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BLOGART(LA COMTESSE)

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11 janvier 2016

Le vieil homme est amer

20160109_01

                                            Babelio m'a comblé en m'envoyant pour chronique l'inédit d'Arthur Schnitzler, Gloire tardive, avant même la sortie au 3 février chez Albin Michel. Court roman de 155 pages, ce livre est une belle relation de la vie viennoise, telle qu'elle me passionne depuis des décennies. L'histoire de l'Europe Centrale est riche en beaux écrivains et Schnitzler n'est pas le moindre. Cette longue nouvelle fait partie des écrits sauvés des rafles nazies en 1933, après la mort de l'auteur. Mais elle fut élaborée dans les années 1890. Schnitzler est alors un jeune auteur.

Masse critique

                                         Edouard Saxberger est un modeste fonctionnaire déjà âgé.  Comme beaucoup il a commis dans sa jeunesse un recueil de poèmes. Personne n'est parfait et ayant péché, je ne lui jetterai pas la pierre. Contacté par un groupe de jeunes poètes, évidemment chevelus et révolutionnaires, ou quand la révolte épouse le conformisme, vieux débat qui me hante et sur lequel je radote, le vieil homme d'abord surpris se prend au jeu. Flatté qu'on s'intéresse à Promenades, son antique opuscule de poésie, le voilà qui participe à ces soirées viennoises où se déclinent les derniers vers de ces jeunots aux dents longues. Mais les dents, on le sait, finissent souvent par s'ébrécher. Le vieux poète asséché et les débutants ardents, ça pourrait être le titre d'une fable.

                                        Albin Michel évoque l'Aschenbach  de La mort à Venise. Pas vraiment car l'univers de Schnitzler n'est pas désespéré comme celui de Thomas Mann, restant d'une relative légèreté, nul choléra ne règne sur le Ring. Cependant se regarder dans la glace l'âge venant devient parfois agaçant. Et les rencontres avec une autre génération, parfois prometteuses, tournent souvent à la déception. Cette jeunesse qui vénère Saxberger, quel crédit lui apporter? Bientôt le fonctionnaire falot et usé ne retrouvera-t-il pas davantage de plaisir aux parties de billard avec ses pairs? L'histoire ne repasse les plats que faisandés semble nous dire le grand romancier de La Ronde, de Liebelei, de Mademoiselle Else. Ce n'est pas un hasard si j'ai pensé au Masque, premier volet du film de Max Ophuls Le plaisir, où un homme mûr danse jusqu'à l'épuisement, le visage d'un jeune homme plaqué sur la face. Ophuls a justement adapté et La Ronde et Liebelei, et ce parfaitement.

                                        Ce fut un grand plaisir de lecture dont je remercie Babelio. Et lire les épreuves non corrigées, ma foi, ne manque pas de charme.

                                       

                      

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9 janvier 2016

Sandor sur ses lauriers

 nUIT

                                  Neuvième lecture de Sandor Marai, et ma passion pour cet écrivain ne se dément pas, bien au contraire. Du côté de Stockholm il fut souvent évoqué mais non... Justice (c'est le cas de le dire avec La nuit du bûcher) lui est rendue car l'action se passe à Rome où un carme espagnol, 1598, prend en quelque sorte des leçons d'inquisition pendant quelques mois. C'est que les hérétiques sont nombreux en cette fin de XVIème Siècle et que l'Eglise veille au grain. Je suis donc resté à la même époque que mon dernier livre chroniqué, La Religion. Epoque troublée, mais toutes les époques ne le sont-elles pas? Sandor Marai, qui eut maille à partir avec le régime de son pays, a pas mal voyagé avant de décider de son ultime destination, choisissant la nuit en 1989 aux Etats-Unis. En 1974 c'est en Italie qu'il vivait lors de l'écriture de La nuit du bûcher.

                                  Même si Bernardo Gui, le sinistre Grand Inquisiteur du Nom de la Rose, est évoqué c'est deux siècles plus tard que Marai a situé l'action de ce beau roman. L'auteur hongrois qui a beaucoup écrit sur les derniers conflits a également souvent utilisé l'Histoire, Casanova par exemple dans La conversation de Bolzano.Le moine d'Avila est ainsi éduqué aux méthodes du Saint-Office pour faire avouer les hérétiques. C'est que c'est tout un art dans cette Rome où la délation va bon train, où l'on se dévisage plus que de raison, et où les orthodoxes de mardi peuvent devenir les déviants du jeudi. C'est en fait une longue lettre qu'écrit ce moine à son frère Urbain, dans laquelle il revient sur son accueil romain, son initiation près des confortatori, des prêtres mais aussi des notables réunis en une confrérie, et chargés de fortifier l'espoir des condamnés, bénévolement par charité chrétienne ou parfois par curiosité et voyeurisme.

                                 Le moine (on ne sait pas son nom) sera finalement admis à l'ultime nuit d'un des plus célèbres "giustiziabili", Giordano Bruno, qui malgré sept années de geôle et de torture ne se sera jamais repenti. La doctrine de Giordano Bruno n'est pas l'objet du livre. Mais le questionnement du moine, ses hésitations, ses doutes, ainsi que l'influence de l'écrit suite à la diabolique invention de l'imprimerie, sont par contre au centre du roman de Sandor Marai, lui aussi victime en d'autres temps de régimes inquisiteurs. En cela La nuit du bûcher est parfaitement en phase avec toute l'oeuvre de cet auteur, pour moi plus que majeur, de la Mitteleuropa si riche en bouleversements et en écrivains.

La nuit du bucher de Sándor Márai vous donne l'avis d'Yspaddaden. Je le partage bien volontiers.

Huit autres romans de Sandor Marai ont fait l'objet de chroniques ici-même. 

7 janvier 2016

La poésie du jeudi, Giorgio Bassani

 Poésie du jeudi

                                  Pour l'Italie, pour Ferrare que je n'ai jamais vue mais dont j'arpente les rues quand la vie m'ennuie, pour Giorgio l'écrivain, pour le Nord néoréaliste, pour Asphodèle dite Le Lien, voici quelques lignes du grand romancier, qui fut aussi scénariste et poète.

Vers Ferrare

C’est à cette heure que vont à travers les chaudes herbes infinies

vers Ferrare les derniers trains, avec de lents sifflets ils saluent le soir,

plongent indolents dans le sommeil qui peu à peu

éteint les bourgs rouges et leurs tours.

Bassani

Par les fenêtres ouvertes, le remugle des prés inondés s’infiltre

et voile la patine des banquettes misérables.

Des pauvres amants en chandail il dénoue les doigts fatigués,

et les baisers désertent leurs lèvres desséchées.

Giorgio Bassani (1916-2000) Histoire des pauvres amants (1945)

f

                             Ferrare, forcément mieux que Rome ou Florence ou Naples. Et pour cause, je ne connais toujours pas la ville. Mais la province y porte un beau nom de femme, l'Emilie. Et vous voudriez que ça m'indiffère?

 

4 janvier 2016

L'Ecrivraquier/1/La manif

 L'Ecrivraquier

                                 Il s'était finalement décidé. Pourtant il n'avait pas la culture de la manifestation. On dit ça, souvent, des belles âmes, des sensibles, des prompts à arpenter, pour une bonne cause, qu'allez-vous chercher?. Mais pas lui, toute sorte de grégarisme lui était insupportable. Mais on disait qu'il y avait presque le feu. On n'allait tout de même pas laisser ce type investir notre beau théâtre à l'italienne? Alors, traînant les pieds, il s'apprêtait à rejoindre la Place de l'Hôtel de Ville, bien pleine somme toute. Il avait plus tard évalué à 3000 personnes environ, selon ses propres calculs, officieux, cela va sans dire. Pas mal pour une ville moyenne, très moyenne parfois. Percussions et slogans, drapeaux bien-pensants, mais c'est un pléonasme pour celui qui le brandit. Il tombait quelque pluie, trois fois rien, en ce petit soir, alors bon, ses principes...

                                De fait ils étaient presque tous là, ses amis, ses connaissances, ses ni l'un ni l'autre. Tant de monde ne pouvait avoir tort en même temps. Mais il n'était pas question qu'ils aient tort, mais non. Il lui sembla que quelques dizaines n'étaient pas excitées que par la défense de la démocratie. Mais une manif est rarement avare de petitesses. Après tout il en était, du bon côté, de celui qui est juste et tolérant, forcément. Fleurissaient quelques calicots, welcome aux uns, go home aux autres. Allez savoir pourquoi même les si françaises manifs s'anglicisent parfois. Les insultes à l'encontre des 150 partisans du type du théâtre, regroupés sur les marches, par contre, se faisaient en français vert au son des djembés.

                                C'est alors qu'il l'aperçut. Leur liaison, de notoriété publique, n'était plus depuis des années. Mais elle courut vers lui, l'embrassa, et le fracassa d"un "Oh! Ca me fait plaisir que tu sois venu". Ouf, il l'avait échappé belle. Nanti de cet aval, presque officiel, il n'était plus obligé d'attendre la dispersion. Il pourrait rentrer assez tôt. Tranquille. Il faut se méfier des manifs où l'on n'apparait pas. On pourrait croire des choses.

1 janvier 2016

L'Ecrivraquier (présentation)

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                        Le mot-valise écrivraquier me semble explicite. Comme le vraquier, bateau généraliste qui transporte toutes sortes de marchandises, la rubrique L'Ecrivraquier véhiculera ce que j'ai envie d'écrire, pensées, brèves, poèmes, idées, traits d'humour, enfin tentatives, divagations, banalités et billevesées, aphorismes et àpeuprèsismes, le tout brut de décoffrage sans clés ni explications, de ci de là, cahin caha.

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                  Avec les errances, les échouages et les perditions inhérents à la fonction. La périodicité en sera pour le moins aléatoire. Et la durée de vie tout autant. Et la qualité... L'originalité je ne sais pas. Nulle originalité par contre mais toute ma sincérité dans mes voeux 2016 à vous tous, passagers habituels, fréquents, occasionnels ou rares, sur ce blog qui approche dangereusement les dix ans d'âge, ce qui implique parfois des signes d'essoufflement.

 

                   De plus, comme ce vendredi tout est permis, je me suis octroyé le droit de massacrer quelques arpèges de Naked as we came de Samuel Beam (Iron and Wine). On est comme on est.

 

 

 

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29 décembre 2015

M.Willocks je vous accuse

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                                M. Tim Willocks, écrivain, je vous accuse d'avoir du talent et de l'imagination. Je vous accuse d'avoir écrit un très bon livre, La Religion. Mais, car il y a un mais, je vous accuse aussi d'emportement, de débordement, de scriptorrhée. Et je vous accuse d'avoir abusé de la chose qui m'est la plus précieuse, mon temps. Vous croyez que je n'ai que ça à faire, de lire vos 951 pages sur les quelques mois du siège de Malte par les Turcs en 1565? Et ce n'est pas parce que votre roman est formidable que vous allez vous en sortir comme ça. La Religion, c'est le nom que se donnait l'ordre des Chevaliers de Malte, des moines-soldats aussi à l'aise dans la prière que dans l'éviscération. Tannhauser est le guerrier que l'on suit pendant ces évènements, Allemand enlevé très jeune par les Ottomans pour devenir janissaire. Devenu commerçant c'est comme expert en art militaire que le Grand Maître de l'ordre, La Valette, le mande sur l'île de Malte pour aider à sa défense. Les Chevaliers sont en nombre très inférieur aux Turcs. Passionné d'histoire j'ai trouvé, Tim Willocks, que vous dynamitiez le genre un peu ronronnant. Mais tout de même ça m'a bouffé pas mal de temps.

                              Cela dit c'est du grand art pour lequel il faut être armé comme un chevalier, ce qui est parfois lourd, pour apprécier cette magistrale aventure. D'estoc et de taille ça démembre et ça décapite sérieux, tant côté turc que côté chrétien. Très documenté mais aussi associant verdeur poétique et réflexion tant sur le pouvoir que sur Dieu, La Religion mérite le détour et l'on comprend mieux les enjeux méditerranéens de l'Histoire. Evidemment la charogne plane sur tout le roman, naufrage d'entrailles et de sang, dont vous M.Willocks, ne nous épargnez aucun détail. Vous étiez chirurgien, ai-je lu? Il en reste manifestement quelque chose. Mais ne m'en veuillez pas, cher docteur auteur, si je ne vous accompagne pas pour le deuxième tome de votre trilogie qui traite de la saint Barthélémy, Les douze enfants de Paris, ni pour le troisième, encore à venir, je crois. Matthias Tannhauser est pourtant une belle figure romanesque. Mais voyez-vous, le temps , ce barbare, m'oblige à choisir entre vous... et le reste du monde. Et bravo pour cette oeuvre fleuve, cet ouragan sur Malte, etc...

27 décembre 2015

Derniers films 2015

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                                 En vrac quelques mots sur quelques films vus en décembre. Le dernier ciné-débat 2015, presque hasard, portait sur le Macbeth de Justin Kurzel avec Fassbender et Cotillard. Ayant un peu vécu avec Shakespeare pendant quelques mois c'était l'estocade pour en finir (momentanément car on revient toujours à Shakespeare). Moyennement apprécié du public et de moi-même ce flot de sang écossais, hypertrophié d'hémoglobine et de ralentis, a le mérite de restituer le texte dans un fracas d'armes parfois plus proche de Mad Max que de Welles ou Kurosawa. Pourquoi pas?

                                Le très dithyrambé (une hérésie linguistique) Fils de Saul du Hongrois Laszlo Nemes m'a paru plus bruyant que vraiment brillant mais il semble que je sois l'un des seuls à trouver ce film surestimé. Ou une relative claustrophobie m'a-t-elle disqualifié pour cette oeuvre?

                                Le premier film guatémaltèque de ma carrière de cinéphile, Ixcanul (Le volcan), de Jayro Bustamante, est une jolie réussite. Miracle, je n'étais pas seul dans la salle pour apprécier ce film presque documentaire qui nous éclaire sur ce sous-continent centraméricain si méconnu. Sur un thème archiclassique, une jeune fille veut fuir sa condition et gagner la ville, c'est une belle incursion surtout sur les rapports des paysans avec la nature et leurs croyances bien éloignées de notre eurocentrisme.

                                 Spielberg bon crû avec Le pont des espions, tendance Guerre Froide, mais distancié, avec l'humour qui n'est pas chez John le Carré par exemple. Et cet incorrigible Steven nous emporte comme le faisait Frank Capra. D'ailleurs Tom Hanks n'est-il pas l'honnête homme, voire un peu naïf, comme l'était James Stewart? Sur ce film Le PONT des ESPIONS est le très bon article de Princecranoir. Et Derrière le mur est celui, tout aussi intéressant de Martin 1001 bobines.

                                 Francofonia, le Louvre sous l'Occupation, nest pas comme on le croirait l'affrontement-amitié de deux hommes de culture dans le Paris de la guerre. Alexandre Sokourov  et sa mise en scène si personnelle et qui peut ne pas plaire nous invitent à une réflexion sur la place de l'art dans l'histoire. Souvent austère, ne craignant pas les chocs spatio-temporels, déstabilisant, ce film remarquable d'intelligence et d'originalité a cependant à mon sens l'inconvénient d'officialiser en quelque sorte la scission du cinéma contemporain, divisant le public en deux parties. A noter que les deux parties sont d'inégale taille. J'étais seul pour voir Francofonia.

                                 Seul par contre je n'étais pas lors de Star Wars,le réveil de la force. Vu avec mon fils et son fils de neuf ans, ce qui est normal quand on sait l'importance de la filiation dans la saga. L'aventure se poursuit donc et je suis content d'en être, un peu perdu au début, mais vite remis en selle par tous ces personnages et J.J.Abrams est un parfait successeur de Maître Lucas. Beaucoup de bruit pour...quelque chose de pas mal du tout. Dès le début 2016 je reviendrai et une bonne année je vous souhaite.

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24 décembre 2015

La poésie du jeudi, Pierre Reverdy

Poésie du jeudi 

                                   C'est bien sûr pensant très fort à Asphodèle, initiatrice, que j'ai eu envie d'un dernier poème de l'année. Et c'est bien volontiers que je lui dédie ce texte de Pierre Reverdy. Il y a une deuxième raison. Reverdy fut un  temps très proche du Bateau-Lavoir de Montmartre dans les années 1910. Et Arte nous a proposé une admirable série mi animation mi archives intitulée Les aventuriers de l'art moderne, d'après le livre de Dan Franck Le temps des bohèmes, que je regarde en replay. Six épisodes passionnants en compagnie de Picasso, Apollinaire, Modi, Dada, les Surréalistes, Montparnasse, Man Ray, Dali, etc...  Soit quarante années qui ont changé le monde des arts et le monde tout court.

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A double tour

Je suis si loin des voix

Des rumeurs de la fête

Le moulin d'écume tourne à rebours

Le sanglot des sources s'arrête

L'heure a glissé péniblement

Sur les grandes plages de lune

Et dans l'espace tiède étroit sans une faille

je dors la tête au coude

Sur le désert placide du cercle de la lampe

Temps terrible temps inhumain

Chassé sur les trottoirs de boue

Loin du cirque limpide qui décline des verres

Loin du chant décanté naissant de la paresse

Dans une âpre mêlée de rites entre les dents

Une douleur fanée qui tremble à tes racines

je préfère la mort l'oubli la dignité

je suis si loin quand je compte tout ce que j'aime

Pierre Reverdy (1889-1960)

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22 décembre 2015

In the name of rock/ Kathy

                                   La chanson de Kathy, quelque part sur l'historique album The sounds of silence, comme cette chanson est simple, et comme j'ai conscience de radoter. Mais comme elle est belle cette chanson de Paul et Art, maîtres absolus de ma jeunesse. Et comme ce prénom ou ce diminutif  est banal à peine auréolé d'un parfum midsixties, celui de mes quinze ans. Et que de ballades pour Kathy, Katherine ou Kathleen, auxquelles je me suis associé et qui savent encore toucher mon coeur et le faire rêvasser. Ces Kathy m'ont bien oublié et vice-versa, mais les cordes d'une guitare chantent toujours la mélodie des années tendres, du lycée de Compiègne et des forêts du Valois, où déjà je nervalisais* laborieusement, pensant à la fille du notaire. C'était un temps déraisonnable... Ce  billet ne convoque pas la nostalgie, je me suis seulement dit, pensant à certaines, que peut-être elles aimeraient écouter ça. C'est totalement dispensable, bien joli cependant.

* Pardon mon Gérard

19 décembre 2015

Les plumes...by Asphodèle: Elle et lui, septentrionalement

Les plumes

                                 Dernier ramassage des copies avant Noël avec les mots qui suivent:espoir-guimauve-comédie-musique-plage-liaison-mièvre-baragouinage-égalité-classique-chanson-inspiration-balai-essuie-glace-navet-louche-roman-abracadabrantesque-amoureux-batifoler. Les mots navet et abracadabrantesque, je les ai  délaissés, j'en avais le droit. Le mot louche me déplaisait, je l'ai ignoré, je n'en avais pas le droit mais je crois qu'il y a des limites à l'exercice. Il en reste dix-sept. Asphodèle a une fois de plus fait preuve de pas mal de patience. Merci Dame Aspho.

                                 La route de Deauville sous la pluie ne m'effrayait pas et ma maladive cinéphilie s'en délectait, le Piccoli des Choses de la vie, le Trintignant de Lelouch, n'étaient pas mes cousins. Ma Romy à moi, mon Anouk aimée s'appelait Larna, et c'était mon histoire, mièvre, diraient certains, péremptoires, mièvre mais mienne. J'étais depuis toujours un homme du presque Nord, attiré par quelque brume artésienne, par quelque brune picarde, et toisais volontiers toute plage subligérienne avec suffisance. Exception italienne faite j'avais toujours rêvé de l'emmener, inspiration Walhalla, vers Scanie, Jutland ou au moins Sligo et le moment était venu de la retrouver sur les planches avant de filer vers Roscoff. Le périple n'était guère classique mais nous avions près de quatre semaines. De loin, de très loin, c'était la première fois que le temps ne nous était pas trop compté, l'espoir d'une parenthèse inoubliable qui au moins pour l'essentiel ferait un joli souvenir, tendre et poignant comme une chanson d'automne bercée par les balais d'essuie-glace de Pont-Audemer et bientôt les embruns baltiques.

 

                                 J'avais toujours su, du temps d'infantiles baragouinages à prétention poétisante, que m'attiraient les moins, les moins chauds, les moins courus de ces rivages. Et puis c'était une fille du Nord à laquelle je chantais Girl of the North country, dylanesque ballade sixtine, un tome en soi du roman de ma vie. Ses cheveux n'avaient pas coutume de batifoler jusqu'au creux de ses reins, je cite, mais courts voire sévères, ils donnaient à cette liaison comme un léger parfum d'austérité, un sentiment avec lequel je me sentais plutôt bien, comme arpentant une lande écossaise ou une musique folk minimaliste. Je trouvais comme de la beauté à certain renoncement et le ton n'était plus à la comédie. Après tout l'égalité entre mes jours passés et à venir était quoi qu'il en soit caduque, le lent déclin tenait là le début de son forfait. J'espérais pourtant que les affres ou les délices amoureux, si voisins et si ressemblants, sauraient guider mes pas, nos pas, songeant qu'après tout, la fleur de guimauve est bien belle sous ses perles d'eau.  

 

Remerciements à Claude Sautet, Paul Guimard, Claude Lelouch, Robert Zimmerman, Hugues Aufray, Pierre Delanoé. Et d'ores et déjà Joyeux Noël à tous ceux qui sont de l'aventure des Plumes d'Asphodèle.

15 décembre 2015

Géographie: Hoboken, New Jersey

Hoboken

                                             Face à New York Hoboken fait pourtant partie du New Jersey. On en parle un peu en ce moment car y naquit il y a juste un siècle Francis Albert Sinatra. Quel bonheur que d'écouter Frank Sinatra dans la plupart de ses disques. Et tout le reste on s'en fout. Non? Mais voilà, bien qu'il ait débuté avec un groupe vocal nommé Hoboken Four je n'ai pas trouvé trace d'une chanson intitulée Hoboken. Je me suis rabattu sur un truc d'avant avant avant, et encore avant, le Hoboken Baby de Pat Boone, rengaine de 1955, un sha la la wap doo wap qui ne devrait pas vous surmener. Mais incapable d'en rester là je vous ai joint une vidéo d'une toute autre trempe, un de mes titres favoris de Frank, auquel je devrais consacrer une conférence en février ou mars.

                                           Il s'agit de Learning the blues (1957) mais personne n'a besoin d'apprendre le blues. Il vient tout seul comme le chante Frankie " Tables are empty, dancefloor deserted,you play the same love song, that's the tenth time you hear it". Réédité en une belle compilation The crooner goes to jazz avec les classiques All of me, Sweet Lorraine, I've got you under my skin,etc...

 

 

 

13 décembre 2015

Valentyne et mois nous sommes branchies...

BRANCHIES

              ... sur le premier roman de Niccolo Ammaniti, publié en Italie en 1997. Et j'en ai beaucoup de peine. Maudit sois-je de l'avoir entraînée dans ces égoûts de la littérature. Encore qu'à ce jour j'ignore tout de sa réaction, la suivante Aujourd’hui « irréel » -13 décembre – Branchies Niccolo Ammaniti Libre à chacun d'avoir trouvé dans ce fatras de roman d'aventures, nous menant d'Italie en Inde, dans cette vague résurgence du thème de L'île du Dr.Moreau, dans ce bouquin branché branchies, coke et parties fines, une  bonne dose d'humour et une salubre vulgarité. Le héros, pas passionnant, gère une boutique d'aquariums et un cancer terminal, avec une fiancée et une mère romaine abusive. Il décide de partir en Inde suite à un courrier le mandant pour ses compétences de pro de l'aquariophilie. Ce qui l'attend là-bas se veut drôle et percutant, avec  des personnages comme sortant d'une BD sous acide,. Niccolo Ammaniti est fils d'un célèbre psychiatre et chef du mouvement littéraire dit Cannibale. Dit comme ça on s'attend au pire...Et c'est pire.

              Suis-je injuste? Ou suis-je has been, enfin has read? Pour ne point avoir saisi l'importance de ce premier roman, dont il se murmure qu'il ne serait en fait qu'une reconstruction de la thèse de fin d'études en sciences biologiques de Niccolo Ammaniti. Cela n'empêche pas les livres d'Ammaniti de se vendre comme des panettone sur la Piazza Navona.  Donc si un fond de trafic d'organes, appartenant à de pauvres Indiens, les organes, si un ahurissant concert dans les égoûts, si des créatures sortant de la trilogie Men in black qui se prendraient pour des personnages de roman vous tentent, prenez le prochain vol Rome-New Delhi et connectez-vous sur Branchies. Je serai tout ouïe si vous avez goûté le dépaysement.

10 décembre 2015

La poésie du jeudi, Raymond Radiguet

Poésie du jeudi

                                De Raymond Radiguet on connait Le bal et Le diable, et le destin fulgurant. On sait un peu moins ses poèmes. Alors en voici un sur une fleur à la vie brève comme celle de Radiguet. J'y ajoute les éditions en Livre de Poche. Celle du Diable je l'avais eue en cadeau dans une station-service. Heureux temps où le pétrole incitait à lire.

Sur la mort d'une rose

Cette rose qui meurt dans un vase d'argile

Attriste mon regard,

Elle paraît souffrir et son fardeau fragile

Sera bientôt épars.

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Les pétales tombés dessinent sur la table

Une couronne d'or,

Et pourtant un parfum subtil et palpable

Vient me troubler encor.

Radiguet

 J'admire avec ferveur tous les êtres qui donnent

Ce qu'ils ont de plus beau

Et qui, devant la Mort s'inclinent et pardonnent

Aux auteurs de leurs maux,

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Et c'est pourquoi penché sur cette rose molle

Qui se fane pour moi,

J'embrasse doucement l'odorante corolle

Une dernière fois

Raymond Radiguet (1903-1923)

6 décembre 2015

Figurines humaines

AFFICHE_IMAGE

                               Excellente réaction du public en ce Ciné-débat de lundi après avoir vu L'image manquante, formidable doc de Rithy Panh. Le cinéaste cambodgien revient une fois encore sur l'histoire de son pays et le crime de l'Angkar Révolutionnaire du Kampuchea Démocratique, nom bien pompeux du régime tortionnaire que connut le Cambodge de 1975 à 1979. Là où l'on pouvait craindre un exercice de mémoire appliqué dont la légitimité n'est plus à prouver Rithy Panh, nanti du très beau texte de Christophe Bataille, parvient à l'émotion progressivement sans agresser le spectateur, et d'une manière inattendue. Assez peu d'images d'archives sur le génocide (terme contesté) cambodgien. Image(s) manquante(s). Quelques curiosités cependant, un Pol Pot souriant par exemple. Mais les mots sont si simples et si forts. Bataille cite un pays qui hait la connaissance, des dirigeants qui habitent en idéologie. Les toujours inquiétants lendemains qui chantent, le grand bond en avant. Juste terrifiant.

                             Alors il y a les figurines, de terre cuite, parfois de bois, qu'on voit prendre corps, étonnant symboles qui finissent par vivre sous nos yeux. Ces petits personnages agissent sur nous tout à fait comme des témoins, au coeur de la machine de destruction khmere rouge. Vierge de prisons officielles le Kampuchea Démocratique n'avait que des camps de rééducation et se targuait d'une réussite imminente alors que la grande Chine avait échoué. Ainsi on comprend l'hallucinante idéologie qui faisait de chacun un délateur et un collaborateur. Une petite fille dénonce sa mère pour un "vol" de mangues. On sent presque physiquement avec ces modèles réduits l'odieux labeur incessant qui pesait sur les épaules de centaines de milliers de Cambodgiens. Stakhanovistes des rizières, maçonnant le jour, des bat-flanc la nuit, où le sol même,des ordres éructés en boucle. Black-out. La nouvelle nuit indochinoise. Des milliers d'images manquantes.

 

                            Très prévoyant j'avais en lançant le débat indiqué que, comme souvent dans l'établissement d'une dictature, les Khmers Rouges n'étaient pas arrivés tout à fait par hasard. Juste avant, la junte de Lon Nol n'était pas particulièrement large d'esprit. Vous connaissez un peu ma modération et je crains les raccourcis. Lien fut aussitôt fait, hativement, avec l'actualité, favorisant ainsi à mon sens les à peu près. Un ciné-débat n'étant pas un meeting avec consignes nous avons réussi à revenir à toute la richesse de ce beau film qui méritait bien que l'on statue, modestement rassurez-vous, sur sa spécificité. A lire, L'élimination,  cosigné Rithy Panh et Christophe Bataille, à l'origine de L'image manquante.   

 

 

 

 

3 décembre 2015

Mon été avec le grand Will, scène 9 et rideau

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                                      Je termine mes interventions sur le cinéma de Shakespeare par l'une des plus belles oeuvres qu'il ait inspirées. Ran (1985), plus ou moins une adaptation du Roi Lear. Kurosawa mit dix ans à concrétiser ce projet et c'est en partie avec les capitaux français de Serge Silberman (les derniers Bunuel notamment) que Ran vit le jour en 1985. Oeuvre totale, mêlant l'histoire traditionnelle du Japon médiéval et l'intrigue principale du Roi Lear, le film est fresque, drame Nô, violence, trahisons, soif de pouvoir, parfois surnommé Apocalypse Nô, eu égard aussi à ses conditions de tournage difficiles. Tout en ayant bien conscience que découper un film pour en analyser quelques séquences est le contraire du cinéma, qui doit rester un spectacle, ce qu'avait parfaitement compris Kurosawa, j'ai tenté de donner envie à mes élèves de voir ce chef-d'oeuvre, parfaitement dans l'esprit de Shakespeare, l'homme qui avait tout compris de l'âme humaine, de son bruit et de sa fureur.

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                                       Hidetora (Lear) partage son royaume entre ses trois fils juste après une chasse au sanglier, version ludique du chaos qui n'allait pas tarder à se développer suite à l'abdication du seigneur. Ran peut d'ailleurs, à peu près, se traduire par chaos. Commencé dans un  restant de sérénité et le vert luxuriant des coteaux japonais le film devient très rapidement un premier réglement de comptes, avec la parabole des flèches brisées et la désunion évidente des trois fils d'Hidetora. Le Roi Lear, lui, avait trois filles, inacceptable pour un Japon post-médiéval dans une lutte pour le pouvoir. Ce sera donc trois frères ennemis  pour la version de Kurosawa, seule façon d'être crédible, les femmes étant la plupart du temps cantonnées à la sphère de la famille ou du plaisir.

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                                     Trois fils rivaux, trois châteaux, trois désastres entrevus pour la dynastie. Dans un film de 2h35 alternent ainsi les scènes plus intimes souvent traitées avec un minimum d'effets dans le style du Nô, si étranger à notre approche occidentale, et les combats meurtriers, fratricides en une orgie de couleurs et de bannières aux teintes primaires identifiant les armées en compétition. Je crois que l'attaque de la forteresse, douze minutes sans bruit mais zébrées de la musique de Toru Takemitsu, est la plus belle scène de guerre à l'ancienne qu'il m'ait été donné de voir. Mais en dire plus sur ce film évènement est sans intérêt. Je ne peux qu'encourager à le voir.

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                                     En conclusion à ces quelques mois passées dans l'ombre de Shakespeare à travers le Septième Art je ne peux que modestement me demander qu'aurait été ma vie sans lui tant ses mots résonnent comme jamais dans la longue errance humaine. Je ne lui vois qu'un alter ego en cette olympe du génie de l'homme, Mozart. Je n'ai pas l'impresssion d'en faire trop, mais trop peu. Dieu merci l'un comme l'autre n'ont guère besoin de moi.

30 novembre 2015

Six cordes, vingt-quatre images/7/Bob Roberts

                                    Ce film de et avec Tim Robbins a déjà 23 ans. Il m'a plu d'exhumer ce pseudocumentaire au sein de cette rubrique qui se veut musicale. Mais bien sûr le sujet est hautement politique, ce qui n'est pas fréquent sur ce blog qui s'ingénie à ne pas s'ériger... Mais la satire est virulente, histoire de ce chanteur qui se met à politicailler, au ras des pâquerettes. Elia Kazan dans Un homme dans la foule, années cinquante, avait aussi abordé ce thème. Souvenirs attention danger. Très américain certes mais finalement transposable. Vous apprécierez le détournement du célèbre clip de Dylan Subterranean homesick blues.Tim Robbins chante lui-même ce démagogique fatras. D'autres, d'un bord à l'autre, d'une rive à l'autre, ne chantent pas.J'sais pas c'qui m'a pris d'écrire tout ça.

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27 novembre 2015

Méandres

Masse critique

CELLES

                                  J'ai eu le plaisir de lire pour Babelio, que je remercie, cet agréable roman américain de Valerie Geary. Pas un très grand livre mais on s'attache vite à ces deux soeurs de 15 et 10 ans, Sam et Ollie, au bord de la Crooked River, pourquoi pas en Oregon, Ouest américain où vit l'auteure. Les deux filles sont pour les vacances avec leur père, surnommé Bear, qui vit dans un tipi, de jardin, de pêche et de ruches. Un tantinet sauvageonnes elles aussi, la découverte d'un cadavre au fil de l'eau va bouleverser leur été. Le livre est construit selon un plan classique, des chapitres assez courts alternant les points de vue de Sam et d'Ollie nous font suivre leur surprise, puis leur questionnement, enfin leur angoisse. Pas vraiment un thriller, il n'y a d'ailleurs que très peu de suspense. Mais un récit pas mal mené auquel on emboîte le pas (trop) facilement. L'intérêt réside d'ailleurs à mon avis plus dans le côté nature writing de cet Ouest, pas non plus indélébile, mais qui donne un joli rôle aux abeilles, symboles industrieux et écologiques, par opposition au pernicieux des villes.

                                Celles de la rivière est dans la lignée  des romans retour aux sources. Le surnom du père, Bear, ramène au native Americans bien qu'il ne soit fait mention d'aucune indianité du personnage. Le ton fantastique mais bienveillant du roman est assumé par des silhouettes flottantes mais rassurantes qui doublent en quelques sorte les deux héroïnes. La sympathie du lecteur est cependant trop vite orientée, et les malfaisants bien peu nuancés pour que nos pulsations rythment l'aventure autrement que comme une aimable promenade aux extrémités occidentales de l'Amérique, en compagnie de personnages tout de même d'un classicisme assez convenu. Cependant je persiste, ce fut une lecture plaisante. Ce n'est pas toujours le cas. Et ce n'est que le premier roman de Valerie Geary.

25 novembre 2015

Mon été avec le grand Will, scène 8

                                        Promis. Encore un billet la semaine prochaine et je ne vous embête plus avec mon copain Will. Jules César occupe une place un peu à part dans l'oeuvre de Shakespeare. Ni pièce historique (tous les rois d'Angleterre) ni tragédie HamMacOth (j'adopte parfois le langage geek) Jules César est toute entière centrée autour du climax du meurtre du consul, Jules n'ayant jamais été empereur. Peu de films vraiment axés sur la pièce, mais deux chefs-d'oeuvre qu'il m'a beaucoup plu d'évoquer devant mes élèves, les plus studieux qui soient.

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                                        1952, Joseph Mankiewicz réunit le très officiel acteur shakespearien John Gielgud, James Mason et leur adjoint à la stupéfaction générale Marlon Brando dont la toge en Marc-Antoine semble encore auréolée de la sueur de son tee-shirt dans Un tramway nommé désir. Mankiewicz refuse le spectacle, le peplum alors que triomphent La tunique ou Quo vadis. Le film Jules César magnifie le génie de Shakespeare sans grandes scènes de foule, juste les Romains devant le sénat lors des discours de Brutus et d'Antoine. Bien sûr on envisage la fameuse accusation de "théâtre filmé". D'abord pourquoi pas? Une pièce bien captée  peut valoir un film platement tourné. Et puis ce n'est pas vrai. Les ombres du verger des conjurés, les statues pontifiantes par exemple sont de belles idées de mise en scène. Et, morceau de bravoure, l'oraison funèbre de César prononcée par Antoine, douze minutes, est un régal de manipulation de l'auditoire servi par un Brando retors, cauteleux, démagogue de génie.

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                                         César doit mourir est une extraordinaire reconstruction d'une expérience ayant cours dans la prison romaine de Rebibbio. Les frères Taviani, octogénaires, bien délaissés depuis leurs chefs-d'oeuvre des années 70, frappent très fort à la Berlinale de 2012. L'Ours d'Or est attribué à ce film coup de poing, 1h15 au coeur et à l'estomac. La couleur très tranchée de la dernière scène de Jules César, représentation donnée par les condamnés longue peine, pas des voleurs de boosters, des durs, fait place après leur triomphe à leur retour en cellule. La vie continue, enfin la vie à Rebibbio. Retour au noir et blanc carcéral pour le casting, les répétitions de ce beau projet. Paolo et Vittorio ont retrouvé l'acuité de Padre Padrone ou de Saint Michel avait un coq.Les convicts s'investissent avec enthousiasme, s'accaparant les défroques de César, de Brutus, d'Antoine. Il y a même, oui, des sourires.

 

                         Quand sous l'oeil du génial duo et la plainte d'un saxo déchirant les taulards s'emparent de cet espace de liberté qu'est l'art, quand la fièvre du jeu, de la parole et la magnificence du texte déchirent les hauts murs de la périphérie romaine, on vit avec Cesare deve morire une expérience inoubliable, dirigée par le metteur en scène Fabio Cavalli. Et l'on a vu l'un des films les plus forts de ces dix dernières années. Cette totale congruence du théâtre relayée par un solide et bouleversant témoignage cinématographique semble héritée de Rossellini. On ne peut mieux dire. Nanni Moretti, autre grand ami, a permis la distribution de ce film. M'étonne pas de lui.

                    Dasola a vu César doit mourir à sa sortie: http://dasola.canalblog.com/archives/2012/10/12/25278828.html

 

 

23 novembre 2015

In the name of rock/Ruby

 

                                                 J'ai toujours adoré cette chanson devenue un classique. Ecrite en 67 par Mel Tillis elle fut d'abord un succès country un peu fadasse. Jusqu'à la version  plus punchy, celle de Kenny Rogers que je vous propose. De grands folksingers l'ont reprise régulièrement, Roger Miller, Waylon Jennings, Carl Perkins forcément plus rock. Chris Isaak aussi. Mais je ne connaissais pas vraiment le sens du texte de Ruby, don't take your love to town. C'est en fait l'histoire d'un vétéran de Corée ou du Vietnam ou d'où vous voulez, condamné au fauteuil roulant et qui vit dans la  peur que sa Ruby n'emmène son coeur à la ville. Selon les versions ça se termine par un meurtre ou un suicide ou plus souvent les deux. Comme la fin d'un Voyage au bout de l'enfer. Depuis des jours j'essaie de la jouer. Le résultat est pour l'instant indigne. Si j'osais...mais j'oserai jamais...je demanderais à Celestine.

                                Bien sûr il y eut d'autres Ruby dans ma vie, la Ruby Baby de Dion (mais j'étais impubère), la Ruby Tuesday des Stones, la Ruby Love de Cat Stevens, mais on en sort, de Cat Stevens. Mais je t'en supplie "Ruby, don't take your love to town".

21 novembre 2015

Les plumes...by Asphodèle: Tendre, l'oreille

 Les plumes

                                         Résultats du ramassage asphodélien de cette semaine: belle-gardien-lapin-destinée-envoler-fermer-souffle-partage-quitter-s'abstraire-voyage-cavale-réchapper-chose-respirer-poète-nid-rêve-vie-doux-fugue-oiseau-imaginer-balles-poudre-bercé. Soit 26 mots à notre disposition, lourde responsabilité.

                                         Ouf, reprenant peu à peu son souffle dans le hallier encore très touffu, curieusement silencieux en cette fin de premier dimanche, Jack le Lapin se surprit à espérer en réchapper. Bien peu d'oiseaux aux branches des chênes ou des frênes tremblotants, et la poudre n'était pas que d'escampette. Jack ne quitterait sa planque que lors des derniers aboiements des mâtins dans le soir débutant. Pour cette journée il n'avait pas trop à se plaindre, mais il avait vu Roger et Bunny exploser en vol, leur cavale s'était avérée mortelle. Il craignait de ne pas finir cette troisième saison de chasse, une moyenne de survie pour son espèce. Seul les lapins des poètes parvenaient à s'abstraire de la statistique, chez M. Carroll, de blanc vêtu, par exemple. Ou chez Mme Potter. Ou les lapins des vitrines pascales qui au moins avaient une chance de provoquer une belle indigestion chez les enfants des hommes, de ces hommes dont balles ou cartouches, j'ignore tout des choses cynégétiques, décimaient allégrément chaque automne la gent lagomorphe, faisant si bon marché de la vie dans le bocage, anéantissant le doux rêve de paix sur le terroir.

                                         Imaginer l'existence autrement qu'une fugue perpétuelle serait vain. La destinée de ces paisibles herbivores était ainsi écrite. Jack devait s'estimer heureux. Au moins il respirait en ce septembre vespéral, comme quelques bartavelles qui s'étaient envolées à temps, sursitaires. Ainsi soliloquait Jack le Lapin, fatigué et plus du tout bercé de la moindre illusion. C'était juste avant que le brodequin ne se ferme sur son antérieur droit. il n'aurait même pas en partage une mort au front comme ses amis. Son dernier voyage serait une longue agonie. Ainsi va la vie. Le pire, ultime gardien, est souvent à venir.

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                                          Ce texte est pour moi une très ancienne résurgence. Celle d'un bel album illustré des Contes du Lundi d'Alphonse Daudet. L'une des nouvelles était Les émotions d'un perdreau rouge. J'avais trouvé ça très beau. C'est l'une de mes plus lointaines lectures. J'ai ainsi eu envie d'y revenir mais en y mettant l'accent grave.

P.S.Le mot nid n'y figure pas.

                                         

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