Cinquante-et-une syllabes
Cinquante-et-une syllabes
Gisent au sol éventré
Refroidies déjà.
Passent ainsi d'autres
Sans le moindre des regards
Sur ces catafalques.
Juste quelques mois
Et d' ignobles automnaux
Nous ignoreront.
Tendre jeudi
Aujourd'hui cest jeudi
Je me souviens des jeux dits d'elle
De nos joutes à muses
Lesquelles étaient parfois
Rétives ou mutiques
Mais nous manquions rarement
Ce bimensuel rond-point
Et exprimions à qui mieux mieux
Parfois à qui pire pire
Notre amour de ces mots
Notre amitié d'Aspho(dèle)
Combien nous nous manque-t-elle?
Alors en votre nom
En votre nom à vous, fidèles
Je voudrais l'embrasser
En ce jeudi sans elle
En ce jeudi sans ailes.
Foggy dew and Happy New Year
Un air d'Irish Trad.
Pour les dûment affiliés
Ou vous qui passez
"bliadhna mhath ùr 2018"
Microguerre
Qelques alexandrins à la manière de Leconte de Lisle. Peut-être certains d'entre vous se souviennent-ils vaguement du Parnasse, ce mouvement littéraire du XIXème. L'un de ses Poèmes Barbares s'appelle Les éléphants. Pour un petit cercle qui s'amuse, pas toujours, à l'écriture j'ai rétréci le propos. Ca donne Les Minuscules. Probablement difficile de faire plus désuet.
Les Minuscules
La modeste prairie est imaginative
L'herbe y est océane et là, sous les brindilles
Les larves sont féroces et la moindre chenille
Combattrait vaillammment en la steppe arbustive
De leurs venin munis de hideux scolopendres
Romaines centuries, belliqueux manipules
Et d'estoc et de taille, escortés de cent iules
Font du sol table rase et du vivant, des cendres
Luisant d'un noir de jais les carabes immondes
Tueurs impénitents immolent vermisseaux
Lucanes oublieux, buprestes du bouleau
Univers souterrain à l'implacable ronde
Seule la gent ailée finira la tuerie
Rémiges et becquées du noir auront raison
Les heures ténébreuses, et la peur à foison
Du ciel ainsi armé subiront la furie.
J'écris
J'écris sur le blues parce que bien que cette musique s'égrène la plupart du temps sur trois accords je suis incapable de la jouer un peu pas trop mal. Et parce que pour le chanter il faut du ventre et du coeur, ce qui doit me manquer. Enfin je me persuade que c'est surtout la voix qui manque. Après tout tout le monde n'a pas eu la chance de crever de faim sur les routes du Sud américain, ni de jouer dans un bouge du Mississippi pour un plat de haricots.
J'écris sur le folk depuis toujours. Je crois que j'écrirais sur le folk même si je pouvais faire autrement. au moins cette question-là ne se pose pas. Je suis un songwriter fantôme, un folksinger virtuel. Mes frères aînés avaient nom Robert Zimmerman ou Donovan Leitch. Et puis d'autres encore plus tard, glorieux, ou pas du tout. Maintenant je cède aux sirènes de la facilité. Un ou deux clics et ils paraissent, folkeux de quatrième série parfois, mais qui me touchent de trois arpèges, me blessent d'un la mineur, me tuent d'une ballade pour une femme partie (régle générale, la femme est souvent partie, ou malade). Le folk c'est rarement du burlesque. Mais ça tombe bien, j'me sens mieux quand j'me sens mal. Et j'écris souvent automne, comme le chante Gordon Lightfoot, dont je préfère la version de Changes à celle du créateur Phil Ochs. Rassurez-vous je dis ça à personne. On en interne pour moins que ça.
J'écris sur les livres depuis que je sais lire. J'ai su lire très tôt et c'est un grand tort. On devrait apprendre à lire sur le tard. Et puis non, on devrait ne jamais apprendre à lire. C'est trop humiliant. On comprend vite qu'on ne saura être aussi inquiétant que Buzzati, aussi lucide que Marai, aussi finaud que Simenon. Donc, disais-je, j'écris sur les livres. Ca m'évite d'écrire un livre. Qu'est-ce que je raconte, là?
J'écris sur le cinéma. Je décortique un film guatémaltèque que j'ai vu un jour seul dans la salle. Oh j'ai pas peur, seul au ciné, ça m'arrive toutes les semaines. J'en parle aussi, du cinéma, assez souvent. Je parle et j'écris, donc je suis. Enfin je suis pas tant que ça, me semble-t-il. Assez pour oublier que j'étais trop jeune pour être le Tancrède du Guépard, et que je suis trop vieux pour être le Prince Salinas d'un éventuel remake. Dieu ou diable nous préservent d'ailleurs d'un tel projet. Voyez...J'écris sur le cinéma.
J'écris, j'écris quelques commentaires sur quelques blogs que j'aime. J'écris parce que d'autres ont écrit. J'écris ainsi sur ce qu'ils ont écrit. Souvent ils écrivent aussi un peu sur ce que j'écris. Vous suivez? Se sentent-ils, se sentent-elles, obligés-ées (inclusive, le ridicule ne tuant pas)? Je l'ignore mais j'aime bien quand ils écrivent, et souvent ce qu'ils écrivent. A quelques-uns j'écris aussi directement mais chut!
De temps en temps, rarement, je me mets à écrire, à écrire tout court. Mais souvent, il me faut bien le dire et l'écrire, je trouve que ça tourne court.
La poésie du jeudi, Edualc Eeguab
Belle semaine puisque je retrouve la Poésie, Asphodèle et tous les rimailleurs qui bien souvent m'enchantent. Comme vous le savez , muses m'ont boudé. Alors j'ai essayé, comme un enfant sans nurse. J'ai bien un peu triché, mais suis resté dans le rythme du haïku 5-7-5. Merci Isabelle, d'un merci qui restera toujours en deça de ce que je voudrais dire. J'ai appelé ça...
Dérober
Ca brasse du vide
Ca veut pas vraiment fuser
Trouver quelque chose?
Quelque chose à dire
Tenant vaguement debout
Si possible drôle
Romanesque, presque
A la rigueur, du burlesque
Qui prête à sourire
Bannir l'incurie
Qui m'occulte les neurones,
Inapte au défi,
Comme à la bonace,
Pire encore, à la ramasse
Plume racornie
Lac inanimé
Inconsolé, morne oiseau
Vallon sans dormeur
Albatros pataud
Pathos d'un loup moribond
Feuilles au tournis
Tous l'ont déjà dit
Soyez maudits vils poètes
Que suis-je sans vous?
Pillard ça et là
N'ai-je fait que dérober
Vous, Prométhéens?
La poésie du jeudi, Edualc Eeguab
Rêve de couleurs
Cartographie, ma jolie
Heureux fleuves bleus.
Doigts sur planisphère
Un enfant, comme envolé
Outre océan, fier.
Roulez roues ferrées
D'autres rives, la cité
Paisible et bercée
Les haïkus de cet asphodélien jeudi, et j'aime de plus en plus cet exercice si ludique, m'ont été inspirés par un très beau film, qui sort complètement de l'habituelle démagogie du cinéma, de son populisme ou de son snobisme. Si vous avez l'occasion, et même si vous n'êtes pas très client du Septième Art, qui reste parfois merveilleux et aux antipodes des défauts précités, allez voir The lost city of Z, qui conjugue aventure, réflexion, profondeur et utopie. Je dédie ces textes à ma grand-mère qui, je devais avoir huit ans, fut très surprise quand je lui demandai, pour mon anniversaire, une "belle carte du monde". Et qui, le mercredi sur le marché de Coulommiers qui sentait si bon le Brie, m'achetait trois petits romans d'aventure, mes premiers voyages autour de ma chambre.
La poésie du jeudi, Edualc Eeguab
Tes pleurs, mon printemps
Demeureront vains, il faut
Cesser de nous voir.
*
Saison, doux réveil
Et la gente fleurie perce
Sous l'astre radieux
*
Dans l'air un refrain
De l'eau, comme un tourbillon
Doux avril revit
Je dédie bien volontiers ces trois petites pièces à Asphodèle actuellement aux intempéries et qu'on a hâte de retrouver.
La poésie du jeudi, Edualc Eeguab
Tes doigts, noir et blanc
Octaves, tant d'émotions
Oui, Rachmaninoff
Je crois que les haïkus n'ont pas de titre. Pas eu vraiment le temps de faire long. Mais comme j'aime Serguei. Puis, prenant conscience de ma pingrerie...
Elle a dit -"paresse"
"C'est pas un peu court, jeune homme?"-
-"Mais bien sûr. Pardon."-
Haïku de l'an neuf
A vous tous, le mieux
L'Ecclésiaste a bien raison
Tout sera à l'heure
L'une de mes chansons de référence. On peut compter sur Bruce pour me comprendre. Roger McGuinn (The Byrds, autre prestige à mon coeur) le rejoint. Vous savez bien que Turn, turn, turn... Et que cela tourne bien pour vous 2017!