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30 janvier 2024

Apprendre, apprendre

Leçons 

                   Un fameux bouquin que ce Leçons de Ian Mc Ewan. Probablement le roman le plus fort depuis Apeirogon de Colum McCann. Et comme la littérature britannique sait être passionnante. Un homme, Roland Baines, pianiste, tennisman, poète, voit sa vie se fissurer lorsque son épouse le quitte, lui laissant un enfant de quelques mois. Leçons me paraît un très bon titre dans tous les sens du terme. L'enfance difficile, père militaire autoritaire, le pensionnat très jeune, et une professeure de piano qui l'initiera à des préludes et des nocturnes pas tous musicaux. A quatorze ans ça peut laisser des traces. Mais Roland apprendra de la vie, et toute une vie. C'est ça la vie.

                  Soixante-dix années qui nous conduisent d'Angleterre en Lybie, de Paris à Berlin, au long des aléas et des bouleversements sociaux et politiques. Si, Baby Boomer, Roland a même fait partie d 'un groupe rock, élément si important pour moi, Dylan le Velvet, Led Zep sont là, il a aussi donné quelques concerts classiques et régulièrement joué du piano-bar pour de riches voyageurs dans les hôtels adéquats. Alcool, quelques pilules, Roland a pu être conformisme en diable. Et la rencontre avec Alissa, qui le quittera sans états d'âme mais lui laissera Lawrence, six mois. 

                Des essais de poésie et de littérature, infructueux. Des engagements politiques, Thatcher, le Brexit. Des rencontres amoureuses, pas forcément sans lendemain, l'amitié qui persiste peut-être. Alissa loin là-bas du côté de l'ex-mur. Alissa et ses romans. Alissa prix Nobel. Mais Alissa qui jadis laissa son fils. Roland traverse le temps. Père parfois démuni, sympathisant des causes dites bonnes, vieillissant, une dernière compagne. La maladie. La vie.

                Ce que j'écris là n'est guère convaincant. Mais Ian McEwan, comme Julian Barnes ou Jonathan Coe dans des registres un peu différents, est un grand du Royaume Uni. J'ai lu Amsterdam il y a très longtemps et je ne m'en souviens plus. Aimé Les chiens noirs, lu plus récemment bien que plus ancien. Jetez-vous sur Leçons. C'est un voyage au coeur de l'Angleterre, en Europe, mais plus encore au fond de l'âme et de l'esprit d'un type rudement intéressant, nimbé de failles, de petites grandeurs et de grandes faiblesses. Un homme. Il faut je crois, un peu de jours ou de nuits. J'ai vécu deux semaines avec mon ami Roland Baines. Riches, très riches.

               Il se leva et se mit à faire les cent pas autour de la table.Bientôt, il appellerait Lawrence. Il irait le chercher à pied...Il s'arrêta près du piano. Sur le côté, à même le sol, quatre piles de partitions, surtout des arrangements d'anciens titres à succès, de classiques qui lui servaient pour son travail à l'hôtel. Au sommet d'une pile, quelques-uns avaient été regroupés voilà longtemps lors d'un accès de zèle organisationnel, autour du tème "Moon", la lune: "Fly me to the Moon","Moon River","Moondance"...Une minute plus tard, accélérant ses recherches, il vit passer "What a wonderful world","Yesterday","Autumn leaves", et fit s'écrouler une pile. Ensuite, ses vieux livres de jazz. Jelly Roll Morton, Erroll Garner, Monk, Jarrett. Il continua. Un voeu pieux était devenu un besoin. Il en était aux trois quarts de la troisième pile quand il tomba sur une série de partitions de Schumann. La chance à l'état pur. Schubert, Brahms, n'importe qui ferait l'affaire. Il s'assit et ouvrit le recueil écorné des morceaux pour l'examen du grade 8. La page était couverte de doigtés notés au crayon par un adolescentde quinze ans.

              Miriam Cornell était sa professeure de piano. Roland n'avait pas quinze ans...Leçons

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21 janvier 2024

Murnau entre aurore et nuit

Murnau-des-tenebres

                 Le titre de ce livre a attiré mon attention. Associer le nom du grand cinéaste de Nosferatu aux ténèbres me semblait couler de source. Et le destin de cet homme, intense et tragique, s'accommode bien de la nuit comme le Non-Mort des Carpates. 1929 F.W.Murnau rallie les Marquises, puis Tahiti et Bora-Bora, pour tourner ce qui sera son film ultime, Tabou. L'aventure de Tabou n'aura rien d'idyllique et méritera bien son titre. L'incursion dans la vie, la mémoire, l'intime des Polynésiens laissera des traces. Mais nul besoin d'être un cinéphile invétéré pour s'immiscer dans le roman de Nicolas Chemla, ce qui ne doit pas vous empêcher de voir L'Aurore, réalisé peu de temps avant et considéré par beaucoup comme le plus beau film de l'histoire du cinéma.

                Tourner Tabou dans ces lieux a priori paradisiaques, c'est être bien loin de la Transylvanie, aux dents longues, de la ville tentatrice de L'Aurore, de l'Expresssionnisme du Dernier des hommes. C'est aussi tourner le dos en partie à Hollywood qui fait les yeux doux à Murnau. Mais Murnau, comme Eisenstein, n'était pas fait pour Hollywood. On est avec Murnau dans les ténèbres entre ethnologie et fantastique car, fasciné par les mystères insulaires, l'art primitif, mais aussi les tatouages sur le corps des garçons, le réalisateur ne fait pas mystère de ses attirances.

                Tabou a été coréalisé par Robert Flaherty, autre pionnier du cinéma. C'est peu dire que l'Allemand et l'Irlando-américain n'étaient pas vraiment sur la même longueur d'onde. Qaunt aux ondes du Pacifique elles ne l'ont pas toujours été, pacifiques. Mais surtout le drame de Tabou réside surtout dans la subjugation de Murnau par ces indigènes, ces éphèbes musculeux qui le conduisit à semble-t-il, un certain irrespect pour les traditions, le sacré, les cimetières. Les autochtones, souvent très influencés par un culte proche de la sorcellerie, auraient maudit Murnau. D'où (?) des conditions parfois cataclysmiques qui firent de ce film en deux parties justement nommées Paradis et Paradis perdu, une aventure plus forte que l'objet filmique lui-même. 

                De retour en Californie Friedrich-Wilhelm Murnau n'assista pas à la première de Tabou. Huit jours avant il trouva la mort dans un accident de voiture, le 11 mars 1931. Cette histoire de prêtresse, de virginité, d'incendies, d'ouragans, en avait fini de mal tourner. La jolie photo de couverture du livre de Nicolas Chemla, versant édénique, nous montre Murnau, Pal le chien, Mehao et Henri Matisse, le peintre fauve en visite sur le tournage. Un excellent docu de l'excellente émission d'ARTE L'invitation au voyage vous en dira un peu plus. 

                 

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