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16 mars 2024

La menace

 

     La série TV m'a donc envie de relire La peste. Or, je ne relis pratiquement jamais. Mais je crois que ça valait le coup. De plus je l'ai lu dans le Livre de Poche, il appartenait à mon père et ce n'en est que plus émouvant. La couverture en est magnifique et est restée assez célèbre. Retrouver cinquante ans plus tard Rieux, Tarrou, Grand, Paneloux, des noms que j'avais ensevelis sous des monceaux de pages lues de ci de là, a été un moment rare de lecture. Le néo-fléau universel d'il y a quatre ans n'est pas étranger à ça et quelques souvenirs, notamment du printemps 2020, sont encore vivaces. Toutes proportions gardéés, cela va de soi.

     Oran, années quarante, un pays qu'Albert Camus connait bien. Les rats menacent la ville et très vite, il faut accepter l'évidence, l'épidémie dissémine sa malédiction. La peste, publié en 1947, demeure un roman magnifique, d'une indicible beauté et d'une richesse absolue. Tous les acteurs de cette tragédie sont si bien analysés par l'écrivain, la ville d'Oran semble se recroqueviller sur elle-même, les fragilités de chacun, médecin, journaliste, prêtre, rentier, nous pénètrent comme je l'ai très rarement ressenti. Il faudrait citer tant de lignes de La peste.

     On peut évidemment disséquer La peste, métaphore, parabole, ce qui s'est beaucoup fait. Mais La peste va plus loin que les gloses et les palabres. La peste se ressent, La peste est contagieux. C'est un roman qui se vit, de chair et de sang, de bubons et de secrétions, d'angoisse et d'espoir. C'est un livre qui fait du lecteur un homme dans la ville. Un homme qui, alors que s'éloigne le spectre, ne sortira pas indemne de cette aventure humaine, dont planent plus que jamais les réminiscences. 

     Rieux n'avait plus devant lui qu'un masque désormais inerte où le sourire avait disparu. Cette forme humaine qui lui avait été si proche, percée maintenant de coups d'épieu, brûlée par un mal surhumain, tordue par tous les vents haineux du ciel, s'immergeait à ses yeux dans les eaux de la peste et il ne pouvait rien contre ce naufrage. Il devait rester sur le rivage, les mains vides et le coeur tordu, sans armes et sans recours, une fois de plus, contre ce désastre. Et à la fin, ce furent bien les larmes de l'impuissance qui empêchèrent Rieux de voir Tarrou se tourner brusquement contre le mur, et expirer dans une plainte creuse, comme si, quelque part en lui, une corde essentielle s'était rompue. 

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L
j'aime beaucoup ce billet et je suis bien d'accord : ce livre est à lire et relire
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