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3 mars 2007

A mi-chemin du paradis

   Sam Shepard fait partie de ces nombreux Américains qui vous réconcilient avec leur pays.Dans cet immense territoire bien des voix s'élèvent avec courage et talent pour décrire un autre Amérique,la leur et celle que j'aime tant.Shepard a tout fait.Bref passage dans le groupe folk-rock Holy Modal Rounders(période hippie),scénariste de Michelangelo Antonioni pour Zabriskie Point,un brin fumeux,de Wim Wenders pour Paris,Texas entre autres,et de Bob Dylan pour son unique réalisation Renaldo and Clara.Dramaturge(Fool for love,L'Ouest,le vrai) et lui-même metteur en scène occasionnel.Acteur sur des films pas toujours géniaux mais aussi sur L'étoffe des héros ou Les moissons du ciel il est aussi un nouvelliste très fin dont voici deux recueils en 10/18.

   Balades au paradis se compose de textes pour la plupart courts et l'on y croise les ombres de Duke Ellington,Gary Cooper,Spencer Tracy sur un rythme un peu syncopé qui s'apparente au jazz et à la culture américaine avec ses cowboys égarés,ses motels interchangeables,ses miles d'autoroute et ses petits désespoirs ordinaires.Féru d'Europe comme pas mal d'intellos de là-bas Sam Shepard a intitulé une de ses nouvelles Un hommage à Céline.Dans le recueil suivant A mi-chemin l'une se nommera C'était pas Proust

  Dans A mi-chemin (Joli titre original:Great dream of heaven) que je viens de terminer d'autres héros très quotidiens essaient d'échapper à leur grisaille en s'intéressant aux courses hippiques,en tentant au téléphone de renouer le  fil de leurs amours démolies,en lutinant gentiment une serveuse de restaurant.Sam Shepard se balade parmi ces gens modestes et terrifiés à l'idée du temps qui passe,de leurs enfants en partance,de la tempête sur leur caravane,de pensions aux ex.Dans ce grand pays de longs rubans d'asphalte et de rêves à construire avant que de pleurer il y a une littérature fabuleuse,encore largement ignorée.Je la défends depuis toujours.

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1 mars 2007

Ah ça ira!

Les Bouffons : Roman des temps révolutionnaires

     Ce Roman des Temps Révolutionnaires(c'est le sous-titre du livre) est un bouquin délicieux,iconoclaste et dynamite allégrément les clichés sur la Révolution Française.Le héros,très modeste aristo mayennais,Lazare de Kervignac,va se trouver mêlé aux complots royalistes et nous faire pénétrer les arcanes des différents comités où pérorent les singes hurleurs et les bouffons,les marionnettes,les agents doubles, triples,quadruples,les maquereaux, les défroqués,et toute une faune de personnages bêtes,méchants,vicieux comme les révolutions en accueillent souvent.En effet une révolution a le mérite de mettre une société sens dessus dessous,ce qui a l'avantage de permettre aux imbéciles de se croire des aigles,aux minables de se sentir pousser des ailes,aux opportunistes de faire leur boulot d'opportunistes.

  Les Bouffons est rempli d'un humour qui s'immisce jusque dans les scènes cruelles qui sont légion on s'en doute en cet univers de carmagnoles et de raccourcissement express.J'ai toujours été étonné par la vitesse d'exécution(c'est le cas de le dire) de cette époque bénie où l'on pouvait dénoncer son voisin pour lui piquer sa maison ou sa femme,quitte à se retrouver soi-même dans les bras de Sanson pour une ultime et courte escalade.Songez que Robespierre ne survécut que quelques semaines à Danton qu'il avait envoyé ad patres.

   Vous aurez compris qu'Hubert Monteilhet est un très alerte conteur et qu'on apprend dans la bonne humeur une belle tranche d'Histoire de France. Ripaille, tripaille, pagaille, canaille dans les rues de Paris débaptisées pour la plupart dans un ridiculissime engouement pour cette trilogie rarement aussi peu respectée Liberté-Egalité-Fraternité.Utopies proches de la démence,vices s'érigeant en vertus,sanglante lanterne sur la place...Un régal...

18 février 2007

Des nouvelles d'Arthur

 

Une petite comédie

Le grand romancier autrichien Arthur Schnitzler(1862-1931) est l'auteur de La Ronde,Le retour de Casanova,Rien qu'un rêve(Eyes wide shut).Le cinéphile qui sommeille dans le lecteur ne cite là que des romans adaptés au cinéma.Joseph Roth,Leo Perutz,Robert Musil sont quelques-uns des autres écrivains magiques qui ont illustré cette extraordinaire floraison intellectuelle qui a accompagné la fin de l'empire des Habsbourg.Curieux comme le chant du cygne de l'Autriche-Hongrie a dynamisé les intellectuels viennois(Stefan Zweig,aussi).

Le recueil intitulé Une petite comédie est une perle.Une vingtaine de nouvelles brillantes,élégantes où la mort tient une grande place,mais une mort viennoise,de classe,crime ou suicide,toujours entre concerts et promenades au Prater.Vienne,encore, fastueuse mais déjà nostalgique est souvent le personnage principal de ces histoires de ruptures entre étudiants et danseuses,de quiproquos entre amants aussi menteurs l'un que l"autre,de comédiennes désargentées en quête de protecteur.Et toujours ce climat de fêtes sur fond de fin de règne même si personne ne le sait encore vraiment.

Si mes amis cinéphiles me donnaient leur avis sur le trois films adaptés d'Arthur Schnitzler auxquels on peut rajouter sa pièce Liebelei,mise en scène par Max Ophuls...

 

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18 février 2007

Berlin 36

Ce thriller très classique nous plonge dans les quelques jours qui précèdent les Jeux Olympiques de Berlin et l'on y croise même le célèbre Jesse Owens.Un Américain engagé pour tuer un dignitaire nazi rencontre un contact qui n'est pas celui qu'il prétend être.De fil en aiguille on assiste à ces quelques jours où le tueur à gages alterne les rôles de chasseur et de gibier.C'est bien souvent le cas dans ce genre de livres.L'auteur, Jeffery Deaver, a déjà été adapté au ciné dans Bone collector avec Denzel Washington.Le rectificateur est un livre lourd au sens propre et au sens figuré.Trop long de 100 pages au moins il n'est pas haletant comme il le devrait et sa construction,hyper-traditionnelle,montages alternés transcendés par quelques points de rupture,ne nous offre qu'un délassement digne d'un voyage en train.Rien de déshonorant.Tout le monde n'est pas Graham Greene ni John le Carré.

10 février 2007

Edgar le magnifique

Faire de ce vieux flibustier de John Edgar Hoover le héros d'un roman passionnant et très éloquent sur la condition humaine est le pari réussi de Marc Dugain(auteur de l'excellente Chambre des officiers).Hoover qui fut le patron du FBI pendant des décennies avait de la démocratie une idée très personnelle.Et une idée de sa nécessité dans les coulisses du pouvoir telle qu'il se jugeait au dessus des suffrages,ayant bien trop peu confiance dans ses concitoyens pour leur demander leur avis.Cet homme fut donc l'un des hommes les plus puissants de l'univer sans jamais être élu nulle part.

Et Marc Dugain,par un très intelligent montage alternant des dialogues,des notes,des comptes rendus d'écoute,des fiches de renseignements mais aussi de petites touches intimes comme les querelles d'amoureux de ces deux vieilles badernes que sont Hoover et son adjoint-concubin Clyde Tolson,parvient à faire d'Edgar un personnage presque sympathique,et surtout terriblement humain.

La malédiction d'Edgar

  En effet le roman prend l'allure des mémoires de Clyde Tolson,totalement apocryphes,cela va de soi.Et ainsi l'on assiste à 40 ans de politique américaine vue par le petit bout,très petit parfois,de la lorgnette.La malédiction d'Edgar nous immerge dans les magouilles de ces figures que l'on a pu croire presque angéliques.Et comme nous avions tort.La famille Kennedy qui fit longtemps figure de galerie princière américaine apparaît pour ce qu'elle a dû être ,à savoir une dynastie d'opportunistes allant d'un père fasciste à des rejetons obsédés et addicts à différentes choses.Bref des êtres humains comme vous et moi,quoi. Martin Luther King ce bon apôtre est loin d'être exemplaire et c'est presque mieux comme ça.Ces gens là nous ressemblaient donc.

   Je ne me livre pas à l'apologie d'une crapule.J'ai seulement lu un bon bouquin,documenté,qui reste une fiction.Certes Hoover était une canaille,mais une canaille de qualité.Et j'aime la qualité.(Gallimard)

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23 janvier 2007

Austère lande d'hiver

Le roman de Dominic Cooper Le coeur de l'hiver ne ressemble à aucun autre et son action sur les rives d'Ecosse aux fougères battues de vent et de marées violentes et destructrices nourrit 180 pages d'un lyrisme panthéiste qui me fait penser à la littérature indienne(Amérique du Nord).Alasdair Mor exploite une toute petite ferme et vit surtout de la pêche au homard.Mais la haine et la violence vont rattraper ce coin d'enfer pour une histoire de voisinage.

La brutalité qui s'immisce dans le récit n'empêche pas de comprendre les véritables héros de l'histoire,l'océan mugissant,le vent de glace et la lande déserte où pourrait errer le chien des Baskerville par exemple,cette saisissant aventure de Sherlock Holmes qui nous rattache vite à la tourbe écossaise.Livre du temps,aussi,du temps et des saisons,du froid qui dévore les mains d'Alasdair lors de sa rude tournée des casiers de crustacés.Le coeur de l'hiver a été publié en 75 et les Editions Métailié viennent d'en publier la traduction française dans une collection Bibliothèque écossaise attirante comme un vieux scotch au coin du feu.

20 décembre 2006

Divorce et mariage à Budapest

       

   J'ai trouvé amusant de chroniquer côte à côte deux autres romans de Sandor Marai.le premier,Divorce à Buda,se présente comme la confrontation d'un juge et d'un médecin,l'un devant prononcer le divorce du second.Publié en 1935 ce livre s'inscrit bien sûr dans la floraison littéraire extraordinaire de la Mitteleuropa entre les deux guerres.On ne dira jamais assez combien le monde a changé en queques années,plus encore dans l'ancien Empire d'Autriche-Hongrie.Vous savez aussi la fascination qu'exercent souvent les déclins sur l'âme humaine et sur le lecteur parfois déclinant lui aussi.

  Le juge et le médecin ont été étudiants ensemble, connaissances plutôt qu'amis.Alors que l'on s'attend à une véritable confrontation en temps réel celle-ci n'aura pas lieu et cela peut même paraître frustrant.Mais Sandor Marai sait nous captiver tout autrement.Toute la première partie est une longue introspection sur la société libérale moderne qui se fait jour en Hongrie  et sur la vie privée du juge,son mariage devenu un gouffre d'incompréhension et de faux semblants.

"Quels phares braquer sur cette épaisse obscurité pour y retrouver le moment,le fragment infinitésimal d'instant où quelque chose se rompt entre deux êtres humains"

La deuxième partie est le presque monologue du médecin face au juge qu'il dérange en pleine nuit.Unité de lieu et de temps,classique certes mais Sandor Marai sait nous plonger dans les arcanes de l'âme de ces deux personnages jeunes encore mais ciselés de fêlures et de doutes.D'homme à homme,un très grand livre.

Métamorphoses d'un mariage

Suite imminente avec Métamorphoses d'un mariage que les critiques considèrent comme la pièce maîtresse de l'oeuvre,solide,de Sandor Marai.Histoire d'un trio classique composé de la femme,du mari et de la domestique et maîtresse qui tour à tour confient leur versions des évènements de leur vie.Chaque monologue,très long,est d'une précision diabolique sur cette bourgeoisie que connaissait si bien Sandor Marai et sur les rapports de classe parfois fielleux entre les castes.Peut-on parler de castes?Ce qui est sûr c'est que comme dans Les Braises ou Mémoires de Hongrie(dont j'ai remonté la critique) la vérité est cernée par les subtiles,très subtiles et très littéraires arabesques du grand Marai.

Je trouve les livres de Sandor Marai d'une extraordinaire cruauté,alliant l'analyse de la déchirure hongroise du siècle avec ses oppresseurs de toutes les couleurs à un portrait de famille catégorie Europe Centrale qui n'épargne personne.M'en voudrez-vous beaucoup si ue fois encore je cite Schnitzler,Zweig,Roth,etc...?A l'Est toujours du nouveau et rien n'est plus actuel que cette littérature d'entre deux guerres qaund elle est marquée du sceau du génie.Pour Sandor Marai,je vous assure,c'est le cas.

26 novembre 2006

Un homme d'Aran

Le Mouchard - Coffret CollectorCet homme était né aux Iles d'Aran en 1896.J'ai visité Aran en 2003.Elles ont changé,beaucoup changé.Pimpantes et fleuries elles accueillent les touristes en bateau,voire sur le petit aéroport.Mais au début du vingtième siècle cet extrême ouest de l'Irlande,donc de l'Europe,était misérable et l'oeuvre de Liam O'Flaherty raconte sans fioritures cette noirceur et cette quête des Irlandais pour vivre libre,vivre tout court.

On connaît un peu O'Flaherty gräce à son ami John Ford,Irlandais d'origine et qui a donné en 35 une bien belle version du Mouchard,publié en 28.Le Mouchard est l'histoire d'une trahison en une nuit,une tragédie de la misère.Si les brouillards du film ont un peu hérité de l'expressionnisme allemand(magnifiquement revendiqué par Ford),le livre,lui,est une très belle et poignante balade dans l'abjection mais l'informateur trouvera une véritable rédemption christique en allant mourir,pardonné,dans la chapelle de la très catholique Irande des années vingt.

On entend dans le film un sublime cantique irlandais.Je n'ai retrouvé une telle perfection vocale que dans les chants de Gens de Dublin,de John Huston,cinquante ans plus tard,d'après un autre immense Irlandais,James Joyce.Cette chronique s'appelle "à l'Eire libre".

O'Flaherty n'est pas l'auteur d'un seul livre.J'ai lu  L'Ame noire,sombre histoire de passion dans une île désolée,et Insurrection,chronique de la lutte pour l'indépendance.Me paraissent hautement recommandables l'Assassin et le Puritain.

Ne quittons pas l'Irlande ce soir sans une tournée générale:Pete McCarthy,dans l'Irlande dans un verre(collection Etonnants voyageurs chez Hoëbeke) nous raconte un voyage de Cork à Donegal en faisant halte dans tous les pubs nommés McCarthy.Je vous laisse imaginer.Allez,je vous laisse,j'ai une petite soif.

L'Irlande dans un verre

13 novembre 2006

Redécouvrir Anderson

TrNous sommes tous des voleursès méconnu et éclipsé par Steinbeck notamment il faut lire Edward Anderson(1906-1969), particulièrement si l'on est comme moi fondu (entre autres) de littérature américaine. Edward Anderson est un de ces Américains des annèes 30 qui aura tout fait tromboniste, boxeur, matelot. Dans cette Amérique de la crise où l'on pense aux grands Les raisins de la colère, Des souris et des hommes ainsi qu'à Erskine Caldwell: La route au tabac, Le petit arpent du bon dieu, n'oublions pas les deux très bons bouquins d'Edward Anderson, évidemment chez 10-18.

Edward Anderson n' a publié que deux romans.Tous des voleurs que les cinéphiles auront immédiatement reconnu et rebaptisé Les amants de la nuit et Il ne pleuvra pas toujours. Le premier Il ne pleuvra pas toujours dont le titre original est Hungry men(Des hommes affamés)est presque l'autobiographie de l'auteur. Il raconte la vie d'Axel Stecker, un hobo, un vagabond de la Grande Dépression. C'est une histoire de bourlingue entre trains clandestins et nuits dans les parcs et les églises.C'est un rude bouquin,de sang,de sueur et de poussière,éléments fondateurs de l'histoire américaine." Ce n'était pas tous les jours que je me prenais pour un gentleman. J'étais plus près du chien galeux".

Les Amants de la nuit

   Publié deux ans après,en 37,Tous des voleurs est un peu plus célèbre surtout par l'adaptation essentielle de Nicholas Ray en 49.C'est une histoire de gangsters,un Bonnie and Clyde un peu plus rural,qui obtiendra un certain succès.Mais Edward Anderson ne fera jamais fortune,Hollywood ne lui fera pas de cadeau et il ne publiera que deux nouvelles dans les trente années qu'il lui reste à vivre.L'adaptation de Robert Altman en 73 me paraît moins forte.

5 novembre 2006

Couleurs en marche

Vie de poètePas un recueil de nouvelles,mais une suite de petites chroniques du Suisse germanophone Robert Walser basée sur les rencontres du promeneur solitaire à travers l'Allemagne.On pense à Rousseau bien évidemment et il y a de ça. Le poète en balade s'arrête à peu de choses:une bière à l'auberge,un arbre où faire la sieste,une accorte logeuse.Il parle même à un poêle ou un bouton de chemise.Vie de poète c'est ainsi 150 pages de légèreté mais empreintes d'une sourde déception,celle de l'homme qui n'avait pas confiance en lui-même.

   Car Robert Walser auteur de ces brèves notes lumineuses a très tôt vécu le deuil de la vie puisqu'interné en psychiatrie les 23 dernières années de son existence.Si j'osais :une sorte de Philippe Delerm des années 1910 que l'on serait bien avisé de lire tant son style et sa grâce font mouche.Que dites-vous de cette simple phrase? "Un clair de lune est-il rien d'autre,au fond,que quelque chose de quotidien,offert au mendiant comme au prince?" (Editions Zoe).

23 octobre 2006

Dino

       J'ai "remonté" cette vieille note pour remercier l'ami Thom de sa découverte du Désert que je suis ravi de lui avoir inspiré avec d'autres.Thom est un amoureux des livres comme moi,de la musique rock comme moi et lui-même m'a souvent montré le chemin.C'est comme ça que j'aime le blog et non pas comme une somme de jugements péremptoires qui sonnent comme des diktats sous la plume de gens sûrs d'avoir raison.

      Il ne s'agit pas ici de l'ami Dean Martin,ce crooner enchanteur que par ailleurs j'adore mais du fabuleux écrivain italien Dino Buzzati(1906-1972) ,immortel auteur du Désert des Tartares, cette fable absurde sur la condition humaine à travers la carrière du Lieutenant Drogo qui attendra toute sa vie l'ennemi pour se couvrir de gloire.Et l'ennemi viendra quand Drogo quittera l'armée pour agoniser dans une chambre d'auberge.D'ailleurs est-on sûr que l'ennemi est là?Jacques Brel très impressionné par le roman  en a fait une chanson,Zangra,qui résume bien le propos de l'homme qui attend...Le cinéaste italien Valério Zurlini en a fait un film estimable en 1976,produit par Jacques Perrin lui aussi fanatique du livre.



      Mais Buzzati aussi un nouvelliste génial dont les"racconti" souvent très courts baignent dans un climat fantastique,poétique,toujours inquiétant. L'une d'entre elles symbolise bien l'ambiance: elle s'appelle Les Sept étages et narre l'hospitalisation du héros dans une clinique où les cas très bénins sont traités au rez-de-chaussée et les cas désespérés au septième étage. Evidemment le héros monte les étages malgré les dénégations des médecins quant à la gravité de son état. Plutôt angoissant,non...

     Principaux titres de ses recueils:Le régiment part à l'aube. Le K. Les nuits difficiles. En ce moment précis. L'écroulement de la Baliverna.Les sept messagers.Et trois autres romans : Barnabo des Montagnes. Le secret du Bosco Vecchio . Un amour.

     Il n'y a rien à jeter dans l'univers de Dino Buzzati.On peut s'y précipiter,lire une nouvelle au hasard ou monter au fort de Bastiani guetter les hordes des Tartares.

18 octobre 2006

Loin,très loin,très au sud et très à l'ouest

Tierra del FuegoMort en 2002 à 92ans Francisco Coloane fils de chasseur de baleines est maintenant devenu une célébrité et nombre de voyageurs hantent la Terre de Feu sous les mauvais vents du Sud sur le straces du patriarche de Chiloé.Semblant sorti d'un roman de Melville ce géant qu'on n'a connu en France qu'avec une barbe blanche est l'auteur de nouvelles et de quelques romans qui font de nous un Jim Hawkins de ll'Ile au Trésor qui aurait troqué les Caraïbes pour le Cap Horn.Les personnages de Coloane,au front précocément ridé par les tempêtes australes,sont des marins,des baleiniers,des bergers,des chasseurs.Couturés de solitude et amis des eaux-de-vie ces costauds sont souvent des colosses fragiles qu'une photo de femme fait fondre au son d'un vieux tango.

Le Passant du bout du monde    Le critique littéraire a une marotte sympa mais un peu envahissante qui consiste à chercher des parrains à chaque écrivain.Alors va pour Jack London par exemple.Comme l'homme de la ruée vers l'or Coloane a bourlingué,auteur voyageur et compagnon d'illusion des gauchos,des contrebandiers et des derniers Indiens Alakaluf,ces tribus disparues dont les rares survivants posent pour les touristes.J'ai aimé le périple avec le vieux Francisco et dévoré Tierra del Fuego,Cap Horn,Le sillage de la baleine.Découvert depuis une douzaine d'années on peut lire aussi Le dernier mousse,El Guanaco,Le passant du bout du monde,Le golfe des peines tous publiés chez Phébus,maison de qualité(également Points).

16 octobre 2006

La douleur de Robert

           Robert McLiam Wilson nous propose à son tour sa version de l'Irlande contemporaine avec entre autres trois romans impeccables et rugueux.

           Ripley Bogle conte la "promenade" en Angleterre d'un raté,jeune flemmard qui n'a que peu de goût pour le travail,héros décadent qui en dit long sur la déshérence de toute une génération.Même les traditionnelles valeurs irlandaises sont battues en brèche par ce loser pathétique.Ce roman qui ne craint pas le mauvais goût s'avère finalement tonique et d'une écriture très cinématographique.

 

 

      Eureka Street,c'est l'amitié entre Jake et Chuckie,l'un catholique,l'autre protestant ou vice-versa,deux as de la débrouille dans Belfast encore secouée par l'interminable et idiotissime guerre des clans.Oscillant entre très drôle et très noir,souvent intimement mêlés en un tableau pittoresque et grinçant,Eureka Street commence ainsi "Toutes les histoires sont des histoires d'amour".Robert McLiam Wilson en vit une belle avec la littérature.

 

     Je préfère malgré tout La douleur de Manfred où planent un peu le théâtre de l'absurde et de vieux fantômes irlandais en exil dans Londres.Manfred,Irlandais vieillissant et condamné,revoit sa femme une fois par semaine sur un banc,sans avoir le droit de la regarder.Il faut dire qu'il l'a jadis battue et que sa vie s'est délitée entre un fils indifférent et sa propre culpabilité.Plus sombre que les deux autres romans,La douleur de Manfred porte l'accent grave d'une comédie humaine qui flirte avec le désespoir.

 

16 octobre 2006

Roddy de Barrytown

Un petit tour dans mon pays fétiche tant sur le plan cinéma que littérature.Voici Roddy Doyle,auteur de la trilogie de Barrytown qu'Alan Parker(The Commitments) puis Stephen Frears(The Snapper,The Van) ont popularisée au grand écran.

Paddy Clarke ha ha ha se passe également au milieu des années 60 dans la banlieue un peu minable de Dublin.Nous sommes bien évidemment avant le boum économique irlandais et Patrick Clarke est un garnement comme tant d'autres,entre bagarres et chapardage,football sur le chantier et parfois,pas souvent,beignes à la maison.On retrouve dans Paddy Clarke ha ha ha la truculente verdeur des trois films précités et,dans la catégorie très chargée des souvenirs d'enfance l'apprentissage de Paddy,alter ego de Roddy Doyle,ets une bonne pioche.


La femme qui se cognait dans les portes,c'est la triste vie de Paula Spencer,dix-sept ans de galère conjugale ponctuée de râclées,dents brisées,grossesses non désirées,le quotidien de pas mal d'Irlandaises et d'autres.Voyez,j'adore l'Irlande mais n'oublie pas qu'elle a vécu assez longtemps une forme d'obscurantisme hélas toujours très partagée dans le monde.Pour ce livre on dirait que Paula Spencer c'est Roddy Doyle tant l'acuité et la sincérité de son écriture sont éclatantes d'authenticité.



Les cinq bouquins cités sont chez 10/18 ainsi que L'enfant de Dublin de Peter Sheridan qui est de la même verve.Quand je vous dis que les Irlandais sont tous écrivains.

15 octobre 2006

Ce dur à cuire de McCoy

  Agrandir la jaquette de Un linceul n'a pas de poches   Que j'aime les destins de ces écrivains américains pas sortis des salons de Time Square mais blanchis sous le harnais de la crise des années trente qui suivait la Grande Guerre.Ils sont nombreux.Après John O'Hara et W.R.Burnett voici Horace McCoy dont on connaît surtout On achève bien les chevaux, l'un des témoignages les plus terribles sur cette crise économique et morale majeure de l'entre-deux guerres.Ce marathon de la danse qui ramène l'homme à la pire bestialité me semble prémonitoire des dérives de la société spectacle d'aujourd'hui.

   McCoy,comme tout le monde a fait tous les métiers depuis le conflit en Europe au journalisme sportif en passant par le taxi avant de  se retrouver à Hollywood ou il fit un petit peu l'acteur et surtout le scénariste(Gentleman Jim,Les implacables).Il a en fait peu écrit et je crois avoir presque tout lu de ce vieil Horace.D'abord des nouvelles pour le Pulp magazine Black Mask cher à Tarantino qui existèrent en Livre de poche en deux tomes,Black Mask Stories et Les Rangers du ciel(ce dernier inspiré par ses mois dans le ciel de la France en guerre).Ces suspenses aériens et policiers,ou les deux à la fois,sont bien dans la tradition des Hard-boiled writers,aussi appelés Tough guys,des auteurs du terrain,fut-il d'aviation,habitués au grand air et aux boissons fortes.

    Adieu la vie,adieu l'amour(Kiss tomorrow goodbye) est l'histoire inéluctable d'un évadé assoiffé de pouvoir,un assassin qui rencontre sur sa route femmes fatales et notables véreux.Ce type de roman,devenu classique, est écrit avec verdeur et causticité,et misogynie bien sûr.Les gants d'une femme quand elle les ôte sont des armes terribles...Je n'ai jamis vu le film avec James Cagney,au titre français débile Le fauve en liberté mais à l'évidence le rouquin irlandais avait l'étoffe.

   La littérature selon McCoy n'est pas aseptisée ni tristement et politiquement correcte.Une fille y est souvent une garce et un établissement fréquenté par les homosexuels n'est pas pudiquement qualifié de bar gay.Dans On achève bien les chevaux prévaut cette même brutalité qui en fait le chef d'oeuvre que l'on connaît,tportrait des sans espoir de la Grande Crise dont parleront si bien aussi Dos Passos, Steinbeck, Dreiser.

  Un linceul n'a pas de poches est un réquisitoire violent et désespéré contre la soumission et la veulerie à commencer par celle des clubs sportifs,déjà.Autres titres Le scalpel,Pertes et fracas.Très longtemps incompris aux Etats-Unis McCoy doit sa célébrité essentiellement à Marcel Duhamel dont la Série Noire historique a contribué après-guerre à tant de découvertes littéraires majeures.

13 octobre 2006

Les diables de Tasmanie

Cet homme s'appelle Matthew Kneale et c'est l'auteur d'un roman génial qui convoque Stevenson, Conrad, Darwin, De Foe entre autres.Ceci est une introduction très quelconque car Kneale n'a besoin d'aucun parrainage.Il suffit de lire Les passagers anglais(Belfond,Presses Pocket) pour qu'éclate son talent de conteur et de moraliste.Le livre tient à la fois du conte des Lumières et de l'épopée à la Jules Verne.Mais assez de name dropping comme dirait Delerm.Plongez vous dans ce voyage au bout du monde d'un navire dont le capitaine convoie un jeune botaniste,un pasteur plutôt fondamentaliste comme on dit aujourd'hui,un médecin convaincu de supériorité.Ce voyage les mène en Tasmanie,cette île du sud de l'Australie où vivent des autochtones ce qui est bien leur droit.

    Que de questions à l'arrivée après les périls des océans sur la terre de Tasman pas trop hospitalière!Y trouve-t-on le Jardin d'Eden?Le racisme est-il justifié par les théories scientifiques très pointues sur la forme des crânes aborigènes?Les colons ont-ils des orteils?La contrebande a-t-elle un avenir entre Sydney et Hobart?Le diable de Tasmanie de nos dessins animés est-il porteur d'un virus?A dire vrai j'ai rajouté cette dernière question pour faire rigolo.Matthew Kneale a choisi pour son récit la forme d'un journal de bord tenu par de nombreux personnages et ceci vivifie encore le bouquin.

  Les Passagers anglais  Comme les Anglais sont privés de bien des choses mais pas d'humour Kneale aborde des choses sérieuses comme le progrès et la paix avec des moments drôles et assassins pour nos certitudes d'avant le Musée du Quai Branly.Jerome k.Jerome ou Redmond O'Hanlon sont eux aussi des voyageurs anglais qui avaient bien compris la grandeur à savoir parler des choses graves avec l'humour,cette politesse du désespoir(ça n'est pas de moi mais je revendique).

13 octobre 2006

Giorgio

  Péchés et vertusGiorgio Scerbanenco(1911-1969),né Cherbanenkov en Ukraine est l'un des meilleurs écrivains italiens des années 50-60.Il a notamment créé Duca Lamberti,médecin radié pour avoir aidé à l'avortement dans l'Italie très conservatrice de cette époque.Dans une suite de romans et de nouvelles il trace un portrait de son pays d'adoption et surtout de la métropole du Nord,Milan,ville du miracle économique italien.Dans cette Italie sur la voie du progrès il y a des laissés pour compte et Duca Lamberti sait faire preuve de perspicacité et de compréhension.   

Les Milanais tuent le samedi,Les enfants du massacre(terrifiant fait divers qui annonce les crimes de lycéens aux Etats-Unis),A tous les râteliers sont parmi les grandes réussites de Scerbanenco.Duca Lamberti est un personnage qu'on n'oublie pas,patient et désintéressé,enquêteur obstiné des trattorie  et des rues de Milan,qui est l'autre grande héroïne de ses romans. 

Giorgio Scerbanenco est aussi auteur de très belles nouvelles plus éloignées de l'univers du polar.Citons La nuit du tigre et,mon préféré,Péchés et vertus,recueil de 14 histoires sur les sept vertus cardinales et les sept péchés capitaux.Une fois de plus les éditions 10/18 ont fait un gros travail pour faire connaÎtre un des meilleurs romanciers d'un pays si riche en talents,tant littéraires que cinématographiques. Les Milanais tuent le samedi

12 octobre 2006

L'autre grand écrivain turc

   

      Regarde donc l'Euphrate charrier le sang du grand écrivain turc Yachar Kemal est une allégorie de la guerre et plus encore de la paix impossible surout quand il s'agit d'ennemis héréditaires qui ne savent plus pourquoi mais se détestent au delà des générations.L'Ile Fourmi, au centre de ce roman, pourrait bien ressembler à Chypre par exemple.Après la Grande Guerre,celle qui a tout changé Grèce et Turquie ont fait un curieux échange d'îles et de populations.Deux hommes se retrouvent dans une île déserte et vont créer une situation presque amicale jusque dans l'absurde de ce no man's island.

   Il m'arrive d'acheter un livre surtout pour son titre et c'était un peu le cas pour Regarde donc l'Euphrate charrier le sang qui me paraissait prometteur.Je ne l'ai pas regretté car il règne sur ce roman un souffle baroque très vivifiant.

10 octobre 2006

Les désarrois de l'instituteur irlandais

Journée d'adieu Avant tout rappelez-vous qui'Eireann en connaît plus sur la littérature irlandaise que quiconque et que d'un clic vous en saurez plus sur ces auteurs nombreux et formidables.Je découvre John McGahern alors qu'il vient de  disparaître,avec Journée d'adieu(Belfond).Il n'y a guère d'exotisme irlandais chez McGahern bien que les pubs et les églises aient pas mal d'importance dans ce roman.

    La joie de vivre n'inonde pas vraiment Journée d'adieu qui commence au départ d'un instituteur de son école et se poursuit par une suite de retours dans le passé.Ce que je retiens de ce beau livre grave et serré c'est essentiellement des mots bouleversants sur la mort d'une mère et un questionnement sur la recherche du bonheur au travers des embûches et des déceptions.

    Mais Journée d'adieu est très surprenant par la relation amoureuse qui s'instaure entre une Américaine divorcée et l'enseignant en congé volontaire. L"immoralité" de cette liaison dans un pays où la religion pèse lourd certes mais pas toujours aussi négativement peut-être qu'on ne l'imagine nous emmène dans les dédales d'une géographie du coeur sans excès ni dérives.Bien au contraire cette histoire est portée par une calme ardeur,celle d'un écrivain sobre et que,je crois,le futur fera mieux connaître.

9 octobre 2006

Italo

Le Corbeau vient le dernierJoli titre comme souvent chez Italo Calvino l'un des auteurs italiens les plus originaux(1923-1985). Ce recueil, Le corbeau vient le dernier rassemble les premiers récits de celui qui fut entre autres traducteur de Raymond Queneau dont l'univers est proche du sien.L'oeuvre de Calvino est bourrée d'humour et d'ironie avec un petit air de fantastique bon enfant. Ceci ne l'empêcha pas d'être un intellectuel très en vue dans les annnées 50-60. Membre comme bien des écrivains et cinéastes du Parti Communiste Italien qu'il quitta après Budapest Calvino a écrit des nouvelles inspirées par la Résistance puis sa fabuleuse(au sens propre de l'ordre de la fable) trilogie souvent nommée Trilogie des Ancêtres mais que je préfère baptiser Trilogie des Aristocrates égarés.

Le Baron perchéLe Baron Côme décide en plein XVIII° Siècle de ne plus quitter les frondaisons des chênes verts. C'est de là en pleine époque des Lumières qu'il connaîtra marquises et politiciens dans un conte qui aurait plu sans doute au sieur Voltaire. Humour,dépaysement recul, rien n'est pareil vu des arbres. Il nous faudrait essayer de vivre ainsi.

Le chevalier inexistantQuand Charlemagne inspecte ses troupes il est plutôt étonné car le chevalier Agilulfe n'est pas ...dans son armure. Son écuyer Gourdoulou lui obéit pourtant régulièrement. Parabole sur l'identité et l'individualisme Le Chevalier inexistant mêle amertume narquoise et burlesque. Détonant hybride de chanson de geste,parodie de roman courtois et quête du Graal pas si éloignée de...Monty Python

    Le Vicomte pourfendu est à mon sens une version conte cruel de Dr Jekyll et Mr.Hyde. Coupé en deux par un boulet barbaresque le noble Médard voit ses deux moitiés vivre en toute autonomie leur propre existence. L'un pour le pire, l'autre pour le meilleur. Et lequel des deux est le plus drôle?

   Enfin Calvino est aussi l'auteur des aventures de Marcovaldo ce modeste manoeuvre romain à peu près aussi adapté à la grande ville que Charlot. Mais Marcovaldo lui est père de famille.A  lire aussi Le sentier des nids d'araignée,La route de San Giovanni...

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