogneuse,un autre qui commence à perdre ses esprits,un tout jeune paniqué,un noir qui espère l'ascension sociale.Le combat entre Thompson et Nelson est filmé dans son intégralité,quatre rounds sévères,cadré au plus près.Au fait,un détail,je n'aime pas la boxe.Et puis il y a le plus impressionnant dans Nous avons gagné ce soir:la salle et les spectateurs.Quelques mots sur ces derniers,hallucinante galerie.

    Un aveugle,qu'on devine ancien boxeur,se fait raconter par le menu et invective l'un puis l'autre des combattants(photo).Une femme d'âge mûr en fait autant,harpie,l'insulte à la bouche "Kill him!",comme on en voit dans nos stades parfois.Un grand nerveux et sa femme,lui mimant les coups et elle essayant de le calmer, finalement le plus sympa.Un obèse se goinfrant de pop corn et proche de l'orgasme,roulant des yeux.Le magouilleur en chef,sûr de lui,puis inquiet,puis furieux.Les deux amis deThompson et "courage,fuyons".Tout un petit monde,un peu interlope mais au petit pied,que pous allons quitter vers 22h30,lumières éteintes, règlements de compte et clignotant "Dreamland" au fronton.

1 mai 2008

Une zombie féline amoureuse d'un léopard

         Coming soon...une passionnante et définitive et modeste réflexion sur la trilogie de Jacques Tourneur qui rester le seul grand metteur en scène américain à être mort à Bergerac.Vaudou ne dure que 68 minutes et comme j'aimerais que nombre de bavards cinématographiques s'inspirent de cette brièveté.Un peu plus d'une heure pour aller à l'essentiel.Acteurs peu connus,budgets moyens mais un producteur éclairé,attiré par l'occultisme,Val Lewton,qui permettra la réalisation de cette trilogie pour le compte de la RKO.Alliance de poésie et de précision,Vaudou laisse sourdre le culte antillais progressivement sur fond de percussions nocturnes et entêtantes.Un magnifique symbole,la figure de proue figurant les mânes des ancêtres esclaves,marque notamment le film, fantômatique à souhait et traversé par les rictus des officiants,et le cri des crapauds et des chouettes.Vaudou est une vraie perle et laisse au spectateur sa part de libre arbitre et de re-création.Jamais le cinéma fantastique n'est aussi beau que lorsqu'il se contente d'effleurer la main de ce spectateur,à l'opposé des marchands de voyeurisme.

  Une ville frontalière ou presque,au Nouveau-Mexique,impératif pour le climat étouffant et la moiteur des nuits du Sud.Un cabaret peu glorieux et un félin en laisse.Nous sommes pourtant loin du scintillant Mr.Bébé de Howard Hawks.Le léopard de JacquesTourneur n'est qu'une modeste attraction de foire mais sa disparition va entraîner quelques meurtres de femmes,jeunes et aux abois.Film sans effets spéciaux L'homme léopard est une vraie pépite sertie dans sa concision et ses décors classiques mais éloquents.Un musée poussiéreux et son conservateur trouble,une rue d'où jaillissent dans la nuit des appels de mères inquiètes,un cimetière qui sent son Mexique si proche avec son culte des morts si omniprésent.Voilà quelques éléments que le noir et blanc du metteur en scène enchaîne parfaitement,faisant de cette histoire digne des dime novels,romans à deux sous,une pièce maîtresse de ce cinéma où rode la mort,de noir vêtue,comme en une gravure ancienne enluminée par un maître artisan.Souvent considéré comme le maillon faible de la trilogie ce n'est absolument pas mon point de vue et c'est fort bien expliqué dans les bonus de ce beau coffret.

       La féline reste le plus connu et finalement le moins surprenant peut-être parce que vu plusieurs fois. Surement aussi parce que les codes du genre sont hyperclassiques dans cette histoire d'attraction répulsion qu'éprouve Irena pour la panthère,ceci en liaison avec une histoire légendaire venant des confins de la Serbie.A noter que les Balkans ici évoqués font immanquablement penser aux Carpathes d'un certain comte bien connu des amateurs.Le noir couleur panthère va tout de même très bien à jacques Tourneur dans ce manège qui conduit immanquablement l'héroïne devant la cage du fauve,l'actrice française Simone Simon lui donnant un petit cachet vieille Europe très appréciable.L'ensemble de ces trois films forme effectivement une véritable cohérence,tournée en quelques mois,avec certains acteurs récurrents,et gagne à être vue dans son intégralité.J'ajoute que le coffret Montparnasse est beau et que l'intervention de Patrick Brion sur le rôle du producteur Val Lewton est limpide.

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10 avril 2008

Heures désespérées(un film du patron)

              Prochainement car par contrat je suis obligé de chroniquer tous les films visibles d'Humphrey Bogart, mon icône...La maison des otages(55) est donc un des derniers films de Bogie,dirigé par William Wyler.Ce n'est plus tout à fait le meilleur de Bogart bien sûr mais sa composition de gangster en cavale vaut le coup,ainsi que son affrontement avec Fredric March,ex vedette d'Hollywood,déjà passablement oublié en ces années cinquante.Je précise que March fut deux fois lauréat des Oscars pour Dr.Jekyll et Mr.Hyde en 31 et Les plus belles années de notre vie en 46,deux très bons films.

      Adapté d'une pièce de théâtre le film manque un peu d'espace et le paysage banlieue américaine fleure la naphtaline des fifties.Bogart et March, rétrospectivement, paraissent assez âgés pour leur rôle.Et la famille américaine baigne dans la convention la plus classique. Cependant dans le rôle du père Fredric March se durcit peu à peu jusqu'à ressembler au gangster.Ceci est assez bien amené et alors que l'on aurait pu croire que le criminel Glen Griffin,sobrement interprété par Bogart,allait finir par s'humaniser (dans mes lointains souvenirs je voyais d'ailleurs le film comme ça),c'est tout le contraire et justice sera faite.Dans un de ses rares rôles,du moins en vedette,totalement antipathiques le patron est une fois de plus inoubliable à voir et à entendre.Ce timbre de voix si unique,nasillant un peu,persiflant souvent,inquiétant toujours.Un blogueur cinéphile me donnera-t-il son sentiment sur le remake de Cimino,Rourke et Hopkins?Je ne l'ai jamais vu.

30 mars 2008

Et bien finalement... non

     Permettez-moi d'abord de vous présenter les talentueux avocats de la défense,respectivement Maître Neil There will be blood (2007) Paul Thomas Anderson ,Maître Bastien There will be blood et Maître Systool THERE WILL BE BLOOD (Paul Thomas Anderson, 2007) .Et bien finalement...non,je ne les rejoindrai pas sur cette affaire.

  Je n'ai lu aucun roman d'Upton Sinclair,le Zola américain auteur de La jungle,Le pétrole(dont est adapté le film).Je connaissais seulement sa collaboration avortée avec Eisenstein lors du séjour de ce dernier en Amérique.Sinclair,grand lutteur,pourrait bien être plus un agitateur d'idées qu'un grand romancier.Il a énormément écrit.Trop?Sa carrière politique n'a pas été couronnée de succès et ses brûlots semblent bien loin.Nous ne statuons pas aujourd'hui, Mesdames et Messieurs,sur l'écrivain Upton Sinclair mais plutôt sur le chef-d'oeuvre annoncé à l'avance par presque toute la presse,le long (très) métrage There will be blood du sieur Paul Thomas Anderson dont je n'ai vu à ce jour aucun autre film.Déjà je suis mal à l'aise quand un film arrive avec un label quasi-officiel de chef-d'oeuvre.Certains termes me semblent ainsi bien galvaudés.

   There will be blood démarre très bien et la première heure m'a paru excellente.L'induction du sujet sur les premiers forages pétroliers est bien vue et j'ai vraiment beaucoup aimé une certaine force tellurique qui émane du métal des conduites,du maniement des explosifs,de l'or noir qui s'apprête à embraser le pays et Wall Street.Il s'échappe de toutes ces séquences une véritable poésie de l'ére industrielle débutante qui m'a touché.On sent le bois des derricks respirer comme le coeur d'une grande nation qui s'apprête à l'envol. Monde rude, monde de pionniers,monde d'une grande brutalité,que le cinéma d'Anderson transcrit tout à fait bien et qui n'est pas sans rappeler les classiques américanissimes et ardents comme Griffith ou Ford.Jusque là vous aurez compris que je souscris.L'esprit des collines est là et bien là.Celui de Jack London par exemple et ce n'est pas un mince complément.Pourquoi faut-il que P.T.Anderson commence à s'ennuyer manifestement pour qu'il se mette à la facilité, voire au ridicule lorsqu'il s'apesantit sur la lourdissime dichotomie américaine Dieu et le business?

   On est alors très loin du Malin de John Huston d'après Flannery O'Connor.There will be blood trace alors le sillon très couru de la violence croissante chez Plainview,dont l'appétit de réussite n'aura d'égal que le manque de scrupules.En ce sens il y a effectivement un petit air de Kane dans ce personnage de Daniel Day Lewis pour qui le succès n'a pas d'odeur.Mais pas d'odeur nous monte au nez comme disait le grand Jacques et si Daniel Plainview est haïssable son double prédicant l'est tout autant,expédiant ainsi deux figures mythologiques fondatrices de l'Amérique dans les affres d'une mise en scène qui tourne au spectacle de Grand Guignol(je n'ai pas dit Guignol qui n'a rien à voir).Ainsi caricaturés au maximum,outranciers comme jamais,nantis de leur seule déraison bien mal exploitée dans la seconde partie du film,le prospecteur et le pasteur versent dans la fable édifiante finalement très ordinaire.Ne dérangeant personne ce film est pour moi,mes chers confrères magistrats,une production relativement toc.Je comprends mal l'engouement journalistique presque unanime.Daniel Day Lewis est bien sûr un bon acteur mais ce rôle est loin d'être le plus intéressant de sa carrière.

    Pour conclure cette plaidoirie à charge pour ce film qui ne réclame pas trop de mansuétude eu égard à l'ambition énorme,je parlerai plutôt de prétention,dont il nous est arrivé accompagné,encore une fois presque officiellement,je demanderai au moins le sursis avant de le béatifier.Reprenez-vous mes amis.Que ceci ne nous empêche pas de trinquer ensemble au Bar du Palais comme d'habitude.Un dernier mot:pour l'oscar du meilleur film de bowling je préfère Les tontons flingueurs ou The big Lebowski.

9 mars 2008

Horizons verticaux

northbynorthwest04.jpg

          Rassurez-vous je n'ai pas l'intention de vous infliger le énième commentaire éclairé ou obscur sur ce film.Qu'on me permette seulement de m'enthousiasmer une fois de plus pour ce modèle de générique imaginé par le grand Saul Bass.Nord Nord-Ouest est le titre du film et en deux minutes ces génies que sont Hitchcock, Bass,Hermann ont tout dit.Voulez-vous qu'on y regarde ensemble d'un peu plus près?

      Leo de la MGM rugit...L'impressionnant score musical de Bernard Herrmann foudroie le silence et semble zébrer l'écran.Cet écran est traversé par les lignes horizontales et verticales,délimitant de petits carrés qui deviendront fenêtres de  ce grand immeuble newyorkais. Cette grille,oblique,imprime déjà au film son mouvement vers les deux directions.Implacablement,comme toujours chez Hitch,le générique se met en place et apparaissent les noms venant d'en haut ou d'en bas puis s'éloignant pour sortir du cadre,souvent accompagnés de petits parallélogrammes au même destin.Remarquez les flèches orientées de North et de Northwest.Puis la descente commence et les voitures dans la rue strient les cases-fenêtres, toujours en cette opposition horizontale et verticale.En bas de l'immeuble la ruche de la vie bourdonne.Un escalier qui mène en sous-sol puis un bus fend l'image,vertical donc suivi d'horizontal.Un autre escalier de balcon et des gens s'engouffrant dans un taxi. Symphonie hyperactive du déplacement La mort aux trousses clot son ouverture par un gros monsieur frappé d'immobilisme en ratant son autobus.Un gros monsieur de connaissance me semble-t-il.

    On a compris que dans North by Northwest ça bougera,mais méthodiquement,presque arithmétiquement. Ca bougera sur la carte des Etats-Unis de New York au Dakota du Sud.En long en large et en travers.En ascenseur inquiétant et hilarant,en voiture ivre sur corniche,en avion et couché dans le maïs sous un autre avion,en train trépidant et plein d'ardeurs.Jusqu'au comble de la verticalité des Monts Rushmore.Tout cela finit par nous donner des sueurs froides.N'allons pas jusqu'à verser dans la psychose.

http://www.youtube.com/watch?v=jIlqatMQSgI Aouh!(ça c'est Leo qui rugit)

8 mars 2008

Terrence Malick,l'aube

        Voici déjà l'avis de Bagheera Badlands, de terrence Mallick ainsi que celui de Jade .Je ne rajouterai finalement pas grand'chose tant je me reconnais dans leurs mots.Les deux jeunes comédiens, Martin Sheen plus âgé  quand même que Sissy Spacek,sont confondants de naturel.Comme le dit Jade on ne peut pas ne pas penser à James Dean,rien que dans la façon de se mouvoir.Comme quoi le cinéma n'a pas besoin d'être plèthorique,la rareté fait parfois le prix des choses(quatre films en 35 ans).La balade sauvage ce n'est ni De sang froid,ni Les tueurs de la lune de miel,ni Bonnie and Clyde.Mais Jade l'a si bien dit...

3 mars 2008

Entêtement à l'extrême ouest

    Avec un peu d'irritation...

         Ce film a bien des qualités,les grands espaces libres,les eaux,les oiseaux et la nature,rude parfois et que le jeune étudiant décide de toucher au plus près.Sean Penn jouit en France d'un énorme capital de confiance.En effet,féroce opposant à George Bush,il ne saurait se tromper.J'avais bien aimé les précédents The Indian runner,The crossing guard et The pledge,ancrés plus solidement dans une réalité de violence et d'enfance meurtrie.Ici la fable ne fonctionne pas pour moi simplement parce que ce jeune homme ne m'intéresse guère.Et c'est bien mon droit de ne pas cautionner le jusqu'auboutisme du héros,suicidaire au fil des jours,ce qui à tout prendre ne me paraît pas la meilleure façon d'en finir.Mis ainsi un peu de mauvaise humeur je reconnais que ce film peut plaire,pas forcément pour de bonnes raisons.Et s'il s'exhalait de ce récit initiatique en quelque sorte un parfum d'une démagogie,mais d'une démagogie branchée qui ne dirait pas son son vrai visage et ses principes.A savoir que seul l'égoïsme transcende la médiocrité ambiante,que les parents sont sinon à tuer,mais au moins à radier,et que "hors de moi-même point de salut".Voilà pour le passif.

     Into the wild reste un grand spectacle malgré la relative animosité qui m'oppose à lui.Au crédit de Penn le souffle de sa mise en scène,les ballades à la guitare,de vieux potes morts ou éparpillés(Roger Miller, Canned Heat),la nostalgie des seventies et ce couple hippie quinqua comme il en est beaucoup,sympa mais pour tout dire un peu vain et artificiel,ressemblant à une attraction touristique.Plus forte me semble être la relation paternelle,voire grand-paternelle entre Emile Hirsch et Hal Holbrook,ce grand comédien peu connu et âgé maintenant.Lourdement symbolique qaund même parfois,avec sa montagne à gravir ou cette chasse à l'élan nauséeuse.N'est pas Jeremiah Johnson qui veut.Ces mots dépassent un peu mon propos et Into the wild mérite un accessit pour qui s'enflamme assez vite dès que s'élève l'altitude.On me permettra d'y voir un brin de jeunisme exacerbé.

28 février 2008

Les trois hommes des deux frères

               On sait que Cormac McCarthy est en passe de devenir très à la mode en France où son dernier livre La route se vend bien,déjà d'aileurs en cours d'adaptation.Personnellement j'avais aimé De si jolis chevaux(film aussi,que je n'ai pas vu) et moins Le gardien du verger,roman déjà ancien.Le grand passage et Des villes dans la plaine forment avec De si jolis chevaux La trilogie des confins,titre sublime qui suffit à faire comprendre que McCarthy écrit sur l'espace américain,revisitant son histoire dans une tradition quasi-faulknérienne mais faut-il rappeler la malchance de ce dernier au cinéma malgré quelques réussites mineures?Les deux frères Coen,peintres pointus et iconoclastes de cette société américaine trop policée,jouissent aussi en France d'un énorme crédit.Je partage mais Non,ce pays n'est pas pour le vieil homme m'a quelque peu décu.A propos du titre je voudrais dire que,baignant danc une culture rock,cinéma et littérature anglo-saxonne depuis toujours,j'ai pourtant l'habitude de citer les titres en français quand la traduction ne dénature pas.

       Bien des bloggers ont déjà écrit sur ce film,des choses souvent intéressantes.Le cinéma des Coen est toujours riches d'idées et d'images fortes.Mes préférés restent Miller's Crossing et Barton Fink.La danse, assez compliquée,des trois personnages du film le sheriff,le tueur et le chasseur,s'apparente presque au cartoon,tant la violence y semble presque hasardeuse mais réelle.La frontière du Mexique,lieu terriblement lié à toute une imagerie western,semble propice à un subtil équilibre pour des héros plus que border line.Hallucinante c'est vrai,comme tous les critiques l'ont dit,la silhouette improbable,lourdaude et cheveux de jais de Javier Bardem et son arme d'un nouveau genre.Ambigu le chasseur car bien des zones sont obscures dans No country.Plus convenu mais crédible Tommy Lee Jones prête son visage las au sheriff,peu loquace.Cette sarabande macabre est un bon moment de cinéma mais j'y croyais trouver une géographie plus abrupte et un désert plus engagé dans la chorégraphie des acteurs.

       En clair je trouve que les Coen ont utilisé l'espace western d'une façon originale qui m'a un peu déstabilisé.De grands espaces,à mon avis,pas tant que cela.Mais par contre l'architecture très Nouveau Monde de ces motels où l'on assassine ne manque pas de piquant.Et ça c'est particulièrement réussi.Les deux loustics savent toujours conjuguer spectacle et "auteurisme".Reste le "problème" de la fin du film, comme l'a bien saisi Dasola.La question reste ouverte?

15 février 2008

Quelques films de Nicholas Ray

      1949,mon maître Humphrey Bogart tourne le deuxième film de Nicholas Ray,Les ruelles du malheur.Le jeune délinquant joué par John Derek,en rupture de société,annonce évidemment La fureur de vivre.Mais le film presque tout en flashbacks est d'une construction que je trouve un peu pesante,ce qui à mon avis l'empêche d'être un grad film-prétoire proche d'Anatomie d'un meurtre,Douze hommes en colère,Le génie du mal.Bogart incarne l'avocat Morton avec ses faiblesses et ses doutes,lui-même issu d'un milieu modeste.Je dirais qu'il est finalement un avatar assez classique de Bogie,l'homme mûr qui s'était "accomodé" du monde dans lequel il vivait et qui retrouve le goût de la lutte.Mais n'st-ce pas le cas de Key Largo,Plus dure sera la chute,et même Casablanca?

     Les ruelles du malheur est aussi un peu l'héritier des Rue sans issue ou Les anges aux figures sales,avec Bogart aussi d'ailleurs mais en gangster d'avant-guerre.Ces films sociaux étaient certes un brin naïfs mais très efficaces,menés par d'excellents Curtiz ou Wyler.La fin des Ruelles du malheur est à cet égard très émouvante encore aujourd'hui.A noter la "finesse" du titre français destiné à faire pleurer dans les chaumières.

     Deux ans avant Nick Ray avait adapté le beau roman d'Edward Anderson Tous des voleurs sous le titre They live by night(Les amants de la nuit).Voir Redécouvrir Anderson .Une histoire de cavale bien sûr,de fuite en avant pour le jeune couple à peine sorti de l'adolescence.Mais Bowie et Keechie ne sont pas Bonnie et Clyde,ni Les tueurs de la lune de miel,plus proches de Romeo et Juliette sur les routes poussiéreuses des années trente dans l'Amérique dépressive.Echec total aus U.S.A. Les amants de la nuit sera repêché par la critique européenne.Annonçant lui aussi une certaine fureur de vivre le héros joué par Farley Granger,est,dès le début étincelant du film,promis au tragique.Contagieux de ce tragique et malgré un très beau mariage de parias,l'une des plus belles scènes de noces que j'aie vues,il contaminera si j'ose dire la toute fraîche Cathy O'Donnell,faisant d'elle une veuve bien précoce.Film noir dont les héros ont presque un visage d'enfant Les amants de la nuit c'est une histoire d'amour que gangsters et policiers sublimeront bien involontairement.

8 février 2008

Bible cinéphilique

A la recherche de John Ford

   

      

             

   

                 Prochainement cet ouvrage extraordinaire qui est aussi un grand bouquin sur l'histoire irlando-américaine, l'exil,la guerre,la famille,etc...Enfin pas si prochainement que ça car A la recherche de John Ford du grand Joseph McBride a autant de pages que la Bible, justement.Me voilà presque au bout de ce pavé passionnant qui ne rend pas Ford plus sympathique mais plus humain peut-être,plus humain c'est à dire plus homme.Ce livre aura déjà eu pour effet de m'empêcher de lire autre chose pendant un mois,mes loisirs étant limités.Le temps est venu maintenant d'évaluer sereinement la filmo de Ford.Pas sûr que ça lui aurait plu tant cet homme s'est évertué à jouer au mauvais coucheur et à l'interviewé désagréable et dédaigneux.A travers la bio de Joseph McBride,très fouillée,il apparaît que derrière le masque hautain et bougon pouvait apparaître(parfois) le créateur,le poète.Car John Ford a su entre les crises et les brimades,réelles,infligées à ses acteurs,et non des moindres,instiller en quelques plans des îlots de lyrisme,de poésie élégiaque et familiale.

     John Ford  reprend à son compte le célèbre adage du poète Walt Whitman "Je me contredis?Très bien,alors,je me contredis.Je suis vaste,je contiens des multitudes".Car rarement créateur aura autant divisé que Ford,adulé,vénéré,vilipendé,humilié selon les films et les époques,et parfoispar les mêmes.Il faut avoir l'honnêteté de dire que ce livre s'adresse aux lecteurs qui ont déjà vu pas mal de films de Ford, s'attardant longuement sur la genèse et les querelles qui ont accompagné beaucoup de tournages.Et,même ainsi,bien des précisions nous échappent.En fait on devrait lire ce livre lors d'un symposium de quinze jours conscré à une rétrospective du maître.Alors,bien vaines nous apparaîtraient les gloses sur le côté réactionnaire voire raciste de certains films,car les mêmes films peuvent la plupart du temps être lus à travers un prisme progressiste.Joseph McBride vous expliquera ça mieux que moi.Je vous recommande aussi chaleureusement un détour chez Inisfree grand fordien de la blogosphère.

    Il faut se rappeler que Ford c'est 55 ans de cinéma du muet aux Cheyennes et à Frontière chinoise,en passant par les films,très nombreux,produits ou réalisés par Ford pour l'Office of Strategic Services,pendant la guerre.Le vice-amiral John Ford tenait énormément à ses deux casquettes,Hollywood et la Navy.Ces deux jobs ne faisaient pas toujours bon ménage et Ford lui-même était tyrannique sur un plateau,sachant parfois larmoyer comme toutes les brutes.A la recherche de John Ford est une somme sur ce cinéaste avec ses rapports de famille,très douloureux,père pas terrible le patron,ses liens avec l'Irlande,pas simples non plus,ses attaches poilitiques curieuses alternant de la gauche à l'ultra- conservatisme. Contrairement à ce que l'on a pu croire longtemps,ce diable d'homme apparaît souvent assez antipathique mais surtout terriblement complexe.Faites-vous une idée!Il faut pour cela un peu de temps,1000 pages bien serrées.En ce moment je regarde Les sacrifiés(48).Mais il y en a tant d'autres.Et beaucoup d'humour.Terminons ainsi en souriant:lors du tournage des Deux cavaliers,en fin de carrière,dirigeant James Stewart et Richard Widmark,tous deux durs d'oreille et portant perruque cause calvitie,Ford déclara "Cinquante ans de putain de métier et j'en arrive à quoi?Diriger deux moumoutes sourdingues".So long.

18 janvier 2008

La Havane vu par Huston

Les Insurgés - Pedro Armendariz, Jennifer Jones et John Garfield

         Les insurgés de John Huston(1949) est massacré par Tavernier et Coursodon dans leur bible Trente ans (puis cinquante ans de cinéma américain).J'ai rencontré deux fois le grand Bertrand et on sait qu'il aime bien avoir raison.C'est vrai que Les insurgés(We were strangers) n'est pas un film passionnant,certaines séquences sont assez plates et la thématique hustonienne de l'échec,célèbre,n'est pas bien illustrée par le simili happy end.Je n'avais jamais vu ce film peu diffusé.Si vous n'avez qu'une dizaine de Huston à voir, manifestement oubliez-le. Mais je sauverai de cette oeuvre moyenne quelques éléments.

         Le plaisir de retrouver Jennifer Jones,passionaria presque malgré elle de la lutte contre la dictature cubaine, celle des années trente car il y en a eu d'autres.Le visage si intéressant du grand John Garfield, moins pourtant que dans ses deux meilleurs films Sang et or et L'enfer de la corruption.La lutte de ces conjurés est certes assez académique et la photo de La Havane peine à rendre l'oppression totalitaire.Ce pendant j'aime assez voir les oeuvres mineures des grands car une oeuvre cinématographique se nourrit aussi de ces imperfections.Et le grand acteur mexicain Pedro Armendariz en chef de la police secrète ne laisse pas d'inquiéter.

P.S.Un grand merci à la sollicitude de mes amis Duclock et Oggy qui s'inquiétaient déjà pour moi.Sympa!

3 janvier 2008

Quand un grand chasseur défend les éléphants

               Des Racines du ciel à Chasseur blanc,coeur noir ou...comme les hommes sont complexes. Le grand, l'immense Huston,grand jusque dans ses ratages(et il y en a quelques-uns), aventurier, buveur, passionné de chasse est bien l'un des auteurs du film tiré du Goncourt de Romain Gary.Il n'est que l'un des auteurs car avec un producteur comme Darryl Zanuck difficile de cerner qui a fait quoi surtout avec un scénariste nommé Romain Gary.Peu importe le film est intéressant même s'il n'a rien à voir avec les grands Huston(Faucon,Volcan,Dublin,Homme qui voulut...).Ne pouvant atteindre à l'amplitude du roman,infiniment plus touffu,le film constitue l'un des premiers films à tendance écolo,à la mode des années cinquante, sans vrai recul sur l'état colonial de l'Afrique qui tirait alors ses dernières cartouches,métaphore un peu osée peut-être.Les racines du ciel pèche surtout par sa naïveté et je me plais à imaginer les conditions du tournage avec de grands sobres comme Huston, Flynn, Welles et Howard,peut-être installés en pays conquis mais là je suis probablemenrt mauvaise langue.Et il ne s'agit pas ici d'avoir un regard moral sur la production.Ce regard moral, justement, sera l'objet du livre de Peter Viertel et de son adaptation,quarante ans après le tournage par Clint Eastwood,Chasseur blanc,coeur noir,passionnante étude en forme de carnet de bord et de portrait de Huston sous couvert d'une fiction très documentée et très incisive.

Trevor Howard, Errol Flynn dans Les Racines du ciel

          Quid du film Les racines du ciel?Revenons à nos éléphants, héros déjà décimés en 53,date où Gary situe le roman.Il y avait beaucoup de personnages dans le livre et il fallut bien sûr tailler dans le vif.La présence d'Orson Welles au générique relève de l'escroquerie car on ne le voit presque pas.Pourtant c'est de lui que le spectateur se souvient le mieux,éternelle injustice des albatros aux ailes trop grandes.Errol Flynn joue un beau personnage alcoolique et blasé qui se redécouvre un idéal tardif et ça lui va plutôt bien.Trevor Howard est moins crédible qu'en amoureux mûr de Brève rencontre ou officier du Troisième homme.Mais la petite troupe des défenseurs de pachydermes tient assez bien la route,tous plus ou moins en fin de course et tentant une ultime renaissance.Car voilà,le monde a vieilli,et les éléphants ne sont pas la priorité absolue ni des colons,ni des gouverneurs,ni des leaders de la toute frémissante émancipation des pays africains,vous savez,ceux qui iront si vite à se transformer en potentats locaux massacreurs.Les racines du ciel fait un peu sage adaptation,moins hustonienne qu'on le voudrait,plus intéressante que les critiques l'ont dit,à mon avis.Présence de Grèco sympathique,la muse de Saint Germain étant très proche de Darryl Zanuck,mais ... cela ne nous regarde pas.

20 décembre 2007

Woody et ses frères

   Prochainement Le Rêve de Cassandre,something completely different.Très différent le dernier Allen,tous l'ont souligné,certains lui reprochant un peu d'avoir quitté Manhattan et son microcosme où il nage si bien et d'autres lui reprochant au contraire de ne pas l'avoir fait plus tôt(avant Matchpoint et Scoop).J'ai vaguement lu qu'il pourrait s'agir du dernier opus d'une trilogie londonienne avec les deux films précités. Aucun intérêt à mon avis de répertorier ainsi les trois films.Grand intérêt par contre de voir Le Rêve de Cassandre que j'écris avec une majuscule car,je l'ignorais,c'est le nom du bateau restauré par les deux frères,Ewan McGregor et Colin Farrell,nouveaux venus chez Woody Allen.Ils sont remarquables et plus encore Farrell dont je trouve que c'est le meilleur rôle,en modeste ouvrier mécanicien.

   Il me semble que Cassandra's Dream est un film sur la culpabilité,mais aussi sur la poisse,le manque de pot qui colle au destin des deux frangins.Pas mauvais bougres mais entrainés par leur oncle autrement moins hésitant,et par la déchéance et la misère pointant son nez,Ian et Terry vont commettre l'irréparable.Et alors?Alors c'est toute la dernière partie de ce rêve de Californie et de fortune qui tourne au cauchemar.Nous assistons  au trouble qui saisit les frères,puis au remords intenable.Dostoïevski n'est pas si loin et l'on pense un peu à Crime et châtiment.Pour ma part j'ai davantage songé au Prince Michkine, L'Idiot,à travers les affres de Terry(Colin Farrell) et ses "offres" de rachat.Très beau film à mon avis,un peu trop linéaire à mon goût,voire un peu trop littéraire mais je ne vais pas vraiment m'en plaindre.Et belle histoire d'amour fraternel et pourtant...

16 décembre 2007

Le vrai du faux,ou billet d'humeur peu fiable

  Bientôt mais rien n'est sûr.Ou tentative de chronique d'un film qui s'échappe, qui nous échappe,et qui se moque bien de nous.Vérités et mensonges,le dernier film d'Orson Welles,mérite bien sûr l'attention.Mais je comprends fort bien que ce film puisse irriter tant cet éloge du faux sonne bizarre et fait du spectateur une sorte de cobaye plus ou moins consentant d'une esbrouffe qui a au moins l'avantage de nous faire entendre une umtime fois la belle voix du géant aux ailes trop grandes.On connaît vaguement le prétexte:une enquête sur le peintre,faussaire de génie,Elmir de Hory à travers le livre de Clifford Irving,auteur d'une biographie de Hory mais aussi "faux" biographe de Howard Hughes,lui-même grand mythomane comme vous le savez.Vous n'avez pas bien compris?Moi non plus.

        Au départ projet de François Reichenbach que Welles devait seulement commenter,puis réaliser sous forme de moyen métrage,Vérités et mensonges finira par devenir un film à part entière,essai cinématographique sur la création et l'imposture,où  nous naviguons sans cesse en eaux troubles entre tous ces affabulateurs dont Orson Welles n'est pas le moindre,il suffit pour ça de  se souvenir de Mr.Arkadin,déjà très complexe écheveau de la saga wellesienne.Ne comptez pas sur moi pour vous dire ce qu'il faut penser de F.for fake.Il ne manquerait plus que ça.Mais ne comptez pas sur moi non plus pour vous dire ce que j'en pense.Je l'ignore.Mais je sais qu'au bout d'une heure environ Welles filme magnifiquement deux minutes et demie de la cathédrale de Chartres entre chien et loup,heure magique,Chartres,oeuvre d'art qui,elle,n'a souffert nulle supercherie et reste un témoignage unique du génie de l'art des hommes.Alors,peu importe la signature..."Maybe a man's name doesn't matter that much".Fascinant autant qu'énervant,Vérités et mensonges nous embobine,mais avec quelle rouerie.

21 novembre 2007

All that jazz

book cover of
Somebody in Boots
by
Nelson Algren

      Nelson Algren(1909-1981),écrivain plutôt délaissé,est l'auteur d'au moins deux romans passionnants. Dans Un fils de l'Amérique (Somebody in boots)publié en 36 sans aucun succès Algren nous entraîne dans la dérive américaine de la Grande Dépression à travers l'univers des hobos,proche des livres d'Edward Anderson ,Redécouvrir Anderson avec davantage de punch,ce qui est normal de la part d'un ancien boxeur.D'Algren Hemingway qui s'y connaissait en livres et en boxe disait "Pour le lire il faut savoir encaisser.Algren frappe des deux mains,il a un bon jeu de jambes et si vpus n'êtes pas vigilant il va vous démolir".Après la guerre Nelson Algren rencontra Simone de Beauvoir et devint pendant quelques années la coqueluche des existentialistes, comme Richard Wright,pratiquement le premier écrivain afro-américain, auteur de Black Boy et Un enfant du pays.Puis le petit monde germanopratin se hâta de les oublier.Mais le plus célèbre roman de Nelson Algren est surtout connu depuis la remarquable adaptation au cinéma d'Otto Preminger.Il s'agit de L'homme au bras d'or où Frank Sinatra donne sa pleine mesure.

       Il y a d'abord le formidable générique animé de Saul Bass et la musique d'Elmer Berstein.Et l'on sait tout de suite qu'on a affaire à une histoire américaine,très,où le personnage qui sort de cure de désintox, mais il pourrait sortir de taule,ou de la guerre,n'aura pas de deuxième chance.Carré,aux riffs inoubliables,cet air de jazz résonne en nous longtemps après le film.Frankie Machine,dit Deal,parce qu'il distribuait les cartes dans un tripot,de son bras habile,de son bras d'or qui lui permettra peut-être de devenir batteur de jazz,de son bras d'or que la caresse de l'aiguille ne tarde pas à courtiser de nouveau,espère pourtant se refaire une existence.Mais Frankie n'est pas un gagnant à la loterie de la vie et les vieux démons lui sautent dessus(old monkey,la vieille guenon,le surnom de la drogue).Si le traitement du sujet fleure bon les années cinquante(on n'est pas dans Panique à Needle Park) l'addiction de Frankie n'en demeure pas moins impressionnante.Il faut voir Sinatra, nerveux, saccadé, profondément ancré dans un quotidien de la déception et de l'incertitude, terriblement humain.Kim Novak dans un joli rôle d'entraîneuse de bon conseil,et Eleanor Parker, parfaite en femme délaissée et prête au pire,complètent la distribution de ce beau film d'Otto Preminger,ce metteur en scène d'origine viennoise et qui débuta près de Lubitsch.

http://www.youtube.com/watch?v=eGnpJ_KdqZE Générique

17 novembre 2007

Doux oiseau de perpète

    Je n'avais jamais vu Le prisonnier d'Alcatraz,film de John Frankenheimer(62) mais connaissais l'histoire de Robert Stroud,54 années de prison,célèbre pour être devenu un ornithologue de renom en cellule d'isolement.L'interprétation de Burt Lancaster fut à l'époque très louangée.La vériré oblige à dire que Robert Stroud était bel et bien une brute,mais une brute intelligente qui devint effectivement une sommité scientifique.Ce film entre dans la tradition du film américain plutôt démocrate(sens américain) et semble vouloir prôner la réinsertion et la seconde chance.Mais voilà ,l'administration reste ce qu'elle est et Stroud mourra en prison,avec un régime quelque peu arrangé mais sans jamais un jour de liberté.A mon avis trop long et n'évitant pas le côté pensum et bien-pensant qui plomba bien des films intéressants,Le prisonnier d'Alcatraz conserve un attrait par l'étude clinique de l'intérêt de Stroud pour les oiseaux,qui devient une passion presque hors norme.Mais allez juger de  la norme quand vous êtes en taule pour de bon.Sur les meurtres commis par Stroud on ne s'apesantit guère même si l'un d'eux concerne un maton particulièrement abject.Par contre la psychanalyse s'invite bien vite dans le scénario.On comprend que Stroud est un fiston à sa maman avec ce que cela implique de domination matriarcale et de déséquilibre chez cet homme,âgé de vingt ans lors de sa première condamnation.Cela nous vaut quelques scènes fortes entre Lancaster et Thelma Ritter,excellente en mère possessive.

   Parmi les banalités au demeurant sympathiques un éditeur compréhensif,une passionnée d'oiseaux qui va jusqu'à épouser le prisonnier.Karl Malden compose un personnage plus ambigu qu'il n'y paraît en directeur de prison,obsédé par une sorte de syndrome Valjean-Javert,mais qu'on ne peut ranger dans la pratique catégorie des vieilles badernes,un peu plus fin que ça.La fin du film en revanche est à mon sens ratée,du moins toute la révolte au péntencier,mile fois vue et revue.J'ai aimé la musique du générique,d'Elmer Bernstein,classique mais très efficace.

12 octobre 2007

Iwo Jima:deux versions,deux versants

      Le dyptique de Clint Eastwood est une oeuvre attachante et originale:conter la bataille en deux épisodes,très différents et pourtant complémentaires.Outre que ces films nous rafraîchissent la mémoire très utilement sur Iwo Jima et le Pacifique dont on connaît mal en France l'importance pour les deux peuples japonais et américains Mémoires de nos pères et Lettres d'Iwo Jima sont indissociables et permettent chacun à sa manière une relecture d'un des grands genres du cinéma,le film de guerre.Traités de manière dissymétrique les deux films constituent les deux faces d'un terrifiant miroir sur l'une des batailles les plus meurtrières du Second Conflit.

    Mémoires de nos pères revient sur un aspect peu connu d'Iwo Jima,à savoir la tournée de propagande de trois des soldats ayant hissé le drapeau au sommet,photographie célébrissime.La manipulation très business,très pro,de ces jeunes gens laisse un étrange gôut de cendres et en dit long sur le désarroi du pays face à la menace nipponne.Les scènes en Amérique sont très réussies et l'on mesure très vite les difficultés de l'après-guerre pour ces soldats dépassés par l'enjeu.Mais si l'on sait qu'il n'y a pas de guerres faciles on sait aussi que les lendemains de guerre ne chantent jamais plus qu'une journée.Clint Eastwood, réalisateur qui a su transcender Hollywood,très américain et en même temps tout à fait capable du recul nécessaire à une réflexion sur cette époque a prouvé avec Mémoires de nos pères qu'il était définitivement inscrit dans l'histoire du cinéma américain dans la lignée de Griffith ou de Ford.

     Lettres d'Iwo Jima est peut-être plus traditionnel mais a l'immense mérite d'essayer d'appréhender le point de vue de l'adversaire.La dignité est le maître mot de ce film.Dignité et discrétion du regard d' Eastwood, dignité du général japonais,patron d'Iwo Jima,plutôt américanophile de culture,dignité de la plupart des personnages,happés par un destin plus grand qu'eux et broyés par la machine de guerre,tout comme leurs homologues américains.Basé sur les propres lettres du Général Kuribayashi le scénario de l'Américano-japonaise Iris Yamashita permet au metteur en scène de peaufiner aussi bien des scènes quotidiennes au fil des jours infernaux vécus là-bas que l'ampleur guerrière de ce cauchemar d'où les soldats japonais n'avaient que d'infimes chances de survie.

    Clint Eastwood dit avoir dirigé des comédiens nippons remarquables de justesse et de sobriété.Au vu du résultat on ne peut qu'acquiescer et s'enthousiasmer pour un film unique,hommage aux combattants,et d'une valeur humaniste universelle.L'édition collector propose des suppléments très intéressants sur les castings,le tournage et la personnalité des vrais protagonistes de cette horreur.Je ne suis pas à priori un fan des bonus mais dans le cas des films de guerre je trouve que l'on gagne à mieux connaître ainsi la trame historique.

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