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17 avril 2008

A propos de Pirandello

    L'oeuvre de Pirandello,immmense romancier poète dramaturge sicilien est une de celles qui me fascine...En 1936 le cinéaste Pierre Chenal et les dramaturges Roger Vitrac et Armand Salacrou adaptent son roman Feu Mathias Pascal sous le titre L'homme de nulle part.Déjà adapté au temps du muet par Marcel L'Herbier en 1925 il le sera à  nouveau par le grand Mario Monicelli en 85 avec Mastroianni dans le rôle titre.Même si je crois qu'il sera difficile de mieux comprendre Pirandello que les frères Taviani dans Kaos ce vieux film français n'est pas inintéressant.Il faut faire abstraction de l'interprétation notamment féminine, particulièrement datée, l'audibilité de la version de notre cher Cinéma de minuit n'étant pas géniale.Broutilles tant le travail de Patrick Brion contribue-t-il vaillammment à la pérennité du cinéma.

     Ce qu'on garde de L'homme de nulle part c'est surtout l'interprétation de Pierre Blanchar,assez habité en Mathias Pascal,nanti d'une seconde vie tant la première était platounette, certes assez théâtrale mais honorable surtout en première partie,le Mathias Pascal un peu benet et barbichu,relatif contre-emploi pour Blanchar.Et surtout celle du plus grand voleur de scènes du cinéma français,j'ai nommé Robert Le Vigan.La Vigue étant l'acteur excentriquissime numéro un,celui que l'on n'oublie jamais,même en quatrième, cinquième,voire dixième rôle.Quelque exemples:Goupi Mains-Rouges, La bandera,Le quai des brumes.

   Feu Mathias Pascal est une fable sur l'identité et le paradoxe de l 'homme dans toute sa complexité.Tout homme est mutiple mais j'en connais qui sont simples,si simples que c'en est effrayant.Ainsi Mathias Pascal, prisonnier d'un mariage raté et d'une vie banale (pas loin de Kafka ou du Bartleby d'Herman Melville),est-il contraint de se "tuer" deux fois avant d'émerger d'une sorte de léthargie et d'assumer pleinement son existence.Ce roman de l'absurde est plutôt joliment illustré par Pierre Chenal dans une atmosphère sordide de manigances au début, avec quelques éclairs lorgnant vers le réalisme poétique prévertien,lequel Prévert avait d'ailleurs failli participer au film.

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9 novembre 2007

Le joueur

   Hollywood adapte Dostoievski et ...c'est pas si mal...Robert Siodmak à qui France 3 consacre un cycle au Cinéma de minuit,enfin de 1h30,met en scène en 49 d'après Le joueur une sorte de mélo assez flamboyant avec deux stars naissantes,Gregory Peck et Ava Gardner,Passion fatale dont le titre original me paraît plus explicite(The great sinner) sur la notion de faute et de rédemption,chères à Dostoievski.Certes il n'est pas question que le cinéma puisse un jour égaler les tourments du Prince Michkine,des Karamazov,cela va de soi.Faut-il donc laisser l'âme russe en guerre et paix chez les géants Fedor,Leon,Ivan?Je ne le pense pas.Ils sont solides et se remettront y compris des ratages totaux,nombreux,je l'accorde à Thom.Robert Siodmak a fort bien recréé le Wiesbaden du siècle dernier,cette ville de cure cosmopolite.Et le héros,écrivain prénommé Fedor,s'il possède le côté un peu lisse de Gregory Peck,apparaît pourtant assez ambigu dans sa déchéance annoncée.Siodmak,qui quitta l'Amérique pour l'Allemagne à deux ans avant de quitter l'Allemagne pour l'Amérique via la France a tout de la Mitteleuropa et saura dans ses films noirs conjuguer les affres existentiels du Vieux Monde et l'efficacité du polar à l'américaine.L'ami Thom sait qu'on lui doit l'une des rares bonnes adaptations d'Hemingway(Les tueurs).

    Au moins quelques scènes me paraissent assez réussies dans The great sinner.La mort à la table de jeu de la grand-mère Ethel Barrymore,et les scènes chez l'usurière,immanquablement dostoievskiennes,ainsi que le retour rêvé du professeur français après son suicide.C'est un bon film,pas si formaté(un peu quand même).Pas réellement enthousiasmant,intéressant.Ce n'est déjà pas si mal.

25 août 2007

De mèche avec Hammett

    J'ai souvent parlé de Hammett,Chandler et autres et toujours de façon admirative.Et le cinéma ne s'y est pas trompé avec nombre d'adaptations dont certaines plus que mythiques(voir la photo de l'accueil).La réalisation de Stuart Heisler,en 42,avec une écriture de Jonathan Latimer,de La clé de verre,roman publié en 31 mérite qu'on s'y attarde.Ce film noir que présente très bien Philippe Labro qui s'y connaît,tourné en un noir et blanc studio Universal typique,nous offre un trio d'acteurs convaincant. La blonde fatale a les traits et la mèche très suggestive de Veronica Lake,dangereuse comme savaient l'être les femmes dans ces histoires de magouilles politico-gangstero-policières.Encadrée d'Alan Ladd et Brian Donlevy dont l'amitié sera mise à rude épreuve elle est assez inoubliable.Ladd est très bon,à mon avis meilleur que dans ses westerns où je l'ai toujours trouvé un peu terne. Donlevy est un acteur méconnu qui donne beaucoup d'étoffe à son personnage ambigu de faiseur de rois,ou plutôt de gouverneurs.

    On sait que Dashiell Hammett avait une écriture comportementale qui laissait peu de place à la psychologie et au bla-bla-bla.Le script de Latimer,un spécialiste,et la mise en scène de Heisler sont au diapason d'un film bref et musclé que Bertrand Tavernier déteste dans son ouvrage de référence sur le cinéma américain.J'aime bien le grand Bertrand qui a fait beaucoup pour sortir de l'ombre de nombreux films mais là je ne suis pas de son avis.Je ne me lasserai pas de ces voitures qui sillonnent la ville américaine sous la pluie,se garent sans problèmes et laissent sortir un politicard,deux sbires et une vamp prompte à prendre le bras du plus fort tour en lançant une oeillade au plus beau.

   Et La clé de verre recèle des dialogues pointus souvent très drôles dont j'ai retenu cette phrase qui suffit à mon bonheur:"Ma première femme était deuxième en cuisine dans un restau minable de la Quatrième Rue".Ou encore un tueur genre pithécanthrope,ceci dit sans vouloir blesser les pithécanthropes, déclarant, affamè:"Quand je mange un steak j'aime sentir qu'il me mord."

29 juillet 2007

Sudiste appréciation

    Le film d'Anthony Mann(58),plus connu pour ses grands westerns que j'ai évoqués déjà,est une adaptation d'un des deux romans les plus connus d'Erskine Caldwell,l'autre étant La route au tabac,d'ailleurs adapté par John Ford et ne passant pas pour une réussite.J'ai beaucoup lu Caldwell il y a très longtemps. Les souvenirs nous jouent des tours mais je crois que le purgatoire de cet auteur est injuste. Caldwell ce n'est pas la tragédie à la Faulkner,ni le social à la Steinbeck.Caldwell plante le décor et laisse ses personnages y surnager tant bien que mal entre cocasse et meurtrier,pas si loin,dans ce Sud éternellement poisseux,de Tennessee Williams,plus rural mais avec un sens de la famille comme une horreur que ne désavouerait pas l'auteur du Tramway.

   Qu(est-ce qui fait que plus personne ne lit Erskine Caldwell?D'abord des plus grands comme Fitzgerald,Dos Passos ou même Hemingway connaissent ou ont connu un relatif désaveu.Et puis les articles que j'ai pu lire,signés de spécialistes de la littérature américaine,font état du fait que l'oeuvre de Caldwell a assez vite tourné à une certaine répétitivité.Les romans de Caldwell seraient un peu comme du Zola de Georgie en quelque sorte,si ancrés  dans la glaise et le coton qu'ilsn'ont peut-être pas l'universalité de ceux de Faulkner.La qualité littéraire s'est peut-être appauvrie rapidement chez Caldwell mais il faut admettre que Le petit arpent du bon Dieu sonne encore fort comme une sale histoire de famille,autour du sexe et de l'argent,avec ses petites et grandes bagarres entre frères.Les Atrides du Deep South...Parmi,les autres titres:Les braves gens du Tennessee,Un p'tit gars de Georgie,La dernière nuit de l'été.

  (1903-1987)

   Anthony Mann a installé ses bouseux pas toujours très sobres autour de Robert Ryan,le père,qui a fort à faire avec ses enfants et les trous qu'il creuse afin de trouver le trésor enterré.Dérisoire quête de cette Toison d'Or où il faut ménager Le petit arpent du bon Dieu.Un peu de bigoterie est rarement absent du Sud.

7 juillet 2007

Les miettes du Ministère ou Londres,nid d'espions

   Paramount Pictures

      J'ai déjà évoqué Graham Greene au cinéma dans La mine Greene .J'ai lu il y a si longtemps Le Ministère de la peur que je ne peux trop y rattacher le très beau Espions sur la Tamise,titre français peu malin du film de Fritz Lang. Certains historiens établissent une trilogie antinazie chez Fritz Lang,dont The Ministry of fear serait le dernier élément après Chasse à l'homme et Les bourreaux meurent aussi. Quoiqu'il en soit et là encore j'insiste sur l'immense cohérence du cinéaste,on retrouve dans ce film les obsessions du complot, des société secrètes et de la manipulation.

     Ray Milland,libéré d'un séjour en psychiatrie(thème déjà langien),se trouve dès sa sortie happé par un engrenage autour d'un gâteau gagné dans une kermesse de bienfaisance dans le Londres de 1943,où sévissent probablement des taupes hitlériennes.Le temps,très présent dans les films de Lang,est dès le générique utilisé comme un personnage,avec les poids d'horloge et l'opposition cercle et verticales.Le héros,fragile,va connaître des péripéties et rencontrer un faux aveugle,le ballon d'un enfant(M...),des amis(?) qui s'appellent Hilfe(qui veut dire à l'aide en allemand),une voyante qui ne parle que du passé,participer à une séance de spiritisme suivie d'un pseudo-meurtre(Le diabolique Docteur Mabuse),cotoyer un vieux libraire cultivé et un médecin éminent qui s'avèreront tous deux être de dangereux fanatiques.

     Chez Lang la vérité est invraisemblable(Beyond a reasonable doubt) et les hommes sont rarement ce qu'ils prétendent être.C'est depuis toujours le cinéma du doute et de l'interrogation.Depuis Les Araignées ou Les espions(années vingt).On appellerait cela interactif car le spectateur manipulable doit se méfier de tout chez ce diable d'homme.Il fallait sûrement se méfier de l'impérial Mr.Lang.Il restera chez lui comme un secret...

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26 mai 2007

Mr.Faulkner goes to Hollywood

   

    Les grands écrivains américains sont tous passés plus ou moins par la case Hollywood.Aucun n'a marqué de son empreinte le cinéma en tant que scénariste,la plupart du temps noyés entre cocktails et corrections de leurs rares contributions par les producteurs.Ainsi William Faulkner aurait contribué à plusieurs films de John Ford(uncredited,comme on dit),ainsi qu'à l'un des films américains de Renoir,L'homme du Sud) et à d'autres productions oubliables.Par contre il est très officiellement au générique de trois films importants de Howard Hawks:Le port de l'angoisse,Le grand sommeil,La terre des Pharaons où il ne semble pas avoir été concerné davantage.Faulkner n' a jamais été un homme d'images.Cependant quelques films adaptés de son oeuvre valent largement le détour.

   

  L'intrus réalisé en 49 par Clarence Brown est un excellent constat sur la vieille culture sudiste basée sur les habitudes de justice sommaire bien ancrées dans ces comtés que Faulkner connaît si bien.Sans acteurs connus L'intrus dépeint avec conviction le lynchage et la prise de conscience de certains citoyens qui finissent par ouvrir les yeux.J'ai toujours pensé que Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur,le beau roman de Harper Lee(au cinéma Du silence et des ombres de Robert Mulligan) avait une filiation assez directe avec le roman L'intrus.

    Mis en scène avec flamme par l'immense Douglas Sirk déjà cité très récemment,La ronde de l'aube(The tarnished angels) adapté de Pylone a fait l'objet d'une remarquable analyse par le Dr.Orlof dans l'article Un et un font trois.Je vais donc lâchement vous envoyer dans son cabinet pour y lire l'essentiel sur La ronde de l'aube,auquel je souscris entièrement.

    J'aime bien Reivers de Mark Rydell,bâti autour de Steve McQueen en 1969,qui nous montre une autre facette faulknérienne,roman d'apprentissage truculent,une virée dans le Mississipi où l'on voit un adolescent apprendre la vie auprès de personnages forts en gueule et surtout libres penseurs.Titre français du livre:Les larrons.C'est un des très bons rôles de Steve McQueen,capable ici de mêler la verdeur et l'émotion,la tendresse et l'action.

  Il était par contre très difficile de rendre la complexité familiale des très touffus Le bruit et la fureur et Les feux de l'été.Martin Ritt s'y est risqué mais ces films,rarement présentés,ne parviennent qu'à peine à évoquer la moiteur du sud,physique et morale. Sanctuaire,trame plus policière,n'est pas de loin,le meilleur rôle d'Yves Montand dans la réalisation de l'anglais Tony Richardson(61) où seule surnage la très bonne prestation de Lee Remick.

5 mai 2007

Précieuse trilogie à l'anglaise

  •        Le soin apporté par James Ivory et son complice de toujours le producteur Ismaïl Merchant a permis la naissance d'une très belle trilogie qui a donné à la France  la chance de découvrir l'auteur anglais Edward Morgan Forster(1879-1970).Rarement tryptique d'adaptations aura fait preuve d'autant de cohérence et de finesse.Transposer le monde à la fois précieux et souterrain de Forster n'était pas à la portée du premier tacheron venu.E.M.Forster issu d'une famille patricienne était un esthète proche du groupe de Bloomsbury au début du siècle.Son oeuvre romanesque tente une correspondance entre les classes sociales de l'Angleterre edwardienne.Cette connection passe entre autres par le premier roman ouvertement homosexuel, Maurice,qui ne parut qu'après sa mort.Mais les rigidités demeurent outre-Manche et ailleurs et l'oeuvre romanesque de Forster commence seulement à convaincre de son intérêt.A noter que David Lean, malade,adapta lui aussi Forster pour son dernier film La route des Indes,qui ajoute aux thèmes centraux des barrières sociales à briser et des amours interdites une réflexion voisine sur la colonisation.Attention il ne faut pas prendre Forster pour un révolutionnaire.Il garde ses distances,cela ne l'intéresse pas vraiment.Il sait seulement que le monde change, doucement, lentement.                                                                                                            

            

    En 1986 Chambre avec vue,outre une belle ballade dans ma chère Florence au temps béni du tourisme aristocratique(enfin béni pour certains),nous emporte dans une délicieuse histoire d'amour soigneusement corsetée de chaperon et de pasteur.C'est la version light des conventions d'époque et la belle Helena Bonham-Carter,en pamoison toscane n'épousera pas le sinistre Daniel Day-Lewis.Comme ces acteurs étaient jeunes!A mille lieues du cinéma agité ce film adapté du roman Avec vue sur l'Arno obtiendra un succès inattendu.Ne nous y trompons pas.Derrière les baignades polissonnes et les pique-niques verdoyants la jeune Lucy prendra subtilement conscience d'un univers peut-être en voie d'extinction,d'extinction lente certes.

    Maurice(87) avec James Wilby et un tout nouveau,Hugh Grant,est un film plus grave et aborde le carcan social sur un versant plus noir que Forster connaissait bien.Si l'on aime les raccourcis on pourrait dire que Maurice est un hybride de L'amant de Lady Chatterley et de The servant.Du roman de D.H.Lawrence le thème de la mésalliance avec le garde-chasse pour ce jeune bourgeois.Du film de Losey d'après Pinter l'attirance et l'influence grandissante du serviteur et les rapports maître-serviteurs qui tournent à la relation inversée esclaves-maîtres.

     J'ai une préférence pour Retour à Howards End(92) où l'on voit que les auteurs ont tout compris de l'univers de Forster.L'interprétation Hopkins-Thompson y est pour beaucoup car ces acteurs là sont à l'évidence les personnages de cette croisée des chemins avec la prise de conscience sociale encore timide et féministe(le personnage de la soeur cadette,Helena Bonham-Carter).Il fallait pour ce film un écrin et c'est la maison Howards End car c'est cela Retour à Howards End,un film-maison comme il y a des films-fleuves.Le lieu est très important chez Forster comme chez Ivory.Déjà dans Chambre avec vue et Maurice les demeures patriciennes étaient des personnages à part entière.Ici Howards End est une sorte de maison jonction des deux siècles et des classes se rapprochant dans la douleur.On y accède en voiture,on n'est pas loin de Londres,on s'y ressource.Le capitalisme y est parfois brutal.Comme ce monde a mal,comme ce pays est douloureux,sous le feutre et le chrome.

E. M. Forster

     Beaucoup de suppléments dans ce coffret,surtout les propos de Ivory et Merchant.Le travail sur les costumes et les décors aussi.Et une anecdote croustillante dans la bouche de James Ivory,que je rapporte en ces temps de démagogie bilatérale qui n'épargne pas la blogosphère:la grande Vanessa Redgrave, héritière d'une célèbre famille de grands comédiens et icône gauchisante,exigeant pour son rôle,court,le double du cachet avant d'en savoir le montant.Vous ai-je dit bilatérale?

24 février 2007

Le patron

                   

    C'est après avoir vu l'excellente interprétation de John Garfied dans la version 1950 de Michael Curtiz,Trafic en haute mer(The breaking point) qu'il me vient l'idée de rendre hommage au patron.Le port de l'angoisse de Howard Hawks(44) pas plus que le film de Curtiz ne sont très fidèles à En avoir ou pas d'Ernest Hemingway.Peu importe car bien que très amateur d'Hem j'ai lu ce livre il ya si longtemps que je ne me rappelle plus guère.Le thème,lui,reste le même,souvent la malchance qui oblige un homme relativement respectable à des compromissions,des marchandages.Jusqu'où?

   Dans Trafic en haute mer il s'agit d'un trafic de clandestins,dans Le port de l'angoisse les scénaristes dont William Faulkner,qui d'après la légende écrivait au rythme d'une ligne un scotch pour le film d'Hawks ont imaginé une histoire de réfugiés gaullistes aux Antilles Françaises.Mais dans la mythologie bogartienne cela compte pour si peu tant Bogie a mis de lui-même dans les dialogues et les sous-entendus lors des scènes avec Bacall.Cette histoire de loser deviendra l'acte de naissance du couple Bogart-Bacall dont je n'aurai pas l'outrecuidance de vous parler davantage.Comment cet alcoolique tabagique vieillissant a-t-il pu devenir le symbole le plus éclatant de la toute puissance de l'écran.Une réponse:la grâce,rarissime.A propos on dit que Bogart avait trouvé en Faulkner son maître ès boissons d'hommes.C'est vous dire le niveau.Autre anecdote trouvée dans le remarquable ouvrage de Todd McCarthy Hawks chez Actes Sud:Bacall offrit à Bogart un sifflet qu'elle lui passa au cou sur son lit de mort.C'était la rubrique people

   Tout ceci pour conclure:peu importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse.Quatre hommes et un chef d'oeuvre et on se fiche de ce que l'on doit à Hemingway,Faulkner,Hawks ou Bogart.

http://www.youtube.com/watch?v=8QsM9cdx1R0 Scène culte "Just whistle"

7 janvier 2007

La mine Greene

Peu d'écrivains ont été si bien servis par le cinéma que Graham Greene(1904-1991).Le célèbre auteur britannique mort sur le Lac Léman là où s'éteignit aussi Chaplin n'a jamais été trahi ni affadi,chose rare dans les orageux rapports littérature et cinéma.Tous connaissent Le troisième homme de Carol Reed en 49 que beaucoup attribuent à Welles tant sa présence pourtant assez courte inonde le film.Film d'ailleurs parfait sur l'après-guerre cinégénique en diable dans une Vienne en proie à tous les trafics où la célébrissime cithare d'Anton Karas,la lumière proche du grand expressionnisme allemand et Joseph Cotten naïf ou Trevor Howard roublard achèvent de donner au film le statut définitif et par trop galvaudé de chef d'oeuvre. http://www.youtube.com/watch?v=0qSHMxN5RMc

Fritz Lang n'est pas en reste et Espions sur la Tamise(44) est une réjouissante aventure labyrinthique qui mène un homme sorti d'un hôpital jusqu'à un réseau nazi au coeur de Londres.Ray Milland est l'interprète idéal de cet homme dépassé,victime mais astucieux avec quelques scènes d'anthologie.Adapté du roman Le ministère de la peur.

John Ford choisit Henry Fonda en 47 pour interpréter le prêtre fugitif de Dieu est mort(adapté de La puissance et la gloire).Dans un Mexique policier en révolution le défroqué retrouve foi et libre arbitre en une production que je persiste à aimer malgré des critiques sévères.L'univers de Ford à mon avis s'est finalement assez bien fondu dans le doute habituel à Graham Greene.

Vivre un grand amour,adapté de La fin d'une liaison par Edward Dmytryk en 54 est une bouleversante histoire d'amour et de culpabilité où transpire la foi douloureuse de Greene,portée à la perfection par l'opportunisme de Van Johnson et la lumière de Deborah Kerr inoubliable(photo du haut).Neil Jordan en a fait une excellente version en 99 avec Ralph Fiennes et Julianne Moore.

Voyages avec ma tante,Notre agent à La Havane,Le fond du problème,L'agent secret,Les comédiens sont autant de films à voir.Ce n'est pas toujours facile mais n'importe quelle bibliothèque municipale possède à peu près tout Graham Greene.Il aura inspiré de grands cinéastes.

17 novembre 2006

Adaptation impossible

Florence Colombani déjà auteur d'un très bon essai sur Elia Kazan(voir ce blog,cinéma américain) vient de publier un ouvrage érudit mais clair et passionnant sur l'un de mes cinéastes préférés.Proustienne convaincue comme Visconti elle s'est penchée sur les oeuvres du metteur en scène et de l'écrivain.On sait que Luchino a toute sa vie couru après l'adaptation de Proust,sans succès pour différentes raisons que Florence Colombani explique d'ailleurs.Mais surtout dans Proust-Visconti,histoire d'une affinté élective(Philippe Rey) elle démontre l'étroitesse des liens entre les deux oeuvres et comme quoi l'influence de Marcel est tangible dans tous les films de Luchino y compris les premiers,encore pourtant très néoréalistes et éloignés apparemment du style proustien.

   En plusieurs chapitres très joliment intitulés Le narrateur,Les multiples visages du baron de Charlus,Elégantes proustiennes Florence Colombani nous initie à ces calmes mystères quoiqu'inquiétants où les images du Duc semblent comme dans une "correspondance suspendue et fleurie" avec les mots et le style de Proust.Bourgeoisie,décadence,saphisme et désir drôlant le morbide,décors somptueux comme vacillant et plongeant vers la fin d'un monde,du monde non pas selon Proust ou Visconti,mais du monde qu'ils ont contribué à recréer.On comprend très vite l'association entre Balbec et Venise,entre les viellissants Professeur(Violence et passion),Prince(Guépard),ou Compositeur(Mort à Venise,pourtant d'après Thomas Mann?Mais Mann lui-même n'est-il pas étonnamment proustien?) et les Swann,Charlus,etc...

  Thème commun aux deux que cette déstructuration des dynasties come celle des Damnés ou de la famille de Rocco et ses frères pourtant très socialement éloignée par rapport aux Guermantes.Enfin la Sérinissime  visitée par le narrateur d'Albertine disparue est bien soeur de la Venise de Senso ou de Mort à Venise,vieille catin mal maquillée et que l'on désire malgré tout sans être exagérément fier de soi.Mais quiconque a contemplé la Beauté à la mort est déjà voué.Le narrateur chez Proust contemple l'Ange d'or du Campanile de Saint Marc comme Aschenbach contemple Tadzio,"rutilant d'un soleil qui le rendait impossible à fixer".

  Ce ne sont là que quelques traces de ce magnifique jeu de piste que nous propose Florence Colombani.Il y en a bien d'autres.A lire pour qui veut ne pas rester en dehors de cette rencontre irréelle entre deux génies.Visconti n'a donc jamais réussi à adapter La recherche...Détrompez vous.Il n'a fait que cela et plutôt bien.

19 octobre 2006

Les titans

                                                 

Quand deux titans se rencontrent et s'affrontent ou collaborent,ce qui est la même chose,le résultat est souvent très décevant(.+ par +égale -).Le cinéma nous offre une extraordinaire exception.

Orson Welles,adolescent surdoué,a commencé d'adapter Shakespeare à l'école.Le génial homme de radio qu'il était a continué sur les ondes puis au théâtre,notamment son fabuleux et novateur Mercury Theatre.Cela nous mène évidemment aux trois films,Macbeth,Othello,Falstaff qui jalonnent l'oeuvre tellement incomplète d'Orson Welles.Shakespeare,"le plus grand homme qui ait jamais vécu"(Welles) a toujours hanté le cinéaste de Kane(personnage shakespearien d'ailleurs et thème très shakespearien aussi comme Arkadin).

Le superbe collector Macbeth(chez Wild Side) fourmille de renseignements sur le film et les inénarrables aventures qu'il a connues comme beaucoup d'oeuvres de Welles.Attention celui-ci,grand  menteur en a rajouté aussi sur ses démêlés avec les producteurs.J'ai étudié Welles et appris à m'en méfier.Il faut savoir par exemple que Don Quichotte est un film inachevé quasi volontairement.Mais revenons à Macbeth car s'agissant de Welles il faut parfois m'arrêter.Avec un tout petit budget et pour la modeste Republic Welles tourne en trois semaines Macbeth dans des décors de westerns de série B.La première version sortie en 48 dotée de dialogues avec un très fort accent écossais est un désastre commercial.Remontée en 50 la deuxième mouture ne convainc pas davantage,même la critique.Laurence Olivier est à l'époque le seul garant de Shakespeare au cinéma.Malgré ces tripatouillages Macbeth marque une date car le film présente de réelles qualités cinématographiques d'utilisation de l'espace pourtant réduit,de la bande-son avec une musique de Jacques Ibert.Le DVD offre de nombreux suppléments où des spécialistes de Welles dissertent de Shakespeare et de l'adaptation.Tout cela est assez docte et savant,passionnant mais pas d'un humour ravageur.

Avec plus d'argent et toujours lui-même dans le röle-titre Welles tourne en 52 Othello au Maroc et en Espagne.C'est le contraire de Macbeth:tournage en décors naturels,très morcelé dans le temps, plusieurs années qui ont usé quatre Desdémone.Welles a utilisé cadrages,plongées et contre-plongées notamment sur les remparts de Mogador pour un résultat assez spectaculaire,récompensé à Cannes.Welles,alors toujours en Europe avait dû faire l'acteur toutes ces années pour financer son projet.

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"Nous en avons vu des choses,Sir John,quand sonnaient les Carillons de Minuit" est l'une des plus belles phrases du Cinéma.Falstaff,meilleur film d'après Shakespeare de tous les temps d'après moi est une pure merveille,pourtant issue d'un collage de quatre pièces du grand Will que le grand Welles a manipulées,triturées pour en saisir la substantifique moëlle.On y retrouve tout :la truculence,la paillardise,la couardise de John Falstaff mais aussi l'ambition,l'ingratitude du jeune roi,ancien compagnon de débauche de Falstaff.Le spectacle se conjugue ici avec une réflexion sur le pouvoir,la déchéance,l'amitié trahie au sein d'une fresque picaresque avec l'extraordinaire bataille de Shrewsbury,des moments de farce et d'émotion quand se mélangent rois et bouffons.Avec Falstaff on n'en est plus aux questions inutiles sur l'adaptation,la littérature au cinéma,la fidélité.On s'en moque:Falstaff est le coup de poing du cinéma.C'est aussi,on l'aura compris,un grand coup de coeurJ'ai beaucoup de respect pour Laurence Olivier ou Kenneth Branagh:ce sont de grands cinéastes fervents amis de Shakespeare.Welles,lui,en est le frère.

17 octobre 2006

Remarque sur Remarque

Le grand écrivain pacifiste allemand puis américain Erich Maria Remarque aura été bien servi par le cinéma ce qui est loin d'être le cas de tous les auteurs.Dès 1930 Lewis Milestone adapte son roman le plus célèbre A l'Ouest rien de nouveau que l'on considère comme le pendant allemand des Croix de bois,livre de Roland Dorgelès et film de Raymond Bernard.Film certes hollywoodien mais très lyrique et conforme à l'esprit de Remarque.Récompensé aux Oscars cette production reste une date dans l'histoire du film de guerre.

   Engagé très jeune dans le premier grand conflit Remarque sera toute sa vie obsédé par les massacres et dans le magnifique Trois camarades de Frank Borzage(38) la guerre est encore très présente même s'il nous conte l'amitié de trois soldats qui dure bien après l'explosion. Mais quitte-t-on vraiment jamais l'uniforme quand on a vécu l'enfer de ces hommes?Une jeune fille marquée elle aussi mais par la maladie vivra quelques mois de toute beauté parmi ces trois coeurs cassés.L'amour fou est une constante chez Borzage également auteur d'une belle adaptation du grand roman d'Hemingway L'adieu aux armes.

    En 58 Douglas Sirk signe le sublime Le temps d'aimer et le temps de mourir adapté du roman du même nom et qui se déroule sur le front russe de la Seconde Guerre Mondiale.Jean-Luc Godard en a dit "Je n'ai jamais cru autant à l'Allemagne en temps de guerre qu'en voyant ce film américain tourné en temps de paix".Sirk,croyez-moi,s'y connaît en émotions.

   Je n'ai jamais lu ces romans d'Erich Maria Remarque mais à l'évidence le regard de cet homme sur le siècle est aussi celui du grand écrivain italien Mario Rigoni Stern,déjà chroniqué,du français Barbusse ou de l'anglais Frederic Manning(Nous étions des hommes). A rapprocher également du tout nouveau Le chemin des âmes dont je viens de vous parler bien que ce dernier livre ne soit pas le témoignage d'un soldat mais une pure fiction d'un écrivain de 30 ans.

4 octobre 2006

Le noir lui va si bien

High SierraOui le noir lui va vraiment bien au cinoche et je crois que je me serais encore plus ennuyé sans ces durs à cuire du roman américain, Hammett, Chandler, Cain et tant d'autres. Aujourd'hui gros plan sur William Riley Burnett.Pas le plus connu mais du tempérament,le gaillard.Comme beaucoup d'autres W.R.Burnett a fini par traîner ses guêtres à Hollywood qui a  adapté nombre de ses romans.Lui-même fut scénariste et on discerne parfois mal dans son oeuvre les vrais romans des scénarios parfois simples ébauches. Faulkner, Chandler, Fante, Fitzgerald ont connu la même mésaventure.

    En 1930 Mervyn LeRoy signe Le petit Cesar où Edward G.Robinson campe un saisissant gangster que l'on suit de son ascension à sa chute.C'est l'un des premiers films noirs du parlant et il marquera une  date et ouvrira la voie pour un certain Scarface de Howard Hawks dont l'un des scénaristes est  justement William Riley Burnett.

   Roy Earle lui est un truand en fin de course et souhaite se ranger des voitures.Ceci est extrêmement difficile au cinéma.Bogart incarne à la perfection cet homme traqué dont la fuite dans les montagnes ne peut qu'être fatale. C'est la dernière fois que Bogart n'est pas en tête d'affiche(derrière Ida Lupino). Raoul Walsh s'y connaît en films d'action et Huston est ici scénariste.On le voit,rien que du beau monde pour High Sierra dont le titre français est peu usité pour cause d'homonymie(La grande évasion).

    En 1950 le même John Huston réalise Quand la ville dort(The asphalt jungle) quintessence du sous-genre du film noir "casse qui ,tourne mal" où excelleront aussi Dassin et Kubrick.Construit très rigoureusement Quand la ville dort met en scène pour the ultimate knock over Sterling Hayden,Louis Calhern,Sam Jaffe et d'autres,des gueules de l'emploi comme c'est nécessaire dans le polar à l'américaine.Je vous laisse imaginer la chute sans oublier de citer une certaine Marylin dans tois furtives apparitions. Déjà une femme enfant à vous attirer des ennuis.

King ColeCes trois réussites du grand écran ne doivent pas faire oublier l'écrivain qui avait son talent bien à lui.King Cole notamment est une oeuvre majeure qui raconte la campagne électorale d'un candidat républicain ou démocrate et nous éclaire sur la démocratie-démagogie  qui est loin d'être un monopole des années trente et des Etats-Unis.Relations ambigües avec la presse,l'industrie,le commerce.Rien de nouveau sur le soleil mais raconté par Burnett c'est du solide.Avec ce qu'il faut de cigares,de pépées,de pots-de-vin...La vie quoi!

16 août 2006

L'esprit d'Agatha

    Il y a deux manières d'adapter au cinéma les énigmes à l'anglaise d'Agatha Christie comme il y a deux héros au panthéon des enquêteurs de la perfide Albion:Hercule Poirot,belge de son état,a bénéficié de très gros moyens et distribution all-stars que ce soit sous les traits d'Albert Finney pour Le crime de l'Orient-Express ou de Peter Ustinov pour Mort sur le Nil ou Meurtre au soleil.Hotels de luxe, croisière entre gens du même monde, transports de tout confort, moustaches d'Hercule bien lustrées. Pas désagréable mais plus proche de Hollywood et de ses soirées costumées que de la campagne anglaise:voilà ce que m'inspirent ces chromos plaisants mais pesants.

  Non.Cinématographiquement l'univers d'Agatha Christie est bien plus présent dans les polars sans grand budget de George Pollock(61,62) ou Margaret Rutherford vieille dame indigne endosse la dégaine de Miss Marple. Cette série de quatre films:Murder ahoy,Murder at the gallop,Murder she said,Murder most foul qui ont été affublés parfois de titres français fantaisistes comme Le train de 16h50 ou Passage à tabac se déguste comme un vieux scotch au fond d'un manoir.Rien de rutilant comme au paragraphe ci-dessus mais un noir et blanc feuilletonnesque qui fait plaisir et des personnages de châtelains,d'héritiers,de gouvernantes,de médecins tous assassins en puissance mais à qui il sera beaucoup pardonné étant donné leur tare suprême et délicieuse:ils sont tous définitivement... britanniques.

4 août 2006

Le Carré tourne rond


               John le Carré a plutôt été gâté par le cinéma.En effet les adaptations de ses romans sont dansl 'ensemble assez réussis.La toute dernière d'après La constance du jardinier,mise en scène par Fernando Meirelles(La Cité de Dieu) tient à la fois de la fable tiers-mondiste et du thriller,rien de cela n'étant incompatible. Les multinationales et les grands labos n'apprécient pas cette charge très corrosive contre leur action en Afrique.Les Africains eux-mêmes n'en sortent pas grandis,entre corruption du pouvoir, trafic d'esclaves et banditisme. Terriblement pessimiste sur l'avenir du continent africain The constant gardener est aussi un film d'action dans un Kenya où les fauves sont bipèdes.Ralph Fiennes est un diplomate qui sent son destin lui échapper,broyé par des intérêts supérieurs. En 2001 John Boorman avait adapté Le tailleur de Panama,très bonne fiction sur cette espèce de marmite qu'est  l'Amérique Centrale,kafkaïenne à souhait. Les films antérieurs d'après John le Carré sont encore marqués du sceau de la Guerre Froide,thème favori de bien des auteurs d'espionnage.Je n'ai jamais vu La Maison Russie(Fred Schepisi,90) mais conserve un bon souvenir bien que lointain de La petiite fille au tambour(George Roy Hill,84,où il est question du terrorisme palestinien) et du célèbre Espion qui venait du froid(Martin Ritt,65 avec Richard Burton).   

L'antagonisme Est-Ouest est maintenant passé de mode évidemment.Il semble que l'Afrique ou le Moyen-Orient soient les nouveaux terrains propices à ce cinéma qui allie souvent rythme et réflexion politique.Modestement et sans jouer les précurseurs je pense que l'Indonésie,cette poudrière de 210 millions d'habitants où il ne fait pas bon vivre pour certains,pourrait être la star de demain. Une révision de mes documents m'oblige à mentionner M 15 demande protection de Sidney Lumet en 67,que je n'ai jamais vu.

 

1 août 2006

Nikos

AF-08894.jpg

                      Rassurez-vous ce Nikos n'est pas un bellâtre de la télé mais le grand écrivain grec Nikos Kazantzakis.J'ai vu un film de Jules Dassin de 1957 que la susdite télé n'a que très rarement programmé,Celui qui doit mourir,d'après Le Christ recrucifié,formidable roman de Kazantzakis.C'est une histoire de terre et de violence dans la Grèce rurale qui met aux prises deux communautés sur le thème de l'exil et du pardon.Lors d'une reconstitution de la Passion du Christ l'on va s'apercevoir que s'il revenait il serait probablement crucifié à nouveau.J'avoue que le film de Dassin m'a déçu,trop appliqué,théâtral et grandiloquent.Déjà à l'époque le public avait été désorienté et le bouquin est bien plus fort.Néanmoins on peut y retrouver Hanin,Vaneck,Ronet très jeunes avec la muse de Jules Dassin,Mélina Mercouri.

              Martin Scorsese avait en partie réussi  l'adaptation de La dernière tentation du Christ qui avait soulevé bien des polémiques il y a une dizaine d'années mais c'est en voyant Zorba le Grec de Michael Cacoyannis(65),d'après le roman Alexis Zorba que l'on approchera le mieux l'univers de Nikos Kazantzakis,peut-ëtre qu'un Grec était le mieux placé pour saisir l'âme grecque.

28 juin 2006

John,John,Henry and Bruce

 

Oui,cette curieuse affiche belge est bien celle des Raisins de la colère ,singulièrement affadie quant au titre habituel.

 

"L'autoroute luit dans la nuit

Mais personne n'a envie de rire

Assis dans la lumière du feu de camp

J'attends le fantôme de ce vieux Tom Joad"

       Bruce Springsteen(The ghost of Tom Joad)

La ballade,très belle,qui donne son nom à l'album très dépouillé de Springsteen(1997) fait référence à Tom Joad,le fermier ruiné du grand roman de John Steinbeck,adapté au cinéma par John Ford,dès la sortie du livre(1940).Il est est des cas,très rares où un grand livre peut donner naissance à un grand film.Le roman sonnait un peu comme un reportage;le film,très rigoureux,est un road-movie avant la lettre,contant la poignante errance d'une famille de paysans d'Oklahoma au lendemain de la Grande Dépression.

La route,c'est celle de la Californie qu'emprunte la vieille automobile bringuebalante des Joad,rappelant bien sûr les chariots bâchés de la mythologie du western,cahotant,trébuchant.John Ford,immense auteur des plus beaux films sur l'Ouest,maîtrise à la perfection la dramaturgie de cet espace vers la liberté(Go West,young man).Sur la route on rencontre aussi bien la fraternité que la désillusion,l'amitié que la trahison et les lendemains chantent rarement aux exilés du rêve américain.

L'authenticité du film est totale.Certaines scènes ont été tournées dans de vrais camps "oakies"(le surnom des déplacés de l'Oklahoma).Et Henry Fonda incarne avec foi Tom Joad,chef de famille qui veut croire encore à son Amérique.Les raisins de la colère,c'est simplement toute la noblesse du cinéma américain.Un grand livre,un grand film et soixante ans après un grand disque.N'en déplaise,un pays qui nous a donné John Steinbeck,John Ford,Henry Fonda et Bruce Springsteen  ne peut être complètement mauvais.

 

 

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