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12 juillet 2014

Japoniserais-je, finalement?

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                                             Et si oui il faudra s'en prendre au Bison, La Mort, l’Amour et les Vagues [Yasushi Inoue]  qui, non content de ses grands espaces, et de ses soirées musicales jazz, blues and co., est doucement en train de m'intéresser à la littérature nippone. Yasushi Inoué (1907-1991), je ne le connaissais pas mais l'Herbivore que vous savez, qui en parle si bien a titillé ma curiosité. Et au hasard ou presque j'ai choisi ces trois nouvelles réunies dans La chasse dans les collines. Il est finaud le Ruminant, car ces trois histoires sont un modèle de narration, sobriété toute orientale, essentiel du récit apparaissant comme les gravures japonaises minimalistes, mais d'une acuité précieuse. Les thèmes sont d'un Japon éternel donc absolument contemporain, où rôde toujours comme un vieux code samouraï, incluant retour nature et disparition de l'individu envers la société. La première de ces nouvelles, éponyme, traite de l'adultère, au delà du doute, chez un chasseur qui trouve le mouchoir de sa jeune épouse dans un bois non loin de la maison. Pas de grand scandale, ni de violence, et puis il y a une belle différence d'âge... Alors rien de très grave,sauf que l'homme ira plus mal qu'avant...        

                                           Veillée funèbre traite aussi du couple mais pas seulement. Le grand journaliste avait presque disparu depuis trois ans. Mort le lendemain de son retour à Tokyo. Une inconnue soulève le voile mortuaire, inconvenant. On apprend au fil des 80 pages que cette femme a vécu avec lui pendant ces années dans des conditions un peu spartiates, et épisodiquement. Cela suffit-il à parler de liaison? Cette femme écrit deux lettres, à la veuve,et à l'homme lui-même. Sur la difficulté d'être l'irrégulière, encore que dans la culture japonaise le mot de maîtresse n'est probablement pas le terme qui convient. Il y a dans ce pays de telles spécifités morales et sociales que beaucoup de finesses peuvent nous glisser entre les mains, poussières spirituelles très stimulantes néanmoins.

                                           Dans Sannomiya en feu, ma nouvelle préférée, Kobé, sous les bombardements, nous suivons un groupe de filles délinquantes, délinquantes comme là-bas, dont le plus grave délit est d'entrer au cinéma sans payer. Ainsi quelques mois de la vie de ces filles dans un Japon à feu et à sang. Paradoxalement, Omitsu et ses amies, éprises de liberté, sorte de zonardes en une ville mutante, ne connaissent-elles pas ainsi le meilleur de leur vie? Comme en témoignent ces dernières lignes, stupéfiantes et fulgurantes.

                                           Aujourd'hui encore, il m'arrive de me rappeler la beauté des langues de feu dans lesquelles je vis se consumer Sannomiya. Des flammes hautes et basses léchaient le ciel noir, crachant de temps en temps des gerbes de petites étincelles tremblotantes, d'une beauté fugitive. Ce brasier dévorant engloutissait un monde : c'étaient les arbres qui bordaient nos rues, les toits et les fenêtres de nos immeubles qui s'effondraient. Et il se dégageait de ce magnifique incendie quelque chose qu'en cette époque sombre il était sans doute permis de nommer "beauté".

 

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Commentaires
A
Je le connais cet auteur, je l'ai même lu plusieurs fois à ma période sinisante et japonisante ! Mais j'ai beaucoup oublié... Me restent en mémoire ces fameux codes dont tu parles, les honneurs perdus des samouraïs qui existent encore sous une autre forme... Tu en parle très bien, ta sensibilité a saisi un bout de l'âme insaisissable de ce mystérieux pays... Sinon, pour les amours, irrégulières ou pas c'est un peu comme chez nous, avec la mort en plus, le seppuku fatal... Mais c'est plus compliqué que cela encore, en fonction de l'âge des protagonistes ! Bises et à ttds :)
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S
Encore un nouvel horizon qui s'ouvre pour toi, Edualc :wink:<br /> <br /> Tu pourras désormais faire des LC avec Jean-Charles !<br /> <br /> Ta plume raffinée et toute en nuances colle à merveille à cette littérature japonaise.<br /> <br /> <br /> <br /> Je ne me suis pas lancée encore dans cette littérature, j'y pense souvent quand je vais rôder dans ma grande librairie, mais je n'ai jamais osé franchir le pas.<br /> <br /> J'aimerais certainement cette sensibilité et subtilité précieuses de ce Japon fascinant... où la délinquance a un tout autre visage que celle que nous subissons chez nous, hélas...<br /> <br /> <br /> <br /> Bisous de Lyon
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L
J'en suis même jaloux, parce que je ne connais même pas ce Inoué. Tu m'as convaincu (bon, ok, je crois que j'étais déjà convaincu avant, mais quand même !).<br /> <br /> Heureux que tu y es trouvé du bon temps à découvrir cette lecture japonisante. Et au final, cela ne fait pas si longtemps que j'ai redécouvert cet auteur. Un grand qui sait dégager des émotions de sa plume, même si certaines restent froides. Mais la mort, la passion, l'adultère sont des sujets dont il décrit bien leur complexité.<br /> <br /> Bravo pour ce passage à la lecture du soleil levant !
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N
Non seulement il nous japonise et nous titille l’âme agréablement, mais en plus, il est en train de me Bukowskyniser! La chronique japonaise te va bien Claude. Tu en parles avec cette délicatesse qui leur est propre. « Les thèmes sont d'un Japon éternel donc absolument contemporain, où rôde toujours comme un vieux code samouraï, incluant retour nature et disparition de l'individu envers la société ». J’aime ce regard d’un Japon « éternel »…<br /> <br /> Bonne journée
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C
J'en connais un à qui tu vas faire plaisir, j'ai parlé du Choupinet de ses dames...<br /> <br /> De japonais, je n'ai lu que le premier tome du best seller 1Q84.<br /> <br /> Encore une fois tu donnes envie de lire, surtout la troisieme nouvelle.<br /> <br /> En secouant le chiffon de ces "poussières spirituelles" on a les narines frémissantes d'un délicieux chatouillement, et l'on sait déjà qu' éternuer sera un vrai bonheur orgasmique.
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