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BLOGART(LA COMTESSE)
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1 juillet 2010

Souvenirs d'Autriche

                   Le grand écrivain israélien Aharon Appelfeld a scindé son roman en deux.En Autriche peu avant l'Anschluss,puis 25 ans après le conflit.Un auteur juif,ami de Zweig et admirateur de Kafka,subit les attaques de la presse, insidieuses puis directes.Le plus curieux est qu'il est lui-même presque antisémite.C'est un cas de figure pas si rare dans cette Autriche corsetée qui depuis qu'elle n'est plus la légendaire Autriche-Hongrie s'apprête à accueillir triomphalement son enfant le plus célèbre,tristement cela va sans dire et encore mieux en le disant.L'écrivain a des rapports difficiles avec sa femme et son fils de douze ans,et plus encore avec la communauté juive.Le temps des prodiges n'est pas une ample machine littéraire sur les débuts de l'apocalypse.Non,c'est plus que ça.Une ballade des errements d'un intellectuel qui finit par flotter en son identité, aussi éloigné des rabbins en caftans que des sirènes aryennes.Espérance réduite quoiqu'il en soit.

          La seconde partie c'est le retour du fils Bruno,en 1965,dans la paisible bourgade provinciale qui vit la fin de son enfance.Les murs ont changé bien sûr,et les hommes.Pourtant il croit reconnaître une silhouette,parmi les survivants.Mais c'est essentiellement son fardeau de culpabilité,ses années d'enfance chaotique,qu'il tente d'assumer revenant sur les lieux,comme lui-même en déshérence de l'auberge à la rivière.A peine y croise-t-il des fantômes,et bien réels une cousine à peine juive,un Japonais qui noie sa nostalgie dans la bière.On n'est pas tellement sûr,à la lecture de ce beau roman du vieux continent,que l'après,ambigu,exonère l'humanité de l'avant,assassin.

               Né comme Gregor von Rezzori à Czernowitz,actuelle Roumanie,Aharon Appelfeld fut déporté à huit ans,fuyard en Ukraine,incorporé à treize ans dans l'Armée Rouge.Juste après-guerre il se retrouve brièvement en Italie et rejoint le tout jeune état d'Israel où il vit à Jerusalem.C'est la première fois que je le lis,pas la dernière je l'espère.

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23 juin 2010

Afrique du Sud,vainqueur

    

                     Grande terre littéraire dont je n'avais lu que Paton,Brink et Schoeman,d'Afrique du Sud ne nous vient pas que la fange.Prix Nobel, J.M.Coetzee a écrit en 83 Michael K.,sa vie,son temps.C'est la très modeste histoire d'un homme lui-même humble jardinier englouti par la spirale guerrière du pays.Il n'y comprend rien,Michael.Manifestement il n'a pas inventé la poudre mais il voue un culte à sa mère malade qu'il trimballe dans une brouette pour la mettre à l'abri des violences de ce Sud meurtri.Bientôt ce ne sont plus que les cendres de sa mère Anna qu'il porte sur son coeur.Michael tente alors de survivre à l'aide des rares graines de potiron et de melon qui constitueront son unique mets.Coetzee décrit magnifiquement les travaux de Michael,ses tentatives d'irrigation et ses douces joies transitoires lors de sa récolte de cucurbitacées.Ces lignes agraires sont fabuleuses et courent dans la première moitié du livre,pépites insoupçonnées et porteuses d'espoir,modeste lui aussi.Car tout est modeste dans Michael K.,sa vie,son temps.Le héros n'a d'autre idée que de lutter pour préserver sa dignité plus que sa vie.

    Son initiale peut bien sûr faire penser à Joseph K. et à Kafka.Je l'ai du moins ressenti ainsi.Ce pays en guerre civile permanente,hérissé de camps,divers mais réels,plus parcourus de mépris et d'indifférence que de véritable haine,farcis de toutes les incompréhensions,ne semble avoir ni queue ni tête,telle une bureaucratie tatillonne qui a oublié toute fraternité.L'homme Michael,fruste,n'existe qu'en son carré de légumes qu'il appelle ses enfants.C'est une belle figure de cette littérature riche,haletante et hyperalgique;c'est un personnage que je n'oublierai pas.J.M. Coetzee de son écriture austère et calme est un auteur de haut vol.J'ai très envie d'en lire davantage.Je vais finir en faisant vraiment la fine bouche:j'ai cependant été plus sonné encore par Karel Schoeman(voir chroniques de ses quatre romans traduits en français).

15 juin 2010

Chant gregorien

    

                              Ce livre est paru pour la première fois en 79.J'aime bien cet auteur de la Mitteleuropa,thème parmi mes préférés.Gregor von Rezzori n'a pas toujours fait partie de la jet set,même s'il a parfois fréquenté le cinéma (voir le précédent article le concernant,tournage de Viva Maria).De par ses origines,né  en 14 en improbable Bucovine,nom qui semble sortir des aventures de Tintin,et qui était en fait l'extrême orient de l'Empire austro-hongrois,Rezzori a toujours été un déraciné.De luxe parfois,mais d'un luxe paneuropéen à l'élégance raffinée en sa perdition.Car bien sûr le monde premier de Gregor von Rezzori n'existe plus.

    Dans la famille von Rezzori on a toujours vu des Juifs,Europe Centrale s'entend.Comme des Roumains,des Ruthénes,des Moldaves,etc...Il ne paraît pas que cet anitisémitisme constitutif ait été si flagrant chez Gregor.Mais à l'évidence il n'est pas absent. D'où d'ailleurs est-il absent?L'auteur dans ce récit d'une partie de sa vie manie humour et désespoir,un désespoir qui ne s'en laisse pas conter au long de trois mariages dont le deuxième avec une femme juive accessoirement. Affabulateur Rezzori certes l'est et ses pluseurs livres de mémoires sont un régal d'imagination,de celle qui s'appuie sur le vécu de Bucarest entre deux guerres ou la Vienne d'avant l'Anschluss.

          Apatride en quelque sorte ou cosmopolite, à quel canton rattacher Gregor von Rezzori?Je l'ignore.Ce dont je me porte garant c'est qu'il rejoint pour moi l'impressionnant bataillon d'outre Rhin,outre Danube des Musil, Schnitzler, Zweig, Marai, Roth,etc...La mine Mitteleuropa est inépuisable pour moi.Le baroudeur du vieux continent Rezzori s'est calmement éteint sous les cyprès toscans en 1998.Quand je vous disais que cet homme ne pouvait pas être vraiment mauvais.Un tel goût...

25 mai 2010

Bonne adresse à Dublin

    Ouvrage collectif,comme un hommage à cet établissement célèbre,le Finbar's Hotel à Dublin,initié par Dermot Boger,ce livre sorti en 99 réunit outre ce dernier Anne Enright,Jennifer Johnston,Roddy Doyle,Hugo Hamilton,Joseph O'Connor et Colm Toibin.Chacun a écrit une nouvelle ayant pour cadre le Finbar's Hotel,une institution sur les bords de la Liffey.L'endroit fut fort connu au début du XXème Siècle pour avoir abrité entre autres turpitudes épiscopales et trafics divers de part et d'autre de la floue limite de la légalité.Les sept auteurs ont eu à peu près quartier libre mais unité de temps et de lieu étaient figures imposées.Dermot Bolger a lié ces étranges aventures notamment par un vieux barman amateur de vodka,un comble,ici.

   Autre énigme:les textes ne sont pas signés.J'ai crû reconnaître les univers de Colm Toibin et Joseph O'Connor mais rien n'est moins sûr bien qu'ils soient les deux écrivains que j'ai le plus lus parmi ce septuor.Un gangster,un héritier des premiers propriétaires fondateurs,une femme en fin de vie,deux soeurs haïssantes,un homme avec un futur cadavre dans son sac....Voilà les amis irlandais que vous fréquenterez si vous décidez de loger au Finbar's Hotel.Pour les irlandophiles dont je suis ce florilège est séduisant comme un whiskey tourbé,certains verres étant plus savoureux que d'autres.J'y ai retrouvé une phrase magnifique que j'avais lue dans le très beau roman Inishowen de Joseph O'Connor.Je lui avais attribuée à tort.Elle est de William Butler Yeats l'immense poète de là-bas..

    "Mon âme est enchaînée à un animal mourant"

  Comment voulez-vous écrire le moindre vers après ça?Salauds de poètes!

16 mai 2010

Maux d'auteur

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                                                En pleine Ozmania et j'aime les textes brefs voici Vie et mort en quatre rimes.Un grand écrivain s'ennuie lors d'une soirée au centre culturel en son honneur.Alors il anticipe un peu les questions du public,passablement banales en général en ces moments. Et son esprit recrée,vagabonde,invente à ces admirateurs un nom,une histoire, un passé,des parents,des amours.Lui-même pourrait bien être piégé en homme amoureux.C'est que quelquefois ces cérémonies peuvent un peu déraper, pas méchamment .On reste en pays de comédie mais il peut s'avérer troublant de mélanger les sphères privée et publique.Alors il vadrouille dans la petite ville,qui ressemble à celle de Scènes de vie villageoise  (je trouve les deux livres très proches).Des silhouettes,un chien menaçant puis un peu collant,et ses pensées vont aux lecteurs là-bas au centre,qu'il imagine, qu'il reconstruit déjà en écrivain de profession,peut-être pas très capable d'une vie propre.Alors reste l'aventure,une lectrice,une complicité,ça m'étonnerait mais qui sait?

                                                 Le titre Vie et mort en quatre rimes serait celui d'un recueil poétique d'un auteur flou et tout aussi incertain que cette nuit de perplexité. D'une perplexité cependant finement observée par l'une des belles plumes israéliennes.

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8 mai 2010

Onirique qui mal y pense

   

                                        

           Mes souvenirs d'Edgar Poe sont estudiantins, antédiluviens.La chute de la maison Usher,mêlée à quelques éléménts du Portrait ovale ont fourni à Jean Epstein la matière à un bien beau film en 1928.J'ignorais Epstein et l'ami Nightswimming chroniquant Finis Terrae m'a donné envie d'en savoir un peu plus.Assisté d'un jeune Espagnol nommé Luis Bunuel Epstein nous offre un poème d'une grande richesse plastique qui ne cède en rien aux clichés d'un fantastique trop codé.Théoricien du cinéma,ses rencontres avec Cendrars,Gance,Germaine Dulac,sa collaboration avec Delluc,sa passion de la littérature (Balzac,Sand,Daudet furent adaptés par lui),et son intérêt pour le documentaire ont fait de Jean Epstein un créateur indéfinissable dont il faudrait sérieusement revoir l'essentiel,ou ce qu'il en reste.

         Comme le veut la tradition familiale Roderick Usher dans son manoir peint son épouse Madeline mais celle-ci dépérit quand le portrait prend vie.Oscar Wilde probablement s'en souviendra.Aux confins de la vie et de la mort Epstein utilise magnifiquement le ralenti,ce qui ne fera pas école hélas. Songe ,crypte, tissu de fils envoûtants d'étangs et de frondaisons,il me semble que les arbres de La chute... sont les plus beaux qu'il m'ait été donné de voir.Encensé par bien des critiques le film n'aura jamais l'aval du public mais le lui a-t-on vraiment jamais proposé,au public?

23 avril 2010

Le second,non,le deuxième,et puis je m'y perds

                Il s'appelait Edwin Buzz Aldrin et arriva sur la Lune en deuxième position.Comment voulez-vous vous remettre d'une telle expérience?Le passionnant premier roman du jeune auteur norvégien Johan Harstad nous présente Mattias,né la nuit de juillet 69 où un petit pas pour l'homme etc...Mattias garde de cette date une fascination pour le "rouage" Aldrin en cette mission Apollo 11.Plutôt nanti en une société nordique sans trop de problèmes majeurs Mattias n'aura qu'un but,curieux,une sorte de quête d'un anonymat qu'il pensera trouver aux Iles Féroé,ce confetti en voie de boréal où les arbres s'apparentent plus aux lichens qu'aux séquoias.Mais il n'y trouvera qu'une intranquillité et quelques amis en équilibre instable.Harstad revient régulièrement au destin d'Aldrin,agité lui aussi.Ce parallèle entre le deuxième homme et cet autre homme,Mattias,souffrant d'être le premier pour ses parents par exemple,et même le seul,est extraordinaire de précision et d'intériorisation d'un héros septentrional.On sait depuis les auteurs de polars de là-haut que nuit polaire,soleil de minuit et saunas baltiques n'assurent pas forcément la félicité.

       Ce roman,récent,est à ma connaissance peu présent dans les critiques.Je l'ai emprunté par hasard  à la Bibliothèque Municipale.Cela m'arrive parfois,au vu de la couverture,du titre,ou de quelques lignes au dos.J'aimerais beaucoup avoir l'avis d'autres lecteurs car il m'a semblé vraiment original tant par sa géographie (peu de romans se passent aux Féroé) que par ses influences revendiquées du côté d'un certain rock un peu désespérant,du côté aussi d'un absurde quelque peu tartaro-buzzatien.Archives psychiatriques au milieu de nulle part.Inquiétant non?Un personnage arrive seul sur un canot,venant de l'Ouest.Plutôt troublant. Normalement on fait naufrage dans une île du Pacifique Sud.Visiblement ce passionnant roman m'a tourneboulé.Perdrez-vous un peu la boussole,vous aussi?Et si oui mais où serez-vous donc passés?

3 avril 2010

Longs jumeaux

 

                Il faut à Wally Lamb 652 pages pour venir à bout de ce psychodrame sur la gémellité.C'est un peu long même à deux.Non que ce livre soit dénué de tout intérêt,mais la lourdeur psy nous guette à chaque page tournée et l'on finit par n'y croire qu'à moitié.Bon la moitié de jumeaux ça fait encore un entier,me direz-vous.Thomas le fragile et Dominick,plus fort,différents osmotiques,ignorent qui est leur père.On découvre plus tard alors que Thomas s'est mutilé que leur mère morte était elle-même une jumelle,fille mal aimée d'un émigrant sicilien.A travers le manuscrit laissé par son grand-père Dominick va voir ressurgir le passé de sa famille.Les secrets,la violence,tout une gangue de culpabilité s'abat sur lui.C'est vraiment beaucoup et le montage parallèle entre le récit de Dominick et la confession de l'aïeul Domenico (en plus ils ont le même prénom) s'avère artifice un peu trop voyant à mon sens.On repasse aussi par la case Sicile et l'inévitable migration transatlantique.Rien de cela n'est inintéressant mais manque singulièrement de grâce.

  Et puis le roman-fleuve a ses exigences dont la première est le souffle authentique de la vita americana.On ne le sent pas assez dans La puissance des vaincus qui peine à s'élever au dessus du mélo familial freudien bourré de complexes et de non-dits.Wally Lamb semble jouir d'une réelle popularité aux Etats-Unis.Deux autres romans chez Belfond,Le chant de Dolores et tout récemment Le chagrin et la grâce dont le titre semble déjà une expiation.La puissance des vaincus reste cependant estimable,mais m'a pris un peu trop de temps.Je pense que la fin du livre est de loin la meilleure partie,plus serrée et révélant vraiment Dominick.

28 mars 2010

Discorde Island ou la possibilité d'une île

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Sur le livre de David Vann,les avis de Dasola et Dominique

http://dasola.canalblog.com/archives/2010/03/27/17326861.html

http://nuagesetvent.over-blog.com/article-david-vann-sukkwan-island-45071942.html

  Cette île du Pacifique Nord est-elle en passe de devenir une destination culte (terme ridicule) en même temps qu'un sujet de querelle littéraire et accessoirement un triomphe de librairie?Elle va rejoindre d'autres terres célèbres en Lettrelande, Au trésor ,Mystérieuse, du Dr.Moreau.Les amies citées plus haut ne semblent guère désireuses d'y débarquer.Sans être inconditionnel de cette insularité mon séjour là-bas m'a semblé somme toute intéressant.Certes ce livre fait un sacré choc à mi-parcours.Il faut d'ailleurs se montrer particulièrement attentif à n'être pas trop disert en le chroniquant.Ce bouquin est un roman de 200 pages dont la brièveté cadre bien avec le côté expéditif de cette histoire.Dans cette littérature de la rudesse on aura compris que les rapports père-fils n'auront rien d'une île enchanteresse.Mais cette brutalité assène un coup de poing plutôt salutaire à ce type de récit qu'on aurait pu croire initiatique.Je n'en dirai pas plus sur l'intrigue dont pas mal de blogueurs ont déjà évoqué le fil.

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   C'est un ouvrage qui divise à l'évidence les lecteurs et braque parfois ceux qui ne l'ont pas encore lu et ne le feront peut-être pas.Un malaise saisit toutefois le lecteur,fût-il plutôt favorable comme moi.C'est que fréquenter Jim et Roy n'est pas de tout repos et l'on peut comprendre facilement les réticences.Glacial,secoué de pleurs et de peurs,zébré de matins qui ne chantent pas,il est âpre de séjourner à Sukkwan Island.A chacun d'y puiser sa substantifique moëlle,quitte à dévorer en frissonnant  des crabes crûs comme le "héros".Pour se détendre on peut essayer de trouver qui sera l'interprète de l'adaptation ciné,quasi inévitable à mon avis.

2 mars 2010

Il est plus tard que tu ne penses

                       On peut ne pas goûter le personnage Franz-Olivier Giesbert,bateleur parfois,suffisant souvent,cabotin télévisuel comme il en est tant.Mais Giesbert est aussi un bon écrivain dont j'avais jadis aimé Mort d'un berger et plus encore Le Sieur Dieu.Un très grand amour est le roman,si peu roman d'ailleurs,d'un homme de soixante ans,malade,quitté après avoir quitté,homme à femmes comme l'on disait il y a longtemps.Il y a un peu ici du syndrome d'Hemingway,dont le fusil remplaça sèchement les impuissances,littéraires et intimes.D'ailleurs le héros de ce récit que Giesbert assume totalement est tenté à plusieurs reprises par le suicide.Mais,velléitaire et épicurien à la fois F.O.G." s'arrange" avec les choses,quelques mensonges,quelques omissions,quelques compromissions. Comme j'ai trouvé cela bouleversant de pâte humaine,moi qui suis né la même année.

   Autre héroïne du livre la Provence offre à Giesbert l'occasion de digresser sur les tomates et les chèvres.Ce diable d'homme,gourmand de toutes les vies,à s'en éclater la panse,trouve à l'évidence le ton juste pour brasser ses histoires de femmes,nombreuses,et d'enfants à tout vent,d'examens inquiétants et de whiskys rédempteurs,de copains délaissés et de parfums de melons.Vous serez tentés de chercher les clés.Je vous les donne:c'est l'histoire d'un homme,un homme à l'italienne,à la Mastroianni,à qui les femmes ont tant donné et tant repris,et qui (merci Moustaki) "a su faire souffrir autant qu'il a souffert".Mais lui il en a fait une histoire.Universelle,bouleversante,arrogante parfois et si proche toujours.

19 février 2010

Un peu gris tout de même

                                Richard Price né en 1950 écrit assez peu.Scénariste pour Scorsese et Spike Lee,ses livres sont Clockers,Les seigneurs,Ville noire,ville blanche,Le Samaritain.,et dernièrement Souvenez-vous de moi.Peintre de New York on le présente un peu comme l'alter ego du Ellroy de L.A. ou du Pelecanos de Washington.Complexes et profonds ses bouquins vont au delà du bon polar,ce qui ne serait déjà pas si mal.Mon avis est un peu plus réservé. J'ai lu Ville noire,ville blanche,pavé de 620 pages,ce qui est beaucoup trop et affaiblit un peu à mon gré .Dans une banlieue de la Grande Pomme il y a souvent choc entre les communautés.On s'en serait douté depuis belle lurette.Richard Price pointe bien les contradictions et les cicatrices de ce monde de petits délinquants pas si petits,de miliciens peu fréquentables,de travailleurs sociaux harassés et guettés par le découragement, de flics paumés et alcooliques dont beaucoup essaient de faire à peu près bien un sale boulot.
                  Rempli d'enfants perdus,jonchés de seringues,zébré de peurs crépusculaires Ville noire,ville blanche n'apporte certes rien de vraiment nouveau sous le soleil noir de l'Amérique. Mais, sérieux, documenté,étayé d'une manière presque pédagogique il nous distille une fois encore la grande crainte de nos sociétés,version New Jersey,c'est à dire la porte à côté.

14 février 2010

Le roux et le noir

           Fleuve de 755 pages Un pays à l'aube se lit sans difficulté et avec pas mal de plaisir.Premier livre pour moi de Dennis Lehane auteur des bouquins devenus films (Mystic River,Gone,baby,gone,Shutter Island) Un pays à l'aube brosse un état des lieux de l'Amérique en 1919 à travers l'historique grève des policiers de Boston.La facture de ce livre est ultra classique,sorte de montage alterné de la vie des deux personnages principaux,un flic irlandais et un ouvrier noir.Ils finiront par se rencontrer et se lier d'amitié.Tout au long du roman corruption, banditisme, anarchisme et base-ball:nous sommes bien en Amérique où les boys de retour du front européen essaient de retrouver leur place en chassnt les autres,dure loi de la guerre.Lehane nous gratifie d'un bien longuet prologue sur les finesses du base-ball justement et j'avoue que c'est un peu pénible.Mais après on se prend d'affection pour ces gens ordinaires confrontés aux changements sociaux qui se dessinent en ce début de prohibition.Nous sommes à Boston et ça nous change un peu de New York ou Chicago.Mais ce Boston là n'est pas seulement le bastion démocrate et féministe que l'on sait.C'est,comme ailleurs en ce pays et ces années,une ville de misère et de saleté où la négritude n'est guère mieux vue que dans le Sud.

  Confrontés tous deux à la violence et à l'injustice Danny l'Irlandais et Luther le Noir ne pourront non plus s'exonérer de toute brutalité.Le lecteur,lui,aura passé un bon moment.Bien fait,relativement vite lu,documenté manifestement,Un pays à l'aube ne fait pourtant pas à lui seul un très grand écrivain.Même si les scènes de grèves et de répressions ont de quoi tenter une fois de plus un cinéaste après Eastwood, Affleck,Scorsese pour les ouvrages précités.Et si Dennis Lehane était plus à l'aise dans l'univers plus franchement noir du polar pur jus.J'aimerais avoir l'opinion des blogueurs intéressés.

24 décembre 2009

Grace d'Ecosse

                                         Deuxième livre pour moi de cet auteur écossais(voir Le coeur de l'hiver http://eeguab.canalblog.com/archives/2007/01/23/2924105.html Cet écrivain commence seulement à être traduit en France,trente ans après la publication originale.C'est une plume très riche que Dominic Cooper.En moins de 200 pages il nous intéresse à Murdo Munro,forestier écossais qui vient de quitter sa femme à 58 ans,le jour du mariage de leur fille.après avoir accessoirement incendié sa maison.Fuyard,perdu,Munro,plutôt bon bougre,erre dans cette forêt d'Ecosse péninsulaire,en quête d'un restant d'avenir bien ténu.Les collines,les lacs,les ruisseaux de ce petit bout d'Ouest 'Ecosse n'ont pas de secret pour Dominic Cooper.C'est extrêmement bien décrit,à en frôler le vertige du lecteur.Qu'il parle des nuages ou des oiseaux il nous enchante.Tout petit extrait:"Survolant les collines en direction du sud,quatre corneilles,des lambeaux noirs devant la lumière plus haute,passèrent devant la montagne et disparurent bientôt."

   Drame de l'usure des sentiments et de la solitude,Vers l'aube,est un superbe poème de cette Calédonie tellurique,cette Ecosse rude et enclavée,ces rochers d'Occident aux prises avec la mer.A mille lieues de la littérature du nombril que je déteste prenez une pinte de cet alcool aux forts effluves que n'auraient renié ni Stevenson ni Conan Doyle.Je ne sais s'il y a d'autres romans de Cooper à paraître mais d'ores et déjà ce bel écrivain d'embruns et de fougères rejoint mon album photo.Il y sera en bien belle compagnie.

20 décembre 2009

Liaisons dangereuses

         Ce livre est salutaire car il cerne fort bien les ambigus rapports entre littérature et politique,couple infernal et qui souvent a rapetissé plutôt que grandi les écrivains.Je crois que c'est Fellini qui disait que politique était prison.De fait le maestro avait raison et s'est d'ailleurs bien gardé de trop d'allégeance.Stéphane Giocanti,universitaire et biographe d'écrivains ,T.S.Eliot,Charles Maurras,n'oublie personne dans ce vagabondage littéraire.On y croise certes Sartre et Camus,Hugo et Zola,Malraux et Duras,astres de première grandeur.Mais le plus intéressant me semble le recul et le désengagement relatif des Hussards par exemple, Nimier, Laurent, Déon,tant me sont vite pénibles les leçons de certains,bilatéralement parlant.

   La littérature n'est jamais aussi forte pour moi qu'ailleurs,au dessus,ou au delà.Le cliché de l'écrivain dans la cité,de la conscience,du témoin privilégié,s'il est souvent compréhensible atteint vite ses limites.Encartés de tous les bords libérez vos chaînes,ce qui ne vous ôtera ni clairvoyance ni talent ni génie.Au contraire...Cette Histoire politique de la littérature nous présente toutes les facettes de cet improbable pacs.Il y a là les idéologues,les courtisans,les pamphlétaires,les bonnes consciences à peu de frais,les humanistes de cocktails,etc...Cela ne les prive pas complètement de leurs qualités d'hommes de lettres,mais quand même quelques-uns auraient dû y regarder à deux fois.Vous penserez comme moi mais peut-être pas  au sujet des mêmes auteurs.

12 décembre 2009

Le mendiant et le colonel

           Quel beau livre que Tarabas un hôte sur cette terre.Tarabas,tour à tour étudiant, soldat, révolutionnaire, colonel, antisémite,mendiant s'est vu promettre par la gitane de New York le meurtre puis la sainteté.Pour devenir meurtrier c'est assez vite fait: l'Europe à feu et à sang vous tend les bras et Joseph Roth le juif galicien sait de quoi il parle.Pour la sainteté...Tarabas retrouve le chemin de son enfance,là où il pourrait donner un nom à chaque saule,chaque bouleau,là où l'attendent ses bonnes chaussures,et surtout là où père et mère sont leurs propres cercueils d'égoïsme et de folie.Quand criera-t-on plus fort le génie de Joseph Roth?

31 octobre 2009

Couchés les morts!


   

      Les morts à leur place.Journal d'un tournage écrit il ya 44 ans est un témoignage fort intéressant sur le cinéma.Viva Maria ne m'avait pas laissé un grand souvenir.Rezzori dont peu de gens connaissent le talent,sorte d'apatride voyageur alternativement branché et has been,a une plume assez vitriolée our évoquer les deux stars et plus encore Louis Malle.Plus ou moins acteur par hasard sur Viva Maria Gregor von Rezzori nous raconte les coulisses mais pas du tout comme un diariste des people(quel mot!).Non,il met dans son éphéméride toute la finesse d'écriture que lui savent ses rares lecteurs.Peu importe Bardot,peu importe Moreau,ce qui m'a ravi c'est le regard de Rezzori sur le Mexique des années soixante,cet étonnant pays où règne le culte de la mort comme nulle part ailleurs,entre le grand voisin du Nord et le grand baroque de l'Amérique Latine."Les morts à leur place" c'est l'injonction du metteur en scène aux figurants.Pas forcément très à la sienne au cinéma Gregor von Rezzori a su mettre dans ces articles très sixties une ironie très intemporelle,beaucoup d'humour et plus encore bien de la lucidité sur lui-même,Européen errant et légataire de tout un siècle d'histoire austro-roumano-hungaro-germano-etc...

30 octobre 2009

Chasse aux alpins

             Montagnard ce livre,et épisode guerrier.Comme souvent Mario Rigoni Stern l'un de mes préférés au delà des Alpes.La comparaison s'arrête là.Très différents ces deux auteurs.Le livre de Curzio Malaparte est plus ardu dans la forme,constellé d'italiques,et presque versant dans l'onirique,un onirique de violence dans des décors alpins si grandioses.En fait ce court roman était sorti en épisodes dans Il Tempo en 41 quand Malaparte était correspondant de presse dans l'armée italienne des Alpes.Mais Mussolini fit censurer certains chapitres et les deux derniers disparurent et Malaparte ne voulut jamais les réécrire.Beaucoup trop francophile pour le Duce tout ça.

            Malaparte déclara en 1947 qu'avec Le soleil est aveugle il fut "le seul parmi tant d'écrivains italiens,fascistes et antifascistes (parfois ce furent les mêmes) à avoir osé condamner le coup de poignard dans le dos de la France (expression consacrée), le condamner publiquement,pendant la guerre".Je ne me prononcerai pas sur cette assertion.Par contre j'aime beaucoup le tableau illustrant le livre,Troupes au repos d'un certain Christopher Nevinson.Etonnant destin que celui de Malaparte qui s'engagea pour la France en 1914 à l'âge de seize ans et fut emprisonné par les Allemands à la fin du second conflit.Rappelons que Kurt Suckert le Toscan avait choisi son pseudo par haine/admiration de Bonaparte et que ses romans les plus connus sont La peau et Kaputt.

25 octobre 2009

Ancien Régime,qualité française

      Furetant parmi les livres de mon père je viens de retrouver La Varende.Il s'agit du recueli de nouvelles Les manants du roi..Il me semble très intéressant de lire des auteurs non seulement complètement oubliés mais même réprouvés ou à tout le moins assez vilipendés.Parfois à juste titre mais là n'est pas la question.La prose de La Varende,évidemment très Ancien Régime,est cependant bien belle.

     Qui aujourd'hui lit La Varende?Il n'existe guère d'écrivain plus "homme du passé" que La Varende.J'ai,pourtant voulu m'y frotter un peu en un petit voyage sentimental dans les vieux Le Livre de Poche (nom déposé) de mon père,en grande partie responsable de mon goût de lire.Les manants du Roi est un recueil de nouvelles qui ne quitte pas au long de 150 années de France les hobereaux normands de la famille de Galart.Monarchiste absolument convaincu La Varende nous présente quelques dates clés et les réactions de ces gentilhommes peu fortunés et laborieux à la mort de Louis XVI,à la Restauration,sous le Second Empire.
        Nous sommes bien sûr en pays normand plus chouan parfois que la Vendée elle-même.Ecrit en 38 on ne s"étonne guère à lire la prose pleine de glèbe du Vicomte que les mois prochains le verront plutôt maréchaliste.Ce n'est pas à mon avis l'intérêt de ce recueil.Ce que j'ai aimé dans Les manants du Roi,souvent truffé de termes dialectaux,c'est cette profonde fusion des châtelains successifs avec le pays et leurs paysans.Les derniers chouans notamment conte avec véhémence et lyrisme la rencontre du maître et du manant qui finissent par se perdre presque dans les marnières de ce pays d'Ouche de fondrières et de galeries.Il n'est question dans ce livre que de fidélité et que de lys bien sûr.C'est cependant un livre très bien écrit,ode à l'Ancien Régime sûrement.Difficile de le nier.Difficile aussi de ne pas reconnaître à ces nouvelles une vraie grandeur.Je dois reconnaître que cet exemplaire tout écorné par le temps et le souvenir s'accorde à merveille au thème.Et les toutes premières couvertures du Livre de Poche étaient bien belles.Mon père qui ne connaissait pas les marque-pages faisait soigneusement un petit triangle replié.On les voit encore.Mon père lisait aussi Steinbeck, Hemingway, Tolstoï et Yves Gibeau.

22 octobre 2009

Les rapaces

    J'ai présenté à quelques étudiants retraités une petite communication sur le film noir.Le faucon maltais croise-t-il encore en altitude cinéphile?A mon avis oui mais il est vrai que pour la filmo d'Humphrey Bogart on peut trouver plus objectif que moi.Mais quel plaisir de se replonger dans les méandres imaginés par Dashiell Hammett et si bien relayés par John Huston.Film véritablement fondateur du genre Le faucon maltais d'Hammett a bel et bien " pris le crime dans le vase vénitien où on l'avait rangé pour le laisser tomber dans la rue"(G.B.Shaw).Dès après le générique Frisco est là,son pont,son port,sa plaque de privés associés.Et Sam Spade,à jamais Bogart, à jamais cette image du dur à cuire,que les vicissitudes n'ont pas tout à fait blasé.D'ailleurs il le dit à la fin à Brigid la meurtrière:"Je ne suis pas aussi pourri que je le laisse dire"

    Tout de tabac,tout de chapeau,tout d'ironie,et une certaine cruauté,Sam Spade n'a guère le temps ni le goût de regretter son associé assassiné.Déjà débarquent les comparses,ce trio infernal du film noir,Peter Lorre vaguement levantin et moins vaguement efféminé,les 280 livres de Sydney Greenstreet,souvent filmé en contre-plongée, falstaffien et drôle dans sa frénésie de quête du faucon,Elisha Cook petite gouape gitonesque.Oui ici comme dans le roman on appelle un chat un chat.Ca ne se fait plus guère et ça tombe presque sous le coup de la loi.D'une très grande fidélité au livre qui était c'est vrai presque découpé Huston insuffle sa propre recherche mythique dans cette chasse à l'oiseau noir(Huston plus tard ce sera bien d'autres quêtes,Le trésor de la Sierra Madre,Moby Dick,Les racines du ciel,Le malin,L'homme qui voulut être roi).

   Les femmes du film noir,comme on s'y attendait,vénéneuse ou victime,est-ce la même?Si les pires gangsters semblent conserver un zeste de franchise,les femmes,elles,ne sont que duplicité et manipulation.Ouvertement machiste Le faucon maltais ne s'embarrasse guère de circonlocutions.Mais plus  que tout il y a dans la plupart des bons films noirs cet humour féroce et salvateur,cette ironie mordante,ce sarcasme comme les dents de Bogart,dont on ne sait si c'est baiser ou morsure.Mais dites-moi qu'est-ce vraiment que Le faucon maltais?Sam Spade,alors que la femme s'enferme dans la cage d'ascenseur qui préfigure une autre cage,nous le dit sans ambage:"That's the stuff dreams are made of.

    On pourrait gloser très longtemps sur l'importance du noir,roman ou film.On peut aussi et surtout le lire ou le voir.Cest tellement mieux que de débattre.

13 octobre 2009

Vingt ans après

           Henry Porter,né en 53,britannique comme il se doit,est l'un des maîtres actuels du roman d'espionnage.Vingt ans après les coups de masse et les embrassades il nous replonge dans les arcanes de la fin de la RDA,quand Chemnitz portait encore le doux nom de Karl-Marx-Stadt.

            Brandebourg,c'est juste avant la chute du Mur et ça raconte une histoire d'espionnage où comme dans toutes les histoires d'espionnage il y a des microfilms ou des disquettes dont on ne saisit pas très bien la nature.Il y a aussi plusieurs services de contre-espionnage dont on ne saisit pas toujours la clarté.Il y a enfin des agents doubles,triples,etc...J'ai cru y voir un Soudanais proche du KGB,un Vladimir appelé à de hautes responsabilités,un Polonais mort à Trieste mais était-il vraiment polonais quoique bien mort à Trieste.Pour toutes ces raisons je ne lis pas très souvent d'espionnage.
         

         Mais il y a dans Brandebourg et c'est passionnant les derniers soubresauts du régime d'Erich Honecker,les manifs de Leipzig,les manipulations terminales et essoufflées de la douce Stasi,la fuite d'un professeur d'art lui-même ancien collaborateur de cette même Stasi,comme tout le monde.Il y a ainsi un bon roman qui nous resitue cette histoire vieille de vingt ans juste avant que ne résonne le violoncelle de Rostropovitch près d'une ligne de démarcation qui avait connu pire musique.

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