Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
BLOGART(LA COMTESSE)
Derniers commentaires
Pages
25 janvier 2023

Please allow me introduce myself

Des diables

                   Joseph, plus très jeune, joue du piano dans les gares et les aéroports. Quelle belle image. Je crois qu'il en faudrait dans les écoles, à la poste, voire en prison. Rêvons. Il se raconte. A seize ans il perd ses parents et sa soeur dans un accident d'avion. Il se retrouve aux Confins, une sorte d'orphelinat bien nommé aux fins fonds de l'Ariège, entre France et Espagne. Dans cet établissement un piano mais nul n'a le droit d'y toucher, probablement un peu diabolique.

                  Les pensionnaires de ce pénible centre ont entre huit et dix-sept ans. Joseph y est placé l'été 1969. Neil Armstrong fait quelques pas appelés à un certain retentissement. Mais Joseph, lui, s'intéresse à Michael Collins qui tourne en rond autour de la Lune, taxi driver oublié de l'Histoire. Jean-Baptiste Andréa emmène aussi Beethoven dans cette aventure adolescente en ce lieu clos, malsain et cruel. L'ambiance carcérale est cependant étoilée d'humour et de fantaisies malgré la dureté de l'abbé directeur et le sadisme du surveillant. La société secrète me fait penser aux mythiques Disparus de Saint Agil, drolatique roman et film des années trente. Dans ce huis clos, cachots et obscurité mais un espoir. Au sens propre, Pyrénées obligent, un espoir au bout du tunnel. 

                L'amitié, l'amour se faufilent dans la vie de Joseph, qui se remémore les leçons de son vieux professeur de musique, pas toujours très tendre, mais si efficace. L'auteur réussit un très beau roman, émouvant et lumineux, tragique et drôle. Ce livre est finement martelé, un sens du rythme surprenant avec entre autres un culte (voir le titre) au Sympathy for the devil des Stones. Joseph est vraiment un héros de roman par excellence, balloté par la vie, cabossé mais debout, jouant son hymne à la liberté en majeur. On souffre, on peine, on aime avec lui et son souffle nous contamine, presque au sens propre. Après Des diables et des saints je crois que vous approcherez du gars ou de la fille qui joue du piano Gare du Nord (c'est la mienne). 

Publicité
21 janvier 2023

Coup de (Red) Bluff

Black

                   Blackwood est notre roman commun de fin d'année, à Val et moi. Blackwood – Michael Farris Smith. Pas vraiment un cadeau à mon avis. Sera-t-elle d'un avis différent? Le kudzu, plante grimpante invasive, a envahi Red Bluff, coin paumé du Mississippi. C'est le Sud, celui, bien que plus tardif, de Faulkner, de Caldwell, de beaucoup d'autres. J'avais aimé Nulle part sur la terre. Moins Blackwood qui flirte un peu avec le fantastique.

                  1976, Colburn, la trentaine, revient au pays où il a connu un drame enfant expliqué dans le court prologue, effrayant. La bourgade a changé, désertée et sans entrain. Il est artiste plasticien, plasturgien, et récupère métaux et ferrailles. Je trouve que ce n'est déjà pas très glamour. Très vite on est plutôt dans le réglement de comptes dans l'air vicié de ce Sud profond. Savez-vous qu'en Amérique le Sud est toujours profond? Le fameux kudzu, et les rancoeurs. Plutôt un taiseux, Colburn, mais personne n'est loquace dans le comté. Quand deux enfants disparaissent mystérieusement l'ambiance s"alourdit salement. Il y a bien un sherif, un bar, mais cette alchimie pour moi n'a guère pris.

                  Il semble même que j'ai déjà un peu de mal à me remémorer ce roman lu il y a à peine quelques semaines. Mauvais signe. Et je me pose quelques questions subsidiaires sur le sens d'une lecture à la quelle on ne mord pas, et sur mes propres capacité à m'y investir? Et si était venu le temps de relire. Relire, je ne l'ai fait que deux fois. Pour Le désert des Tartares et Le nom de la rose. Et ça m'inquiète un peu d'en être là. Le kudzu, un kudzu moral m'envahirait-il? 

20 janvier 2023

Mort d'un Oyseau

SLXYH6PPYVEZ3A72H2VEKM6KD4

David-Crosby-The-Byrds-011923-3-a4280be809e4404ba6f5c3ab81173479

                         Ce blog commence à accuser son âge. Et j'ai vraiment l'impression qu'il tourne uniquement à la rubrique nécrologique. L'adieu à David Crosby est une étape de plus. Les Byrds, chantres du folk électrique, avec Stills and Nash, puis avec Stills, Nash and Young, en duo, seul, avec d'autres. Six décennies. Allez, pas de dithyrambes, pas trop de larmes, la musique...Je ne vais pas refaire l'historique. Tamalpais High.

  

              David Crosby ne fut pas un parangon de vertu. C'est le moins qu'on puisse dire. Moi non plus. Mais je suis peut-être moins bon 🎸. Alors je partage avec lui Guinnevere, toutes proportions gardées. 

         

          

14 janvier 2023

Eloge du court

M02072951070-large

                Roberto Saviano est célèbre plus pour le sort qui lui est promis que par ses écrits. Depuis Gomorra (2006) consacré à la Camorra, triomphe littéraire international, devenu film de Matteo Garrone puis série, Saviano vit à l'étranger sous protection, menacé par la pieuvre napolitaine. Deux nouvelles dans ce mince recueil. Seule la seconde, La bague, revient sur la mafia, narrant en vingt pages comment Vincenzo et Giuseppe, deux jeunes napolitains n'ont pu survivre. Leur crime, avoir tenté de résister à l'horreur ancestrale. Sobre, serrée, essentielle, l'écriture de Saviano installe très vite le décor. Et la honte de vivre là, en cette ville gangrenée où le simple fait de naître est une faute, où le premier souffle et la dernière quinte de toux ont la même valeur, la valeur de la faute. C'est bref, précis, la violence y est fulgurante j'oserai dire, hélas, efficace. Cette saloperie de société criminelle, bien loin du Parrain, se porte bien. 

              La première nouvelle, Le contraire de la mort est sous-titrée Retour de Kaboul. Maria n'a que dix-sept ans quand son amoureux s'engage dans l'armée. Et c'est l'Afghanistan. A priori seul ascenseur social envisageable pour un petit gars de Naples. Et puis les talibans, un camion, ou un char. Maria ne sait pas très bien et semble peiner à comprendre. Sans grandiloquence ni pathos Roberto Saviano cerne bien la jeune Maria, presque une enfant. Ces guerres récentes, un peu oubliées. Les morts de Bosnie, du Kosovo.

              80 pages, regroupées sous le vocable Scènes de la vie napolitaine, et c'est assez pour saisir le drame intime de Naples, de la Campanie, et accessoirement du monde entier. Je ne tresserai jamais trop les louanges de la concision. A l'heure où le moindre auteur nous gratifie de 500 pages parfois indigestes, où tout metteur en scène de cinéma croit déchoir en dessous de 140 minutes, ça me plairait, ça, l'essentiel. 

12 janvier 2023

Jeff's last boogie

abd52ae4262f7e36214206d56ba6f8f1-1673475436

                Non Jeff t'es pas tout seul. 🎸The Yardbirds, Jeff Beck Group (Rod Stewart, Ron Wood), Beck, Bogert and Appice. 

Publicité
2 janvier 2023

L'apprenti puisatier

product_9782072881817_195x320

            Je n'avais jamais lu le Prix Nobel 2006. La femme aux cheveux roux est un très beau roman qui en dit beaucoup sur la Turquie d'aujourd'hui. Très riche, assez complexe, qui donne le ton d'une littérature très indépendante, forcément peu en cour à Ankara. Abandonné par son père, Cem vit seul avec sa mère dans ce qui est encore la campagne près d'Istanbul. Il travaille pour un puisatier avant son entrée à l'université. Il fait la connaissance d'une comédienne de théâtre, aux cheveux incendiaires, le double de ses dix-sept ans. Une seule nuit bouleversera sa vie. Vingt-cinq ans ont passé.

            Vingt-cinq ans ont passé, Cem a bien changé, Istanbul aussi, et toute la Turquie, cet état sur deux continents, ce qui n'est pas fréquent. Etudes brillantes, un mariage plutôt heureux, mais sans enfant. Loin des travaux physiques exténuants, Cem est devenu un géologue réputé, puis  businessman, plutôt acquis aux idées neuves, obsédé par un drame dont je ne dévoilerai rien, et aussi par la paternité, le mythe d'OEdipe meurtrier de son père, omniprésent au long du roman. La réussite économique de Cem ne suffira pas, malgré son épouse aimante et aimée, à faire de lui un homme en paix.

            Les ombres du passé n'en ont jamais fini. Qu'est devenu son maître puisatier? Disparu depuis si longtemps? Les scènes très belles de forage artisanal à la recherche de l'eau, encore rudimentaires en ces années, sont parmi les plus belles du livre. L'initiation de cette fin d'adolescence a été double, la quête de l'eau, si cruciale, et l'éveil amoureux pour la belle actrice, ardente à la chevelure de feu, ensorcelante. Ainsi donc, quelques semaines dans la vie d'un tout jeune homme suffisent à orienter douloureusement toute uen existence. Brûlure jamais tout à fait ne s'apaise. 

            La femme aux cheveux roux passionne de bout en bout et donne envie d'approfondir l'oeuvre d'Orhan Pamuk. Istanbul est bien sûr plus qu'un décor. On voit la ville changer au fil du bouquin, devenir tentaculaire et indéfinissable. Métropole, mégapole, mégalopole, elle échappe aux personnages qui tous, finissent par s'y perdre. Tout est si fragile, comme le sol turc, en proie aux séismes. De l'hommage au théâtre populaire, engagé, aux remords et regrets d'un père qui s'ignore, le voyage dans la vie de Cem est une belle expérience. 

            

Publicité
BLOGART(LA COMTESSE)
Publicité
Archives
BLOGART(LA COMTESSE)
Newsletter
32 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 369 695
Publicité