7 novembre 2012
Pour seule richesse
Pour seule richesse dans ce livre...la littérature,de la plus belle eau qui soit.Troisième roman,pour moi,de Laurent Gaudé,Pour seul cortège est un roman d'anthologie dont la relative brièveté ne freine pas l'envol au coeur de la grande histoire,celle qui donne à réfléchir sur le pouvoir et sur le destin,à travers la mort d'Alexandre,phare de toute une époque et aussi encombrant mort que vivant.Le livre est admirable et je suis en désaccord avec ceux qui aiment le livre mais le trouvent somme toute d'une grande froideur.Pour moi il est possible d'être ému par le style et le tragique de cet ultime voyage d'Alexandre.
Terrassé en Babylone lors d'un banquet Alexandre se meurt sous les fièvres.Que va devenir l'Empire avec ces prétendants à la succession et ces déchirures immédiates?Et quel est le rôle de cette princesse tirée d'un temple exilé que l'on ramène près du moribond?L'aventure,car c'en est une,des plus fidèles des compagnons de l'Empereur,se vit à travers les interventions de différents personnages tel un choeur antique,une polyphonie de l'épopée,justement évoquée par plusieurs critiques.
Certains parlent à propos de Pour seul cortège de clichés désuets et j'en suis surpris.J'ai un point de vue radicalement opposé.J'y trouve le souffle romanesque allié à l'érudition qui fait de ce livre un "western" antique,une fresque mais pas croulant sous les hyperboles pédantes,un écho d'un empire qui avec la fin de son maître risque de se déliter,et des personnages de haut rang susceptibles comme tout un chacun de jalousies et de trahisons.Je suis sensible à la langue et à la sonorité et ainsi je trouve que les noms propres des héros sont déjà pure poésie à mes oreilles de lecteur.J'ai pris plaisir à lire quelquefois à haute voix.Prononcer ainsi Tarkilias, Aristonos, Moxyartés est une jubilation,partie prenante de la lecture.Les lieux aussi exercent leur magie,l'Hyphase,l'Elymandros...Mais qu'on ne s'égare pas,Pour seul cortège n'est pas un exercice de style avec sa brillance mais aussi sa vanité.
Le long périple posthume d'Alexandre dont le corps est symbole,dont le corps est enjeu,devient sous la belle plume de Laurent Gaudé un extra-ordinaire récit où coule le sang des ambitieux et où frappent l'un contre l'autre les frères d'armes d'un passé récent.La cruauté n'est pas sans grandeur et la mort qui rôde a quelque chose d'exaltant.Certains blogueurs glissent une ou deux citations avec gourmandise.Ils ont bien raison mais je serais en peine d'en faire autant tellement ce livre s'élève au dessus de la mêlée littéraire.Une phrase toute simple m'a bouleversé par son universalité."Ce qu'ils on fait aujourd'hui,je l'ai fait hier" à propos des complots qui suivent forcément la mort d'un chef.Enfin,puisqu'il faut en finir,le personnage féminin est d'une richesse inouie,à lui seul justifierait les dithyrambes,le destin de Dryptéis étant âpre et barbare comme seuls savent l'être les dieux.
Ma note (je ne note jamais):17/20
Merci à Oliver de Price Minister qui a permis à bien des lecteurs ce beau voyage.
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