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cinema
4 novembre 2007

Ne pas oublier Palerme

      Je consulte bien des blogs ciné,très variés,et je me suis aperçu que même les blogueurs férus de classiques ne parlent guère du cinéma politique italien des années 70.Ce cinéma semble avoir très mal vieilli et n'être plus guère à l'honneur.L'un des spécialistes était le metteur en scène Elio Petri(1929-1982),moins connu que Francesco Rosi.Rosi avec Main basse sur la ville,Lucy Luciano,L'affaire Mattei, Cadavres exquis a un moment eu la côte puis,les choses étant ce qu'elles sont,le cinéma,facilement versatile est passé à autre chose.On a donc peu lu en France l'écrivain sicilien Leonardo Sciascia,auteur de Cadavres exquis,et de deux romans portés à l'écran par Petri,Todo modo et A chacun son dû.

    Je trouve aussi que l'on a très vite oublié Gian Maria Volonte, acteur engagé s'il en était et qui fut de la plupart des films courageux de l'Italie de cette époque.Moi qui tente une modeste histoire du cinéma italien et de l'influence néoréaliste qui persiste en lui jusqu'à Moretti et Lucchetti je conserve un vif intérêt pour ces films maladroits mais sincères,un tantinet dogmatiques mais que la France n'a guère su faire éclore,toute auréolée de la fameuse exception française d'une ahurissante prétention.La filmographie de Volonte passe en dehors de Rosi et Petri par les cases Melville,Boisset,Delvaux,Littin,Zurlini et ...Sergio Leone.

     Souvent le filtre de l'histoire policière sert de sauf-conduit pour dénoncer l'affairisme et les corruptions, ces gangrènes de la péninsule(pas seulement,mais les cinéastes italiens eux ,ont su en parler).C'est le cas du peu connu A chacun son dû,où l'on voit dès les premières images d'élégants hommes de noir vêtus qui se signent au sortir de la cathédrale,et des balles perdues dans le maquis sicilien.L'archevêque a des amis haut placés,l'avocat et le notaire s'offrent un conciliabule,les amants reçoivent d'anonymes plis menaçants et les veuves pleurent comme au théâtre.Partie est liée entre les puissants,rien là-dedans de bien surprenant. Le film,en tout état de cause,ne vaut pas les oeuvres citées plus haut.Il donne cependant une idée de ce cinéma italien qui,au moins qualitativement,a toujours été plus au fait du pays que n'importe quel autre.

      E firmato   

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3 novembre 2007

Le huis clos mexicain

   1962,Bunuel tourne L'ange exterminateur au Mexique où il vit depuis 25 ans.Ce film restera l'un des plus célèbres de l'auteur,l'un des plus interrogatifs aussi.Car qu'a voulu signifier Bunuel avec cette fable comme il les aimait tant,filmée avec verve,malice et ce zeste de démagogie bunuélienne qui lui sied d'ailleurs à ravir?Après tout n'avons-nous pas tous le droit de lester nos propos d'un peu de simplisme?Débarquons vite de ce dîner dans les beaux quartiers les domestiques qui désertent la grande maison dès le début.Peut-être tient-il à leur épargner l'indignité qui va saisir leurs patrons.Peut-être n'intéressent-ils pas Bunuel tout simplement.On est loin de Los Olvivados ou Las Hurdes. Comme si le fait d'être humble et de servir vaccinait contre la bêtise.Ca se saurait.Bref les convives se trouvent livrés à eux-mêmes et enfermés,toute volonté bientôt annihilée par leurs apathies et leurs antipathies.

   Au fil des heures les invités se découvrent et aucun ne trouve grâce aux yeux de Bunuel. Intérêt, lubricité,vanité sont leurs moindres défauts et les humains s'abêtissent au sens propre.Ils ne tentent pas de sortir vraiment,confits dans leurs rivalités et leurs mesquineries. Bien sûr Don Luis a la main lourde et une telle charge paraît parfois sombrer dans l'outrance.Mais Bunuel est habile et sait instaurer dans ce climat délétère l'humour ravageur et presque non-sensique qui parcourt nombre de ses films.Une main comme sortie de La famille Addams,des moutons sacrificiels et la touche anticléricale,marque de fabrique ancienne du temps de son ex-complice Salvador Dali,des pattes de poulet comme signe des superstitions diverses qu'il dit abhorrer,tout cela a bien passé les années et je crois(voir notes anciennes sur Bunuel) que le purgatoire qu'il traverse prendra fin.Des créateurs,des chercheurs comme Luis Bunuel,sont définitivement hors des modes.Parmi les plans d'églises ou de cathédrales au cinéma, autre idée qui me passionne,les images de fin sont bunueliennes en diable (l'expression lui plairait).

2 novembre 2007

Un été 52

Monika1_2

      

 

   J'ai découvert ce vieux film de Bergman,cinéaste pour lequel j'ai un retard considérable,qui date de 53.A cette époque il a déjà beaucoup tourné et subi l'influence de ses grands ancêtres suédois Sjöstrom et Stiller,ainsi que celle plus ou moins marquée du Néoréalisme,qui baigne nettement le début de Monika.Parfois titré Un été avec Monika ou Monika et le désir ce film commence comme une bluette entre deux tous jeunes gens épris de liberté et peu enclins à l'aliénation du travail.Pour peu on se croirait en congés payés.Mais c'est oublier l'austérité et la désespérance qui hantent l'oeuvre du fils du pasteur.

    Harry et Monika sèchent le boulot et vont vivre un été d'amour au bord de l'eau,de l'eau scandinave avec une saison des baisers plutôt courte et le confort rudimentaire.Les lendemains se profilent vite et la sonate d'automne aura une toute autre tonalité.Un enfant leur arrive et Monika,femme-enfant,agressive rêveuse,ne semble pas mûre.Le prolétariat de Stockholm n'est pas celui de Rome et la solidarité est bien mince.Et surtout l'érotisme des bords de lacs suédois s'accomode mal des rigueurs de la maternité.Harriet Andersson sera l'une des actrices préférées de Bergman et celui-ci donnera bientôt les chefs-d'oeuvre que l'on croit connaître.

20 octobre 2007

Adieu Madame

      Quelques photos d'une actrice rare qui a marqué ma vie de cinéphile,Deborah Kerr(1921-2007).

Elle et lui

Thé et sympathie

Le roi et moi

Tant qu'il y aura des hommes

Le narcisse noir

12 octobre 2007

Iwo Jima:deux versions,deux versants

      Le dyptique de Clint Eastwood est une oeuvre attachante et originale:conter la bataille en deux épisodes,très différents et pourtant complémentaires.Outre que ces films nous rafraîchissent la mémoire très utilement sur Iwo Jima et le Pacifique dont on connaît mal en France l'importance pour les deux peuples japonais et américains Mémoires de nos pères et Lettres d'Iwo Jima sont indissociables et permettent chacun à sa manière une relecture d'un des grands genres du cinéma,le film de guerre.Traités de manière dissymétrique les deux films constituent les deux faces d'un terrifiant miroir sur l'une des batailles les plus meurtrières du Second Conflit.

    Mémoires de nos pères revient sur un aspect peu connu d'Iwo Jima,à savoir la tournée de propagande de trois des soldats ayant hissé le drapeau au sommet,photographie célébrissime.La manipulation très business,très pro,de ces jeunes gens laisse un étrange gôut de cendres et en dit long sur le désarroi du pays face à la menace nipponne.Les scènes en Amérique sont très réussies et l'on mesure très vite les difficultés de l'après-guerre pour ces soldats dépassés par l'enjeu.Mais si l'on sait qu'il n'y a pas de guerres faciles on sait aussi que les lendemains de guerre ne chantent jamais plus qu'une journée.Clint Eastwood, réalisateur qui a su transcender Hollywood,très américain et en même temps tout à fait capable du recul nécessaire à une réflexion sur cette époque a prouvé avec Mémoires de nos pères qu'il était définitivement inscrit dans l'histoire du cinéma américain dans la lignée de Griffith ou de Ford.

     Lettres d'Iwo Jima est peut-être plus traditionnel mais a l'immense mérite d'essayer d'appréhender le point de vue de l'adversaire.La dignité est le maître mot de ce film.Dignité et discrétion du regard d' Eastwood, dignité du général japonais,patron d'Iwo Jima,plutôt américanophile de culture,dignité de la plupart des personnages,happés par un destin plus grand qu'eux et broyés par la machine de guerre,tout comme leurs homologues américains.Basé sur les propres lettres du Général Kuribayashi le scénario de l'Américano-japonaise Iris Yamashita permet au metteur en scène de peaufiner aussi bien des scènes quotidiennes au fil des jours infernaux vécus là-bas que l'ampleur guerrière de ce cauchemar d'où les soldats japonais n'avaient que d'infimes chances de survie.

    Clint Eastwood dit avoir dirigé des comédiens nippons remarquables de justesse et de sobriété.Au vu du résultat on ne peut qu'acquiescer et s'enthousiasmer pour un film unique,hommage aux combattants,et d'une valeur humaniste universelle.L'édition collector propose des suppléments très intéressants sur les castings,le tournage et la personnalité des vrais protagonistes de cette horreur.Je ne suis pas à priori un fan des bonus mais dans le cas des films de guerre je trouve que l'on gagne à mieux connaître ainsi la trame historique.

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17 septembre 2007

La passion selon Andreï et Andreï

L'univers d'Andreï Tarkovski est fascinant et je viens d'y aborder avec une prudence de Sioux en présentant Andreï Roublev qui tient de la fresque historique mais surtout de l'interrogation mystique sur la place de l'artiste dans le monde et la dichotomie entre l'Art et le Mal.A savoir lequel terrassera l'autre.Quand il commence à tourner Andreï Roublev en 65 Tarkovski est encore le jeune prodige de l'école soviétique du cinéma.Il n'a signé qu'un film,plutôt distribué dans le cadre des films pour enfants,L'enfance d'Ivan,encore très marqué du sceau un peu glacial du grand cinéma soviétique.Mais Tarkovski à parti de Roublev ne sera plus l'homo soviéticus de l'avenir mais un cinéaste libre,terriblement exigeant et qui ne produira que peu d'oeuvres,toutes passionnantes,toutes âpres et à mille lieues de tout autre cinéma.Attention je rappelle que je débute en "tarkovkisme" evec cette petite étude présentée au Temps Libre.

  Andreï Roublev est le plus célèbre peintre d'icônes de la Sainte Russie(XV° Siècle).La Trinité est la plus connue de ses oeuvres,modèle d'épure et d'esprit.Andreï Tarkovski,avec l'aide du troisième Andreï de la trinité,Kontchalovski,le futur cinéaste ici scénariste,a divisé son oeuvre en huit épisodes encadrés d'un prologue et d'un épilogue.Mon propos n'est pas d'analyser ici de fond en comble un film d'une richesse et d'une densité stupéfiantes,ni de gloser sur les invraisemblances historiques relevées par de pointilleux exégètes.Mon propos serait plutôt de donner envie d'entrer dans un monde unique,celui du doute et du mystère,qui hanta toute sa vie  l'oeuvre si serrée de Tarkovski,qui ne doit rien à Eisenstein,ni au théâtre de Tchekhov,ni aux romans existentialistes de Dostoievski.Beaucoup de réalisateurs ont fait des films,parfois immenses.Tarkovski,lui,a fait du cinéma.Tarkovski,homme presque seul...et russe.Ce qui lui valut l'exil,cela va de soi.

   Après un préambule où un homme s'écrase dans une ébauche de montgolfière où il n'est pas interdit de voir les rapports de la Terre et du Ciel,et le mythe de la chute(pas interdit mais pas obligatoire non plus)Tarkovski nous entraîne sur ce chemin russe  de la fin du Moyen Age,très obscurantiste.Ses héros à lui,outre le moine artiste Andreï Roublev,sont souvent un fou,une infirme,un vieux compagnon de marche.Tous semblent se confondre avec l'hostilté de la nature,maigres comme ces modestes bouleaux,maltraités comme cette pauvre terre russe gorgée d'eau et de boue.C'est l'occasion pour Tarkovski de très beaux tableaux sur la foi et la raison,avec une Passion du Christ enneigée(le premier titre du film devait être La passion selon Andreï),avec un sabbat,peut-être la part du diable,avec l'apocalypse selon les Tatars et la mise à sac de la cathédrale de Vladimir qui contraindra Roublev au silence et à l'expiation pour un crime de légitime défense.Enfin une cloche rédemptrice rouvrira les lèvres et les mains d'Andreï qui comprendra que taire son talent est un grand péché.

    Ne nous y trompons pas surtout.Andreï Roublev n'a rien d'un pensum terriblement orthodoxe.C'est au contraire une invitation au spectateur à se prendre en charge,à se questionner.Naviguant entre la fresque grandiose et les angoisses du moine-peintre,annonciatrices de la Renaissance,Tarkovski signe un chef-d'oeuvre complexe,incroyablement fouillé,interactif en ce sens que l'on ne sort de ce film qu'en s'interrogeant.Il y a un sentiment religieux qui anime Andreï Roublev certes mais plus encore une exaltation de la liberté artistique qui lui valut d'être " bloqué" longtemps aux temps très anciens de l'U.R.S.S.En 86 Andreï Tarkovski tournera en Suède son film ultime Le sacrifice.Au très beau cimetière orthodoxe de Sainte Genevieve sa tombe voisine avec celle de Rudolf Noureev.Sont-ils si éloignés l'un de l'autre?

16 septembre 2007

Les fleurs du mâle

    J'aime le cinéma de Jim Jarmusch.Sans avoir l'air d'y toucher et sans tourner énormément il a su depuis vingt ans faire entendre sa petite musique filmique très personnelle.Dead man et Ghost Dog sont deux films très aboutis,aux images fortes,où les influences de différents cinémas transpirent(western,films de samouraï).Broken flowers est lui aussi un bijou de ciné-pêle-mêle frôlant le surréalisme et le road-movie,narrant le très improbable voyage d'un Don Juan d'aspect lunaire joué par le fabuleux "Droopy" Bill Murray,cet acteur à minima qui d'un regard nous fait fondre de compassion et nous tordre de rire.Bill est tout cela à la fois,clown blanc à la tristesse chevillée devant sa télé,solitaire conquérant mais qui comme Don Juan a dû être à chaque rencontre,donc à chaque rupture(car pour moi rencontre et rupture sont synonymes,ce n'est qu'une question de temps) se retrouver encore un peu plus pâle,un peu plus triste,un peu plus absent.Il y a dans les personnages joués par Murray un je ne sais quoi d'un mime du Boulevard du Crime qui n'aurait pas déparé Les enfants du paradis.

   Le cinéma de Jarmusch joue beaucoup sur l'absence avec des héros qui ne sont pas tout à fait là.Ils sont un peu ailleurs et le spectateur s'est éloigné lui aussi pour broder sa propre logique sur les thèmes égrenés par Jim Jarmusch. Ici la sempiternelle quête du père à la recherche d'un fils,fils pas très probable lui non plus évidemment.Jim Jarmusch n'impose jamais rien.Ce n'est pas un tonitruant et si vous voulez des certitudes passez votre chemin.Ici vous n'aurez même pas des probabilités,seulement des hypothèses au long de la route comme dans Mystery train ou Down by law,plus anciens mais déjà très incertains. Quelle qualité que l'incertitude qui baigne Broken flowers.Et comme toujours Jarmusch a soigneusement choisi ses musiques.

16 septembre 2007

Italie,couple,premières crises

    Ce film,intelligent,émouvant,clinique prouve l'infinie cohérence de ce cinéma italien à nul autre pareil.Je ne reviendrai pas sur ma vénération de Roberto Rossellini, l'homme de Roma cita aperta,de Païsa, d'Allemagne année zéro et sur le Néoréalisme,honneur du cinéma et mon leitmotiv sur ce blog ciné depuis les origines.En 53 Rossellini s'est éloigné des critères néoréalistes,à sa manière,comme les quatre autres  figures majeures prénommées Vittorio,Luchino,Federico et Michelangelo. Déjà il y a eu en 51 le très dérangeant Europe 51 où la grande Ingrid est tentée par la sainteté après le suicide de son fils.Rossellini a toujours été dérangeant.Il est même le prototype du cinéaste de la remise en question.

   On a parlé d'Antonioni au moins quelques jours après sa disparition.Voyage en Italie préfigure la crise existentiellle que le metteur en scène de L'Avventura portera à son apogée.Rossellini se penche sur le couple avec une acuité toute personnelle lors d'un voyage de bourgeois anglais près de Naples.Dans la pauvre campagne napolitaine ou dans les hôtels de luxe les deux époux,sans enfant,ne se sont jamais tant vus et cette intimité est douloureuse. Comment ne pas partager cette inquiétude feutrée d'abord puis patente devant la déliquescence de ce couple finalement comme vous et moi?La jalousie s'installe sournoise mais Voyage en Italie n'est pas un film sur un triangle amoureux quelqu'il soit.C'est par contre une oeuvre magistrale sur la difficulté d'être à deux,et l'humanité ne semble guère douée pour ce que j'appelle "l'être ensemble".

     En Italie plus qu'ailleurs et surtout dans les années cinquante on est confronté à la beauté antique et à la noirceur contemporaine.Souvenir de la guerre pas si lointaine un jeune poète ami de Katherine lui revient à l'esprit.Ce n'est pas du gôut d'Alexander peu porté sur la sensibilité.Les fuites de l'un comme de l'autre dans les catacombes(symbole) ou les musées aux troublantes statues pour Katherine,et dans les mondanités pour Alexander,semblent un temps sonner le crépuscule de ce mariage stérile.Images de landaus et de femmes enceintes,puis images de la foi des processions redonneront peut-être une autre foi et un semblant d'avenir à l'un des plus beaux couples "vrais" de cinéma qu'il m'ait été donné de voir,Ingrid Bergman et George Sanders.

    Le cinéma de Rossellini est le plus étudié au monde.Le cinéma de Rossellini est aussi le plus poignant,le plus "humain" qui soit.Il faut absolument voir Rossellini qui n'est pas qu'un sujet de thèse.

8 septembre 2007

Furie:titre sobre

         Et l'homme fit de l'homme une bête. Fritz Lang découvre l'Amérique.

     La foule est une hydre,entité propre,qui fait partie de l'univers de Fritz Lang dès ses films allemands. Souvenez-vous des ouvriers robotisés de Metropolis ou du tribunal de la pègre de M.Après une courte escale en France Lang tourne en 36 son premier film américain.Fury est une oeuvre d'une rigueur admirable qui ne se démodera jamais car le couple infernal crime-vengeance et le rapport mal-justice sont inhérents à l'homme qu'il soit des cavernes ou dans nos sociétés civilisées.D'ailleurs Lang en parle bien dans ce film des "civilisés".Venant de quitter l'Allemagne en pleine horreur montante Lang universalise très intelligemment une parabole sur la violence latente qui sera au coeur de plusieurs de ses films (voir billets précédents dans Cinéma des Etats-Unis).

  Spencer Tracy,qui aura toute sa vie plutôt une image de droiture est victime d'une méprise et emprisonné. Les années trente et une ambiance encore très western baignent cette intrigue.Nous ne sommes même pas dans l'erreur judiciaire mais dans la justice expéditive(Voir le beau film de W.Wellman L'étrange incident déjà chroniqué). La brutale montée de la haine des gens "bien" fait penser à d'odieux évènements contemporains du film et Fritz Lang  orchestre la partition magistralement:les "justiciers" assiègent la prison presque en chantant,sûrs de leur bon droit.L'étranger ne peut qu'être coupable et l'on s'achemine vers l'innommable de façon presque guillerette.Scènes d'hystérie,mention spéciale à quelques femmes qui viennent comme au spectacle de la guillotine.Mais le film,déjà très troublant,est loin de s'arrêter là.

     Joe Wilson n'est pas mort et toute la deuxième partie du film est consacrée à sa vengeance,menée progressivement et sans faiblesse,réfléchie,orchestrée,planifiée et pour tout dire cauchemardesque.Joe Wilson le brave type ira frôler par sa haine et son idée fixe l'horreur du comportement des accusés.Passé de l'autre côté de la ligne,mort civilement et anéanti par le basculement des valeurs de son pays cet homme sain,homo americanus de bonne foi et fidèle à l'amendement,ira aux limites de l'insoutenable et la victime finira par ressembler comme un frère à ses bourreaux.Mais veille l'amour et Lang a souhaité la rédemption. Faut-il le regretter sur le plan du cinéma?Mais bon sang,le grand pays démocratique a eu très chaud,si prompt à dégainer.En Europe dans trois ans on dégainera sérieux.

   Fury est un film implacable comme la plupart des grands films de Lang: manipulation, voyeurisme, vengeance, compromissions au programme du maître viennois.

5 septembre 2007

Jane,ma soeur Jane

     Dans la série Familles je vous hais,non loin de Festen ou de Qui a peur de Virginia Woolf?,voire La guerre des Rose,voici Cruauté,duplicité,sororité.On sait que ce type de films tourne souvent au duel de monstres sacrés,plus encore d'ailleurs au théâtre,combat quotidien où doivent s'exacerber encore jalousies et rancoeurs,fort courantes à la scène(exemples célèbres d'Arestrup ou plus loin dans le temps de Raymond Gerome et Madeleine Robinson dans la scène de ménage totale d'Edward Albee qui au cinéma vit aussi Burton-Taylor échanger des horions)Avec Baby Jane on frôle le film d'épouvante domestique et fraternelle. Le Grand-Guignol,spécialité théâtrale du XIX° Siècle,n'est pas loin non plus,chargé de rictus et de maquillages outranciers.

    On sait peu que Qu'est-il arrivé à Baby Jane? est adapté d'un roman de Henry Farrell auteur aussi d'Une belle fille comme moi(Truffaut au cinéma).Le film dirigé par Robert Aldrich est impressionnant,cerné de méchanceté et de puérilité débilitante,traversé par un infantilisme incarné par Baby Jane-Bette Davis.C'est bien d'une sorte de poupée maléfique qu'il s'agit.Ce malaise s'empare de nous et ne nous lâche plus.Davis y est ahurissante et le malaise s'en accroît encore vu la façon dont elle s'approprie ce personnage quasi-démoniaque.Crawford victimise davantage Blanche Hudson et sa manière de tourner en rond les yeux exorbités semble indiquer qu'elle n'est pas l'innocence même.Ce serait trop simple.Pour faire court je dirai que je crois beaucoup à Davis en bourreau,moins à Crawford en victime et c'est ce que voulait ce malin de Robert Aldrich à mon avis.Les bonus du DVD qui m'ont assez peu conquis parlent de relations tumultueuses entre les deux stars,ce qui,étant donné leur réputation,n'étonne guère.

   Longtemps classé dans les films d'épouvante Baby Jane dépasse de loin le genre mais y adhère totalement malgré tout par la surenchère de kitsch,de mauvais goût,sorte de Dallas presque gore(rappelons que nous sommes en 62). Mais je viens au plus impressionnant du film à mon gré,peu commenté me semble-t-il.Le personnage joué par Victor Buono,musicien convoqué par Jane pour recréer son numéro musical d'il ya plus de cinquante ans,est à lui seul un cas clinique effrayant.Vieux garçon accaparé par sa mère, freudien comme c'est pas permis,la lippe pendante et la chemise douteuse,Erwin sera la lâcheté en personne, veule et méprisable,d'une totale in-humanité.Un rôle formidable de composition qui sera pour moi l'image forte d'un film qui n'en manque pas.

25 août 2007

The last rebel

       Dalton Trumbo(ex-black listé),Edward Abbey(auteur du roman The brave cowboy)Kirk Douglas producteur acteur et David Miller sont à l'origine de Seuls sont les indomptés(62). J'ignorais d'ailleurs que ce film était adapté d'Abbey mais n'en ai pas été surpris au vu du sujet écologique,voire passéiste,et à mon gré pas très loin de la puérilité.Car c'est bien de cela qu'il s'agit. John W.Burns(Kirk Douglas) est un enfant de 40 ans qui refuse de grandir ou du moins qui n'accepte pas que la société ait changé.C'est bien le thème quasi unique des livres d'Edward Abbey dont le plus célèbre Le gang de la clé à molette( Un Américain pas bien tranquille).

    Plan d'entrée vant le générique:un cowboy somnole et un avion le réveille.Tout est là,ce choc des cultures,le passé idyllique auquel on veut nous faire croire et le présent turbulent.On ne sortira pas du dilemme au long du film.Mais Seuls sont les indomptés n'est cependant pas dénué d'intérêt et la débauche de moyens mis en oeuvre pour maîtriser ce type simplement coupable de bagarre dans un bar fait froid dans le dos.Walter Matthau campe un sheriff lucide et qui n'est pas particulièrement motivé par sa tâche. Burns, coupable surtout de vouloir vivre comme avant,n'a aucun avenir sur cette terre et la scène finale assez poignante,fait partie du faire-part du décès du western.Ce n'est pas un hasard si les rapports homme-cheval n'ont jamais été aussi cruciaux que dans ce film.

25 août 2007

De mèche avec Hammett

    J'ai souvent parlé de Hammett,Chandler et autres et toujours de façon admirative.Et le cinéma ne s'y est pas trompé avec nombre d'adaptations dont certaines plus que mythiques(voir la photo de l'accueil).La réalisation de Stuart Heisler,en 42,avec une écriture de Jonathan Latimer,de La clé de verre,roman publié en 31 mérite qu'on s'y attarde.Ce film noir que présente très bien Philippe Labro qui s'y connaît,tourné en un noir et blanc studio Universal typique,nous offre un trio d'acteurs convaincant. La blonde fatale a les traits et la mèche très suggestive de Veronica Lake,dangereuse comme savaient l'être les femmes dans ces histoires de magouilles politico-gangstero-policières.Encadrée d'Alan Ladd et Brian Donlevy dont l'amitié sera mise à rude épreuve elle est assez inoubliable.Ladd est très bon,à mon avis meilleur que dans ses westerns où je l'ai toujours trouvé un peu terne. Donlevy est un acteur méconnu qui donne beaucoup d'étoffe à son personnage ambigu de faiseur de rois,ou plutôt de gouverneurs.

    On sait que Dashiell Hammett avait une écriture comportementale qui laissait peu de place à la psychologie et au bla-bla-bla.Le script de Latimer,un spécialiste,et la mise en scène de Heisler sont au diapason d'un film bref et musclé que Bertrand Tavernier déteste dans son ouvrage de référence sur le cinéma américain.J'aime bien le grand Bertrand qui a fait beaucoup pour sortir de l'ombre de nombreux films mais là je ne suis pas de son avis.Je ne me lasserai pas de ces voitures qui sillonnent la ville américaine sous la pluie,se garent sans problèmes et laissent sortir un politicard,deux sbires et une vamp prompte à prendre le bras du plus fort tour en lançant une oeillade au plus beau.

   Et La clé de verre recèle des dialogues pointus souvent très drôles dont j'ai retenu cette phrase qui suffit à mon bonheur:"Ma première femme était deuxième en cuisine dans un restau minable de la Quatrième Rue".Ou encore un tueur genre pithécanthrope,ceci dit sans vouloir blesser les pithécanthropes, déclarant, affamè:"Quand je mange un steak j'aime sentir qu'il me mord."

17 août 2007

Vous reprendrez bien un peu de solitude?

      Avec plaisir,servie par Antonioni.Ultime élément de sa désormais célèbre(et même relancée par son départ) trilogie du couple en crise et de l'incommunicabilité, vraiment difficile à dire et même à écrire ce mot,L'éclipse est un film que je n'avais jamais vu.Le désert rouge,film suivant peut d'ailleurs tout à fait préténdre s'ajouter au tryptique qui deviendrait alors tétralogie.J'appellerai ça le cycle antonionien de la crise et de l'absence.Ca en jette non?Et si vous me dites que quelqu'un l'a écrit avant moi j'en pique une,de crise.Outre Monica Vitti,muse et double d'Antonioni,présente dans les quatre films,on y retrouve Delon dans l'un de ses plus beaux rôles.A propos de Delon comme on écrit beaucoup d'âneries je rappelle que Visconti, Antonioni, Clément, Melville,Losey,Zurlini c'est déjà pas si mal,non?

    L'éclipse commence par des silences et une rupture.Il y en aura des silences car Antonioni est plutôt un taiseux qui laisse l'image prendre toute sa place.Quant à la rupture c'est tout son cinéma qui rompt.Et ce sont ces quatre films qui feront date à mon avis dans l'oeuvre d'Antonioni.Son aventure de Zabriskie Point me semblant assez lourde et bien que Blow up soit un thème intéressant je ne suis pas totalement conquis par une sorte de reconversion nihiliste,ce qui n'est pas le cas de L'éclipse ou L'Avventura qui même s'ils taquinent la vacuité et le vide ne nous bouleversent pas moins.

    Vittoria vient de quitter son amant.Vittoria est seule.On est toujours seul et ce n'est pas Antonioni qui pourra y remédier.J'ai parlé du silence.Pourtant on vocifère beaucoup dans L'éclipse,à la bourse de Rome où Delon, magique en jeune trader nerveux et aérien rencontre Vittoria.Réapprendre à aimer?Mais elle le dit:"A-t-on besoin de se connaître pour s'aimer?Et puis a-t-on besoin de s'aimer?".La solitude qui est la nôtre,on la sent dans L'éclipse,on peut la toucher et de ce cinéma que l'on dit ardu,on sort les larmes aux yeux,plus mal,plus humain en quelque sorte.Plans muets sur Rome presque vide, réverbères qui s'allument,rares passagers des derniers bus.Il ne s'est rien passé.Plans muets sur Rome vide, comme ma vie.Et si planait l'ombre de Buzzati,nantie de son infernale attente qui me dévore le ventre.Voici les dernières minutes avec la musique de Prokofiev.

http://www.youtube.com/watch?v=e-R-ZNYxGHM

9 août 2007

Riches heures du cinéma italien

las-llaves-de-casa

                    Dasola qui a commenté l'affiche l'a fort bien dit.Voilà un film qui est dans la droite ligne du billet précédent et qui me rattache encore plus à ce cinéma que l'on a tendance à enterrer depuis la disparition des maîtres historiques ô combien importants.Les clefs de la maison est le troisième film de Gianni Amelio que je vois.J'avais présenté il y a une dizaine d'années en ciné-club Lamerica,beau film sur les magouillages autour des boat-people albanais.Les enfants volés se présente comme un joli road-movie à l'italienne sur un carabinier qui doit convoyer deux pré-ado difficiles.Ces sujets parlent d'eux-mêmes.

             Gianni Amelio s'intéresse ici à la rencontre entre un père et son fils handicapé de 15 ans,qu'il découvre car l'ayant abandonné à sa naissance sans même le voir.C'est l'histoire de leur sentiment naissant,à mille lieues du racolage oscarisable.En quelques jour le père plutôt insouciant prendra conscience de ses responsabilités.Mieux vaut tard que jamais.J'avoue que je suis moins convaincu par le personnage de Charlotte Rampling pour lequel le metteur en scène a un peu cédé à la facilité afin d'introduire un tout petit peu de romanesque.Faute vénielle pour un film serré,net et qui offre une vue un peu documentaire qui m'a beaucoup intéressé,étant moi-même professionnel en ce milieu.

 

9 août 2007

Le cinéma du courage

      Ermanno Olmi(L'arbre aux sabots) est un de ces cinéastes du courage et de l'exigence.Peu prolifique il signe en 59 son premier long.Je considère que Le temps s'est arrêté est l'adieu au Néoréalisme,tardif mais évident tant le regard et la production artisanale des films d'Olmi s'apparentent au Mouvement.De quoi s'agit-il?Le temps s'est arrêté est la chronique toute simple,sans scories anecdotiques ni dérapages romanesques,d'un premier contact professionnel entre deux hommes appelés à passer un mois ensemble dans une baraque de montagne,à surveiller le chantier d'un barrage.Nous sommes dans l'Italie du Nord des années cinquante.

        Ce film peu connu illustre parfaitement l'artisanat d'Ermanno Olmi,qui sait parfaitement filmer le travail des hommes(Cf. L'emploi,L'arbre aux sabots).Ce cinéma tout en noblesse ,sans amertume et sans démagogie, à l'opposé du militantisme bas de plafond de certains,n'est certes guère armé pour le box-office. Mais les dialogues entre le vieux briscard et le jeune stagiaire,restreints au début,personne n'osant se livrer, atteignent une justesse rare et ne cèdent à aucune facilité.Un de ces rares films que l'on peut être fier d'avoir vu,comme si l'on avait participé à une bonne journée de travail,utile,du travail d'homme,celui qui peut presque vous rendre heureux.

      Olmi,qui tourne peu,occupe en Italie une place à part,mais,je crois,sincèrement aimé du peuple italien comme l'un des leurs.D'origine paysanne modeste Ermanno Olmi a lui-même été employé d'une compagnie d'électricité,ce qui lui a permis de réaliser ses premiers courts,documentaires.Il lui en est resté quelque chose.

31 juillet 2007

Les feux de la rampe version Cinecitta

         Antonioni quand il signe La dame sans camélias en 1953 n'est pas encore le cinéaste "à la mode" qu'il deviendra quelques années plus avec L'avventura,La nuit ou L'éclipse. Pourtant sous les derniers feux du Néoréalisme percent les questions existentielles sur l'identité qui seront un peu sa marque.Celui qui devait devenir le chantre de l'incommunicabilté a su très bien dans La dame sans camélias nous faire sentir le mal-être de Clara Manni,jeune starlette peu douée pour l'art dramatique et plus ou moins manipulée par les hommes qui traversent sa vie.

        Régulièrement oublié quand on dresse la liste des films se déroulant dans le milieu du cinéma (Truffaut, Godard, Mankiewicz,Minnelli,Wilder) La dame sans camélias mérite un détour.Déjà comme beaucoup d'antihéros antonioniens Clara est de la race des vaincues et le film est l'histoire d'ue défaite,d'une renonciation.Fatiguée malgré ses 22 ans la jeune actrice finit par céder et sacrifier ses ambitions artistiques sur l'autel des paillettes,cette drogue dure qui fera d'elle une étrangère à sa propre vie,come on le voit dans le très beau plan sur son regard lors de la scène finale.

  Peut-être un peu trop volubile ce qui tend à caricaturer les professionnels du cinéma présents dans le film et ce qui peut s'avérer trop couleur locale pour prétendre à une certaine universalité La dame sans camélias est une oeuvre passionnante qui laisse à penser à l'évolution possible de l'art de Michelangelo Antonioni.Lucia Bose endosse avec beaucoup de vérité l'habit de cette comédienne en devenir.Lucia Bose a peu tourné.Il y a comme ça dans le cinéma des visages seulement entrevus mais inoubliables.Lucia Bose est de ceux-là (Chronique d'un amour,Mort d'un cycliste).

29 juillet 2007

Sudiste appréciation

    Le film d'Anthony Mann(58),plus connu pour ses grands westerns que j'ai évoqués déjà,est une adaptation d'un des deux romans les plus connus d'Erskine Caldwell,l'autre étant La route au tabac,d'ailleurs adapté par John Ford et ne passant pas pour une réussite.J'ai beaucoup lu Caldwell il y a très longtemps. Les souvenirs nous jouent des tours mais je crois que le purgatoire de cet auteur est injuste. Caldwell ce n'est pas la tragédie à la Faulkner,ni le social à la Steinbeck.Caldwell plante le décor et laisse ses personnages y surnager tant bien que mal entre cocasse et meurtrier,pas si loin,dans ce Sud éternellement poisseux,de Tennessee Williams,plus rural mais avec un sens de la famille comme une horreur que ne désavouerait pas l'auteur du Tramway.

   Qu(est-ce qui fait que plus personne ne lit Erskine Caldwell?D'abord des plus grands comme Fitzgerald,Dos Passos ou même Hemingway connaissent ou ont connu un relatif désaveu.Et puis les articles que j'ai pu lire,signés de spécialistes de la littérature américaine,font état du fait que l'oeuvre de Caldwell a assez vite tourné à une certaine répétitivité.Les romans de Caldwell seraient un peu comme du Zola de Georgie en quelque sorte,si ancrés  dans la glaise et le coton qu'ilsn'ont peut-être pas l'universalité de ceux de Faulkner.La qualité littéraire s'est peut-être appauvrie rapidement chez Caldwell mais il faut admettre que Le petit arpent du bon Dieu sonne encore fort comme une sale histoire de famille,autour du sexe et de l'argent,avec ses petites et grandes bagarres entre frères.Les Atrides du Deep South...Parmi,les autres titres:Les braves gens du Tennessee,Un p'tit gars de Georgie,La dernière nuit de l'été.

  (1903-1987)

   Anthony Mann a installé ses bouseux pas toujours très sobres autour de Robert Ryan,le père,qui a fort à faire avec ses enfants et les trous qu'il creuse afin de trouver le trésor enterré.Dérisoire quête de cette Toison d'Or où il faut ménager Le petit arpent du bon Dieu.Un peu de bigoterie est rarement absent du Sud.

28 juillet 2007

Le premier homme à en savoir trop

   En 1934 la première version de L'homme qui en savait trop sera un triomphe pour Alfred Hitchcock et attirera l'attention de Hollywood.Je n'aurai pas l'outrecuidance d'apporter un éclairage neuf sur un cinéaste que François Truffaut a si bien analysé et il n'est pas le seul.Ce film à suspense a aussi des atouts de comédie,notamment une jolie bagarre de chaises dans une église,très potache malgré le caractère dramatique d'un scénario à base d'enlèvement d'enfant.Ceux qui ne connaissent que le remarquable film de 56 avec James Stewart et Doris Day seront étonnés puisqu'à Marrakech s'est substituée une station de sports d'hiver suisse.Moins exotique certes mais en 34 la Suisse n'était pas si proche et Hitch raconte qu'il avait passé là-bas son voyage de noces.Sinon les deux films ne sont pas si différents:plus d'humour british en 34,plus d'introspection américano-freudienne en 56.

   Le morceau de bravoure est conservé,ce fameux coup de cymbale au Royal Albert Hall,qui doit couvrir le bruit du meurtre d'un diplomate.Rappelons qu'en 56 c'est Bernard Herrmann en personne qui dirigeait l'orchestre.Au rayon des interprètes on a oublié Leslie Banks(Les chasses du Comte Zaroff) pourtant excellent,moins "héroïque" que Jimmy Stewart.L'espion français très vite assassiné est joué par un Pierre Fresnay dont le célèbre débit s'amalgame assez bien lors de ses rares répliques en anglais(Daniel Gélin pour la version marocaine).Mais bien sûr et comme le dit l'ami Oogy c'est Peter Lorre que l'on garde en tête pour son premier rôle en anglais.Mais je reviendrai sur Peter Lorre,cet acteur hors du commun que le cinéma américain a condamné à des rôles de comparses dont certains furent inoubliables chez Huston ou Curtiz par exemple.

Extrait:Pierre Fresnay dans le texte   http://www.youtube.com/watch?v=SebVC6ly9pU

   

7 juillet 2007

Les miettes du Ministère ou Londres,nid d'espions

   Paramount Pictures

      J'ai déjà évoqué Graham Greene au cinéma dans La mine Greene .J'ai lu il y a si longtemps Le Ministère de la peur que je ne peux trop y rattacher le très beau Espions sur la Tamise,titre français peu malin du film de Fritz Lang. Certains historiens établissent une trilogie antinazie chez Fritz Lang,dont The Ministry of fear serait le dernier élément après Chasse à l'homme et Les bourreaux meurent aussi. Quoiqu'il en soit et là encore j'insiste sur l'immense cohérence du cinéaste,on retrouve dans ce film les obsessions du complot, des société secrètes et de la manipulation.

     Ray Milland,libéré d'un séjour en psychiatrie(thème déjà langien),se trouve dès sa sortie happé par un engrenage autour d'un gâteau gagné dans une kermesse de bienfaisance dans le Londres de 1943,où sévissent probablement des taupes hitlériennes.Le temps,très présent dans les films de Lang,est dès le générique utilisé comme un personnage,avec les poids d'horloge et l'opposition cercle et verticales.Le héros,fragile,va connaître des péripéties et rencontrer un faux aveugle,le ballon d'un enfant(M...),des amis(?) qui s'appellent Hilfe(qui veut dire à l'aide en allemand),une voyante qui ne parle que du passé,participer à une séance de spiritisme suivie d'un pseudo-meurtre(Le diabolique Docteur Mabuse),cotoyer un vieux libraire cultivé et un médecin éminent qui s'avèreront tous deux être de dangereux fanatiques.

     Chez Lang la vérité est invraisemblable(Beyond a reasonable doubt) et les hommes sont rarement ce qu'ils prétendent être.C'est depuis toujours le cinéma du doute et de l'interrogation.Depuis Les Araignées ou Les espions(années vingt).On appellerait cela interactif car le spectateur manipulable doit se méfier de tout chez ce diable d'homme.Il fallait sûrement se méfier de l'impérial Mr.Lang.Il restera chez lui comme un secret...

29 juin 2007

Blog-a-thon John Ford

   L'idée vient d'Inisfree et je la trouve excellente.Elle invite à parler de John Ford.Or,ce Ford là fait partie de ma culture et je viens en vrac vous dire ce que m'évoque le nom de John Ford,ce qu'il évoque chez le petit citadin(14 ans lors du dernier film  de Ford,Frontière chinoise) et ce qu'il évoque aujourd'hui à l'heure enthousiaste où l'on peut presque se constituer une cinémathèque idéale,presque.Ici rien de chronologique ni d'hagiographique,que quelques réflexions buissonnières,des souvenirs et la sensation que la vie aurait été encore plus moche sans Monsieur Ford.

   La légende court à propos de John Ford et il faut l'imprimer.On le sait depuis L'homme qui tua Liberty Valance où je crois que le premier rôle n'est ni le Duke ni Jimmy mais la presse,si importante dans le cinéma anéricain(Ford pas si éloigné de Capra).Les histoires du cinéma racontent que Ford aurait traîné sur les plateaux d'Alamo et que son vieux frère d'armes John Wayne l'aurait éconduit presque manu militari.J'aime cette idée.

    J'aime la trilogie du sergent Victor McLaglen,à tout jamais irlandais,bagarreur et alcoolique(pléonasme), cette trilogie du tempérament qui n'empêcha pas le grand d'être l'immense Mouchard en son drame de la misère et de l'Irlande  éternelle dont nous sommes si  nombreux à être citoyens d'honneur. Comme Ford a su si bien capter les chansons  dans cette sale histoire de délation. Chantons, buvons,trahissons mais payons!

   Il est si beau le crépuscule de Ford lorsqu'il brouille les cartes que les imbéciles croyaient définies avec  ce long poème que moi j'appelle L'automne des Cheyennes,cette tragédie de l'oubli où il me semble déceler une sorte d'amour du genre humain,de type fordien certes mais néanmoins bouleversant.Rien n'est si simple dans cet univers et La prisonnière du désert,qui croule pourtant sous les exégèses,reste un summum d'ambigüité.

    La carrière de John Ford est si longue et il y tant de films que je n'ai pas vus.Tant mieux si l'avenir cinéphilique pouvait s'enorgueillir de certains films peu diffusés.Ce n'est pas le cas des Raisins de la colère et je vous renvoie à John,John,Henry and Bruce dans lequel je déclare haut et fort que parfois film et livre sont ex aequo.Mon enfance a été bercée par la U.S.Cavalry et tant pis si ça fait de moi un mesquin valet de l'impérialisme et moi qui ai peur des chevaux j'ai chevauché le long du Rio Grande vers Fort Apache et en une Charge héroïque qui m'a cloué à mon fauteuil.Je revendique cette amitié virile et cette naïveté qui parsèment Les deux cavaliers.Voir Ford et deux autres cavaliers

   La dernière fanfare et Le soleil brille pour tout le monde sont parmi mes favoris.Pour Spencer Tracy et la démocratie,pleine de défauts mais si humaine de cette Amérique en marche.Et pour cette justice loin d'être expéditive et au-delà des clichés de l'histoire du juge dans Le soleil...pas si loin de Faulkner ou de Harper Lee(Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur).Et puis il ya tous  ces films qu'on redécouvre presque par hasard:A l'attaque du Ford méconnu Enfin Ford était un type sûrement pas facile mais je crois que j'aurais aimé trinqué avec lui dans La taverne de l'Irlandais.D'autres insisteront sur My darling Clementine,Stagecoach ou L'homme tranquille et ils auront raison.Surtout n'oublions pas que Ford n'est pas  le chantre de la tyrannie qu'ont voulu décrire certains(ça a changé heureusement) mais qu'il a su pointer les limites de son(notre) Amérique dans nombre de ses films.A vous de juger...

   

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