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BLOGART(LA COMTESSE)
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24 novembre 2014

Ta guérison, ma déraison

VALLEJO    

                                          François Vallejo, dont j'ai jadis apprécié Ouest, a réussi avec Fleur et sang un excellent roman à double lecture, dont les héros sont deux médecins, l'un médecin apothicaire dans la France de Louis XIV, l'autre chirurgien cardio à notre époque. Un côté plutôt fleur, un côté plutôt sang. Vu ainsi ça ne nous éclaire pas beaucoup. Les deux  histoires sont indépendantes et cependant tout à fait en résonance. Dans une paroisse de Touraine, le jeune Urbain Delatour, élève de son père à son corps défendant, observe les relations complexes que son père, chirurgien et apothicaire, entretient avec le maître des lieux, seigneur de Montchevreuil. Suite à la disparition de ce dernier c'est sa fille unique qui règne, que maître Delatour est mystérieusement le seul à pouvoir raisonner. Le jeune Urbain, lui, est sous le coup d'une certaine attraction-répulsion envers elle, pourtant dotée d'un physique hors norme.

                                          Trois siècles plus tard, Etienne Delatour, interne à Tours, tombe amoureux d'une jeune fille affligée d'une légère claudication mais terriblement séduisante. Là aussi importance de la différence, y compris physique, traitée très joliment par l'auteur. Quel sera le poids exact d'Irène de Saint-Aubin dans la vie d'Etienne, devenu brillant cardiologue, parfois contesté? A travers ce portrait d'un homme très complexe et indéfinissable ce n'est que bien des années plus tard que la véritable nature de leur relation se précisera mais il faut convenir que très habilement François Vallejo laisse l'ambiguité régner. Beau roman sur la manipulation dans les deux cas, tant on hésitera à prendre parti. C'est un de  ces romans qui laisse le lecteur diriger sa barque, il y a bien des écueils, et l'on ne saisira jamais l'essence intégrale des deux médecins d'Ancien Régime, le père notamment échappant à trop de sanctification, pas plus que l'on ne se prononcera sur la sincérité/duplicité d'Etienne.

                                           Vallejo est un écrivain très fin, qui refuse les facilités, mais qui honore la littérature française, ce qui empêche probablement de plus grands tirages. J'encourage à découvrir, tant Ouest que Fleur et sang, et bien d'autres romans encore. Le titre de cet article est emprunté au livre,phrase plusieurs fois prononcée par Etienne Delatour s'adressant au patient. Très troublant.

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2 novembre 2014

Péril d'ennui en la demeure

Mmasse critique

                                          Le collectionneur des lagunes ne m'a pas intéressé beaucoup au début. Et puis plus du tout. Cela bien sûr n'engage que moi. J'ai eu toutes les peines du monde à aller au terme de ce que je considère comme un sinistre pensum prétentieux. L'histoire m'avait pourtant séduit, cette variation sur un séjour de Tchaïkovski à Venise peu avant sa mort en 1893. Vieillissant, jaloux, logé chez un mécène qui aiguise la curiosité, nanti de l'improbable nom de Barparoz. Le palazzo est vénitien lui aussi, mais l'ennui est universel et continu au long de ces 260 pages qui se voudraient vénéneuses et qui ne sont qu'ampoulées et, pour moi, incompréhensibles.

                                       Jean-Maurice de Montremy, très érudit et qui tient  à ce que  ça se sache, multiplie les intrigues de palais et de masques composées. Omniprésence du carnaval avec ses mannequins emperruqués, alors que se mêlent aux affres de Piotr Ilyitch les récits du narrateur contemporain Bauer qui lors d'un séjour chez son frère, propriétaire du dit palazzo,, découvre une malle au nom de Barparoz, jamais expédiée. Tchaïkovski, lui, tente d'en finir avec sa Sixième, la Pathétique, sous le coup d'une impossible et ultime passion pour son propre neveu.

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                                       Tout au long de cette fête costumée qui se voudrait étrange, traitant et maltraitant trahisons et complots, espionnage et scandales, c'est le pauvre lecteur qui tente d'en finir et qui maintes fois songe au suicide moral, très tenté par la seule idée séduisante, celle de mettre fin à son calvaire. Un tour du côté des contes de fées et de leur perversité, une incursion très laborieuse dans les manuscrits du maestro, une accumulation de noms impossibles pour les innombrables comparses de cette traversée, nobles baltes, domestiques indigènes, servantes maîtresses. J'ai rarement dénigré un roman à ce point mais c'est à l'aune de l'ennui incommensurable qui fut le mien, me donnant bien des regrets de m'être embarqué dans cette gondole invraisemblable. Homme de parole j'ai fini ce livre pour le chroniquer dans cette Masse Critique pour Babelio que je remercie, innocents qu'ils sont de ce Collectionneur des lagunes , mais noyé depuis très longtemps dans les marâtres eaux de la Sérénissime, je gagnerais à être plus circonspect sur certains choix.

 

16 octobre 2014

La poésie du jeudi, Max Jacob

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Le Phare d’Eckmühl

 

Si tu as perdu ta route sur la lande tu regardes à droite ou à gauche

et tu vois où est Saint-Guénolé.   

 

Depuis que je vous connais, Marie Guiziou,

j’ai cherché vos yeux sur toutes les mers de cette terre-ci.   

 

Mais vos yeux tournent de côté et d’autre

partout où il y a des amoureux.

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Marie Guiziou, Marie Guiziou !

La vie est comme la lande pour moi

et vous êtes pour moi comme le phare d’Eckmühl.                                                                      

 

Marie Guiziou !

Ma vie est comme l’océan autour de Penmarch !

et si je ne vois vos yeux, je suis un naufragé sur les rochers

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                                                                                   Non loin de son Quimper natal, le phare de l'enfance de Max Jacob,des mots simples, presque enfantins. Juif,Breton,poète, peintre, Max Jacob mourut en 1944 au camp de Drancy.

27 septembre 2014

En territoire bien connu

Mmasse critique

 

 

 

 

                                                                                     Tout d'abord je remercie  Babelio et les éditions Presses de la Cité, Terres de France, de m'avoir fait gracieusement parvenir, dans le cadre de l'opération « Masse critique », le tout récent roman de Nathalie de Broc. J'ai cependant eu tort de m'engager cette fois. Mais Et toujours ces ombres sur le fleuve..., par ailleurs sérieusement documenté, ce qui est un bon point, appartient au roman historique, genre dont je ne suis plus très friand, en ayant lu trop peut-être. Bien évidemment rien de déshonorant dans ce livre et je serais fort mal venu de donner des leçons. Mais ce livre aurait gagné à mon sens à être un peu plus long plutôt que de mettre en place dès le début une dramaturgie hyperclassique, du traumatisme de l'enfance à la vengeance programmée, mais qui prendra du temps et se fourvoiera au long d'au moins une ou deux suites un peu trop évidentes.

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                                                      On connait les ressorts du roman historique depuis longtemps mais sans remonter à Dumas on peut évoquer les héroînes un peu fondatrices d'écrivains contemporains, j'ai nommé Caroline chérie et Angélique,Marquise des Anges. Il y en a bien d'autres.Points de repère: une époque précise, génératrice de conflits et de changements, c'est à dire presque n'importe quand, un héros voire plutôt une héroïne, d'abord victime puis vengeresse, des rebondissements, un bon qui s'avère ignoble ou un salaud qui en fait combat l'injustice, etc... Et surtout un territoire, un terroir, une ville, un fleuve, qui permet l'identification quand bien même on n'aurait jamais mis les pieds là-bas.

                                                      Nathalie de Broc nous entraîne sur les pavés de Nantes, la Loire, négrière, et assassine en cette fin de XVIII° siècle, les beaux hôtels particuliers et les bouges du port, tout ça à peu près interchangable. La Révolution est en marche et sur l'estuaire ligérien le sinistre Carrier célèbre ses mariages républicains, c'est à dire ses noyades par couples. Les parents de Lucile sont du lot et elle-même n'y échappe que par miracle. 1793, à douze ans, Lucile devient Albane et trouve refuge parmi les voleurs, un peu sa nouvelle famille. L'histoire n'est pas finie mais ce volume ne nous mène qu'à ses dix-sept ans, ce qui augure de nouvelles livraisons pour lesquelles je ne m'inscrirai pas.

                                                     On apprend pas mal de choses sur la ville de Nantes, les bords de l'Erdre et les navires en partance, aussi sur les maisons closes, un passage ultraclassique dans le roman historique dont le personnage principal est féminin,en général sauvé avant "consommation" si je peux me permettre. Ce qui m'a le plus amusé c'est quelques injures d'époque, car pour le coup, là, on peut dire que c'était mieux avant. "Jean-fesse, valet de toupie, bougre de groin,savon à culotte", il me semble que j'aimerais bien être insulté ainsi. Trêve de billevesées Et toujours ces ombres sur le fleuve... (le titre même semble avoir été soigneusement décidé) ne m'a pas vraiment intéressé mais libre à chacun d'espérer la suite des aventures de Lucile de Neyrac, forcément attendues dans les deux sens du terme.

28 août 2014

Aval, amont, embâcles et noues

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                                         La Marne est souvent associée à l'Est et aux guerres, un peu au Front Populaire et au canotier dans sa version banlieue parisienne. Homme de l'Ouest mais que les destinations un peu extrêmes (L'arche des Kerguelen, La chambre noire de Longwood, sur Sainte Hélène) passionnent tout autant, Jean-Paul Kaufmann, qui a connu l'enfermement que l'on sait, a eu l'idée de remonter cette rivière intégralement; ce qui n'est pas si facile car la géographie de maintenant fait parfois diversion, carrefours, zones industrielles, ouvrages d'art. La Marne est en fait plus longue que la Seine qui est en quelque sorte sa supérieure hiérarchique directe, et qui la toise facilement, cette prétentieuse. Il en va des cours d'eau comme des hommes et des femmes, jalousies, querelles de voisinage, kleptomanie car l'une vole parfois le lit de l'autre. Le périple de Kauffmann est très intéressant, délivrant au fil de l'eau un amont curieux, fait de bric et de broc, une France sans prétention, je ne dirais pas une France profonde car l'épithète est souvent péjorative.

                                       Parti du banlieusard et tristounet confluent de Charenton Jean-Paul Kauffmann apprivoise le cours de la Marne  tout au long des étapes qui nous emmèneront au Plateau de Langres. Bien sûr la Grande Guerre est passée par là, bien sûr les coteaux champenois effervescents nous tiennent compagnie, Kauffmann est d'ailleurs un oenologue reconnu, mais c'est au détour de la cathédrale de Meaux*, d'une maison d'éclusier à la Simenon ou à l'évocation d'André Breton séjournant six mois à l'hôpital psychiatrique de Saint Dizier que j'ai vraiment apprécié cette longue promenade qui prend toute son ampleur dans une certaine austérité haut-marnaise, où l'ombre d'une grande croix de Lorraine s'observe là-haut sur la rive gauche, rappelant la grandeur du cher et vieux pays.

                                         Ce coin de France dessert la Manche, la Mer du Nord et la Méditerranée. En effet, y naissent la Seine, la Meuse et des affluents de la Saône, toute la France en quelque sorte. Plus émouvant qu'il n'y paraît ce voyage est aussi d'une belle eau (forcément) littéraire où notre vocabulaire s'enrichit considérablement avec les marnois et les brelles, respectIvement des radeaux et des bateaux plats, quinze jours pour livrer à Paris le bois du sud champenois, ou avec la distinction entre berges et rives (vous la connaissez, vous?).

                                         * "Non loin du tombeau de Bossuet, je me suis assis dans la nef près d’un pilier, débarrassé de mon sac posé sur la chaise voisine. L’église lumineuse sentait la pierre blanche, ce coquillé du calcaire et une odeur poudrée de vieux livre, aucunement moisie, quelque chose de blet ressemblant au parfum de vieilles pommes rangées sur un carrelage. Quel moment délicieux ! Les bruits de l’extérieur me parvenaient étouffés : touches de klaxon, percussions régulières d’une masse sur le bois, staccato d’un marteau-piqueur. Ce léger brouhaha contrastait avec l’intérieur où le moindre pas, le grincement d’une chaise, le battement de la porte capitonnée retentissait, amplifié par la réverbération. (…)

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                                         "L’odeur du marbre dans cette église. Même le marbre a une odeur. Il a beau être impénétrable, il exhale une curieuse sensation de givre, acide, dur, piquant. Il me faut débusquer ces effluves chaque fois que je découvre une ville, un village, un site. L’empreinte. La trace d’un parfum ou d’un monument."

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24 juillet 2014

La poésie du jeudi, José Maria de Heredia

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Un coucher de soleil sur la côte bretonne

Les ajoncs éclatants, parure du granit,

Dorent l'âpre sommet que le couchant allume.

Au loin, brillante encore par sa barre d'écume,

La mer sans fin, commence où la terre finit !

A mes pieds, c'est la nuit, le silence. Le nid

Se tait. L'homme est rentré sous le chaume qui fume ;

Seul l'Angélus du soir, ébranlé dans la brume,

A la vaste rumeur de l'Océan s'unit.

Alors, comme du fond d'un abîme, des traînes,

Des landes, des ravins, montent des voix lointaines

De pâtres attardés ramenant le bétail.

L'horizon tout entier s'enveloppe dans l'ombre,

Et le soleil mourant, sur un ciel riche et sombre,

Ferme les branches d'or de son rouge éventail

José Maria de Heredia (1842-1905)

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                                         En guise de vacances et avant de fermer ce lieu à compter du 2 août, et jusqu'en septembre, quelques vers du XIXème, hommage à une belle région. Mais toutes les régions ne sont-elles pas belles? Merci de tout coeur à Asphodèle, initiatrice et organisatrice de cette très belle année en poésie. La poésie, je l'avais pas mal négligée. J'avais tort. 

15 juillet 2014

Sur les traces de Jeff

Mmasse critique

                                          Chouette aventure avec Babelio dans le sillage de Louis Meunier et de ses fringants Cavaliers afghans. Vous pensez à Joseph Kessel? Comme vous avez raison car c'est sur ses traces que s'est élancé Louis Meunier. Chevaux et montagnes de l'Hindou Kouch, nuits glacées et poussières aux sabots, le récit à peine romancé est un beau voyage au coeur du pays, version Nord, où tout est cheval, ce qui me fait immanquablement penser au western. Car l'auteur, documentaliste, producteur, vit depuis huit ans à moitié en Afghanistan, pays fascinant et si méconnu, talibans, attentats, présence étrangère, intégrisme étant les mots qui viennent à l'esprit. Et cela n'est pas faux. Mais Louis Meunier, ce centaure, nous met en selle pour une autre aventure, pour laquelle il vaut mieux bien tenir les rênes.

les_cavaliers_afghans

                         Le buzkashi est célèbre depuis Kessel et le film avec Omar Sharif. Bref rappel, ce sport de brutes, oui, quand même, individuel, consiste à ramasser un cadavre de chèvre, ou de veau, et à le déposer dans un cercle, le tout à cheval évidemment, sur un terrain immense. Tous les coups ou presque sont permis. A moi on me permettra de douter du bien-être des chevaux. Mais Louis Meunier à l'évidence pense que certains chevaux s'éclatent vraiment dans cet exercice. Trêve de polémique, ce récit se révèle très agréable et dépaysant. Les tchopendoz, c'est le nom de ces cavaliers intrépides, forment une sorte d'aristocratie, parfois hautaine, et qui se divise en clans plus ou moins "sponsorisés" par des gens fortunés, souvent politiciens véreux, seigneurs de la guerre, ou parrains de l'opium. Peu à peu Louis Meunier, accueilli dans le pointilleux cercle des initiés, l'un des rares étrangers à avoir été admis à pratiquer le buzkashi, aura toute les peines du monde à marquer son premier point dans cette sorte de Rollerball équestre. D'où, ne l'oublions jamais, toute présence féminine est proscrite, ce qui déjà jette un froid. Les Cavaliers afghans est aussi un carnet de voyage de deux cavaliers au contact des populations souvent plutôt hospitalières mais où l'arrogance de quelques tyranneaux régionaux peut s'avérer parfois inquiétante.

                        Encore une fois une belle aventure qui s'apparente au journalisme plus qu'à la littérature. En cela je crois que l'homme à la crinière léonesque, Jeff Kessel, hantait des sphères romanesques et néanmoins documentées plus intéressantes. Mais Louis Meunier a le temps, on n'est pas tout de suite Albert Londres.

                        Merci aux Editions Kero et à Babelio qui nous permettent ainsi de découvrir des livres sur lesquels à première vue on ne  se serait pas forcément rué. Changer les habitudes de lectures ne peut qu'être profitable.

10 juillet 2014

La poésie du jeudi, Francis Picabia

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Picabia

Labyrinthe

             La volonté attend sans cesse

Un désir sans trouver.

Le cran d'arrêt passionne

l'absence de gaudriole.

Une cicatrice vers la nuit

profane la réflexion.

Il n'y a que détachement incrédule.

On me fait souffrir

parce que je sais l'indifférence

Banalités embarquées

sans cesse sur elles-mêmes :

Les horizons attirent les yeux

de nos sentiments.

Francis Picabia (1879-1953)

 t-Picabia__Parade_amoureuse_1917

                                                       Touche à tout aristocratique Francis Picabia fut surtout peintre. Dada, Surréalisme, et autres sympathiques sornettes eurent sa visite. Poète aussi, à sa manière, qui ressemble à celle de Picabia peintre. Pour preuve ce Labyrinthe aussi clair que Parade amoureuse, le tableau ci-dessus. En fait Picabia ne voulait surtout pas rater le dernier train à la mode. Maintenant on dirait hype, ou branché. Ainsi fut-il fou de l'automobile et du cinéma, tous deux frémissants. On est en droit d'apprécier. En droit aussi de penser qu'il se fout de nous. Allez savoir! A dire vrai, moi, de Picabia, j'aime surtout son duo avec Erik Satie dans le surréalistissime Entr'acte de René Clair.

 

 

 

                                           


 

 

 

 

 

25 juin 2014

La poésie du jeudi, Marie Krysinska

chromo-oiseau-couronnc3a9-ana-rosa1                                             Voulez- vous danser, blogueuses?

                                                                                      Voulez-vous giguer, charmeuses?

                                                                                      Marie la Polonaise

                                                                                      Vous met à l'aise

La gigue

 

Les Talons

Vont

D'un train d'enfer,

Sur le sable blond,

Les Talons

Vont

D'un train d'enfer

Implacablement

Et rythmiquement,

Avec une méthode d'enfer,

Les Talons

Vont.

Cependant le corps,

Sans nul désarroi,

Se tient tout droit,

Comme appréhendé au collet

Par les

Recors

 

sans-titre

 

La danseuse exhibe ses bas noirs

Sur des jambes dures

Comme du bois.

Mais le visage reste coi

Et l'oeil vert,

Comme les bois,

Ne trahit nul émoi.

Puis d'un coup sec

Comme du bois,

Le danseur, la danseuse

Retombent droits

D'un parfait accord,

Les bras le long

Du corps.

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Et dans une attitude aussi sereine

Que si l'on portait

La santé

De la Reine.

Mais de nouveau

Les Talons

Vont

D'un train d'enfer

Sur le plancher clair.

Marie Krysinska (1857-1908)

                                     Née à Varsovie Marie Krysinska fut une apôtre du vers libre. Et l'une des très rares femmes à adhérer à des cercles littéraires florissants dans le Paris de la fin du XIXème Siècle, les Zutistes, les Hydropathes et aussi  pensionnaire un temps du célèbre Chat Noir de Montmartre. Danseur tout en raideur que je suis, euphémisme, cette fantaisie aux talons qui claquent m'a pas mal réjoui.

11 juin 2014

La poésie du jeudi, Pierre-François Lacenaire

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                                         Lacenaire, je le connais depuis si longtemps. Enfin par le biais du merveilleux Les enfants du paradis, de Carné et Prévert  Alors j'ai voulu le lire au moins une fois ce gandin poète assassin. Et là, vive le net, j'ai trouvé quelques vers dont cette truculente pétition. Qui lui va comme un gant, du moins si on l'imagine comme Marcel Herrand dans ce rôle. Lacenaire, le vrai, (1803-1836, guillotiné) aurait inspiré Dostoievski pour Crime et châtiment mais il est aussi évoqué par Stendhal, Balzac, Gautier, Baudelaire et Lautréamont. Excusez du peu. Allez je vous laisse en bonne compagnie.

Pétition d'un voleur à un roi voisin

Sire, de grâce, écoutez-moi :

Sire, je reviens des galères...

Je suis voleur, vous êtes roi,

Agissons ensemble en bons frères.

Les gens de bien me font horreur,

J'ai le coeur dur et l'âme vile,

Je suis sans pitié, sans honneur :

Ah ! faites-moi sergent de ville.

Bon ! je me vois déjà sergent :

Mais, sire, c'est bien peu, je pense.

L'appétit me vient en mangeant :

Allons, sire, un peu d'indulgence.

Je suis hargneux comme un roquet,

D'un vieux singe j'ai la malice ;

En France, je vaudrais Gisquet :

Faites-moi préfet de police.

Grands dieux ! que je suis bon préfet !

Toute prison est trop petite.

Ce métier pourtant n'est pas fait,

Je le sens bien, pour mon mérite.

Je sais dévorer un budget,

Je sais embrouiller un registre ;

Je signerai : " Votre sujet ",

Ah ! sire, faites-moi ministre.

Sire, que Votre Majesté

Ne se mette pas en colère !

Je compte sur votre bonté ;

Car ma demande est téméraire.

Je suis hypocrite et vilain,

Ma douceur n'est qu'une grimace ;

J'ai fait... se pendre mon cousin :

Sire, cédez-moi votre place.

Pierre-François Lacenaire

 

 

3 juin 2014

Peu de précipitation

pluie

                                         Ce polar pourrait entrer dans le sous-genre psycho puisqu''il se situe entièrement dans un hôpital psychiatrique, lequel établissement a une histoire et ruisselle de souvenirs d'une époque pas si lointaine où la médecine des troubles du comportement était rien moins que diablement carcérale. Diablement est le mot juste car le centre porte le nom pas forcément jovial de Théophobe Le Diaoul, jadis Théophile Le Bellec, un ancien patient illuminé ou assombri, c'est selon, et que la Grande Guerre avait conduit dans ces murs tragiquement continuateurs de l'aliénation des tranchées. Cette idée sous-tend toute la suite de l'enquête menée par Eric Lanester, flic et psychologue, et son équipe dans cet univers où l'on a coutume de dire que la différence entre les soignants et les soignés ne saute pas toujours aux yeux.

                                        En cette année centenaire la Grande Guerre est donc indirectement responsable une fois encore de morts violentes, celles d'un patient défenestré par son infirmier, puis le suicide de ce dernier. Le meurtre en ces lieux peut s'avérer essentiellement d'ordre chimique, antidépresseurs, psychotropes, gélules et pilules multicolores pouvant faire fonction de fameux objets contondants. Françoise Guérin, elle-même psychologue, décrit bien les arcanes et plus encore les archives si cruciales dans cet hôpital où l'on comprend trop vite l'importance de l'hérédité, des rivalités et des dynasties. Peu de professionnels collaborent vraiment aux interrogations de Lanester et de ses collègues, soigneusement stéréotypés, une râleuse, une extravertie portée sur la chose, un bleu maladroit. Pas trop d'aide du médecin-chef, pointilleux sur ses prérogatives. Par contre, Elisabeth Bassonville, elle, responsable de tout le passé historique du Centre Théophobe Le Diaoul, se prête si bien aux questions que ça en devient louche.

                                       On s'achemine ainsi vers une vérité subodorée depuis bien longtemps. Dommage que l'on soit depuis pas mal de pages resté assis à la cafeteria, à rêvasser à ce qu'aurait pu être une incursion réussie dans ce milieu hostile à toute curiosité. Les enfants de la dernière pluie, tout au plus une petite ondée de l'autre côté du rideau, celui qui sépare tant bien que mal la norme de la différence, sachant que l'individu dit normal n'a pas bonne presse dans la critique littéraire jamais exempte de démagogie, mais tout ceci reste insuffisant.

28 mai 2014

La poésie du jeudi, John-Antoine Nau

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                                       Ce grand méconnu n'est resté un tout petit peu dans l'Histoire que pour avoir obtenu le premier Goncourt avec Force ennemie en 1903. Américain né à San Francisco de parents français, marin et  voyageur ayant vécu en Martinique, Espagne, Portugal, il ne vécut jamais de sa plume et ses poèmes restent largement ignorés. Très marqué par la mer il mourut  à Tréboul, Finistère, d'un océan à l'autre. Ca m'a amusé de découvrir un peu ses vers très "olfactifs" au moins dans ce sonnet. Merci Asphodèle de m'avoir ramené dans le sillage de la poésie.

Sur l'arc vert de la plage apaisée

 

Sur l'arc vert de la plage apaisée

Où le matin mélodieux descend,

Ta maison pâle entre les palmes balancées

Est un sourire las sous un voile flottant.

 

Ces longs stores sont des paupières affligées ;

Des fleurs se meurent dans la nuit des banyans,

Des fleurs du violet velouté si souffrant

De tes doux yeux couleur de pensée.

 

Ces lourds parfums égarants, confondus,

Des bosquets fragrants comme des temples d'Asie... ...

Brouillards embaumés sur l'horizon défendu ?

John-Antoine_Nau

 Est-il vrai qu'il soit cruellement revenu,

Cédant à quelque nostalgique fantaisie,

Trop tard, le trop aimé que tu n'attendais plus ?

 

John-Antoine Nau (1860-1918)

 

15 mai 2014

La poésie du jeudi, Alphonse Allais

Complainte amoureuse

Oui dès l'instant que je vous vis

Beauté féroce, vous me plûtes

De l'amour qu'en vos yeux je pris

Sur-le-champ vous vous aperçûtes

Ah ! Fallait-il que je vous visse

Fallait-il que vous me plussiez

Qu'ingénument je vous le disse

Qu'avec orgueil vous vous tussiez

Fallait-il que je vous aimasse

Que vous me désespérassiez

Et qu'enfin je m'opiniâtrasse

Et que je vous idolâtrasse

Pour que vous m'assassinassiez

Alphonse Allais (1854-1905)

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Plût à Asphodèle qu'elle  permit

Qu'Allais-grément je satisfis

A ce que l'humour ainsi saillît

Et, ce jovial jeudi, jaillît

E.E.Guab (dates inconnues, enfin pour moitié)

                                                                             On le sait peu, le facétieux natif d'Honfleur, fut aussi peintre. On lui doit notamment une série de sept magnifiques monochromes dont celui que je vous propose et que l'hilarant natif de Senlis a rebaptisé Mercurochrome plutôt que Cinquante nuances de rouge.

3 mai 2014

Affres, hics en questions

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                                         Un titre bien banal pour un roman fort enlevé. Des enquêtrices qui s'assument, des femmes fortes, on sent bien l'intention de l'auteur, un tantinet militante, de revendiquer la pleine légitimité de la parité. Pas de surprise de ce côté mais un excellent voyage qui mêle assez habilement les services secrets, les rivalités policières, les boeufs-carottes, les hommes de l'ombre, face aux mouvements terroristes, en l'occurrence la piste syrienne semble avoir la côte ces temps-ci. Mais on pense évidemment à l'affaire dite Karachi et à certaines ventes d'armes. 

                                          Lola, flic en disponibilité et son amie Ingrid en rupture de Las Vegas se penchent, mais pas très officiellement, sur la mort mystérieuse du commissaire divisionnaire Mars en Côte-d'Ivoire, sur un chantier abandonné sous la pluie tropicale. Un avocat marron en taule semblerait être en possession de carnets compromettants. Un autre grand flic que tout accuse, et un monde parallèle d'ex-barbouzes ayant conservé un petit job, de mercenaires sans scrupules, un grand camé devenu serviteur zélé. On patauge dans la déliquescence, qui remonte très haut dans la sphère politique, mais on s'y trouve bien car la plume de Dominique Sylvain est alerte et conjugue fort bien rythme soutenu et humour percutant, les réparties entre Lola et son associé dans cette recherche, Berlin, fusant avec  bonheur même pieds et poings liés.

                                        Particulièrement réussie toute la partie africaine d'Ombres et soleil, où un patron de boîte de nuit et un conteur un peu griot renseignent Lola et Ingrid dans les gravats d'une résidence des beaux quartiers d'Abidjan. L'image d'un continent noir où la débrouillardise tient lieu de passeport et où la chanson  Reine Pluie scande avec drôlerie les aléas de l'enquête au milieu des ingrédients naturels d'un bon thriller version Françafrique, trahison, violence, corruption, le tout venant de l'âme humaine tant à Treichville que dans l'Ile-de-France résidentielle. Remontent lentement les meurtriers souvenirs de la station Saint-Michel et d'un attentat à Damas. On s'y perd un peu,le labyrinthe parfois se complique de frénésie mais dans le monde du polar on sait bien que climat, ambiance et dialogues noient souvent l'intrigue la plupart du temps tarabiscotée pour des neurones moyens,je parle des miens. Qu'importe la façon pourvu qu'on ait la liesse. De toute façon Dominique Sylvain vous en parle mieux que moi.

 

 

 

22 avril 2014

Vois Belz et bute-le

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                                           Amateurs d'embruns, de sel et de houle atlantiques, embarquez pour la petite île de Belz, au large de Lorient. Le polar, on le sait, se conjugue sous toutes les latitudes, du Botswana jusqu'en Islande, c'est même devenu un genre en soi, le noir quasi ethnique. Cap à l'Ouest donc avec Emmanuel Grand pour son premier roman qui mêle habilement immigration clandestine venue de l'Est et ambiance tempête sur les îles, lorgnant avec un peu d'application vers le fantastique légendaire, le fameux Ankou, ange tutélaire de bien des malheurs bretons. Marko est ukrainien, une petite annonce lui a fait rencontrer un patron de pêche, taiseux comme pas permis qui l'embauche sur son chalutier. Curieux, pas d'une folle vraisemblance quand on sait que bien des îliens pointent au chômage et que Marko n'a mis les pieds sur un bateau qu'avec son grand-père à la pêche dans le port d'Odessa. Ce Caradec aurait-il une autre idée? Drôle de comité d'accueil pour Marko et drôles d'évènements sous le ciel souvent chargé du Morbihan. L'étranger attire les regards et dérange ce petit monde plutôt vindicatif en dehors de quelques figures imposées compréhensives, l'institutrice, le libraire lettré, le "fêlé" de service.

                                           Côté méchants, très, on a droit à une brochette de Roumains, des passeurs prédateurs mécontents que leurs proies leur aient échappé, avec un tueur sur la piste de l'exilé. On suit donc en montage alterné le gibier et le chasseur, selon un procédé habituel dans le roman policier. J'avoue avoir été plus séduit par le climat breton, ses grimoires et ses signes inquiétants sur terre et mer, que par la course-poursuite. Nous sommes en Bretagne, le prêtre, dit-on encore le recteur, joue un un rôle non négligeable dans cette lutte où les démons prennent parfois figure humaine. La malédiction, ce satané Ankou, c'est le cas de le dire, trouve beaucoup d'écho dans la population donnant à Terminus Belz un air assez passéiste à mon sens. Mais on ne s'ennuie pas sur cet îlot venteux, ni dans ce roman où le commissaire du continent ne s'attarde guère et où l'on a l'impression qu'on aime bien régler ses comptes entre autochtones. Revigorant comme une bolée de cidre lors de vacances sur une côte sauvage, salubre incursion en plein air, ce voyage vers l'Ouest fait plutôt du bien, dans une catégorie agréable et convenue.

19 avril 2014

Notre-Dame du crime

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                                                            Premier roman d'Alexis Ragougneau ce roman policier ne nous éloigne guère géographiquement du fameux Quai des Orfèvres. Tout près de là ce bon polar vaut surtout par son personnage principal, trônant en majesté au coeur de Paris depuis huit siècles,Notre-Dame. Imposante, impressionnante et intemporelle,un certain Victor Hugo nous l'avait déjà peuplée de héros inoubliables, gens de peuple, gens d'armes, gens d'église. Il y avait même déjà une "créature" du diable. L'été apporte dans l'île de la Cité son lot de touristes et la grande gothique ressemble à une babel cosmopolite, laquelle voisine avec toute une faune pas forcément très chrétienne.Voilà que se commet un meurtre à l'église comme dans Maigret à Saint Fiacre. Mais la victime n'est pas ici une comtesse dame patronnesse mais une fille de 21 ans, minijupe et décolleté, de blanc très court vêtue en ce 15 août dédié à Marie, et qu'on rtrouve sur la dalle curieusement souillée. A toute recherche il faut un limier, le Père Kern sera notre homme, prêtre malingre, contrefait, douloureux,il mène son enquête qui ne colle pas trop avec celle de la police. Classique, il ne faut pas espérer que La Madone de Notre-Dame donne  dans le suspense haletant ni dans le whodunit à la Agatha Christie. Loin de là mais ce n'est pas très grave. L'intérêt est ailleurs.
                   
                                                            L'important dans ce livre c'est l'atmosphère et la découverte de la ruche Notre-Dame. Plus qu'un commerce, presque une industrie. Prêtres de tout niveau, hiérarchie sourcilleuse, petit personnel de sacristains, de surveillants mais aussi policiers omniprésents, et milliers de touristes font de la belle un monde à part en plein milieu de la grande ville. C'est parmi ce réglage minuté, particulièrement ce jour, dans un maelstrom de dizaines de langues, mais aussi à la technologie de surveillance pointue que le coupable sera identifié. La jeune Claire Kaufmann, procureur troublée , un commissaire manifestement un peu trop buté, les gargouilles en ont des vertiges. On s'attache au Père Kern, lourd passé et tentations refoulées, un enquêteur inattendu. Dans le Paris historique avec l'aide d'un clochard alcoolo et celle de Dieu bien qu'il ait ici fort à faire avec l'ombre du diacre hugolien Frollo, soumis au mal, on fait avec La Madone de Notre-Dame une belle escapade entre spirituel et ô combien charnel, bref tout ce qui fait de l'homme un diable potentiel.

                                                         Dasola a bien aimé aussi L'insoutenable légèreté des scones - Alexander McCall Smith / La madone de Notre-Dame - Alexis Ragougneau

10 avril 2014

Le livre mystère d'Asphodèle

                                              Asphodèle, sur une idée de Jérôme, m'a proposé un livre mystère, reçu couvert et anonyme, mais pas sans charmes, chère Aspho, à charge pour moi de le lire sans aucune indication d'auteur, de date d'édition, sans illustration,sec. Curieuse sensation sur laquelle je vous livre d'abord mes impressions, puis une critique du roman, puis enfin je dévoilerai le pot aux roses pour vous... et pour moi. Evidemment il est déconseillé de faire ça avec un Maigret ou un Sherlock Holmes, le suspens serait vite expédié. Donc pas de place pour les récurrents dans le livre mystère.

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                                               A première vue je ne rentre pas très vite dans l'histoire, me consacrant à tenter de percer le nom de l'auteur. C'est déjà fausser un peu ma lecture. Bon, déjà un élément, le livre est court, format de poche, alors une histoire de détective, de grand détective? Mais non, pas d'enquête à proprement parler. Cependant comme on est en pleine Renaissance et que le héros s'appelle Michel-Ange, génie créateur de son état, je pense à Sophie Chauveau par exemple dont j'ai déjà lu une très moyenne Obsession Vinci. C'est pas tout ça,les amis, mais vu qu'il ne compte que 170 pages dont certaines de douze ou quinze lignes, il faudrait que je me concentre un peu sur la lecture proprement dite. Etrange sentiment que celui de découvrir le grand peintre de Florence face au sultan de Constantinople, en tant qu'architecte ce qui n'est pas une surprise.Le livre se lit maintenant avec beaucoup de plaisir, presque distraitement. L'auteur n'a pas lésiné sur les descriptions des épices et des marchandises, ce qui m'a fait un effet catalogue un peu gênant.Cipolin, sérancolin, brocantin, cinatique , des matières à couleurs. Ou cavet et scotie, des moulures. Ca c'est un peu ce que j'appelle l'effet dico, martelant des vocables à peu près inconnus du profane. Instructif, certes, un peu procédé à la longue. Et puis quand même cette présentation clairsemée, on dirait presque que le responsable a été payé à la page. Ne boudons pas notre plaisir, on respire l'air de la Corne d'Or et l'on imagine le pont selon Buonarotti, fier et florentin. Belle histoire,  romanesque à souhait, de ce romanesque un peu hautain qui caractérise la Renaissance dont la vertu cardinale n'est pas la modestie.

                                               Le roman ? ne m'a pas vraiment convaincu et j'en suis fort triste pour ma chère Asphodèle dont je crois savoir qu'elle a aimé ce livre. Pourtant la Renaissance me passionne mais X, l'auteur m'a semblé saupoudrer son récit de scènes attendues sur l'exotisme un peu appuyé des tavernes de Constantinople, de ses odalisques et de ses éphèbes. Et puis encore une fois j'aime m'installer dans un livre, les chapitres m'apportant une latence, une douce indolence favorisant mon imagination. C'est tout le contraire dans ? qui s'apparente un peu, le mot est fort, je sais, à une sorte de zapping écrit, plaisant et aérien. Nous en venons, maintenant que j'ai fait de la peine à mon amie Asphodèle, mais je crois qu'elle n'aurait pas aimé un enthousiasme factice de ma part, à l'auteur que j'ignore encore à cette heure.  Certaine phrase très précise renvoie au titre d'un livre récent de Mathias Enard. Mais je n'ai jamais lu cet auteur et ça n'a peut-être strictement rien  voir. Il y est question de rois, de batailles et d'éléphants? Demain soir j'aurai enlevé la couverture de papier et je vous dirai ce que j'ai lu.

P.S. Asphodèle, merci encore.Et pardon...

Dernière minute,il s'agit bien du roman de Mathias Enard dont voici un exemplaire. Merci encore Aspho pour cette belle pirouette littéraire.

9782330015060

 

27 mars 2014

Haro sur Dawa

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                                                    Nouvelle aventure critique avec Babelio qui me fait confiance une fois encore. Dawa est un pavé qui aurait gagné à se "galetiser" d'au moins un tiers car tout de même 500 pages c'est lourd, surtout pour un roman pour le moins redondant et immodeste.Dawa est le nom d'une opération terroriste visant à cinq attentats dans les cinq grandes gares parisiennes. Tous les étages de la société française de 2014 sont explorés,mais comme ça m'a ennuyé. De la cité des 3 000 avec son habituel gisement de délinquants dont certains recrutés pour l'opération, jusqu'aux arcanes du pouvoir, très concrètement circonscrits car l'action se déroule en ce moment même d'élections 2014, en passant par la sempiternelle guerre des polices. Souvent dans ce genre de bouquins on n'aime pas tout. Là je n'aime presque rien.

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                                    A commencer par le présupposé que l'argot des banlieues n'avait pas de secrets pour moi. Nanti d'un zeste d'incompréhension, j'ai très vite fait la gueule à ma lecture mais suis allé jusqu'au bout, sans que jamais aucun personnage ne m'interpelle vraiment. Trop de figures traversent cette histoire, pessimiste quant à ce pays qui ne se comprend plus lui-même. Dans ces cas là on privilégie l'efficacité, genre cinéma carré, pourquoi pas. Mais voilà, des digressions, des considérations générales sur le microcosme politique, des personnages féminins stéréotypés, Julien Suaudeau a fait bien long pour m'emmener tout près. Sans intérêt pour moi. J'ai bien dit pour moi.

 

20 mars 2014

La poésie du jeudi: Jules Supervielle

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                                         Jules Supervielle, né en 1884 à Montevideo, devint orphelin à un an. Sa vie fut partagée entre France et Amérique du Sud. Romancier (L'homme de la pampa), nouvelliste (L'enfant de haute mer), ami de Rilke et de Henri Michaux, ce poète mourut en 1960. Sa tombe pyrénéenne à Oloron Sainte Marie , où moururent ses parents lorsqu'il avait huit mois, porte une bien jolie épitaphe. "Ce doit être ici le relais/ Où l'âme change de chevaux."

La goutte de pluie

Je cherche une goutte de pluie

Qui vient de tomber dans la mer.

Dans sa rapide verticale

Elle luisait plus que les autres

Car seule entre les autres gouttes

Elle eut la force de comprendre

Que, très douce dans l’eau salée,

Elle allait se perdre à jamais.

Alors je cherche dans la mer

Et sur les vagues, alertées,

Je cherche pour faire plaisir

À ce fragile souvenir

Dont je suis seul dépositaire.

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Mais j’ai beau faire, il est des choses

Où Dieu même ne peut plus rien

Malgré sa bonne volonté

Et l’assistance sans paroles

Du ciel, des vagues et de l’air.

                                                                Jules Supervielle (La Fable du Monde)

                           

20 février 2014

La poésie du jeudi, Stéphane Mallarmé

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                                  Très méconnu, en tout cas de moi, Stéphane Mallarmé est pourtant copieusement cité sans même qu'on le sache. J'avais oublié mais l'ai-je jamais su, que cette phrase, la première de Brise marine était de lui. Perclus depuis un siècle sous l'accusation d'hermétisme, et si Mallarmé pouvait aussi hanter les sacs à main d'étudiantes? En toute simplicité. Sans mâts ni loi.

Brise marine

La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.

Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres

D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !

Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux

Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe

Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe

Sur le vide papier que la blancheur défend

Et ni la jeune femme allaitant son enfant.

Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,

Lève l’ancre pour une exotique nature !

Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,

Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !

Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,

Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages

Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots …

Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !

Stéphane Mallarmé (1842-1898)

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