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BLOGART(LA COMTESSE)
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italie
9 novembre 2008

Paolo et Vittorio vont en bateau

   Film d'avant leur célébrité,d'ailleurs plutôt furtive eu égard à une certaine versatilité me semble-t-il de la critique,prompte à brûler ce qu'elle a adoré,Saint Michel avait un coq (71) annonce ce qui sera pour moi le meilleur des frères toscans,Allonsanfan.Proches d'un marxisme qui serait intelligent et là les frangins sont plutôt seuls,ils nous racontent leur Italie,rêvée mais réelle.Une Italie du XIXè Siècle,avec ses mouvements insurrectionnels précoces et que l'on idéalise facilement en France peut-être.J'ai déjà écrit sur Allonsanfan et San Michele aveva un gallo en est en quelque sorte le prologue.Le héros en est Giulio Manieri,leader de la révolte.Mais cette révolte est un peu en avance et arrêté mais surtout incompris Manieri croupit dans sa gêole. 

   Toute la deuxième part de ce film se passe en prison,à l'isolement et cela nous vaut des scènes très fortes.Il décide en effet de lutter contre cet internement et la folie qui le guette de vivre "normalement".Il tient des réunions politiques avec ses anciens amis,tenant leur rôle à chacun et les plaçant dans la cellule.Avec plaisanteries et querelles de compagnons de lutte.Il "déguste " son horrible soupe en la nommant de termes culinaires fins,champignons à l'émincé,petits légumes de saison,etc...J'ai trouvé cette séquence fascinante et Giulio Brogi,acteur peu connu mais habitué des Taviani,y est remarquable.

   Ce film,carrément scindé en trois,se clôt par un long voyage en bateau car Giullio change de prison et part pour Venise.Sa barque y croise celle d'un groupe de prisonniers avec lesquels il échange des propos sans les convaincre de la justesse de ses thèses car Giulio n'a guère changé.Très belle scène avec le père d'une prisonnière qui suit sa fille en barque le plus longtemps possible,quand elle-même le supplie de partir.Déchirant dans la sécheresse du traitement,les Taviani n'étant pas des sangloteurs.Cette longue croisière scelle surtout l'incompréhension totale et en fait l'enfermement moral dans lequel va finir par sombrer Giulio.A cette fable désespérée,très belle,je préfère cependant la douloureuse remise en question de Mastroianni dans Allonsanfan.

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26 octobre 2008

Emois au lac de Côme

Un été

  Alberto Vigevani est un auteur inconnu...Les amis de Parfum de Livres,que je fréquente assidument,m'ont fait découvrir cet auteur italien né en 1918 et dont la discrétion n'a d'égal que le talent.Il y a dans Un été au bord du lac une belle finesse d"analyse de ces fameux premiers émois que l'on a tous connus.Un livre qui aurait dû ravir François Truffaut par exemple.Un univers de questionnement sur cette douleur de l'adolescence quand se tord un peu le coeur pour mieux voir.Avant guerre,le jeune Giacomo,trop jeune pour les grands,plus pour longtemps,passe ses vacances d'adolescent milanais privilégié sur les rives du lac de Côme.Il se prend d'amitié pour Andrew,enfant venu d'Angleterre avec sa mère.Andrew est gravement malade et en cette fin d'été Giacomo le sensible cherche à atténuer sa peine.Il trouvera ainsi sa propre peine dans cette nouvelle fragilité du coeur qui bat un peu fort la chamade à la vue de la mère d'Andrew.

  Sur ce sujet somme toute très classique Vigevani brode de fort subtiles variations autour d'infinis détails,une maquette de bateau,une baignade,un sentier de montagne.C'est magnifiquement écrit et ce déchirement qui perce la jeune âme de Giacomo,il faudrait être une brute pour ne pas en saisir la grâce.A des années-lumières de tout tapage ce court roman est inoubliable.

25 octobre 2008

Afrique ma douleur

      Prochainement.Ce livre,antérieur à L'homme qui voulait tuer Shelley,que j'ai présenté il y a quelques mois, se lit comme une belle aventure certes très morale,mais bien écrite et qui mêle le récit d'aventures aritimes,très classique,et le conte un peu édifiant sur la fraternité.

     Yann,jeune Breton,embarque comme mousse sur le Sainte Anne.Or ce navire s'avèrera être un négrier,à sa grande surprise vu sa naïveté.Le troisième officier,Floriano,se révèlera et se rebellera contre l'odieux trafic,scellant ainsi son destin contre les méchants de service,à savoir le Chirurgien(surnom) et ses complices africains.Mais rassurez-vous il y a aussi de bons Africains et ensemble ils créeront Aldébaran, communauté utopique et melting-pot improbable sur les côtes d'Afrique de l'Ouest.Avec sa dose de traîtrises,ses bons sentiments et ses mutins violents mais souvent au grand coeur Le troisième officier est un livre de bonne facture dont on se doute qu'il ne sera pas le livre inoubliable d'une vie de lecteur.Mais combien de livres peuvent-ils prétendre à cette envergure?

19 octobre 2008

Trois visages d'Italie

trois_frer

  .Italie du Sud,1980,trois frères qui se sont perdus de vue ou presque ,se retrouvent pour les obsèques de leur mère. Raffaele est juge à Rome.Rocco éducateur à Naples.Nicola ouvrier à Turin.Le Nord industriel,la capitale administrative,le Sud déshérité.Toute notre Italie.J'aime beaucoup Tre fratelli,une oeuvre majeure à mon avis dans la filmo de Rosi,qui a su mêler émotion et intelligence,la première ayant peut-être manqué à Francesco Rosi pour devenir populaire au lieu d'être seulement respecté,ce qui n'est déjà pas si mal.Le père,marmoréen et impressionnant Charles Vanel,accueille dans sa maison à la campagne ses trois fils,si différents et qui n'ont plus grand-chose en commun.Pas sûr d'ailleurs car petit à petit en ce temps rétréci,quelques jours,ils vont se retrouver partiellement, presque subrepticement.Une différence d'âge assez importante et des vocations très diverses les ont éloignés.Pourtant Rafaele,Rocco et Nicola sont bien frères,bercés chacun d'étranges inquiétudes,tous trois proches de Francesco Rosi,qui en parle très bien dans le document joint à ce beau coffret DVD.

   Les dialogues,sages et réfléchis,en disent long sur l'éternelle déliquescence italienne,qui n'en finit pas de renaître de ses cendres.Les Brigades Rouges,la lutte des classes,la délinquance sont au coeur du dossier car Rosi est l'un des rares réalisateurs à savoir vraiment parler de la justice.Nanti de quelques retours en arrière et d'un zeste d'onirisme,Trois frères touche au coeur du spectateur, l'humanité héritée du lointain Néoréalisme baignant le film et lui conférant une sorte de légitimité pour qui s'intéresse à l'histoire de l'Italie.Et comme il me semble impossible de séparer les deux termes cinéma et Italie...

   Le juge,Philippe Noiret,renvoie à peu près dos à dos les violences,sans circonstances atténuantes au terrorisme. L'éducateur, Vittorio Mezzogiorno,excellent acteur tôt disparu,doux et grave dans sa naîveté et l'ouvrier instable et divorcé,Michele Placido,complètent la fratrie dont je ne peux que vous inviter à faire la connaissance. Dans ce coffret baptisé Civilita contadina incivilita urbana nous reparlerons bientôt d'Oublier Palerme et de Le Christ s'est arrêté à Eboli,à mon sens le plus beau film de Francesco Rosi.L'ami Ed, lui, vient de nous parler,très bien,de Lucky Luciano.

31 juillet 2008

Une bonne notte

        Aorès La nuit une légère déception car je préfère les deux autres volets de cette fameuse trilogie de l'incommunicabilité antonionienne.Je ne suis plus très sûr d'avoir d'ailleurs vu le film en entier avant ce jour.J'avais surtout souvenance de la soirée mondaine et de ces personnages en noir et blanc,vaguement erratiques,souvent filmés en plongée comme en un ballet drôlatique et d'une totale vacuité.La nuit reste un film remarquable et il arrive même que l'émotion affleure,notamment la scène de de l'hôpital et de l'ami si malade du couple Mastroianni-Moreau.Pourtant il me paraît que La nuit se présente davantage comme une suite de vignettes existentialistes un peu artificiellement enchaînées en 24 heures d'un récitatif minimaliste:l'hôpital,le cocktail à la maison d'édition,la soirée,la rencontre avec Monica Vitti,jeune fille de la maison et peut-être symbole d'une liberté tonique que Giovanni(Mastroianni), écrivain,comme par hasard dans le monde hyperintellectualisé du cinéaste Antonioni de ces années soixante,a perdue depuis longtemps.

   La balade nocturne de Jeanne Moreau dans Milan ne me convainc pas vraiment.Je lui préfère l'île close ou presque de L'Avventura et pourtant La nuit est souvent préférée de peu à ce dernier et à L'éclipse.Je crois que c'est dû à Marcello Mastroianni,tout en retenue,si loin du matin lover,intellectuel encore jeune et fatigué,un des plus grands acteurs du siècle.Calme et mortifié il sait donner à ce ce cinéma de Milan,ennemi intime du cinéma de Rome,si charnel, l'étincelle de génie qui fait de La nuit un très grand film,malgré mes préférences.Je sais que l'on a le droit de penser qu'Antonioni se regarde filmer. Mais,imperturbablement, j'aime tant ce narcissisme que je comprends mal l'enfermement dans lequel on réduit souvent le grand Ferrarais.On peut retrouver dans Cinéma d'Italie plusieurs autres notes sur Antonioni,ce grand monsieur qui m'a fait aimer,beaucoup,bourgeois et blasés qui ont bien le droit d'être malheureux.

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24 juillet 2008

Risi le montreur de monstres

     En 71 quand Dino Risi,récemment décédé,signe Au nom du peuple italien,la comédie italienne, justement,  a cessé de plaire vraiment. Ainsi vont modes et courants au cinéma comme ailleurs. On y trouve bien encore le duo de comédiens,Gassman histrion et Tognazzi sur la réserve mais ce sont un peu les derniers feux de ce genre typiquement italien.Quelquefois cela a pu être le contraire dans les castings, les cinq magnifiques comédiens transalpins s'étant combinés de de toutes les façons.Le sujet en est la corruption dans l'immobilier,les louches acquaintances,les dérives populistes.Ce thème est proche du cinéma de Francesco Rosi mais il est bien dans la manière de Dino Risi.Car avec le personnage d'entrepreneur joué par Gassman on tient vraiment un de ces monstres de la comédie italienne. Hableur, baratineur, corrompu, peut-être meurtrier,et pourtant comme tous ces héros de Risi,Germi,Monicelli et consorts on ne peut s'empêcher de l'aimer et de le trouver sympathique.En contrepartie le procureur, parangon de vertu interprété par Tognazzi nous ennuie un peu avec sa mobylette et son honnêteté.C'est ainsi que vont les choses:il arrive que de braves types nous cassent les pieds et certains escrocs sont parfois bien séduisants.

      Dino Risi n'a jamais eu la main trop légère et tout son cinéma s'en ressent.Pourtant le déferlement des tifosi dans Rome à la fin du film,après le match Italie-Angleterre,n'est rien moins que prémonitoire.On a beau dire on ne dira jamais assez de mal des supporters.Scène hilarante aussi que la première convocation de Gassman dans les bureaux minables et surchargés de Tognazzi(misère de la Justice dont le Palais s'effrite) quand le premier apparaît en costume de centurion.Clin d'oeil à la Rome décadente?J'ai dit mille fois la grandeur du cinéma italien.Tiens ça fait mille et une fois.

15 juillet 2008

Le souffle un peu court

              Il faut bien l'admettre, oui,le souffle des deux frères s'est singulièrement affadi depuis bien des années. Et ce Kaos II(Tu ridi) n'enthousiasme guère comparé au premier opus,une perle de pirandellisme cinématographique où le génie du grand dramaturge s'amalgamait si bien de la mise en scène si profonde des Taviani.Deux nouvelles donc de Pirandello:Tu ris et Deux enlèvements que les Taviani réalisent correctement mais sans la flamme de Kaos,contes siciliens.Dans le premier un ancien baryton devenu comptable au Teatro dell'Opera mène une vie besogneuse. Mais la nuit...il rit,rêves enfuis,souvenirs de gloire,le jour il ne sait plus ce qu'a été sa nuit.Sur cette trame étroite on suit la calme dérive vers une folie plutôt douce,voire un comportement suicidaire.J'ai quand même peiné à ressentir l'émotion qui par contre m'étreint chaque fois que je revois les meilleurs films des frères Taviani.Je les ai vus plusieurs fois pour les plus grands et leur richesse m'enthousiasme encore.

     Ca s'arrange un peu avec  le deuxième conte.Un jeune garçon est enlevé en Sicile là même où un siècle avant une autre séquestration a eu lieu.Alternant passé et présent l'inspiration revient en partie surtout dans l'exploration visuelle de la Sicile du siècle dernier.(par siècle dernier chez moi entendre le XIXe).Une part de mystère demeure et c'est bien ainsi dans ce rapt crapuleux qui semble très différent de l'enlèvement plus récent.Pourtant le monde de Pirandello et des Taviani recèle en fait une grande violence et on peut voir dans ces deux tragédies l'analyse de la déshumanisation de cette société sicilienne où perce encore l'archaïsme.Kaos II,film somme toute assez cérébral et distant souffre de cette pâleur mais mérite qu'on s'y attache,plus personne en effet ne semblant s'intéresser à ces cinéastes.

22 juin 2008

Crocodile dandy

Le Caïman

             Très intéressé par les films de Nanni Moretti je n'avais pas vu  Le caïman à sa sortie il y a deux ans,craignant que Moretti n'aie donné dans le pamphlet un peu démago contre un super démago.Je considère que Le caïman,loin d'être sans intérêt,est pourtant infiniment moins personnel que la plupart des films du cinéaste.Et surtout ce film,à force d'osciller entre la charge anti Berlusconi et la crise du couple chez Bruno Bonomo,finit par se prendre les pieds dans le tapis.Si l'on comprend bien les difficultés du cinéaste de fiction(très bon Silvio Orlando) à relancer sa carrière on s'intéresse assez peu à son divorce qui nous vaut des scènes avec ses enfants assez convenues.Dans la mise en abyme(?) du film dans le film,ou de la difficulté à faire un film où un metteur en scène aurait bien du mal à faire un film critique sur l'homme au pouvoir,il s'avère que j'ai fini par me perdre un peu.Reste toujours avec Moretti un amour du cinéma et d'excellents morceaux choisis comme le débat dans la salle de cinéma ou la dérobade de l'acteur joué par Michele Placido avec cette inénarrable 'italian attitude" qui consiste à se retirer du projet "dans l'intérêt même du projet.

  Demeure la question Berlusconi,infiniment difficile à résoudre,tant le personnage charrie son mélange reptilien d'écoeurement et de fascination.Car rien n'est si simple en Italie et même Il Cavaliere peut nous surprendre.De cela Nanni Moretti,qui reste un modéré comme je les aime,parle très bien.Et curieusement,là je crois que vous serez d'accord avec moi,la fin de son film tourne presque à la tragédie bouffonne, rappelant volontairement les grands films politiques des Rosi,Petri et consorts.C'est particulièrement vrai lors de la sortie du tribunal où les défenseurs de Berlusconi finiraient par attirer la sympathie.Comme quoi le manichéisme n'est pas vraiment le défaut de Nanni Moretti.C'est aussi toute la force du cinéma italien même si chez Moretti je préfère la veine encore plus autobiographique, c'est à dire à peu près toute son oeuvre, pas encore très bien distribuée en DVD à propos.

20 juin 2008

Mario

       Ceci est une réédition d'un article de 2006.Maintenant qu'il vient de mourir peut-être attirera-t-on un peu l'attention sur ce très grand écrivain.

      J'adore parler des écrivains que j'aime et souvent je les appelle par leur prénom.Certains me sont si familiers.Voici Mario.

      Mario Rigoni Stern,octogénaire italien du nord du pays est un conteur fabuleux qui a publié de nombreux livres surtout sur la Guerre et  son pays.Le sergent dans la neige,son oeuvre la plus connue retrace la retraite de Russie en 1943 vécue par quelque soldats italiens.Le travail de Rigoni Stern est une affaire d'artisan et c'est ainsi qu'il se revendique,montagnard de culture et de tradition.Il a écrit des souvenirs de la guerre,sous formes de récits s'apparentant à des nouvelles,la plupart du temps entremêlés d'épisodes d'enfance,de nature,de chasse dans ce Haut Pays d'Asiago qu'il habite encore le plus souvent.

     Sa jeunesse passée dans les troupes fascistes l'a conduit à se questionner et à nous donner des écrits d'une humanité rare,homme de paix devenu sage que sa longue expérience des conflits a amené à rencontrer Primo Levi(très bel hommage lors du suicide de ce dernier en 87,dans Le poète secret),Italo Calvino,Mario Soldati,Elio Vittorini,les plus nobles des intellectuels italiens,tous poètes et romanciers universels.

     Souvent cité pour le Nobel,Mario Rigoni Stern n'a pas besoin de cela pour être l'immense écrivain qui appartient à tous.D'autre titres:Histoire de Tönle,La chasse aux coqs de bruyère,La dernière partie de cartes,Le vin de la vie,Les saisons de Giacomo.Presque tous ses livres existent en français(Ed.10/18 et La Fosse aux Ours).

12 juin 2008

Frères d'armes,ou l'intelligence du cinéma italien,une fois de plus

     La Révolution a bon dos.Mise à toutes les sauces car c'est si facile de se donner bonne conscience.Le cinéma italien, lui,a su de tout temps,au prix de quelques exceptions, conjuguer la petite et la grande Histoire,le regard ambivalent, théoricien parfois, humain toujours sur ce pays.Fulvio,1816,est libéré,mais uniquement parce que le pouvoir en place espère remonter ainsi jusqu'aux conjurés,les Frères Sublimes,dans cette Italie de la Restauration. Mastroianni est impressionnant de fragilité,aristocratique par sa famille et rebelle par ses idées,dans le rôle très riche et infiniment nuancé de Fulvio.La Révolution a souvent permis aux hommes de s'autocélébrer bien en deça d'un minimum d'analyse,notamment au cinéma.Mais le cinéma italien a été capable de nous offrir le regard d'aigle d'une critique élaborée et le miel des émotions,mêlant morale et sentiment en un amalgame parfois de toute beauté.

       Fulvio,héros émouvant d'Allonsanfan,résume toute l'ambigüité de l'engagement dans la vie d'un homme. Héros certes,mais tout de faiblesse et de désarroi,il se dirigera vers la trahison peu à peu, presque à son insu,désorienté qu'il est par les années passées,la mort de sa maîtresse et l'éloignement de son fils.Et viennent alors les questions essentielles sur la fidélité à soi même et l'impossibilité d'échapper au reniement, au moins partiel.Il nous faut alors revenir aux frères Taviani,ces hommes de conviction,qui jamais n'abandonnèrent leur intégrité,malgré l'insuccès relatif de leurs oeuvres.Car les Taviani,honorés en Italie, n'ont jamais eu l'aura populaire qu'ils auraient méritée.Taxés de cérébralité Paolo et Vittorio, particulièrement peu  médiatiques de plus, resteront dans la catégorie marginale des grands dont on va finalement peu voir les films.Les années passant ils auront de plus en plus de mal à boucler leurs projets,signant alors des films moins intéressants à mon sens.Le cinéma des Taviani m'a toujours semblé proche des grands écrivains russes,eux qui ont su admirablement conjuguer fresques et doutes,innocences et culpabilités,trahison et sacrifice.N'ont-ils pas adapté Tolstoï?De ce cinéma,parfois littéraire,il est difficile de sortir tout à fait indemne tant ce pari sur l'intelligence  du public est exigeant.Car ici pas l'ombre de cette hideuse démagogie,gangrène de tant de films,

       Allonsanfan est un film révolutionnaire,chose rarissime.En ce sens que la véritable révolution peut se lire dans l'acceptation de l'inéluctabilité d'un renoncement pour un personnage tragique et dostoievskien. Formulé de façon un peu choquante:et si c'était à peu près normal de devenir une vieille baderne.S'il n'était de révolutionnaire que jeune et mort...Si Fulvio c'était vous ou moi. Plutôt moi actuellement,question d'âge qui peut s'arranger avec le temps.Si la grandeur était dans l'ultime rédemption avec le geste inutile de Fulvio qui après sa dénonciation rencontre le seul survivant des révoltés,prénommé justement Allonsanfan, fils d'un fondateur du mouvement.Si revêtir la veste rouge équivalait à endosser une tunique sacrificielle qui rejoindrait ainsi Dostoievski mais aussi le cinéma japonais.

    Nous sommes au cinéma et toutes ces considérations ne nous font pas oublier le traitement très beau de la couleur pour ce film en rouge et blanc.La chorégraphie et la musique d'Ennio Morricone nous conduisent aux confins de l'opéra,cet art si italien de la mort violente et du rideau qui se relève afin que les morts saluent.Un peu comme dans la farandole de la fin(vidéo).Et puisque définitivement on est sous influence n'oublions pas Vanina Vanini de Rossellini et Stendahl et Senso de Visconti,Boito(et Verdi).Mais Allonsanfan,ce jeune homme en colère est un grand garçon qui se débrouille très bien tout seul.Pour finir sur une note d'humour dans cette chronique qui en manque:pas facile d'assassiner l'autre quand on est dans la meme barque.Ni dans Allonsanfan,ni dans Monsieur Verdoux,ni dans L'aurore,ni dans Une place au soleil.

http://www.youtube.com/watch?v=7rlvyVrjFVA   Allonsanfan,la fin

7 juin 2008

Good bye,Ciao

    Un salut aux nonagénaires Mel Ferrer,immortel Prince André du Guerre et paix de King Vidor et Dino Risi,"père spirituel" de tant de monstres de la comédie italienne dont Le Fanfaron par exemple.

29 avril 2008

Quand il est mort le poète

                     Joli roman poètique et enquête policière en quelque sorte que ce livre de Giuseppe Conte qui nous emporte sur la côte ligure en 1822,sur les traces de Shelley qui y trouva la mort lors d'un naufrage douteux.Poète romantique anglais n'était alors pas un brevet de longue vie.Keats mourut à 26 ans,Byron à 36 et Shelley à 32.N'ayant pas précisément vécu d'eau fraîche ni même de balades le long de la plage la mort violente est souvent la dernière muse de ces messieurs.Giuseppe Conte nous narre ainsi les dernières semaines, très agitées,du poète.Ses querelles avec Lord Byron,ses frasques extra-conjugales,et ses lubies à vouloir se croire marin firent de son bateau une épave et du grand écrivain un maudit.

      Sur cette trame Conte brode une investigation policière menée par un commandant italien,ancien officier de Napoléon et qui voue aux Anglais une rancoeur tenace.Mais le Commandant Medusei se prendra au jeu et sera séduit par l'aura de Shelley,chantre des libertés,prêt à soutenir les premiers soubresauts d'une Italie en route vers son destin.On sait par ailleurs l'explosive équipe formée par Lord Byron, Shelley, Mary Shelley éprise d'absolu et mère de Frankenstein. Autour d'eux gravitent marchands désabusés,espions à la solde de la Couronne Anglaise,mâitres-chanteurs et enfants malades comme il sied à des poètes romantiques qui auraient détester aller bien. Curieux comme j'ai déjà eu cette impression,de vivre un peu plus fort quand rôdent par exemple la rupture ou les questions.Je cite rarement des extraits mais la prose de Conte est tès belle et traversée d'images parfois sombres come les brisants de Viareggio:"La haine s'accumule et s'alimente d'elle-même,à moins qu'elle ne se cache,la nuit,sur les branches d'un arbre comme une chouette ou un chat-huant,prête à ouvrir ses ailes et à pousser ses cris douloureux".Et puis ce genre de livres me poussera peut-être à me repencher ou plutôt à me pencher sur les vers de Percy Bysse Shelley.

J'ai rencontré un voyageur venu d’une terre antique
Qui disait : « Deux immenses jambes de pierre sans le tronc
Se trouvent dans le désert. Près d’elles, sur le sable,
Sombrant à moitié, un visage brisé est allongé, dont les sourcils sont froncés,

Et les lèvres plissées, et qui sourit froidement sur commande,
Ce qui montre que son sculpteur a bien compris ces passions,
Dont survivent encore, empreintes sur ces choses sans vie,
La main qui s'est moquée d'elles et le cœur qui les a nourrit,

Et sur le piédestal ces mots apparaissent :
'Mon nom est Ozymandias, Roi des Rois :
Contemplez mes œuvres, Ô vous les puissants, et désespérez !'

Rien à côté ne reste. Autour de la décomposition
De cette colossale épave, illimitée et nue,
Seul les sables plats s'étirent au loin. "

logo romantisme

12 avril 2008

Sicile de sang

        On a oublié que la Sicile a tenté une sécession juste après-guerre.De cette terre bénie pour le cinéma qui vit Le Guépard, Kaos,contes siciliens,Le Parrain, Stromboli ou La terre tremble, excusez du peu,Francesco Rosi a exhumé l'histoire controversée de Salvatore Giuliano.Controversée et compliquée.Je la connaissais très mal avant d'avoir vu le film.Je ne la connais guère mieux,Francesco Rosi n'apportant aucune vérité indiscutable.Il s"en explique fort bien et en français dans un assez long entretien en supplément du DVD.Tourné en noir et blanc juste avant Main basse sur la ville Salvatore Giuliano (1961) est tout aussi austère.De plus Rosi n' a pas misé sur une chronologie linéaire. C'est néanmoins un film bien intéressant par le regard sur cette Sicile,île d'extrême et d'extrémités,de haute civilisation et de bien basses besognes.On pourra aussi revoir le film de Cimino Le Sicilien(1987),qui lorgne plus vers la superproduction sans être dénué de qualités pour autant qu'il m'en souvienne.

          Ce que l'on retient de Salvatore Giuliano c'est le cri des femmes en noir,ces mères italiennes, non, siciliennes.C'est la montagne palermitaine et ses chèvres faméliques gardées par des bergers illettrés dont l'un deviendra colonel ou général,peu importe dans ce pays où sévit l'amalgame brûlant de paysans,de mafieux,de soldats ou de carabiniers,tous contre tous et chacun pour soi. Giuliano,probablement plus utilisé que stratège,est mort à 28 ans.Complices d'hier, traîtres d'aujourd'hui, repentis de demain,les hommes ne sont que de passage en cette glèbe ensoleillée et épuisante,où démêler le vrai du faux s'avère insoluble,et presque sans intérêt.Il semble que la Sicile,que ce soit celle du Prince Salinas, des pêcheurs du Néoréalisme, des mafiosi,même s'ils vivent là-bas à Little Italy,ou des pauvres diables des contes de Pirandello,ne soit née de la mer que pour faire du cinéma, douloureux,le meilleur.

20 mars 2008

Tranche napolitaine

    Tranche de travaux bien sûr dans la Naples du début des années soixante.Lion d'Or à Venise en 1963 Main basse sur la ville est le film qui a révélé Francesco Rosi,spécialiste du pamphlet politique courageux que l'on s'évertue bien sûr à trouver obsolète.

      Film tourné sans grande vedette,l'américain Rod Steiger alors peu connu,Main basse sur la ville n'est qu'un constat,qui a la sécheresse d'un procès-verbal et le lyrisme d'un permis de construire.Cette oeuvre dont l'essentiel se passe en palabres et négociations ardus et un brin austères touche en fait à cette gangrène si marquée dans la Campanie des années soixante où la ville étend ses tentacules sans trop se soucier des gens qu'elle écrase moralement voire physiquement.Et cette ville c'est Naples,presque entière dans son affairisme et sa corruption,grands vainqueurs finalement de cette lutte à armes inégales.Un mot du Néoréalisme,mon péché mignon de toujours.Des films comme Le voleur de bicyclette ou,plus tard,Le toit(si méconnu) de De Sica,avaient ouvert la brèche d'un cinéma du courage et de la conscience, probablement décuplé par la digestion douloureuse des années noires.Mais en 1963 le NR est éteint depuis assez longtemps.Rosi saura prendre en quelque sorte une certaine relève avec entre autres Elio Petri et Gian Maria Volonte.Voir note du 04 novembre 2007.

    Mani sulla citta est un grand film auquel il manque peut-être un minimum de démagogie.Je m'explique,moi qui déteste la démagogie si présente partout,y compris sur le blog de La Comtesse à doses que j'espères infintésimales.Mais absolument personne n'y échappe totalement,souvent avec les meilleures intentions.Bref si Rosi et ses scénaristes avaient nanti Main basse sur la ville d'un peu plus de chair et de coeur ce film serait devenu pour l'Italie non seulement un beau film intelligent et fier,mais aussi une oeuvre populaire au sens le plus noble.Evidemment les coupeurs de cheveux en quatre,dont je fais parfois partie,lui auraient sûrement reproché.Jamais content celui-là.Après ce bel exercice non exempt de tartufferie je ne peux que vous engager à voir ce film et les autres de Rosi,quand le cinéma italien saura enfin de doter d'une véritable politique du DVD.Je pense à Lucky Luciano,Le Christ s'est arrêté à Eboli qui a ma préférence, Cadavres exquis,Trois frères,etc...

http://www.youtube.com/watch?v=79vVDpYn36I  (extrait)

9 mars 2008

Un été 43

    C'est peut-être bientôt la fin de la guerre.Elle a dix ans de plus que lui...Non ce n'est pas Un été 42 mais un été 43.De Valerio Zurlini,peu prolifique mais si sensible cinéaste(voir Le douloureux cinéma de Zurlini ) voici Eté violent(1959).Le fascisme va s'effondrer.Sur les plages de Rimini une jeunesse dorée essaie de s'en moquer.Roberta,jeune veuve depuis peu,et mère d'une fille de quatre ans,rencontre Carlo,fils d'un dignitaire du régime,mais lui-même peu concerné,plutôt velléitaire.Cinéaste d'une immense pudeur Zurlini entraîne ses deux personnages dans un amour difficile,mais très vite sérieux,malgré la mère de Roberta et l'instabilité du pays.

    Au contact,pourtant délicat de Roberta Carlo se dirige vers un début de prise de conscience mais le propos de Zurlini n'est pas politique et ne cherche pas à démêler le juste de l'ignoble.La versatilité des hommes est universelle.C'est ainsi que les scènes de la victoire antifasciste semblent ambigües et loin d'être très dignes.Les immédiats lendemains de guerre sont si propices à d'autres horreurs.La violence de cet été 43 est aussi bien celle d'une Italie exsangue que celle d'un amour sur décombres,si émouvant,si prégnant et manifestement sans issue.Comme Bolognini Zurlini est impérativement à revoir pour les amoureux du cinéma italien que je sais nombreux.Jean-Louis Trintignant dans un de ses tout premiers rôles interprète Carlo avec une nonchalance puis une inquiétude remarquables.

16 février 2008

Honte à l'italienne

Le bel antonio

     Mauro Bolognini est un cinéaste qu'il faut revoir impérativement pour sa finesse et l'élégance de son propos.Sur le thème délicat, surtout en 1961,de la virilité,qui plus est en Sicile,et avec la complicité à l'écriture de Pasolini il adapte le roman de Vitaliano Brancati,auteur sicilien lui aussi(1907-1954).A Catane le jeune Antonio(Mastroianni prototype du latin lover) épouse Barbara. Bourgeoisie,belles demeures,aisance financière et un avenir radieux.Mais la fêlure s'insinue et les parents s'inquiètent puis se heurtent.Et surtout l'honneur est en jeu.Ha l'honneur!L'honneur en ces années se situe parfois sous la ceinture et Barbara(Cardinale très jeune) ne sera qu'un pion dans le jeu du patriarcat et de la résignation des femmes,filles ou mères.

  Ce film ne prête ni aux plaisanteries grasses ni au marivaudage et Mastroianni campe avec conviction et douleur ce prétendu Don Juan dont on mesure peu à peu la solitude et la culpabilité.Film d'une grande pudeur,Le bel Antonio reprend le meilleur de Pasolini qui n'aura pas toujours cette réserve que Mauro Bolognini,doux ciseleur du cinéma italien,saura,lui,garder jusqu'à sa mort.Probable que cette discrétion lui a valu en partie le purgatoire.Dans l'infinie richesse du cinéma transalpin j'aime à attirer l'attention sur les réservistes (Zurlini,De Santis ont déjà fait l'objet de chroniques).Autres très beaux films de Bolognini:Les garçons,Metello,L'héritage,Ce merveilleux automne.Le titre de ce billet est un clin d'oeil à la vogue "à l'italienne" des films des années 55-60.En effet eûmes droit à Caprice, Scandale, Divorce, Mariage, Meurtre, tout ça à l'italienne.

29 décembre 2007

Palabres à la romaine

     Pas le meilleur Scola,loin de là,mais quelques dialogues à méditer et quelques émotions bien réelles parsèment La terrazza que je viens de revoir 27 ans après sa sortie.L'extrême longueur du film, 2h40, est,il est vrai assez rhédibitoire et favorise bien des baisses de régime.Cependant la richesse et la finesse des interprètes et plus encore les échanges verbaux où le fiel le dispute à l'amitié donnent à La terrasse un regain d'intérêt.A égale distance du film choral où les protagonistes font un bilan de leur vie(La bilanomanie ayant été un des dadas du cinéma,Les copains d'abord,Le déclin de l'empire américain et son rejeton Les invasions barbares,les films de Sautet.Je n'ai rien contre ayant moi-même tendance à la bilanomanie, maladie de l'âge que l'on dit mûr.),et le film à sketches(spécialité très transalpine) La terrasse,romaine et huppée comme il se doit car l'on n'est plus au temps du Voleur de bicyclette,en tout cas pas chez ces gens-là,nous présente Sergio,Mario,Luigi,Enrico et Amedeo,tous quinquas et tous plus ou moins intellectuels, scénariste, député de gauche évidemment,journaliste,etc... aux prises avec leur conscience(un petit peu élastique, c'est bien les consciences un peu élastiques,j'en ai une) et le décalage entre maturité et jeunesse.Le thème du film est l'arrangement,qui nous guette tous et que Scola avait déjà fort bien illustré avec Nous nous sommes tant aimés,plus picaresque,plus cinématograhique et moins bavard.

      Tour à tour les héros nous intriguent et nous content leur mal d'être.Je n'insisterai pas sur le côté artificiel et un peu irritant du défilé que guettent les clichés.Tout cela est dangereusement statique et l'ennui point chez certains spectateurs.Pourtant La terrasse vaut qu'on y prenne un verre entre amis car Scola et ses complices les éternels Age et Scarpelli de la comédie italienne ont de bonnes idées,la mort de Reggiani dans la neige synthétique d'un tournage télé par exemple,mort de dénutrition à ne pas vouloir grossir.Certes le film parle trop,comme ces soirées entre amis qui refont le monde et qui,finissent par s'engueuler avant de s'embrasser car ces gens-là s'aiment,critiques envers les autres,très tolérants quant à leurs propres accommodements.

   Deux citations pour terminer.De Scola lui-même présentant les héros de Nous nous sommes tant aimés:"Nous voulions changer le monde et c'est le monde qui nous a changés".Et de je ne sais pas qui mais que j'assume à fond:"S'il fallait accepter des autres ce que l'on accepte de soi-même la vie serait tout bonnement invivable".Rien de novateur sur cette riche Terrasse de Rome,mais des hommes,tout simplement,vous et moi peut-être.Et si La terrasse s'appelait Le miroir...

http://www.youtube.com/watch?v=l--3SCgJsUg  La terrazza

28 décembre 2007

Pâles étoiles de la Grande Ourse

Vaghe stelle dell'Orsa

      Très viscontophile je n'avais jamais vu Sandra(65) et ne m'en portais pas plus mal.Je n'ai guère prisé ce film et trouve que le parti-pris vénéneux qu'instille Visconti ne m'entraîne pas loin dans cette quête d'un passé trouble de Sandra et Gianni,frères et soeur qui ne m'ont inspiré ni osmose,ni même la moindre sympathie.Il y a bien la grande maison de Volterra et un peu deToscane nocturne,pays que j'aime pourtant profondément.Mais il y a surtout le jeu fraternel faussé et aucun personnage à aimer.De Sandra me resteront deux choses qui heureusement se passent très bien de cinéma.Les variations pour piano de César Franck qui couvrent parfois le texte et c'est presque mieux ainsi.Et le magnifique titre original dû au grand poète du romantisme italien,Léopardi.Ni César Franck ni Giacomo Léopardi n'ont besoin de Visconti.Visconti qui reste bien sûr dans mon panthéon pour bien d'autres films.

28 décembre 2007

Le blues de la vallée du Pô

      Cherchant un angle pour présenter le très beau Il grido de Michelangelo Antonioni(1957) j'ai eu l'idée d'une sorte de blues accompagnant un road-movie au long de la vallée du Pô,symbole d'une Italie du Nord industrielle,grise et pluvieuse...Années cinquante c'est l'adieu au Néoréalisme dont Antonioni était un compagnon de route plus qu'un véritable adhérent.Mais il y a dans ce très beau Cri de très belles réminiscences du grand mouvement de liberté et les décors réels de cette vallée du Pô qu'Antonioni avait déjà filmées dans Gente del Pô donnent une très forte authenticité à cette oeuvre.Le cri,bien que linéaire et décrivant le monde ouvrier,assez étranger au bourgeois de Ferrare qu'était M.A.,préfigure aussi les grandes oeuvres des années soixante.J'ai déjà évoqué L'Avventura et L'éclipse,ces films perpétuelllement à revoir comme les plus grandes oeuvres du cinéma,celles qu'on n'explore pas comme ça,un peu vite.

     Si l'on n'est pas encore dans les méandres existentiels de l'incommunicabilité le drame d'Aldo que sa compagne quitte après sept ans illustre bien le mal de vivre.Non mariée avec lui,ce qui est déjà dans l'Italie de 57 un choix courageux des auteurs,elle prend les devants et ça c'est carrément révolutionnaire.Mais le film est surtout le voyage de cet homme,d'abord avec sa fille de sept ans,qu'il aime malgré ses maladresses,puis seul,au gré de quelques femmes de rencontre,ployant souvent sous le faix de leur propre solitude.Le cri n'est pas un cri de désespoir total,du moins au début et l'on se prend à croire un peu aux lendemains.Mais l'homme(Wayne Cochran,très bon acteur américain tout à fait à sa place) est fatigué,trop fatigué.Le blues d'Aldo,qui traîne sa peine au long du fleuve,finira mal.Jean Gili,remarquable historien du cinéma italien,parle clairement et simplement de ces films qu'il aime,autant que moi et ce n'est pas si fréquent.

26 novembre 2007

Quand le politique se fond dans l'esthétique

   

       La Califfa est un film que j'ignorais.Je le classais vaguement du côté du Francesco Rosi des années 70,le film est d'ailleurs de 70,mais son metteur en scène,Alberto Bevilacqua,est plutôt un écrivain.Et sa mise en scène,si elle épouse la crise sociale en Italie à travers la liaison d'une passionaria ouvrière et  du patron de l'usine,délaisse assez vite le terrain de la lutte sociale pour une baroque initiation au délire qui s'empare des deux protagonistes.Ce film est une curiosité,pas vraiment convaincante mais qui peut par instants séduire.Il y a en effet quelques fulgurances de couleurs qui l'éloignent tout à fait du cinéma politique de Rosi ou Petri.Cet amour est par essence promis au néant et le nihilisme s'empare alors de l'oeuvre que je qualifierai de poème du no future.

   Mais ce film assez unique recèle quelques perles visuelles,placées sous le signe de la mort qui baigne à mon sens l'ambiance crépuscule,le cercueil,l'incendie,le vieux père de Tognazzi.Reste Romy Schneider que je peine quand même à imaginer en ouvrière.Reste la musique d'Ennio Morricone qui parvient à être magnifique, sentencieuse et parfois parfaitement parasite.

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