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BLOGART(LA COMTESSE)
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7 avril 2013

Je les ai donc lus.Tome 1: Guillaume

            J'en avais assez d'entendre leurs pubs annuelles,mais aussi de l'attitude méprisante de certains.J'ai donc pris mon courage à deux mains et décidé de les lire tous les deux.Mais si,vous savez bien,tous les deux.Hola,pas tout,comme vous y allez! Non,un de chaque.Non,je ne les ai pas achetés.Je ne soutiens pas l'édition française à ce point là.On m'a prêté un Guillaume. Lequel,ça n'avait pas d'importance.Après une bonne âme me prêtera bien un Marc.Je suis tombé sur Sauve-moi.Etait-ce meilleur ou pire que d'autres?

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               400 pages qui se lisent très vite mais dont je ne dirais pas qu'elles se dévorent.Dévorer un roman supposerait un appétit aiguisé par l'intrigue ou l'ambiance,un goût prononcé pour le style,un plaisir du suspense ou de l'évolution des personnages.C'est tout de même très loin d'être le cas de Sauve-moi.Plutôt une impression de plat insipide,qui à aucun moment ne m'a intéressé,une sorte de fast food de papier,du fast reading en bon français.On ne s'y ennuie même pas vraiment.Il m'a semblé être resté à la couverture dans un point livres d'une grande gare.J'attends mon train et je n'ai rien à lire,enfin rien d'autre et ce foutu train est en retard,alors je continue à flotter,pas à naviguer ni à ramer,ce qui aurait eu le mérite de stimuler des neurones qui n'auront rien gagné à ce jeu.Rien de rien.Sur le livre que dire? Que ça se passe à New York,c'est plus porteur que Roubaix.Qu'un beau médecin américain tombe amoureux d'une jeune Française à deux jours de son retour en France.Qu'il y a un soupçon de fantastique inconsistant.Que ça ne m'a à aucun moment attiré et que je n'ai pas de temps à perdre.

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          Cependant, voir dans ce même train qui a fini par arriver,ou dans un square quelqu'un lire Guillaume Musso,ça ne me déplait pas réellement.Ce sera toujours mieux que...,mieux que quoi d'ailleurs.Je sais pas,mais mieux...

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9 mars 2013

Sculpteur de maux

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                               Quatre récits composent cette ballade aux trois quarts italienne (d'où le clin d'oeil au Viaggio de  http://chezmarketmarcel.blogspot.fr/ ) de Laurent Gaudé,un des auteurs français que j'apprécie. Cette phrase,je l'ai écrite après avoir lu trois de ces textes.Maintenant que j'ai lu le quatrième je n'hésite pas à ranger Gaudé au firmament des écrivains français actuels.La mort accompagne les héros des ces histoires,elle leur tient la main,au long des fleuves de ténèbres et de boue,omniprésente annonciatrice des charniers hors du temps.Le style de Gaudé est toujours si riche,en hommes et en dieux et en diables.Cet auteur là est lui-même de glaise et de sang,et comme ça se sent dans ses livres, particulièrement dans ce somptueux carré,que je n'ose qualifier de nouvelles,terme parfois un peu précieux et alambiqué,bien à tort d'ailleurs.

                     Les oliviers du Négus,c'est l'Italie sinistrée après l'Ethiopie,une Sicile mortifiée qui semble ignorer le Prince Salinas,ce guépard éclairé,bien que nous soyons maintenant dans l'Entre Deux Guerres.Le catafalque de la cathédrale de Palerme,le roi des Deux Siciles,Frédéric II,Zio Négus le vétéran d'Abyssinie et le narrateur nous plongent aux arcanes de cette terre,toute de pierre et de lumière, baignée de tant d'obscur.L'écriture,je n'y reviens pas,elle est magnifique.

                     Le bâtard du bout du monde nous ramène plus au Nord,quand Rome commençait à se gangréner et dont ce centurion honnête et rude préfigure l'agonie.Lucius,retour d'une lointaine et froide Calédonie,l'Ecosse,le mur d'Hadrien, presque à lui seul, endosse les malheurs de l'empire romain.Au contact des Barbares,l'homme s'est endurci sur les chemins boueux de Germanie et de Gaule.Lucius a tué,beaucoup, et ce fils de personne,né dans la poussière des quartiers populaires parmi les chiens faméliques et les esclaves,de retour sur l'Aventin,clame son amour pour sa ville,Rome,lascive et putassière.Ses larmes scelleront le sac de Rome. Quarante pages,un Tibre de passion,de terre et de douleur.

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                  Je finirai à terre nous transporte dans la France de 1914,qui s'y connaissait en boue et en douleur,dans l'Artois voisin de ma Picardie. La violence ne le cède en rien à Rome et Laurent Gaudé revisite en quelque sorte le mythe du Golem, né, je pense, en Mitteleuropa.Gaston Brache,soldat,comprend que la terre de France,meurtrie et mutilée,a créé un sur-être de glaise et de feuilles, destiné à punir les hommes,ces matricides.

            J'ai écrit ici-même à propos de la Mafia qu'aucun roman ne lui rendait,si j'ose dire,justice.Car le sujet est fort.C'est fait. Vingt-quatre pages de Tombeau pour Palerme,et c'est le plus beau texte que j'aie lu sur l'hydre assassine.Nous accompagnons pendant quelque temps un juge anti-mafia qui tient en personne le sinistre compte à rebours le séparant de sa propre exécution.On comprend que c'est Paolo Borselino qui narre la chronique de sa mort annoncée.Carlo Alberto Dalla Chiesa,Giovanni Falcone y sont nommément cités.D'autres aussi...Dédié par l'auteur "Aux seuls véritables hommes et femmes d'honneur de Sicile", ce récit est splendide de retenue et d'une ampleur inouie.

7 mars 2013

Harry dans tous ses états

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                        Grand succès actuel ce livre n'est pas un très grand livre.Mais il a une qualité non négligeable, il se lit avec un vrai plaisir simple,celui de se confronter à une embrouille policière efficace.Habilement construit,ce pavé de 650 pages nous emmène en Nouvelle-Angleterre et veut mêler adroitement et à sabots pas toujours d'une exemplaire finesse,le vertige de l'écriture,le roman dans le roman,la sociologie d'une petite ville du New Hampshire,les rebondissements abracadabrants. Marcus Goldman,écrivain est amené à enquêter sur son mentor Harry Quebert,écrivain lui aussi mais sec depuis 33 ans,depuis la disparition de Nola, quinze ans.Nola dont on vient de retrouver le corps dans le jardin d'Harry.Joël Dicker joue sur différents tableaux avec plusieurs coupables possibles,base de tout polar,mais aussi avec une variation sur l'acte d'écrire,pas mal fichue d'ailleurs.Ce qui fait qu'à la fin on ne sait plus très bien qui a écrit quoi.Mais c'est bien troussé,d'un abord très aisé malgré les drames.Il me semble toutefois que l'Académie Française a été un peu généreuse en couronnant La vérité sur l'affaire Harry Quebert.Pour le Goncourt des Lycéens on comprend mieux.N'ont-ils pas l'âge de la victime?C'est donc à double titre que ce roman rejoint le sympathique challenge de Laure(Ma danse du monde)

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         Pourquoi ce roman a-t-il rencontré une telle audience?Et pourquoi les détracteurs sont-ils montés au créneau?A mon avis ce livre remplit son rôle presque à l'excès,la roublardise de l'auteur,ou son savoir-faire,c'est selon,permettant à tous les lecteurs de traverser ce récit au galop.Pourtant il ne manque pas d'une certaine complexité,avec de nombreux retours et une constante oscillation entre Quebert et Goldman,le suspect et l'enquêteur,tous deux aptes à bâtir des histoires puisqu'écrivains. "Un bon livre, Marcus, est un livre que l'on regrette d'avoir terminé".On peut voir les choses comme ça.De toute façon il n'y a pas de mal à se faire du bien et les lecteurs plutôt satisfaits,j'en suis,oublieront vite cet ouvrage agréable et sans séquelles.

      Polémique puisque polémique il y a eu.Certains critiques,non des moindres,Nouvel Obs. par exemple,et d'autres,ont cru voir dans La vérité...  l'ombre de Philip Roth.C'est faire beaucoup de place médiatique à Joël Dicker,bon faiseur.Comme souvent je pense qu'il n'y a ni excès d'honneur ni indignité dans ce livre.Pourquoi Roth,le maître absolu de l'écriture nord-américaine,version Est?Parce que,dixit Obs.,l'affaire se passe dans une petite ville universitaire de la côte atlantique.Parce que Quebert est un intello,prof de fac,soupçonné,comme tout le monde ou presque,d'obsessions sexuelles.Parce que comme Philip Roth,il fait partie de la longue lignée de l'écriture juive de Nouvelle-Angleterre.Parce que la transmission des générations y tient une grande place,le relais Harry-Marcus. Tout ceci est à mon avis sans intérêt.Plus sévère,mais plus juste,l'accusation d'easy reading,péjorative mais qui m'a semblé évidente, un peu comme l'easy listening,courant musical un peu simpliste,mais pas forcément bouillie musicale dans l'ascenseur.En conclusion,lisez "quand même" La vérité...On a tous ses faiblesses.Et surtout,qui de nous est toujours un aigle?

Deux autres avis parmi les très nombreux sur les blogs:

http://touteseule.over-blog.com/article-dicker-joel-la-verite-sur-l-affaire-harry-quebert-115940850.html

http://meslectures.wordpress.com/2013/01/06/la-verite-sur-laffaire-harry-quebert-joel-dicker/

6 février 2013

Ce qu'il advint du lecteur

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                       Goncourt du premier roman que j'ignorais Ce qu'il advint du sauvage blanc m'a été judicieusement conseillé.Et j'en suis ravi car voilà un vrai plaisir de lecture,qui se dévore avec enthousiasme,intelligent et gentiment érudit,historique et exotique sans les colifichets souvent inhérents aux romans sur le passé.On pense à Robinson à la vue de ce matelot abandonné sur une côte australienne peu amène.Mais on est assez loin du classique de Daniel Defoe.Ce dernier était seul,longtemps,ce qui n'est jamais le cas de Narcisse Pelletier en cette moitié de XIXème Siècle.Très vite il se retrouve entouré d'autochtones,assez frustes,et surtout quasi indifférents.Il vivra cette situation originale dix-sept ans.Vraisemblablement à peu près adopté par la tribu à force,mais nous n'en saurons guère plus.Grand étonnement:dans ce genre de récits on s'attend à voir le naufragé soit massacré,soit emprisonné,soit honoré,soit déifié.Ici rien de tout cela et François Garde ne nous livre que les premières semaines,assez rudes cependant.

                  Un montage fait alterner les ennuis insulaires de Narcisse avec sa réinsertion prise en main par Octave de Vallombrun,un voyageur éclairé,qui le ramène en Europe et essaie avec beaucoup de bonne volonté,d'abord de reconstituer son état-civil,puis de doucement le réintégrer au siècle.Objet de curiosité,on pense toutes proportions gardées,à Elephant Man,puis de condescendance,et d'exploitation,notre ami Narcisse retrouve un tarvail en bor de mer,ce qui à tout prendre est l'univers qu'il connait le mieux.Vallombrun,lui,se heurte à la communauté scientifique pas plus accueillante que les sauvages d'Océanie.

             C'est l'occasion pour François Garde de réfléchir et faire réfléchir sur l'adaptation de l'Européen chez les primitifs,et sur ses capacités à faire la route à l'envers.S'inspirant d'une histoire,ou de plusieurs,semblables,l'écrivain nous dépayse dans le temps et l'espace,des antipodes aux côtes charentaises.Parmi les paradoxesde ce roman,c'est finalement l'Impératrice Eugénie qui,en son palais de Compiègne,saura le mieux touchet cet étrage voyaguer sans bagages.L'on se prend d'affection pour les deux héros,qui apprennent à se comprendre,mais plus encore à se respecter,à défaut de se comprendre vraiment.

http://enlisantenvoyageant.blogspot.fr/2013/01/ce-quil-advint-du-sauvage-blanc.html Keisha a aimé aussi

14 novembre 2012

A l'orée du mépris

           Attention terrain glissant.J'ai donc lu Les lisières à peu près comme tout le monde,pas trop de mon plein gré mais,bon,on me l'a prêté.C'est déjà ça.Le pire,si j'ose dire c'est que c'est pas un mauvais livre.Cependant,il était un peu temps d'en finir tant le roman d'Olivier Adam conjugue un réel talent et une arrogance pas possible.Pas envie de dîner avec lui et vu ce que j'ai lu ce serait probablement réciproque.Olivier Adam a pas mal promené sa carrure sur les plateaux télé,ceux qu'il n'aime pas beaucoup dans son livre.Il est fatigant,Olivier Adam,il n'aime guère de monde,et surtout pas Olivier Adam.Il est en même temps plutôt malin,Olivier Adam et il sait retourner les choses en sa faveur sans en avoir l'air.Il tient un peu du prestidigitateur.J'aimerais en dire du mal,je vais le faire,mais avant je suis obligé d'en dire pas mal de bien.Si vous croyez que ça m'amuse.

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          Roman d'expérience,Les lisières raconte la vie d'un jeune quadra,milieu culturel,romancier lui-même,scénariste,branché du bon côté,tolérant mais ne supportant personne.Il a quitté Paris,c'est plus possible Paris,tu t'rends compte, pour la Bretagne.En divorce et souffrant de la situation il a décidé de revenir en cette fameuse lisière,la banlieue parisienne.Le mot est lâché.Retrouvant ses parents,le père avec lequel il est en conflit larvé,la mère effacée et très malade.Et la tendresse,bordel?Il trouvera moyen de nous faire presque croire que sa tendresse filiale,à lui,est d'une autre trempe.Et que,de toute façon,on ne peut pas comprendre.

        Paul en veut à son père de ne pas avoir su l'aimer,possible,mais plus encore de se laisser aller avec l'âge à des idées pas bien, c'est à dire des idées contraires à lui,Paul.Paul,lui,il sait ce qui est bien.Olivier Adam,aussi,manifestement.Et il ne se prive pas de nous le faire savoir.Et là,chose rare,j'ai terriblement envie de le frapper,Paul,pour le punir de toujours avoir raison.Parfois il a vraiment raison.Oh et puis qu'est-ce que c'est compliqué.Car voilà,derrière ce qui tient parfois du fatras prechi-precha pas mal démago quand même,se trouve Olivier Adam,écrivain et très bon qui plus est, quand il décrit ses si difficiles rapports avec son père.Ou quand il revient sur la mer qu'il aime longer et où il fait du kayak pour évacuer ses larmes. Qu'on se le dise,Olivier Adam est un être humain. Un gars qui fait du kayak en Bretagne et boude les salons ne peut être totalement mauvais.

          Mais,car il y a un mais,il m'énerve grave,Paul Olivier Adam (si en plus ils s'y mettent à trois).D'abord il use de facilités et ne nous épargne pas ses sarcasmes littéraires ou sociaux.Guillaume Levy et Marc Musso en prennent un coup.Ca m'a presque donné envie de les lire.Facile,ça,Olivier.Quand il revoit quelques copains de lycée,vingt ans après,il ne fait guère dans la sympathie.Mais comment lui donner tort,c'est souvent une terrible épreuve que d'être confronté à l'échec des autres,qui vous rappelle fâcheusement le nôtre,dans un registre différent,en mieux,ça va de soi.Il y a un peu de Paul en moi,et ça ne me plaît pas,il colle un peu,Paul,et je n'arrive pas à m'en débarrasser totalement.A lire,donc,Les lisières?

      Cependant Olivier Adam,si vous ne m'insultiez pas toutes les quatre pages environ,je finirais par apprécier.Est-on méprisable et nanti parce qu'on ne lit pas le même quotidien?D'ailleurs je n'en lis pas.J'ai parfois eu l'impression d'en prendre plein la gueule, probablement éteint puisque vous êtes éclairé.Votre hémiplégie a fini par m'écoeurer.J'en ai eu marre qu'on me donne des leçons.Si vous ne m'aimez pas,je ne vous aime pas non plus.Mais les baffes,c'est vrai que vous vous les mettez fort bien vous-même.Et c'est diabolique.Vous savez à qui vous m'avez fait penser,Olivier?A ces prêcheurs américains si prolixes et si prompts à mettre en garde les hommes contre les diableries.Un jour on à la preuve de leur duplicité.Ils se mortifient alors,s'accusent du pire,reconnaissent leurs torts à grands renforts de larmes.Et ainsi,les applaudissements redoublent et l'opinion leur redevient très vite laudative.Et les différentes démagogies de se mordre la queue.

    P.S.Accessoirement,et bien que ça m'écorche de l'écrire,vous avez un beau talent d'écrivain,Monsieur Olivier Adam.

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7 novembre 2012

Pour seule richesse

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Pour  seule richesse dans ce livre...la littérature,de la plus belle eau qui soit.Troisième roman,pour moi,de Laurent Gaudé,Pour seul cortège est un roman d'anthologie dont la relative brièveté ne freine pas l'envol au coeur de la grande histoire,celle qui donne à réfléchir sur le pouvoir et sur le destin,à travers la mort d'Alexandre,phare de toute une époque et aussi encombrant mort que vivant.Le livre est admirable et je suis en désaccord avec ceux qui aiment le livre mais le trouvent somme toute d'une grande froideur.Pour moi il est possible d'être ému par le style et le tragique de cet ultime voyage d'Alexandre.

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Terrassé en Babylone lors d'un banquet Alexandre se meurt sous les fièvres.Que va devenir l'Empire avec ces prétendants à la succession et ces déchirures immédiates?Et quel est le rôle de cette princesse tirée d'un temple exilé que l'on ramène près du moribond?L'aventure,car c'en est une,des plus fidèles des compagnons de l'Empereur,se vit à travers les interventions de différents personnages tel un choeur antique,une polyphonie de l'épopée,justement évoquée par plusieurs critiques.
 
Certains parlent à propos de Pour seul cortège de clichés désuets et j'en suis surpris.J'ai un point de vue radicalement opposé.J'y trouve  le souffle romanesque allié à l'érudition qui fait de ce livre un "western" antique,une fresque mais pas croulant sous les hyperboles pédantes,un écho d'un empire qui avec la fin de son maître risque de se déliter,et des personnages de haut rang susceptibles comme tout un chacun de jalousies et de trahisons.Je suis sensible à la langue et à la sonorité  et ainsi je trouve que les noms propres des héros sont déjà pure poésie à mes oreilles de lecteur.J'ai pris plaisir à lire quelquefois à haute voix.Prononcer ainsi Tarkilias, Aristonos, Moxyartés est une jubilation,partie prenante de la lecture.Les lieux aussi exercent leur magie,l'Hyphase,l'Elymandros...Mais qu'on ne s'égare pas,Pour seul cortège n'est pas un exercice de style avec sa brillance mais aussi sa vanité.
 
Le long périple posthume d'Alexandre dont le corps est symbole,dont le corps est enjeu,devient sous la belle plume de Laurent Gaudé un extra-ordinaire récit où coule le sang des ambitieux et où frappent l'un contre l'autre les frères d'armes d'un passé récent.La cruauté n'est pas sans grandeur et la mort qui rôde a quelque chose d'exaltant.Certains blogueurs glissent une ou deux citations avec gourmandise.Ils ont bien raison mais je serais en peine d'en faire autant tellement ce livre s'élève au dessus de la mêlée littéraire.Une phrase toute simple m'a bouleversé par son universalité."Ce qu'ils on fait aujourd'hui,je l'ai fait hier" à propos des complots qui suivent forcément la mort d'un chef.Enfin,puisqu'il faut en finir,le personnage féminin est d'une richesse inouie,à lui seul justifierait les dithyrambes,le destin de Dryptéis étant âpre et barbare comme seuls savent l'être les dieux.
 
 
Ma note (je ne note jamais):17/20
Merci à Oliver de Price Minister qui a permis à bien des lecteurs ce beau voyage.
11 septembre 2012

Lycanthropicardie

 DUMAS

                 Le meneur de loups nous entraîne dans les forêts d'enfance d'Alexandre Dumas.Du côté de Villers-Cotterets au XVIIIème Siècle, Thibault,un modeste sabotier un peu trop envieux va vivre pendant juste une année une malédiction,assez proche de celle de Faust.Un soir, un loup noir se présente à lui et lui propose un pacte : la possibilité de faire des voeux, à condition qu'à chaque voeu, un peu de sa chevelure change de couleur.Son pouvoir sera immense.Il pourra se venger des humiliations du lieutenant de louveterie,devenir riche, épouser la charmante Aignelette.Mais à pactiser avec le Diable on risque gros et Thibault sera conduit à la surenchère,voyant ses souhaits exaucés mais aussi dévoyés.Ses amours,ses rêves de puissance et de conquête vont lui échapper de bien lupine façon.

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           La forêt de Retz,Dumas l'a arpentée en ses tendres années,né en à Villers-Cotterets en 1802.Ecrit en 1857,Le meneur de loups est une incursion dumasienne dans le conte fantastique,assez rare dans sa prolifique bibliographie.L'auteur narre cette histoire à travers le garde-chasse Mocquet qui l'aurait-lui même dite au jeune Dumas de quinze ans.On comprend très vite que le défaut majeur de Thibault,cette envie maladive,deviendra une véritable haine du genre humain et finira par le briser dans ses lubies d'ascension sociale.Mais le récit est bien mené,comme la meute, non sans drôlerie.Comme je l'ai vu sur plusieurs notes il serait intéressant de lire Le meneur de loups en pleine forêt de Retz,Dumas ayant soigné la toponymie,très fidèle à la belle Picardie du Sud,verte, ombrageuse et propice à courre...le cerf,le loup et le sabotier.

         En 2002,bicentenaire oblige, on a déplacé le tombeau d'Alexandre au Panthéon.Je l'aimais mieux dans son pays d'Ourcq.Mais les Amis d'Alex l'ont plébiscité.Pourquoi ne pas réunir tous les grands écrivains en un seul lieu? Et ainsi " jacobiniser" davantage notre pays en une sorte de Père Lachaise Litterary Land.

12 août 2012

Il me semble en effet qu'en vieillissant...

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                         Voilà un deuxième roman français qui m'enchante en quelques semaines.L'âge venant,me rapprocherais-je d'une littérature que j'ai somme toute assez peu fréquentée.Auvergne,début des années soixante.Albert est ouvrier chez Michelin,et la télé arrive chez lui,aujourd'hui même où Cinq colonnes à la une diffuse un reportage sur l'Algérie.On doit y voir son fils aîné Henri. Gilles,autre fils d'une douzaine d'années ne s'intéresse qu'à la lecture,Balzac surtout.Drôle d'idée, non? Suzanne son épouse semble ailleurs.Un couple ordinaire de ces années, l'ascenseur social fonctionne assez bien,mais les armes aussi.Albert est un homme bien.Mais son goût de la vie vacille alors que le monde bascule.De toute façon le monde,notre monde bascule un peu tous les jours,plus ou moins.Le roman de Jean-Luc Seigle est un très beau livre qui parvient à l'émotion sans débauche d'effets spéciaux,sans grandes scènes racoleuses.La tragédie intime d'un homme simple se cristallise un jour de juillet 61.Se pose à lui la question essentielle:a-t-il aimé la vie et les autres,ses proches,si loin finalement?

              En quelques heures Albert prendra conscience d'un présent pas très enchanteur,notamment à s'occuper de sa vieille mère atteinte d'Alzheimer,comme on ne le disait pas,et d'un avenir flou.Une scène très belle où il lave entièrement la vieille dame est d'une pudique beauté très émouvante.Travailleur obstiné,calme jardinier du dimanche,paisible mais volontaire,Albert remet en cause sa paternité, son mariage,s on existence.Parabole aussi que cette irruption de l'objet télé dans l'univers familial.C'est très discret, c'est néanmoins très prégnant.La Guerre d'Algérie est là,tapie au coeur de cette campagne auvergnate et il me semble m'en souvenir très bien,moi qui n'avais que onze ans à cette époque.En vieillissant les hommes pleurent,c'est un très beau titre pour un livre.Un livre qu'on achèterait rien que pour son titre...et qu'on aurait la très bonne idée de lire.Profond,profond et durable.

          

2 août 2012

Un compagnon de Dumas

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              J'ai voulu lire La grande sonate par amitié envers Alexandre Dumas à qui je dois tant.Claude Schopp est un lettré,un universitaire qui a entre autres consacré bien du temps à Dumas,sa vie,son oeuvre,véritable exégète du fameux quarteron, notant, annotant, classifiant les éditions, les centaines de textes.Un travail de bénédictin au service du roman d'aventures.Mais c'est le Schopp romancier que j'ai abordé,La grande sonate étant une biographie libre du compositeur méconnu Charles-Valentin Alkan, contemporain des Chopin, Liszt, Berlioz.J'espérais nager en plein romantisme,l'un de mes péchés mignons.Mais ce n'était pas le genre d'Alkan,surdoué tant comme auteur que comme interprète,plutôt austère, probablement à cause de ses origines hébraïques.Bien qu'Alexandre Dumas fasse une apparition on est loin de la truculence gasconne,et même de la flamme qui caractérisa la plupart des Romantiques.

 Liste des participants

        Alkan,dont j'ignorais le nom,passa sa vie à l'étude de la musique,vivant proche de la solitude malgré ses connaissances nombreuses.Souvent confiné,il faut bien dire que l'univers quotidien d'Alkan manque singulièrement de brillance et que ce n'est pas l'idée que je me fais du XIXème.Je vous propose néanmoins quelques notes du compositeur,à défaut d'un grand livre flamboyant. Cet Allegro Barbaro portant bien son nom.Pourquoi pas? Mais on est loin de la bataille d'Hernani et des amours des enfants du siècle,malgré une George Sand plus vraie que nature.Reste un livre estimable,dont j'aurais pu me passer,ce qui n'engage que moi.D'où l'intérêt des bibliothèques municipales,que l'on ne défendra jamais assez.

5 juillet 2012

Le prompt Guy court

           La Fête des Pères m'a valu L'art français de la guerre,et du coup vous vaut en titre cette drôlissime contrepéterie.Je n'étais guère emballé,la littérature française actuelle n'encombre pas mon espace livre.De plus,le soupesant,je comptai 630 pages.Papa modèle(?), je remerciai avec effusions,craignant le pensum.Hors,le Goncourt 2011 est un roman extraordinaire,de loin ce que j'ai lu en France de mieux depuis des années.Alexis Jenni,prof de 48 ans,publie ainsi son premier roman.Le choc est de taille,de masse et d'estoc,pour rester dans la métaphore militaire.

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       Parcours en parallèle de deux personnages.Il n'ont pas le même âge mais leur rencontre s'avèrera essentielle.Un jeune homme mal dans sa peau et un ancien militaire se trouvent un point commun,la peinture,le dessin plus précisément.Ils ont beaucoup à s'apprendre,l'un écrira l'histoire de l'autre,l'autre qui le formera à l'art de peindre.Mais ce résumé est infiniment réducteur.L'art français de la guerre tient de l'épopée,de l'aventure,de la fresque qui jamais ne s'égare,rare pour une fresque,mais aussi du journalisme écrit.Le théâtre militaire tragique et grotesque,tant de l'Indochine que de l'Algérie,y est stupéfiant d'empathie et de complexité.Je pense n'avoir jamais lu ça.

          Dans ces chapitres guerriers les hommes sont passionnants,grandioses et velléitaires,les interrogatoires dans une villa mauresque d'Alger,comme les mines meurtrières du Tonkin y ont des accents universels.Mais tout ceci est un peu court pour signifier mon enthousiame envers ce roman magnifique,si bien construit où la langue française,un personnage à elle seule dans ce récit de la fin des colonies,est superbement mise en valeur.Plongez dans L'art français de la guerre,vous aimerez et le narrateur,et Victorien Salagnon.Et d'autres qui traversent la Haute-Région ou la casbah,des braves types conduits au pire.Le pire ce n'est pas toujours l'autre même si l'autre sait l'odieux tout aussi bien.Impossible dialogue," la mâchoire figée dans un spasme galvanique". Retrouvailles de la Résistance, douloureuses et personnages secondaires passionnants,le médecin juif grec ou l'ami Mariani,milicien dans l'âme et,le croiriez-vous,intéressant.Une belle critique cinématographique aussi quand le narrateur chronique le film La bataille d'Alger avec lequel il n'est pas tendre.

      L'autre art dans L'art... c'est le dessin et l'encre notamment avec des pages entières sur cette sorte de calligraphie du minimum, car Salagnon a beaucoup appris de vieux maîtres vietnamiens,accessoirement combattants du Vietminh.L'homme est ainsi fait.Les gens du Prix Goncourt,de fieffés lecteurs quoiqu'on en dise,ont bien fait d'éclairer ce roman,de loin le plus fort en France depuis longtemps.Certes j'en lis peu.Mais c'est mon avis.Et encore une fois quelle merveille que la langue française chantée par Alexis Jenni et ses personnages.

19 avril 2012

Charly le Calamiteux

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                    Pochade de potache.Palsambleu,certes,mais rudement troussée et qui bouscule l'Histoire,tous cotillons voltigeant.Les premières pages me sont apparues presque trop appliquées,comme un numéro de music-hall un peu laborieux,Teulé est d'ailleurs un peu un enfant de la télé.Puis j'ai trouvé que la langue était belle, verte certes,mais d'un picaresque qui parvenait à faire bien rire des Guerres de Religion,particulièrement hilarantes, il est vrai.Certains se sont offusqués de ce qu'ils considèrent comme une pantalonnade.Pas si faux mais qu'importe.Charly 9 m'a au moins aidé à comprendre le rythme d'une époque,très accélérée par rapport à la nôtre.Notamment les derniers Valois,François II,roi à quinze ans mort à seize.Son frère Charles IX,roi à dix ans,mort à vingt-quatre,et n'ayant survécu que deux ans à la Saint Barth(oui,je suis un peu snob,je dis Saint Barth).Mais vraiment quelle belle histoire de famille,aimante et tendre!

              Quand on parle fin de race on peut penser que ça s'applique tout à fait bien à cette invraisemblable fratrie sous la houlette de la Mère Catherine de Médicis,le vrai patron de ces Valois hors d'usage.J'ai oublié de vous présenter Alençon,le benjamin,aimablement surnommé Hercule étant donné sa difformité.Les morceaux de  "bravoure" sont légion dans les deux dernières années de la vie de Charly.A condition d'avoir de la bravoure une approche un peu particulière.Quand il joue à la paume avec ses deux frères et son cousin Navarre,qui entre parenthèses, pue l'ail à cent lieues,pendant que le royaume est à feu et à sang.Quand il chasse le lapin ou le cerf dans les salles d'apparat du Palais du Louvre,égorgeant au besoin lévriers et valets.Ou ses ratés de faux monnayeur.

            Certains ont détesté,invoquant les incroyables libertés avec l'Histoire.Vraiment détesté parfois.Je ne prends pas Teulé pour un très grand écrivain mais j'ai passé un très bon moment à lire ce que je considère pas  si éloigné de la vérité historique telle que la concevaient par exemple les Monty Python.Après tout l'Histoire en a vu bien d'autres et les lecteurs sauront faire la part des choses,sans être spécialistes de cette époque si brutale et si expéditive.

Un autre avis favorable  http://www.laruellebleue.com/6088/charly-9-jean-teule-julliard/

Un avis très défavorable http://mesaddictions.wordpress.com/2011/04/17/charly-9/

30 janvier 2012

Billet paresseux,c'est la faute à Rousseux

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           Bref et paresseux car ce délicieux petit roman de 92 pages a déjà été fort bien présenté par Dominique d' A sauts et à gambades .De l'utilité des blogs car j'ignorais complètement ce petit bijou.Joli bouquin mutin, original,frondeur,une fable,un conte.Si vous voulez rencontrer deux imbéciles...ce qui est souvent réjouissant.

Jean-Jacques Un clic pour Dominique

 

 
 
 
17 novembre 2011

L'homme en ex-île

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                S'il y a un chanteur français qui me paraît digne du joli challenge initié par Claudialucia il me  semble que c'est lui.Cela n'engage que moi(phrase que j'écris souvent,très souvent,nécessaire,nécessaire).Il me faut vous dire que j'écoute peu de chanson française,sauf les piliers,bien entendu.Pom,pom.J'ai choisi la plus évidemment liée au Romantisme,et pour cause...Mais bien d'autres chansons de William Sheller,par ailleurs grand musicien et compositeur "néo-romantique", feraient l'affaire.Je suis allé à Guernesey et Hauteville House peut-être plus encore la faute à Sheller que la faute à Hugo.La chanson Guernesey,extraite de l'album Univers, a été coécrite par Sheller et Lavilliers.

http://youtu.be/MG98ocg8cA0  Guernesey    William Sheller

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3 novembre 2011

On appelle ça pudiquement "le poids des traditions"

L'enfant de sable

           L'enfant de  sable est un roman déjà ancien de Tahar Ben Jelloun.Souvent dans ces livres de l'autre côté de la Méditerranée on parle de la lourdeur de la tradition,terme aussitôt tempéré par une nuance de compréhension sous peine de passer pour odieux.La huitième fille du couple  sera donc un garçon.C'est ainsi que la malédiction sera brisée et que l'honneur sera sauf.Ahmed grandira ainsi,niant sa féminité,se faisant un dolorisme assez pénible,je trouve,de ce sacrifice de l'intime qui met mal à l'aise.Très bien écrit,empruntant la manière des conteurs orientaux,donnant ainsi la parole à plusieurs intervenants,L'enfant de sable est un livre en lequel je ne me reconnais pas malgré la belle langue de Tahar Ben Jelloun.Pourquoi?Parce que rien de cette culture du secret,de cet ahurissant enfermement qu'on espère uniquement fictionnel,bref rien de ces aveuglements archaïques ne m'a vraiment touché.

      On sait que Tahar Ben Jelloun est un très bon raconteur.On sait que l'écrivain,par la bouche de  ses différents interprètes,ne fait qu'exprimer parfois brutalement des vérités enfouies,très enfouies,que je veux croire inhumées.Pourtant tant de trouble sur l'identité profonde,sur le ventre et sur l'âme,tant d'ambiguité sur la famille et les choses du corps ne laissent que bien peu de place à la tendresse.Ce n'était probablement pas le propos.Mais comme Ben Jelloun parle bien des places marocaines,de leurs silhouettes furtives et des nuits andalouses.

8 septembre 2011

A vélo dans le Yorkshire

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    Didier Decoin est certes un écrivain classique.Mais c'est vraiment un habile conteur et on comprend son attrait pour l'Angleterre,lui qui vit au bout du bout du Cotentin,doigt pointé vers Albion.Je lui trouve un charme d'auteur britannique dans cette histoire américano-anglaise et non pas anglo-américaine.Un photographe anglais sauve du massacre de Wounded Knee une petite fille Sioux.Revenu dans son Yorkshire il finit par l'épouser vingt ans après.Mais le plus étonnant dans cette histoire est le rôle de la bicyclette qu'Emily apprend à chevaucher et dont elle devient vite une addicte dans la verte campagne.

         Mais ce n'est pas tout.Didier Decoin nous entraîne dans un roman délicieux d'anglophilie qui plaira par exemple aux passionnés de Peter Pan et de Conan Doyle qui tient un rôle non négligeable dans notre histoire.Filez à l'anglaise dans cette histoire de fées.Arthur Conan Doyle,on le sait,était très versé dans le spiritisme malgré son fils littéraire devenu l'archétype du rationnalisme.Ajoutez à cela un policier soupçonneux sur l'origine d'Emily,pas si mauvais malgré tout.Saupoudrez de quelques vieilles dames anglaises comme la plupart des vieilles dames,très pressées d'être immortalisées sur pellicule par le photographe,avec cependant quelques retouches non encore numériques.Il y a une histoire d'amour sans histoire,pas mal d'humour,des gens bien élevés.Et si le héros,Jayson Flannery est affligé de lépidophobie( panique cause papillons) et de *****trucphobie (la terreur de la bicyclette,mais j'ai oublié le nom et j'ai déjà rendu le livre à la Bib.), il faudrait être hardly anglophobe pour ne pas prendre plaisir à cette belle balade dans un jardin anglais.

9 avril 2011

Long cours

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                   Les dames de nage  sont ces encoches sur une embarcation et c'est avec poigne qu'on les saisit dans ce très beau roman de Bernard Giraudeau.Les critiques avaient été excellentes et je les partage en bonne part.Ces pages sont d'un vrai auteur qui nous convie à son univers duquel on sort en ayant mieux compris cet homme aux semelles légères,en partance comme l'y destinait sûrement le port de La Rochelle tout Ouest dehors.Quelques dames de sa vie  traversent le livre comme des sillages marins sur les océans d'un globe terrestre,un de ces globes dont je rêvais enfant.Nulle exclusive géographique chez Giraudeau,de son premier amour d'adolescence en Charente au si douloureux travesti des bas-fonds chiliens en passant par Jo la soignante des bords de Niger.Rimbaud bien sûr mais aussi Loti et Artaud ont droit de citation d'Atacama aux Philippines.Giraudeau a fait là un très beau texte nuage et zéphyr,Gulf-Stream et désert. Cède-t-il un peu à une fascination du sordide?Peut-être ne doit-on pas le dire.Mais le voyage, quoiqu'il en soit,tout d'énergie et d'affections,reste emballant.

          Qu'il me soit permis d'écrire que malgré ses fulgurances planétaires à la Corto Maltese,malgré ses amis tragiques, Giraudeau m'a plus bouleversé encore parlant de Marguerite,voisine d'immeuble qui s'appelle en fait Irina,fragile vieille dame émigrée russe.A qui il n'a fait que sourire en rangeant sa moto sous sa fenêtre en indiquant de ses doigts la durée de son prochain voyage.Et quand il tient  la main de  sa vieille maman presque aveugle,sur un banc rochelais.

19 février 2011

Epreuves afghanes

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    Cette chronique entre dans le cadre de l'opération de http://www.canalblog.com/ qui a demandé à certains blogueurs de lire en avant-première L'homme de Kaboul,roman de Cédric Bannel,à paraître le 3 mars,chez Robert Laffont.J'ai donc découvert les "secondes épreuves",ça s'appelle comme ça,du thriller sur fond de guerre civile et de manipulations internationales qui nous emmène des banques de Zurich aux villages miséreux de la montagne afghane.Pas vraiment de mystère:on a vite compris que d'odieux Occidentaux utilisent des autochtones cruels et fanatiques pour détourner à leur profit les pluies de dollars. L'intérêt de ce livre est ailleurs,dans le gros travail de documentation qui a permis à Cédric Bannel de coudre une intrigue de bonne facture,très classique,qui se lit aisément et s'oublie tout autant.Néanmoins ce roman nous donne une idée de la complexité de la situation dans ce pays en guerre permanente depuis des lustres.Le commandant Oussama Kandar,au prénom un peu lourd mais le pauvre n'y est pour rien,policier modéré,essaie de faire le mieux possible un boulot,difficile partout,impossible en Afghanistan tant les rapports entre talibans, ultras ou un peu moins,armée officielle et pouvoir corrompu,sur un air connu,forces de la Coalition internationale, trafiquants d'armes et d'opium,mollahs et paysans kalachnikovisés,sont embrouillés et difficiles à cerner.Bannel insiste à juste titre sur le rôle des ethnies et des clans dont on n'a pas vraiment idée à l'Ouest.Allez vous y retrouver entre Pachtouns, Baloutches, Nouristanis.

    Poursuites dignes d'Hollywood dans les rues de Kaboul,attentats suicides qui n'émeuvent plus guère,traitement des femmes comme on l'imagine,voilà le quotidien du qomaandaan.Contrepoint indispensable à cette horreur Cédric Bannel a doté Oussama d'une épouse gynécologue,tentant courageusement avec d'autres femmes de sortir ces dernières de leur condition si archaïque dans les zones les plus reculées du pays et pas forcément tellement mieux loties dans la capitale.Pour moi cela ne fonctionne que superficiellement,ayant du mal à y croire vraiment. Retrouvez tout cela en évitant les mines,souvenirs russes parfois,dans ce thriller assez efficace somme toute,qui nous éloigne des tueurs en série suédois, des passeurs siciliens pourris, des dealers de Los Angeles.Comme quoi le mal est une denrée pour le moins partagée équitablement.

26 décembre 2010

Ciel,un très bon livre

 

       Rarement enthousiasmé par la littérature française actuelle j'ai découvert une exception splendide,aux ailes immenses comme un ciel de Mermoz,à l'ampleur d'un vol de l'Aéropostale et qui brasse un siècle parmi les nuages,mais des nuages qui auraient sur notre basse terre l'oeil de l'aigle royal.Philippe Forest brode une superbe tapisserie de haut style sur la vie de son père pilote.Ce faisant il nous raconte à sa manière rien moins que l'histoire de l'aviation qui se confond pratiquement avec le siècle.S'il est vraiment ardu de définr l'acte de naissance de ce trasport Forest sa'ccorde sur le bien modeste décollage des frères Wright en 1903, quelques décimètres au-dessus des dunes de Caroline du Nord.Mais bien d'autres nous accompagnent et des plus grands, Lindbergh, Mermoz, Guillaumet, Saint Exupéry,aux presque anonymes qui n'ont laissé qu'une trace fort locale notamment en cette Bourgogne mâconnaise berceau des parents de Philippe Forest.

   Chaque chapitre est une date associée à un vol historique ou vécu par ce père,figure passionnante dont Philippe Forest ne nous cache pas par ailleurs les douteuses tentations de jeunesse un peu maréchaliste. Certes,pas longtemps,et pas vraiment.Et puis avoir dix-neuf ans en 1940 n'était pas si limpide.Ce père,Jean Forest,passera par le Maroc et pilotera finalement lui-même du côté de Macon,sans accent, Alabama. Mais à quoi bon,chroniquant ce livre,privilégier tel ou tel épisode?Ce roman est d'une aisance stupéfiante à se mouvoir dans l'azur ou le gris.Les pages sur l'exode près la débâcle nous font vivre au plus près de ces semaines absurdes et efffrayantes quand Jean convoie sa future fiancée et sa sa famille jusqu'à Nîmes,en un écoulement Nord-Sud d'une France exsangue et ahurie.Sa formation en Amérique touche du doigt dans ce Sud profond la ségrégation triomphante et la maladresse de Jean offrant son siège à une vieille noire,s'attirant l'antipathie de cette dernière car les bonnes intentions pavent l'enfer.

    Le style de Philippe Forest réhabilite le participe présent et donne une fluidité à ce long roman,les phrases souvent assez longues restant parfaitement maîtrisées.On se sent ainsi proche du personnage principal et des autres,avec parfois une délicieuse incursion dans le cinéma,moteur en ces années quarante de la fabrication des souvenirs de jeune homme,avec Bogart,Casablanca (oui ce n'est pas pour me déplaire) ou Fonda,Les raisins de la colère.Particulièrement vivace cette longue cavalcade dans le siècle nous plonge dans l'aventure de la vie de cet homme,mais aussi d'un pays aux prises avec ses contradictions,rallié en bonne part à la voix chevrotante d'un vieillard à Vichy,ignorant voire vilipendant une autre voix inconnue, londonienne. Collectif, individuel, familial, professionnel,le récit de Philippe Forest brasse des décennies et des espaces fabuleux,de ceux qui font le prix d'une grande,très grande littérature française,celle que je ne rencontre pas souvent.Il est vrai que je m'évade plutôt vers de grandes voix d'ailleurs.

     La Résistance et ses à peu près,l'épuration et ses radicalités, l'opportunisme et ses méandres,l'après-guerre ne trouve pas tellement grâce aux yeux de Forest mais le propos est ailleurs.Comme un enchanteur l'auteur nous immerge là haut dans ces merveilleux nuages comme disait le poète,parfois menaçants quand on comprend que les combats aériens n'avaient plus grand chose des codes d'honneur des chevaliers du ciel du début de siècle.Pages étonnantes sur les bombardements de Coventry mais aussi de l'Allemagne.La folie avait entre temps gagné les airs.Forest nous rappelle aussi les origines d'Air France et c'est intéressant d'entrer ainsi dans l'histoire d'un grand groupe dont on finit par oublier les hommes qui l'ont fait.C'est que la vie de Jean Forest est infiniment riche faisant de lui plus ou moins un collaborateur des Services Secrets.Extraordinaire aussi la calme méditation,modeste aussi,sur la cinquantaine et un peu plus (je connais),particulièrement acide pour un pilote.Comme si nous n'étions pas tous des pilotes plus ou moins embrouillardés de notre propre périple sur terre.

    Mais le plus beau dans Le siècle des nuages à l'évidence,malgré les superbes descriptions du ciel et de ses grands oiseaux de métal,malgré les envolées sur ces cathédrales qui ont nom Orly ou Charles-de-Gaulle,malgré cette inéluctable déception du pilote vieillissant qui n'aura pas droit au Concorde mais dont les ailes seront fauchées avant le drame de 2000 et les avions assassins de 2001,le plus beau,disais-je,c'est l'hommage passionné d'un fils pour son père,né avant le Spirit of Saint Louis et mort juste avant une autre mort,celle du siècle,du Siècle des nuages.Quand un roman atteint de tels sommets,qu'il vogue à Mach 2,on se retrouve, enfant, le Dimanche à Orly,rêvant aux nuages,aux merveilleux nuages.Ceux de Baudelaire si je me souviens maintenant.Plongez-vous dans ce grand roman de l'homme et de l'espace,celui qui donna à Lindbergh comme une sagesse ultime quelque peu rédemptrice après ses errances,et à Howard Hughes sa finale folie.

   Jean Forest s'est éteint peu avant l'an 2000.Fatigué il n'aurait pas trop aimé le nouveau siècle,me semble-t-il.Mais ceci est une autre histoire.Quant au propre drame de l'auteur Philippe Forest,relaté en deux pages d'une infinie pudeur je le laisse à votre propre sensibilité.

16 octobre 2010

Monsieur Clavel

            

                                                       On ne lisait plus guère Bernard Clavel à l'heure de Houellebecq et Nothomb.Clavel c'est pourtant tout autre chose que du roman de terroir hyperformaté.Je ne reviendrai pas sur sa vie qu'il a si bien romancée dans sa tétralogie majeure La grande patience dont les jurés du Goncourt ne crurent pas déchoir en le couronnant pour l'ultime tome Les fruits de l'hiver.Cet autodidacte, apprenti patissier,amoureux de ses terres du Haut Jura,des embruns d'Irlande et du blanc Labrador,conteur intarissable aux sagas autrement bien fichues que les pensums télévisuels (je pense à sa remarquable série sur la Guerre de Trente Ans,Les colonnes du ciel),cet homme,citoyen avant l'actuel et navrant galvaudage de ce beau substantif,ce pacifique convaincu (j'aime mieux que pacifiste mais peut-être Bernard Clavel n'aurait-il pas aimé) était l'un des écrivains de chevet de mon père avec ses premiers ouvrages L'ouvrier de la nuit,L'Espagnol.

                         Ca me ramène à des jours anciens mais je voudrais insister sur toute la qualité de l'écriture de Clavel,évidemment plus très en cour,mais si consciencieuse et terrienne au sens le plus noble du terme.Même le souvent  condescendant Télérama le traite en grand écrivain.Je ne suis pas certain de lire à nouveau Monsieur Clavel,la vie étant courte et les auteurs si nombreux.Mais je tiens à l'appeler ainsi,ne serait-ce que pour le plaisir de lire qu'il a donné à bien des gens et la détermination qui a guidé toute son oeuvre.Emballé par Le silence des armes je lui avais d'ailleurs écrit.Et ses apparitions chez Bernard Pivot étaient toujours savoureuses,notamment une historique émission d'Apostrophes où avec Brassens ils avaient parlé de l'armée,de la guerre et de la paix.Dans les hommages j'ai souvent lu à propos de Monsieur Clavel "de la belle ouvrage".C'est tout à fait ça.

5 octobre 2010

Ce sacré Jeannot

   

                 J'aime beaucoup cet homme.Je l'aime toujours autant après quelques milliers de passages télé dont il est par ailleurs un bon client.A ceux qui croient voir en lui ce cabotin mondain élégant et faussement nonchalant je donne entièrement raison.Jean d'Ormesson l'est indiscutablement.A ceux qui croient que se cachent derrière cette façade superficialité et esbrouffe je dirai qu'ils se trompent.Je tiens Jean d'Ormesson pour un écrivain majeur malgré ses efforts pour tant se montrer,à tel point que c'est pour mieux se cacher.Trêve de badinage C'est  une chose étrange que le monde est un roman(?) bluffant,stimulant,ébouriffant.Vous connaissez la trame:le Vieux,ce pourrait être Dieu, parle un peu des hommes,et d'Ormesson parle de Dieu qu'il a un peu connu,mais moins que Dieu ne connaît les hommes.Et Papy Jean de nous raconter les belles histoires de l'oncle Paul.Le grand livre du Monde s'ouvre ainsi,par touches très brèves,à croire que Jean d'O. est payé à la ligne,pour payer ses séjours à Venise et sa Méditerranée, onéreux.Sacré Jeannot.

        Galilée,Pascal,Newton,Darwin,Einstein que nous connaissons si bien,n'est-ce pas(???) entrent dans la danse.Et d'autres étoiles,sommités des sciences et de la philosophie,avec lesquels je suis un peu en froid,peu porté sur les équations et les interrogations métaphysiques.En face du Vieux il suffit comme Thésée de suivre le fil du labyrinthe pour démêler le simple du complexe,le sûr du probable,le doute de la vérité et Jeannot nous y entraîne,le volubile,le conteur,le farceur.Au bout du compte on n'est évidemment guère plus avancé (je parle pour moi qui suis au niveau de spiritualité de l'huître,et qui pour la science voisine avec Lucy).Mais ce n'est pas grave de rester en rade,le passé étant passé,intouchable,et le futur étant futur,inconnu.

       De cet excellent bréviaire de vie j'ai au moins retenu que d'Ormessson a connu ses plus belles extases se baignant en Grèce,flânant chez la Sérénissime,lisant Aragon.Programme ma foi bien digne d'intérêt,auquel je souscris volontiers.Souriant souvent,une brise inquiète effleure parfois Monsieur Jean.Et si j'avais préféré la profondeur de Voyez comme on danse j'ai adoré cette balade avec un auteur généreux,pressé car le temps lui est compté,allénien version Quai Conti,bavard comme Luchini et gai comme un pinson.Il y a du souffle romanesque même dans une réaction quantique bien que je ne sache toujours pas comment vivent les quarks.

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