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16 juillet 2007

Paddy

     Patrick Kavanagh(1906-1967) nous offre avec L'idiot en herbe son autobiographie des jeunes années.Poète plus que romancier à l'évidence tant la prose contant son enfance de fils de cordonnier besogneux est frappée d'un réalisme mêlé d'humour et empreint d'un quotidien au plus près de la nature,des animaux et d'une Irlande difficile et archaïque nullement idéalisée.

   On parle bien un peu politique dans L'idiot en herbe mais toujours sur un mode mineur.Les souvenirs d'enfance ont en commun des scènes à faire,peu importe le pays car l'enfance n'est qu'un seul pays.On n'échappe pas à la foire aux porcs,aux noces villageoises,à l'apprentissage rédhibitoire,aux premières amours.Tout ceci est,chez Kavanagh,pétillant mais pas racoleur et surtout témoigne d'un respect de l'enfant,de l'adolescent,qui n'exploite pas jusqu'à l'écoeurement le filon parfois un peu étouffant de  ce type d'écriture.

   Mais les passages que je préfère dans L'idiot en herbe concernent ses premières humeurs voyageuses et son séjour à Dublin où il tente d'approcher les poètes irlandais,c'est à dire deux Irlandais sur trois.Là non plus il ne glorifie pas béatement les clichés parfois envahissants de la verte Erin.A noter que Patrick Kavanagh est l'auteur d'un seul roman,Tary Flynn.L'avis autorisé de l'ami Eireann avec quelques extraits bien choisis: KAVANAGH Patrick / L'Idiot en herbe.

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7 juillet 2007

Les miettes du Ministère ou Londres,nid d'espions

   Paramount Pictures

      J'ai déjà évoqué Graham Greene au cinéma dans La mine Greene .J'ai lu il y a si longtemps Le Ministère de la peur que je ne peux trop y rattacher le très beau Espions sur la Tamise,titre français peu malin du film de Fritz Lang. Certains historiens établissent une trilogie antinazie chez Fritz Lang,dont The Ministry of fear serait le dernier élément après Chasse à l'homme et Les bourreaux meurent aussi. Quoiqu'il en soit et là encore j'insiste sur l'immense cohérence du cinéaste,on retrouve dans ce film les obsessions du complot, des société secrètes et de la manipulation.

     Ray Milland,libéré d'un séjour en psychiatrie(thème déjà langien),se trouve dès sa sortie happé par un engrenage autour d'un gâteau gagné dans une kermesse de bienfaisance dans le Londres de 1943,où sévissent probablement des taupes hitlériennes.Le temps,très présent dans les films de Lang,est dès le générique utilisé comme un personnage,avec les poids d'horloge et l'opposition cercle et verticales.Le héros,fragile,va connaître des péripéties et rencontrer un faux aveugle,le ballon d'un enfant(M...),des amis(?) qui s'appellent Hilfe(qui veut dire à l'aide en allemand),une voyante qui ne parle que du passé,participer à une séance de spiritisme suivie d'un pseudo-meurtre(Le diabolique Docteur Mabuse),cotoyer un vieux libraire cultivé et un médecin éminent qui s'avèreront tous deux être de dangereux fanatiques.

     Chez Lang la vérité est invraisemblable(Beyond a reasonable doubt) et les hommes sont rarement ce qu'ils prétendent être.C'est depuis toujours le cinéma du doute et de l'interrogation.Depuis Les Araignées ou Les espions(années vingt).On appellerait cela interactif car le spectateur manipulable doit se méfier de tout chez ce diable d'homme.Il fallait sûrement se méfier de l'impérial Mr.Lang.Il restera chez lui comme un secret...

4 juillet 2007

Alléniennes pensées

L'erreur est humaine

   Peu enclin à me fatiguer je vais laisser mon maître vous présenter personnellement quelques perles de son recueil dont la première partie m'a semblé moyenne.Mais quand Woody revient au cinéma,à la psychanalyse et au gangstérisme,ou les trois réunis qui s'accomodent fort bien,cela donne bien du roulis dans les zygomatiques.

   Le parapsychologue B.J.Sygmnd était un modeste Autrichien qui avait perdu pratiquement toutes les voyelles de son nom lors d'un accident de bateau.(Dentiste mystérieux à Manhattan)

   La graisse est en soi une substance ou l'essence d'une substance,voire l'Idée de la substance de cette essence.Tout le problème c'est quand elle commence à s'accumuler sur vos hanches(Ainsi mangeait Zarathoustra).

    Les tueurs en série se plaignent d'être toujours les premiers incriminés dès que trois ou quatre victimes sont tuées de la même façon.Ils souhaiteraient que ce nombre soit porté à six(Dentiste...)

    Les représentations ont commencé et l'accueil critique a été mitigé.Le Journal de l'aviculteur et Cigar Magazine ont bien aimé.Time et Newsweek ont été plus réservés qualifiant la comédie musicale de "trou noir d'une insondable bêtise"(Les infortunes d'un génie méconnu).

   Le couple est entré dans un restaurant chic.Ils ont commandé un copieux dîner au barbecue,du vin,tout le bataclan.Quand la douloureuse est arrivée ils ont essayé de payer en étiquettes à matelas(Sans foi ni matelas).

    Je connais Sam depuis ses débuts de jeune médecin légiste.A l'époque il réalisait des autopsies publiques aux mariages et aux fêtes anniversaires d'adolescents pour se payer des cigarettes(Dentiste...).

    Sur ce je vous laisse,devant mettre la dernière main à mon Histoire de l'accent circonflexe dans la littérature médiévale de Pologne Septentrionale.

1 juillet 2007

L'ange exterminateur à Dublin

      Ici l'avis de l'ami Eireann que je remercie de ses critiques toujours très instructives.C'est d'ailleurs lui qui m'a donné envie de lire L'assassin O'FLAHERTY Liam / L'assassin

    Déjà lu il y a des lustres Le mouchard et Insurrection.Un peu plus récemment L'âme noire. O'Flaherty pour moi c'est l'intrusion de personnages dostoievskiens dans l'univers du roman noir, du roman noir insulaire si spécifique à l'Irlande.Il est patent que le thriller est en soi un monde d'innocents et de coupables,lesquels se fondent allégrément en une sorte de Tragedia dell'arte ou plutôt d'Irish Tragedy remplie d'Humiliés et offensés,entre Crime et châtiment et cauchemars théistes.D'ailleurs n'y-a-t-il pas du Raskolnikov chez McDara,l'assassin de ce roman sombre et d'une sécheresse lyrique ce qui n'est pas incompatible?

    L'excellente préface d'Hervé Jaouen montre bien les similitudes entre McDara et O'Flaherty lui-même.Il faut se souvenir qu'O'Flaherty ne jouit pas de l'unanimité en Irlande,personnage controversé qui fut obligé de s'exiler quelque temps en Amérique et en France.Il y a dans L'assassin une face totalement mystique qui peut déplaire et qui est peut-être en rapport avec les années de séminaire de l'auteur.Mais je trouve que L'assassin est un grand livre qui,outre le côté messianique voire christique du personnage,certes envahissant, nous offre de superbes lignes sur les fantasmes guerriers du tueur(impressionnante vision des légions d'Hasdrubal,général carthaginois auquel McDara s'identifie lors de sa balade dublinoise meurtrière). Car bien sûr un Irlandais a toujours un peu envie d'en tuer un autre pour peu qu'il ait une fois conversé avec un Anglais.Pardonnez-moi cette exagération mais j'aime tant ce pays qu'il m'arrive de le taquiner.

   L'hybridation va plus loin et O'Flaherty finit par nous donner le vertige comme si l"assassin et sa victime, ce politicien évidemment corrompu étaient la seule et même personne.Allégorie qu'on peut étendre à l'île toute entière,dichotomisée depuis si longtemps.Heureusement il me semble que le vent d'Irlande tende à se faire plus clément.Dans ce portrait d'un assassin,politique à la rigueur,le style d'O'Flaherty très efficace et jusqu'au-boutiste,est tendu comme l'arc de la volonté.Et l'auteur a le cran de ne pas éluder les saletés qui accompagnent les luttes politiques,qui ressemblent souvent aux guerres des gangs,quand des "généraux" de 20 ans se comportent comme des serial killers.Et les amoureux d'Erin dont je suis doivent être les plus ardents à ne pas idéaliser la violence quelle qu'elle soit.Ce pays n'en sera que plus beau avec sa littérature magnifique et inépuisable.

   Retour sur John Ford et O'Flaherty: Un homme d'Aran

29 juin 2007

Poussières de l'Empire des Indes

Titre français:Quelques jours avant la nuit.

   Paul Scott est un peu connu pour la somme Le quatuor indien,tétralogie racontant sous forme romanesque les derniers soubresauts de la présence indienne aux Indes. Dans la continuité de cette fresque il écrit à la fin de sa vie Quelques jours avant la nuit,qui a obtenu le Booker Prize en 73.Staying on est une histoire plus intime qui nous transporte aux premières années de l'Inde indépendante à travers le portrait d'un couple de vieux militaires qui a choisi de rester sur place entre habitude,regrets et nostalgies sans pour autant donner dans les clichés du colonisateur racorni.

   Quelques jours avant la nuit est en fait un long poème,un poème où une certaine désuétude frise le génie et où le burlesque cotoie le tristounet.Le tristounet,pas le tragique car la calme déliquescence de ce vieux couple,ayant cessé de fonctionner dans l'empire ressemble tant au crépuscule de n'importe quel couple, ayant cessé de foctionner dans n'importe quel atelier,administration,etc... qu'elle en vient à acquérir une patine universelle. Ceci est, attention, parfaitement capable de nous émouvoir.

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2 juin 2007

Parmi ceux qui n'ont pas attendu la mode du vert

        Parmi ceux là Dan O'Brien que je lis régulièrement comme on irait en vacances une fois l'an dans le Montana,ce fameux Montana dont on nous rebat les oreilles littérairement mais il y a des harcèlements plus pénibles.Vous connaissez Jim Harrison,Thomas McGuane,Rick Bass,Larry Watson.Le magazine Lire publie ce mois un entretien avec Dan O'Brien à l'occasion de la sortie de son dernier livre Les bisons du Coeur-Brisé.  Le premier bouquin de Dan O'Brien que j'aie lu est Rites d'automne sorte d'air-movie qui décrivait le voyage dans l'Ouest d'un fauconnier,O'Brien lui-même qui est aussi ornithologue.Ce livre est devenu célèbre à la fois reportage animalier et regard sur l'Amérque éternelle,métaphore de la planète.

   Brendan Prairie sous forme romancée explore la veine intarissable des rapports de l'homme et de la nature et Dan O'Brien dans son Dakota du Sud nous entraîne dans la lutte infatigable de quelques irréductibles contre la lèpre envahissante du profit et de la laideur.Mais Dan O'Brien a vécu la véritable existence d'un éleveur en pays sioux et sait de quoi il parle.

L'esprit des collines

   L'esprit des collines raconte la traque d'un loup immense dans ce même pays des Black Hills et se présente un peu comme une Gévaudan Story qui nous plonge dans les entrailles et les secrets de ce pays indien dakota.Peurs et vieux fantasmes parsèment ce livre qui a la rigueur de l'ethnologue et le mystère du "polariste"..Au  coeur du pays a comme les trois autres été publié chez Albin Michel puis chez 10-18.On peut rajouter ses deux romans "indiens" que je n'ai pas lus,Médecine blanche pour Crazy Horse et L'agent indien.Lire Dan O'Brien c'est s'assurer une brassée de ce vent des montagnes occidentales,une sorte de  croisière entre Jeremiah Johnson et Le peuple migrateur.

27 mai 2007

Les palétuviers du Honduras

   Je découvre Patrick McGrath auteur entre autres de Spider,son oeuvre la plus connue relativement depuis le film de Cronenberg.En potassant un peu j'apprends qu'on lui a longtemps accolé l'étiquette "néo-gothique". Passons,sans intérêt.Mais Port Mungo est très loin d'être sans intérêt.Un peintre très jeune,d'un certain talent rencontre une sorte de virago,artiste elle aussi et quitte Londres puis New York pour le Honduras,genre Mosquito Coast pour le climat(rappelez vous le film avec Harrison Ford d'après Päul Theroux).Ensemble entre jungle et alcool,entre bagarres et inspiration ils vont vivre un amour ravageur et avoir deux filles,elles aussi marquées.McGrath ne fait pas toujours dans la nuance et irrite légèrement par ce parti pris qui me fatigue un peu,à savoir  ce côté artiste maudit dont la vie est forcément plus intéressante.On peut penser à Gauguin,Modi,Gogh et aussi à Verlaine,un peu aussi aux écrivains de la beat generation.Il y a évidemment de la déglingue dans l'air.Cette réserve émise Port Mungo touche juste.

   Juste parce que derrière les tics du couple marginal apparaît la quête universelle d'une certaine estime de soi-même.Et l'écriture de McGrath oscille entre la paix des âmes,rare et fragile,et l'explosion éthylique de tous les personnages.Exorciser le drame passé dans le Golfe du Honduras,exorciser aussi si possible les traumatismes d'enfance quotidienne de Meg,disparue et que réincarne plus ou moins la cadette Anna?Gin,la soeur de Jack est un peu le grand témoin de cette descente aux affres de la création,seule à peu près d'aplomb dans ce navire qui ne joue même pas à faire semblant d'être une famille.Au total un livre assez dérangeant,non exempt de facilités mais qui laisse des traces comme le limon des tempêtes tropicales sur les toiles de ce peintre fatigué.

    

26 mai 2007

Mr.Faulkner goes to Hollywood

   

    Les grands écrivains américains sont tous passés plus ou moins par la case Hollywood.Aucun n'a marqué de son empreinte le cinéma en tant que scénariste,la plupart du temps noyés entre cocktails et corrections de leurs rares contributions par les producteurs.Ainsi William Faulkner aurait contribué à plusieurs films de John Ford(uncredited,comme on dit),ainsi qu'à l'un des films américains de Renoir,L'homme du Sud) et à d'autres productions oubliables.Par contre il est très officiellement au générique de trois films importants de Howard Hawks:Le port de l'angoisse,Le grand sommeil,La terre des Pharaons où il ne semble pas avoir été concerné davantage.Faulkner n' a jamais été un homme d'images.Cependant quelques films adaptés de son oeuvre valent largement le détour.

   

  L'intrus réalisé en 49 par Clarence Brown est un excellent constat sur la vieille culture sudiste basée sur les habitudes de justice sommaire bien ancrées dans ces comtés que Faulkner connaît si bien.Sans acteurs connus L'intrus dépeint avec conviction le lynchage et la prise de conscience de certains citoyens qui finissent par ouvrir les yeux.J'ai toujours pensé que Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur,le beau roman de Harper Lee(au cinéma Du silence et des ombres de Robert Mulligan) avait une filiation assez directe avec le roman L'intrus.

    Mis en scène avec flamme par l'immense Douglas Sirk déjà cité très récemment,La ronde de l'aube(The tarnished angels) adapté de Pylone a fait l'objet d'une remarquable analyse par le Dr.Orlof dans l'article Un et un font trois.Je vais donc lâchement vous envoyer dans son cabinet pour y lire l'essentiel sur La ronde de l'aube,auquel je souscris entièrement.

    J'aime bien Reivers de Mark Rydell,bâti autour de Steve McQueen en 1969,qui nous montre une autre facette faulknérienne,roman d'apprentissage truculent,une virée dans le Mississipi où l'on voit un adolescent apprendre la vie auprès de personnages forts en gueule et surtout libres penseurs.Titre français du livre:Les larrons.C'est un des très bons rôles de Steve McQueen,capable ici de mêler la verdeur et l'émotion,la tendresse et l'action.

  Il était par contre très difficile de rendre la complexité familiale des très touffus Le bruit et la fureur et Les feux de l'été.Martin Ritt s'y est risqué mais ces films,rarement présentés,ne parviennent qu'à peine à évoquer la moiteur du sud,physique et morale. Sanctuaire,trame plus policière,n'est pas de loin,le meilleur rôle d'Yves Montand dans la réalisation de l'anglais Tony Richardson(61) où seule surnage la très bonne prestation de Lee Remick.

20 mai 2007

Du côté de Ruin Creek

   Je n'aime guère la manie de transformer les titres de films ou de livres pour faciliter l'accès du lecteur spectateur potentiel,forcément un peu demeuré..Je me suis souvent exprimé là-dessus.Et Le monde perdu de Joey Madden n'échappe pas  à ce diktat.Comme ça l'on est à peu près certain de rentrer dans un univers intéressant mais pas trop surprenant de l'enfance à jamais éloignée.Bref Ruin Creek est un très beau roman de David Payne,l'un des premiers je crois.L'histoire se passe dans les années cinquante puis soixante mais n'est surtout pas une clinquante reconstitution type banane et Elvis,en Caroline du Nord.

Le monde perdu de Joey Madden

   Adoptant alternativement les points de vue du père,Jimmy,de la mère,May,et du jeune fils Joey,cette chronique de l'échec annoncé d'une famille de négociants en tabac s'avère pleine de finesse,de tendresse aussi.Les grands-parents maternels du jeune Joey sont les plus proches car il y a eu mésalliance. Mésalliance!Que d'enfants fracassés en ton nom!Dans cette société américaine relativement prospère et travailleuse Jimmy va peu à peu franchir la ligne jaune et s'égarer dans l'alcool et les petites compromissions.C'est un brave type pourtant Jimmy qui subit encore sa mère possessive et s'ennuie de ses copains de basket.May voit son couple se déliter devant ses propres parents compréhensifs mais il arrive un stade où la compréhension des autres elle-même devient pesante.

    Cette famille ressemble à toutes les autres.Elle a le mérite d'exister et de représenter une aventure humaine totale car qui dira qu'il est facile de vivre,que l'on soit Joey,Papa Jimmy ou Gran'Pa Will?Le monde perdu de Joey Madden est ici publié dans le remarquable Domaine Etranger de 10/18.A noter parmi les bons moments de la famille une partie de pêche mémorable.Il faudra un jour avec des copains blogueurs que l'on se fasse une sortie pêche virtuelle avec les nombreux auteurs qui ont un jour décrit ce moment souvent privilégié de la vie de famille qui peut parfois virer à l'aigre voire au drame.

5 mai 2007

Précieuse trilogie à l'anglaise

  •        Le soin apporté par James Ivory et son complice de toujours le producteur Ismaïl Merchant a permis la naissance d'une très belle trilogie qui a donné à la France  la chance de découvrir l'auteur anglais Edward Morgan Forster(1879-1970).Rarement tryptique d'adaptations aura fait preuve d'autant de cohérence et de finesse.Transposer le monde à la fois précieux et souterrain de Forster n'était pas à la portée du premier tacheron venu.E.M.Forster issu d'une famille patricienne était un esthète proche du groupe de Bloomsbury au début du siècle.Son oeuvre romanesque tente une correspondance entre les classes sociales de l'Angleterre edwardienne.Cette connection passe entre autres par le premier roman ouvertement homosexuel, Maurice,qui ne parut qu'après sa mort.Mais les rigidités demeurent outre-Manche et ailleurs et l'oeuvre romanesque de Forster commence seulement à convaincre de son intérêt.A noter que David Lean, malade,adapta lui aussi Forster pour son dernier film La route des Indes,qui ajoute aux thèmes centraux des barrières sociales à briser et des amours interdites une réflexion voisine sur la colonisation.Attention il ne faut pas prendre Forster pour un révolutionnaire.Il garde ses distances,cela ne l'intéresse pas vraiment.Il sait seulement que le monde change, doucement, lentement.                                                                                                            

            

    En 1986 Chambre avec vue,outre une belle ballade dans ma chère Florence au temps béni du tourisme aristocratique(enfin béni pour certains),nous emporte dans une délicieuse histoire d'amour soigneusement corsetée de chaperon et de pasteur.C'est la version light des conventions d'époque et la belle Helena Bonham-Carter,en pamoison toscane n'épousera pas le sinistre Daniel Day-Lewis.Comme ces acteurs étaient jeunes!A mille lieues du cinéma agité ce film adapté du roman Avec vue sur l'Arno obtiendra un succès inattendu.Ne nous y trompons pas.Derrière les baignades polissonnes et les pique-niques verdoyants la jeune Lucy prendra subtilement conscience d'un univers peut-être en voie d'extinction,d'extinction lente certes.

    Maurice(87) avec James Wilby et un tout nouveau,Hugh Grant,est un film plus grave et aborde le carcan social sur un versant plus noir que Forster connaissait bien.Si l'on aime les raccourcis on pourrait dire que Maurice est un hybride de L'amant de Lady Chatterley et de The servant.Du roman de D.H.Lawrence le thème de la mésalliance avec le garde-chasse pour ce jeune bourgeois.Du film de Losey d'après Pinter l'attirance et l'influence grandissante du serviteur et les rapports maître-serviteurs qui tournent à la relation inversée esclaves-maîtres.

     J'ai une préférence pour Retour à Howards End(92) où l'on voit que les auteurs ont tout compris de l'univers de Forster.L'interprétation Hopkins-Thompson y est pour beaucoup car ces acteurs là sont à l'évidence les personnages de cette croisée des chemins avec la prise de conscience sociale encore timide et féministe(le personnage de la soeur cadette,Helena Bonham-Carter).Il fallait pour ce film un écrin et c'est la maison Howards End car c'est cela Retour à Howards End,un film-maison comme il y a des films-fleuves.Le lieu est très important chez Forster comme chez Ivory.Déjà dans Chambre avec vue et Maurice les demeures patriciennes étaient des personnages à part entière.Ici Howards End est une sorte de maison jonction des deux siècles et des classes se rapprochant dans la douleur.On y accède en voiture,on n'est pas loin de Londres,on s'y ressource.Le capitalisme y est parfois brutal.Comme ce monde a mal,comme ce pays est douloureux,sous le feutre et le chrome.

E. M. Forster

     Beaucoup de suppléments dans ce coffret,surtout les propos de Ivory et Merchant.Le travail sur les costumes et les décors aussi.Et une anecdote croustillante dans la bouche de James Ivory,que je rapporte en ces temps de démagogie bilatérale qui n'épargne pas la blogosphère:la grande Vanessa Redgrave, héritière d'une célèbre famille de grands comédiens et icône gauchisante,exigeant pour son rôle,court,le double du cachet avant d'en savoir le montant.Vous ai-je dit bilatérale?

1 mai 2007

Cher Maître

 

           La littérature irlandaise est si riche que cette rubrique deviendra récurrente car j'aimerais faire partager ma passion pour le pays de Joyce,Wilde,Becket,Yeats...En attendant voici Colm Toibin dont Le Maître vient de sortir chez Robert Laffont.C'est un ouvrage très riche,qui explore cinq années de la vie du grand écrivain américain Henry James(Le tour d'écrou,Washington Square,Portrait de femme),lors de sa vie en Angleterre.Toibin,admirateur du Maître,nous entraîne dans le trouble de la création littéraire chez Henry James avec entre autres un joli tableau de la vie des artistes anglo-américains sous les pins de Rome,au bon vieux temps où ne voyageaient que des aristocrates,des écrivains ou des sculpteurs.On y trouve aussi  une intéressante étude de la famille américaine,celle de la Nouvelle-Angleterre,de Boston,la seule authentique n'est-ce pas?On est là totalement dans le cinéma d'un James Ivory par exemple.

 

D'autres romans de Colm Toibin sont tout aussi réussis:Le bateau-phare de Blackwater,Désormais notre exil,et mon préféré,La bruyère incendiée.Mais l'Irlande nous offre bien d'autres auteurs dont on reparlera.

 

29 avril 2007

Washington D.C(Drama City)

         Classé par le mensuel Lire parmi les meilleurs auteurs américains de polars j'ai bien aimé sans plus Drama City de George Pelecanos.Il faut bien dire que la littérature policière,très attrayante par ailleurs,finit tout de même par tourner un peu en rond.C'est pourquoi je n'en lis pas trop souvent.

          Néanmoins l'intrigue ourdie par Pelecanos se laisse goûter.Je crois que le principal intérêt de Drama City tient à sa géographie.L'action se passe à Washington,plus rarement visitée par le roman noir que New York, L.A. ou Chicago.Les notes de Pelecanos sont précises et la ville est quadrillée par l'auteur comme un plan dans un commissariat.Noms de rues, marques des voitures, qualités des stupéfiants,Pelecanos est à l'évidence bien documenté. L'autre surprise me semble être la fonction des deux personnages principaux,pas des flics mais des fonctionnaires de l'ordre cependant.Lorenzo travaille pour une société protectrice des animaux et Rachel est chargée du suivi des délinquants en conditionnelle.On s'en doute, bien du travail pour tous les deux entre combats clandestins de chiens et trafics divers qui font de Washington,D.C. une capitale fédérale certes mais aussi criminelle.

28 avril 2007

Grand combat

J'ai l'honneur de vous informer de cette rencontre au sommet entre

  A ma droite

        Et à ma gauche      

                                     Eeguab,dit Blogart,pas favori sur ce coup.

   

    Reculant depuis des décennies j'ai décidé de relever le défi avant une éventuelle grève perlée de mes neurones.Il va de soi que je vous tiendrai au courant de l'évolution de ce combat de titans.

21 avril 2007

Pelé,galeux,mal élevé,génial

Le polar américain     Je lis assez peu d'essais mais celui-ci m'a tenté et je ne regrette pas car au delà du côté savant et universitaire de la thèse j'ai senti le bitume sous mes chaussures,respiré les effluves des blondes fatales,et coiffé le feutre pour me fondre dans la jungle urbaine. Benoît Tadié,par ailleurs traducteur de Gens de Dublin dont on vient de parler,est maître de conférences en littérature anglaise et américaine.Il y a comme ça de bien beaux métiers...

    L'auteur replace dans leur contexte les différentes moutures du polar américain.N'étant pas un exégète je ne me risquerai pas à gloser là-dessus.Mais ce livre se lit bien.Tadié n'oublie rien.Il marque d'abord comment ce roman noir s'est rapidement affranchi des énigmes type Sherlock Holmes de la vieille Angleterre,souvent passionnantes mais loin du terrain.C'est alors l'invention de l'américain,une nouvelle langue qui a brisé les chaînes jusque là imposées par Shakespeare et Daniel de Foe.Plus près du peuple,voire de la lie,cette nouvelle approche sera celle des grands,des durs à cuire, Hammett, McCoy, Chandler,Cain,Burnett et beaucoup d'autres que Tadié nous encourage à découvrir.

   C'est évidemment un regard sur l'histoire de l'Amérique avec le rôle très important des deux guerres avec leur lot de déracinés,blessés,alcoolique,etc...Crucial s'avère aussi le mythe de l'Ouest et de la frontière avec l'idéalisation du passé et de la campagne vierge qui s'oppose à la ville corruptrice,refrain bien connu des polars et des films adaptés.Benoît Tadié inclut dans cette somme des auteurs dits nobles comme Faulkner,Hemingway et même de plus anciens comme Melville ou Hawthorne.Il sait bien nous faire comprendre que la différence est très ténue,disparue maintenant entre certains auteurs de séries noires et les classiques.Et le polar américain est en fait une aventure continue depuis les pélerins du Mayflower jusqu'à nos jours.Il insiste également sur la Bible,toujours de mise en Amérique,et nous rappelle que s'il y a de la Bible dans le Polar,il y a aussi du Polar dans la Bible:adultères, fratricides, trahisons,ivresses,fils indignes et la première femme fatale,Eve.

  Le polar américain,la modernité et le mal se lit presque comme un thriller et sa grande qualité est de donner envie de lire,de lire encore et toujours.Le polar,tempo de jazz, couleur whisky,découpage ciné,c'est vraiment pas ce que les Américains ont fait de pire.

  De haut en bas les méconnus Davis Grubb et Armitage Trail,auteurs de La nuit du chasseur et de Scarface dont on oublie volontiers l'origine littéraire.Et David Goodis,lui aussi bien servi par le cinéma(Tirez sur le pianiste,La lune dans le caniveau).

18 avril 2007

Les enfants au Vietnam

      Préjugé favorable,la collection Terres d'Amérique ne m'ayant jamais déçu.En cours,le préjugé favorable se confirme.David Bergen,écrivain canadien,nous donne avec Un passé envahi d'ombres un très grand roman sur le Vietnam,se déroulant trente ans après la fin de la guerre.Livre dans le livre Un passé envahi d'ombres est en fait le titre d'un récit écrit par un déserteur nord-vietnamien que Charles Boatman découvrira par hasard dans sa solitude de Colombie Britannique.Boatman tente depuis trente ans d'oublier ou au moins de calmer son cauchemar d'Indochine et son geste ignoble.Mais au Vietnam comme ailleurs l'ignoble touche souvent au sublime et la vie d'après n'a rien de facile.Rien de facile en Amérique mais rien de facile non plus dans ce Vietnam en proie à la pauvreté qui suit la guerre et à la perte d'identité de tout un peuple.

   Les enfants au Vietnam ce sont Jon et Ada,partis à la recherche de leur père de retour au Vietnam pour replonger dans ce passé,s'y confronter,l'exorciser ou peut-être l'expier.Dans Da-Nang méconnaissable aux yeux de Charles dont l'image s'évanouit Jon s'enfonce dans la nuit vietnamienne baroque et incompréhensible alors qu'Ada frôle la vérité,douloureuse mais qu'un artiste sensible l'aidera à appréhender. C'est toujours la guerre quelque part,au moins dans les âmes tourmentées des enfants du G.I. meurtri.

   Ce bouquin est passionnant de bout en bout.Et Bergen rejoint l'impressionnante cohorte d'écrivains nord-américains dont je vous parle si souvent.J'ai très envie de lire les deux premiers romans de David Bergen,Une année dans la vie de Johnny Fehr et Juste avant l'aube.L'ami Eireann les a chroniqués déjà et je vous conseille de passer le voir. http://eireann561.canalblog.com/archives/2006/05/18/1904946.html

8 avril 2007

Mes aveux sur les aveux

eireann561.canalblog.com/archives/2006/05/18/1905186.html

Le livre des aveux

   John Banville,Irlandais comme il se doit,m'a été proposé par Eireann(références ci-dessus),Docteur ès littérature gaélique.Ce n'est pas la première fois que l'ami du Morbihan m'embarque ainsi.Soyons clairs,avec Banville ça ne rigole pas tous les jours dans Le livre des adieux.Et s'il y a bien un pub on n'y chante guère La ballade de Molly Malone.Le livre entier n'est qu'un monologue,une confession mais ce mot à mon avis ne convient guère car il recèle une part de culpabilisation qui ne semble guère émouvoir Frederick St John Vanderveld Mongomery.Qu'est ce que j'aimerais avoir un tel patronyme,qui à lui seul tient lieu de CV.

   Mais voilà Freddie est un assassin,pas vraiment volontaire mais pas vraiment occasionnel non plus.Aucun dialogue dans Le livre des adieux,seulement des mots,des phrases,beaucoup de mots et de phrases,dans la bouche du seul personnage à part entière.L'homme parle,ne cherche ni excuse ni compréhension,pas plus qu'il ne s'incorpore vraiment à la vie des autres.Mr.FSJVM est une sorte d'outcast,d'étranger.Est-il seulement vraiment vivant?Il y dans ce livre intéressant mais assez déconcertant quelque chose des grands romans russes,me semble-t-il.Une indéfinissable impression d'une conscience bafouée victime de sa propre barbarie.Le livre des adieux est écrit dans un style très littéraire et nanti d'un vocabulaire recherché,ce qui oblige à quelque remise en question du bagage du lecteur.Les grandes oeuvres sont parfois hérissées d'aspérités qu'il nous faut abraser un peu pour mieux les franchir.John Banville n'est pas forcément à lire toutes les semaines et la confession de Frederick s'avère souvent poisseuse et nous met mal à l'aise mais Le livre des adieux s'inscrit dans la tradition littéraire irlandaise,richissime et variée..

31 mars 2007

Tourbillon dans le Sud

     Moins connu et plus tardif que ses deux plus grands succès Les fous du roi et L'esclave libre tous deux portés à l'écran Un endroit où aller virevolte dans le Sud américain,cette terre qui colle à l'oeuvre de Robert Penn Warren(1905-1989).Mais le Sud de Warren ne suffit pas à son héros en tant que pays natal.Il agit au long de la vie de Jed Tewksbury comme un personnage récurrent à part entière.Parti d'une misérable bourgade d'Alabama il deviendra un brillant universitaire cotoyant le beau monde et Rozelle,l'amour de sa vie,qu'il retrouvera à plusieurs reprises.

   Il ya de très beaux passages dans Un endroit où aller,parfois drôlatiques quand Jed se remémore la mort rocambolesque et grotesque de son père.Parfois émouvants:les lettres laborieuses de sa mère qui lui avait ordonné de quitter ce bled de Dugton,au risque de ne jamais le revoir.La guerre en Italie,l'université de Chicago,les amours compulsives avec Rozelle,la naissance de son fils parsèment la progression de Jed dans cette "vita americana" que le lecteur peine quelquefois à bien pénétrer.C'est que la Terre d'Amérique cèle toujours une part d'elle-même à des yeux européens.

   C'est l'un des derniers livres de Robert Penn Warren et il aurait gagné,me semble-t-il,à être un peu resserré.Une grande plume américaine parmi tant d'autres.C'est aussi ça l'Amérique,foisonnante et,quand il s'agit d'auteurs de cette trempe,pas loin d'être au meilleur de sa forme.Penn Warren est aussi un très grand poète deux fois Prix Pullitzer.

   

24 mars 2007

J'ai oublié de me souvenir de l'oublier

L'ignorance

   Thom m'a convaincu de lire Kundera.L'univers de Milan Kundera m'était étranger.Ca tombe bien car L'ignorance parle de l'exil et surtout du retour et la figure tutélaire d'Ulysse traverse ce récit,emblême des retrouvailles difficiles dans son île d'Ithaque.L'Ithaque de Josef et Irena c'est la Prague d'après la Révolution de Velours.J'ai du mal à trouver les mots pour dire mon sentiment devant L'ignorance mais le voyage vaut la peine.

   Que retrouve-t-on après tant d'années d'absence,tant de boulevesements,la chute des différents murs et souvent l'édification d'un autre mur,celui de l'incompréhension?Quand le départ a été mal compris les retrouvailles ne peuvent qu'être superficielles et désillusionnées.Kundera procède par courtes captations-chapitres et certaines phrases sont déchirantes sans jamais d'outrances.C'est manifestement la preuve d'un talent immense pour un auteur qui écrit maintenant en français.La relation brève et intense que vont vivre Josef et Irena,dont le premier n'est même pas sûr de reconnaître la seconde,est véritablement un enchantement qui tient en quelques pages.L'ignorance de son prénom,c'est quand même vertigineux,non.

  Et si le destin de l'homme après sa mort était celle de ce grand poète islandais que l'on a cru exhumer d'un cimetière de Copenhague pour le transférer en terre d'Islande alors qu'on avait en fait déterré un boucher danois.Ces variations,ces courtes digressions émaillent le récit de Kundera et lui donnent beaucoup de véracité.Et ces quelques pages sur Schönberg,sur la musique devenue bruit me semblent d'une évidence démoralisante tant la musique est souvent devenue effectivement subie.Thom l'a très bien décrit et je vous y renvoie:ce court roman très littéraire est aussi d'une portée universelle sur l'identité et l'idée de patrie au sens très large.Je crois que quelqu'un venu de l'autre côté du Rideau était le mieux placé pour l'exprimer.

   

20 mars 2007

Et de Hongrie soufflent les braises incandescentes

   

          Sandor Marai,magnifique écrivain hongrois,s'est suicidé en Amérique en 1989.Il avait 89 ans.Claude Rich et Bernard Verley avaient joué il y a trois ans l'adaptation théâtrale de son roman Les braises.Ce livre est dans la lignée de ces écrivains d'Europe Centrale ayant vécu la bascule du siècle en cette monarchie austro-hongroise qui vit éclore et souvent fuir les meilleurs intellectuels,mais vous connaissez déjà Arthur Schnitzler,Stefan Zweig,Joseph Roth.En son château le vieux général attend son ancien condisciple qu'il n' a pas revu depuis quarante ans.Mais le monde qui avait réuni leurs jeunesses n'existe plus.Comme enfermé dans son palais le vieux général n' a pas su comprendre le siècle.Son vieil ami,voyageur et homme d'affaires,l'a-t-il mieux saisi au moment où ils se retrouvent dans le salon où rougeoient les braises de leurs souvenirs?Sandor Marai est un écrivain de l'attente et des silences dans cette Europe où les esprits ont perdu leurs repères.Oserai-je citer encore Buzzati si je ne craignais de m'entendre dire qu'il me faut tuer Dino en un sain exorcisme.Les braises c'est un voyage dans l'insondable et impossible amitié de deux hommes que tout a séparés et qui ne sont plus guère eux-mêmes que vestiges.Comme les restes du Guépard sur les ruines de la vieille Europe.

 

 

   

         Mémoires de Hongrie est le récit que fait Sandor Marai de la fin de la guerre.Ecrit en 1970 ce récit narre le changement de propriétaire de la maison Hongrie" en 44.Résistant antifasciste avant la guerre puis ennemi de classe lors de l'arrivée des Soviétiques,ce grand intellectuel bourgeois éclairé aura eu du mal,bien du mal,à être simplement hongrois.Comprenant qu'aux noirs assassins succédaient en un fondu enchaîné, très enchaîné,les rouges égorgeurs,Sandor Marai qui savait que l'humanisme deux fois étranglé devrait attendre bien des années,décida de partir en 48:"Pour la première fois de ma vie,j'éprouvais un terrible sentiment d'angoisse.Je venais de comprendre que j'étais libre.Je fus saisi de peur".Et comme l'on partage cette crainte chez cet homme de haute culture et de tradition,détaché de toute idée préconçue.Albin Michel qui édite ces deux livres sort en ce moment même Métamorphoses d'un mariage.Vous imaginez comme cela me tente de découvrir une autre oeuvre de cet auteur lucide,courageux et embrasé.Cette grande voix de la littérature européenne s'est tue volontairement.Le grand âge lui avait-il rendu l'espoir et apaisé sa peur des barbaries?

5 mars 2007

Sandro

   Ne pas se fier à ce titre digne d'une collection fleur bleue.J'en profite pour dire que je n'ai aucun mépris pour ces lectures car je pense que le seul fait de se plonger dans les pages d'un roman fût-il dit de gare est déjà un voyage.Sandro Veronesi m'était inconnu mais le Domaine étranger de 10/18 m'a déjà donné tant de bonnes surprises que je n'hésite guère à me lancer dans une nouvelle rencontre littéraire.Bien m'en a pris car La force du passé est un roman étonnant et interrogatif.Un auteur à succès de livres pour la jeunesse voit soudain l'irruption curieuse dans sa vie d'un personnage bizarre qui prétend avoir bien connu son père qui vient de mourir.Et cet homme lui livre un secret.Le père de Sandro,ultra-conservateur notoire était en fait un espion russe.A partir de là Sandro va vivre quelques jours difficiles dans l'attente d'une vérité.Mais quelle vérité?

   Tout au long du livre court ainsi ce mystère sur le passé qui bouleverse le quotidien de Gianni pour lequel les moindres incidents deviennent d'éventuels signes,indices d'hypothétiques évènements antérieurs qui auraient pu se dérouler.On est dans un domaine à la lisière d'un fantastique ordinaire et moderne,pas si étranger à mon avis à certaines nouvelles de mon écrivain préféré Dino Buzzati,déjà souvent cité.Veronesi, probablement cinéphile,fait référence au cinéma d'une curieuse manière,peu confite en dévotions.Et puis la balade en scooter de Gianni dans Rome fait plus penser à Nanni Moretti et même à Woody Allen ,un Allen qui aurait émigré dans la ville éternelle et troqué ses taxis pour un vespa,qu'à Gregory Peck dans Vacances romaines.

  Né à Florence en 59 Sandro Veronesi a une formation d'architecte et de traducteur d'ouvrages américains.En 10/18,disponible également Les vagualâmes.

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