Et bien finalement... non
Permettez-moi d'abord de vous présenter les talentueux avocats de la défense,respectivement Maître Neil There will be blood (2007) Paul Thomas Anderson ,Maître Bastien There will be blood et Maître Systool THERE WILL BE BLOOD (Paul Thomas Anderson, 2007) .Et bien finalement...non,je ne les rejoindrai pas sur cette affaire.
Je n'ai lu aucun roman d'Upton Sinclair,le Zola américain auteur de La jungle,Le pétrole(dont est adapté le film).Je connaissais seulement sa collaboration avortée avec Eisenstein lors du séjour de ce dernier en Amérique.Sinclair,grand lutteur,pourrait bien être plus un agitateur d'idées qu'un grand romancier.Il a énormément écrit.Trop?Sa carrière politique n'a pas été couronnée de succès et ses brûlots semblent bien loin.Nous ne statuons pas aujourd'hui, Mesdames et Messieurs,sur l'écrivain Upton Sinclair mais plutôt sur le chef-d'oeuvre annoncé à l'avance par presque toute la presse,le long (très) métrage There will be blood du sieur Paul Thomas Anderson dont je n'ai vu à ce jour aucun autre film.Déjà je suis mal à l'aise quand un film arrive avec un label quasi-officiel de chef-d'oeuvre.Certains termes me semblent ainsi bien galvaudés.
There will be blood démarre très bien et la première heure m'a paru excellente.L'induction du sujet sur les premiers forages pétroliers est bien vue et j'ai vraiment beaucoup aimé une certaine force tellurique qui émane du métal des conduites,du maniement des explosifs,de l'or noir qui s'apprête à embraser le pays et Wall Street.Il s'échappe de toutes ces séquences une véritable poésie de l'ére industrielle débutante qui m'a touché.On sent le bois des derricks respirer comme le coeur d'une grande nation qui s'apprête à l'envol. Monde rude, monde de pionniers,monde d'une grande brutalité,que le cinéma d'Anderson transcrit tout à fait bien et qui n'est pas sans rappeler les classiques américanissimes et ardents comme Griffith ou Ford.Jusque là vous aurez compris que je souscris.L'esprit des collines est là et bien là.Celui de Jack London par exemple et ce n'est pas un mince complément.Pourquoi faut-il que P.T.Anderson commence à s'ennuyer manifestement pour qu'il se mette à la facilité, voire au ridicule lorsqu'il s'apesantit sur la lourdissime dichotomie américaine Dieu et le business?
On est alors très loin du Malin de John Huston d'après Flannery O'Connor.There will be blood trace alors le sillon très couru de la violence croissante chez Plainview,dont l'appétit de réussite n'aura d'égal que le manque de scrupules.En ce sens il y a effectivement un petit air de Kane dans ce personnage de Daniel Day Lewis pour qui le succès n'a pas d'odeur.Mais pas d'odeur nous monte au nez comme disait le grand Jacques et si Daniel Plainview est haïssable son double prédicant l'est tout autant,expédiant ainsi deux figures mythologiques fondatrices de l'Amérique dans les affres d'une mise en scène qui tourne au spectacle de Grand Guignol(je n'ai pas dit Guignol qui n'a rien à voir).Ainsi caricaturés au maximum,outranciers comme jamais,nantis de leur seule déraison bien mal exploitée dans la seconde partie du film,le prospecteur et le pasteur versent dans la fable édifiante finalement très ordinaire.Ne dérangeant personne ce film est pour moi,mes chers confrères magistrats,une production relativement toc.Je comprends mal l'engouement journalistique presque unanime.Daniel Day Lewis est bien sûr un bon acteur mais ce rôle est loin d'être le plus intéressant de sa carrière.
Pour conclure cette plaidoirie à charge pour ce film qui ne réclame pas trop de mansuétude eu égard à l'ambition énorme,je parlerai plutôt de prétention,dont il nous est arrivé accompagné,encore une fois presque officiellement,je demanderai au moins le sursis avant de le béatifier.Reprenez-vous mes amis.Que ceci ne nous empêche pas de trinquer ensemble au Bar du Palais comme d'habitude.Un dernier mot:pour l'oscar du meilleur film de bowling je préfère Les tontons flingueurs ou The big Lebowski.