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                                            Faute d'amour est un film terrifiant comme Le retour, comme Leviathan. Que le cinéma de Zviaguintsev est troublant, jusqu'au malaise. Et comme la Russie semble le pays idéal pour la dérive,les dérives. Un couple se déchire dans la banalité d'une banlieue de Moscou ou Saint Petersbourg. De toute façon  on n'est nulle part. Dans un no love's land hideux et terrible où des parents glissent le doigt sur leurs tablettes, sans émotion, leur enfant étant en fugue, rien de plus, rien de grave. J'ai eu froid et j'ai pensé à Leonard Cohen " I've seen the future, it is murder".Andrei Zviaguintsev est d'ores et déjà un immense cinéaste mais ne comptez pas  sur lui pour vous sentir bien.

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                                 Un peu contraire, jouant la carte du mélo et de la différence, mais intelligemment construit sur l'aventure de deux adolescents sourds en fugue à New York en 1927 et 1977, Le musées des merveilles sait nous bouleverser. La Big Apple en noir et blanc, juste avant l'irruption du cinéma parlant, est très joliment filmée et ce conte initiatique transfigure la quête de ces  deux enfants sourds à la poursuite de leurs destins. Pour la magie on pense à Hugo Cabret qu'adapta Scorsese. Rien d'étonnnant, Brian Selznick étant l'auteur des  deux romans. Le film doit beaucoup à ses deux jeunes acteurs. Todd Haynes rend hommage aux grands mélodrames silencieux, et à la ville de tous les possibles. Bien sûr, quelques-uns, pas très nombreux, ont fait la fine bouche. Et Cannes l'a soigneusement ignoré. Moi j'ai trouvé qu'on était proche de la perfection. Space oddity de Bowie, la version d' Also sprach Zarathustra par le pianiste brésilien Deodato que je n'avais pas entendue depuis des siècles, une très belle musique originale de Carter Burwell, de jolis glissements des scènes identiques entre l'époque de Rose et celle de Ben, une poésie de tous les instants, autant de raisons de voir Wonderstruck.

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                                   Une séance ciné-philo a été consacrée au document d'Amos Gitai, un de plus, A l'Ouest du Jourdain. On connait depuis si longtemps le long combat de Gitai pour une solution pacifique du séculaire conflit. Pas mal d'intellectuels israéliens, écrivains, cinéastes, savants, luttent ainsi pour faire triompher la raison. C'est peu dire que c'est pas gagné. Le public a été très intéressé et la discussion s'est bien engagée, mais le sujet est si complexe. Certains ont vu le verre à moitié plein, les scènes de fraternisation des mères des deux côtés, le trouble de certains soldats d'Israel se remettant en question. Mouais... Moi, qui pèche rarement par excès d'optimisme, j'y ai surtout entendu un gamin de douze ans rêver de martyre d'une part, et un journaliste plutôt désespéré prévoyant que pour des raisons de démographie la solution négociée sera tout bonnement définitivement impossible d'ici quelques années. Terrifiant, glaçant et, à mon sens, probable. A l'Ouest du Jourdain est bien sûr un film à voir. Sans illusions.